LA ZONE -

Raviolis, peinture blanche et chips

Le 10/05/2006
par Winteria
[illustration] On a tous déjà eu envie de mourir, parce qu'on s'est pissé dessus à la cantine, parce qu'on a vomi sur la moquette de sa belle-maman, parce qu'on s'est fait cramer en train de reprendre une salle de cours avec du PQ mâché, parce qu'on s'est fait larguer par une salope qu'on avait promis de baiser quelques fois - juste deux, trois - avant de la lâcher.
Parfois, on essaie vraiment de mourir, mais une lame de rasoir à la con, un couteau de cuisine de merde, un tube de somnifères assomants, une corde flasque et inutile ou un flingue - trop facile - ne suffisent pas.
Dans ces moments-là, on essaie parfois de passer pour autre chose qu'un pauvre lâche. On tente d'être original, d'être autre chose qu'un truc dans un sachet plastique isotherme et stérile, autre chose qu'une nature morte sur un rapport d'autopsie.
Disons que je me créé des problèmes. Disons qu'il y a un clin d'oeil à V.H. Disons que je suis un de ces types.
Je regarde au loin, là où se trouvent les collines et l'horizon, mais je ne vois ni les collines, ni l'horizon. Je ne vois que des lumières qui éclipsent tout le reste. Lumières aux fenêtres des immeubles, lumières dans la rue, lumières des phares des voitures, sous mes pieds. Dans le ciel, il n'y a rien d'autre que de vastes et opaques ténèbres, qui se confondent avec tout ce qui n'éclaire pas. J'évite de regarder en bas. On ne sait jamais.

Lucie me regarde en rigolant, car au moment où la boîte de conserve heurte l'immeuble de béton, ou peut-être au moment où l'immeuble de béton heurte la boîte de conserve, je sursaute. Après, il est possible que le petit cylindre métallique disparaisse dans sa chute, dans le noir. À un moment, vous êtes quelque chose, puis l'instant d'après, plus rien. Vous avez disparu. Ou peut-être, tout simplement, que les petits pois et les carottes vont fracasser le crâne d'un quidam, en contrebas. Mais je ne regarde pas en bas. On ne sait jamais.

L'espace d'une seconde, je me demande pourquoi j'ai amené Lucie ici. La seconde qui suit, je lui pose la question. Elle hausse les épaules, et elle balance une nouvelle conserve dans le vide, où elle siffle au milieu du vent froid qui siffle et me pique les yeux. Je recule d'un pas, sans déplacer mon regard du point où je l'ai fixé une dizaine de minutes plus tôt. Je cesse d'être sur la corniche. Je cesse de vouloir me suicider. Je vais m'asseoir contre le mur de brique, l'accès au toit, et je me demande si j'y arriverais vraiment un jour, à haute voix, certainement. Elle me sourit doucement, puis son visage change soudainement, en une fraction de seconde. Il devient renfrogné, comme une pomme pourrie au soleil. Je crois qu'il s'agit de colère. Une boîte de raviolis s'écrase sur le mur, à un mètre de ma tête. De la sauce tomate, du boeuf. Partout. Je dois probablement être figé sur place. Lucie dit :
- Ferme ta putain de grande gueule.

La brise glaciale souffle, me frappe de plein fouet, et reprend son chemin, doucement. J'évite de regarder sur ma droite la conserve éventrée. On ne sait jamais.

Et quelques jours plus tard, j'ai le sentiment qu'un concours de tondeuses à gazon a été organisé près du centre équestre. J'imagine des dizaines, des centaines de tondeuses à gazon dans l'arboretum voisin, et les participants ont tous une portion égale d'herbes à couper. Il me semble que l'air m'apporte une voix qui semble sortie d'enceintes. Je me dis, que, peut-être, un mec commente le concours de tondeuses à gazon. Je ne sais pas ce que je fais là.

Le centre équestre est désert. Je m'en suis assuré avant d'y pénétrer. Les chevaux remuent dans les box, ils grattent le sol de leurs sabots, henissent, respirent bruyamment. Je n'aime pas vraiment les chevaux, mais je veux savoir d'où viennent les bruits de moteur, alors je monte au sommet du silo à grain. La peinture blanche s'écaille et tombe dans les cailloux, doucement. Je pense que je n'ai rien à foutre ni de la peinture ni des cailloux, je grimpe rapidement l'échelle qui m'abîme les mains.

Une fois en haut du silo, je scrute les environs, et je ne vois aucune tondeuse. Il y a bien l'arboretum, quelques maisons plus loin, mais pas de tracteurs-tondeuses. Et pourtant, ces bruits et cette voix persistent, mais comme le couvercle du silo à grain n'est pas très stable, j'entrepends de redescendre, déçu. Les barreaux de l'échelle métallique me glacent les mains, me font mal. Tout autour de celle-ci, il y a une sorte de cage, une grille qui empêcherait quiconque de tomber. C'est là, j'imagine, que l'idée me vient à l'esprit.

J'essaie d'aller plus vite à chaque fois. Je monte, je descends, je monte, je descends à l'échelle. J'oublie totalement la présence de la grille, je me contente de penser à bouger mes bras de plus en plus rapidement, jusqu'à ce que mon pied glisse du barreau, et que je me sente partir en arrière. C'était l'effet recherché, à vrai dire. Enfin, mourir. Seulement, lorsque je sens que ma nuque touche quelque chose de froid, lorsque le sang coule dans mon dos, me faisant frissonner, je me rappelle de la cage, et je panique. Une sorte de réflexe me force à agir, sans doute à cause de la douleur. Donc, je tente de me raccrocher à ses mailles. Au bout de quelques secondes, les mains pleines de coupures, les jambes ouvertes, je m'étale presque au ralenti sur les cailloux et le sable, au milieu des bouts de peinture blanche.

Plus tard, je cache un paquet de chips dans ma chambre, j'ignore pourquoi. Après quoi, je cloue des planches aux fenêtres, jusqu'à ce qu'aucune lumière ne filtre. Jusqu'à ce que je me retrouve dans le noir complet. Je ferme la porte à clé, et je jette la clé dans l'obscurité. Bruit métallique, puis plus rien. Je me déshabille, m'écrasant par deux fois sur le plancher en enlevant mon caleçon et mes chaussettes. Je ne sais pas vraiment ce que j'espère en faisant ça.

Ce que je peux vous dire, c'est que peu à peu, on perd ses repères. Cette chambre dans laquelle j'ai vécu durant des années, je ne la reconnais plus. J'oublie la position de l'armoire, j'oublie même où est mon lit. J'accepte les ténèbres, je deviens l'obscurité, je m'asseois dans un coin, ou dans ce qui me semble être un coin, et j'attends. Je ne sais plus si il fait jour, si il fait nuit, l'heure qu'il est. J'entends juste la pluie qui tombe, dehors, je l'entends s'abattre sur les planches. Au final, j'ai soif. Et putain, je crève la dalle. C'est à partir de ce moment-là, en général, qu'on réalise qu'on a peut-être trop bien réussi notre début de tentative de suicide, ou qu'on a peut-être pas vraiment envie de mourir. Alors je me mets à ramper, à chercher la clé qui peut-être absolument n'importe où dans cet espace dont j'ai oublié les limites.

8 mai 2006.

Finalement, sauter du haut d'un immeuble, tenter de tomber intentionnellement d'un silo à grain ou se laisser mourir de soif seul dans l'opacité fuligineuse de sa chambre sont toutes des solutions les plus stupides les unes que les autres pour en finir avec sa vie.
Finalement, il y a probablement mieux.

Finalement, Monsieur Pudré, je pense avoir trouvé comment me suicider. Monsieur Pudré, je ne décrirai pas l'intérieur d'une boucherie au dix-huitième siècle pour cette rédaction. Monsieur Pudré, professeur de français, je vais vous rendre ceci, ce hors-sujet naze, pédant et complètement stupide.

Finalement, c'est vous qui allez décider si, oui ou non, vous allez me suicider en me rendant cette copie.

= commentaires =

Malax

Pute : 0
    le 10/05/2006 à 18:06:34
C'est pas con comme tentative, Nounourz, t'as noté ?
nihil

Pute : 1
void
    le 11/05/2006 à 00:11:00
tu ferais mieux de lui montrer ta bite, à M. Pudré, t'aurais surement une meilleure note.
Aesatruc
    le 12/05/2006 à 00:00:07
C'est très bien, c'est juste un peu long, un peu trop long, un peu chiant, mais j'aime bien, c'est bien écrit en tous cas.

Par contre promettre à une salope que je vais la sauter par tous les trous... euh... ouais... non.
Narak

Pute : 2
    le 12/05/2006 à 19:55:05
J'aime bien la façon dont c'est écrit, en particulier le début, mais plus ça va plus c'est chiant.

Tu repeints des salles avec du PQ maché ? C'est interessant ça... J'imagine la scène.

Commentaire édité par Narak.
nihil

Pute : 1
void
    le 13/05/2006 à 00:16:25
Exactement le contraire : j'aime pas l'ambiance vaporeuse et l'écriture puzzle, genre que je te fous des bouts de phrase qui n'ont aucun rapport pour te foutre une ambiance. J'ai pas dit que c'était mal fait, juste que ça me gonflait. C'est du Manet littéraire, ça me donne envie de crâmer le texte. Putain je veux du chirurgical, du précis, du millimétrique, pas ce genre de saloperies nauséeuses. Le flou artistique c'est pour les tapettes.
Après, après avoir un peu dégagé l'intrigue de ce tas de conneries, ça a été mieux, c'était même lisible et pas mal.
La chute est minablissime. Si le texte prétendait avoir un sens voire un intérêt, il serait dézingué en vol par cette fin.
Aesatruc
    le 13/05/2006 à 16:06:55
Oui mais c'est quand même un texte de zonard.
    le 13/05/2006 à 16:09:19
Ah putain il a lâché le mot.

Bon maintenant vas-y, d'une définis "texte de zonard", de deux surtout explique-nous pourquoi un texte médiocre le serait moins en vertu de la qualité de son auteur.



Et le "oui mais", c'est une attitude éthique de tafiole.
Aka

Pute : 2
    le 14/05/2006 à 20:36:25
Je l'ai trouvé plein d'humour ce texte, il est sympa. Je te fais des bisous pour la peine tiens.
G Kwizera
    le 10/05/2007 à 06:57:10
ah bin c'est une bonne idée, ces textes un an après.

là, je diras c'est pas exceptionnel, mais j'ai lu jusqu'au bout (à cette heure ci c'est pas mal), j'ai souri, etc.

Le gros défaut en fait, c'est que question style (et je ne m'interesse qu'à ça, perso) on sort un peu frustré. Ya plein de passages où on se dit "ah, ça va décoller, fallait rentrer dans l'ambiance, là je vois maintenant son rythme" et puis vlan. On dirait un gars qui joue de la guitare, et qui à chaque fois qu'on commence à se laisser entrainer par sa musique, s'arrête pour accorder son instrument. Et ça c'est chiant.

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