LA ZONE -

Les aventures de Gwen

Le 03/03/2003
par Dipsy
[illustration] Gwen dévore la vie à pleines dents. Celles de son père évidemment. Le soleil brille là-haut dans le ciel. La nuit, c'est la lune qu'elle voit. Elle parcours dans tous les sens le Quartier Latin. Ses cheveux ondulent sous les caresses du vent. Elle hâte le pas. Elle a remarqué que plus elle marche vite et plus elle arrive tôt.
Il paraît que les hommes la trouvent belle. Arwen et Atahulfo sont amoureux d'elle. Ils lui ont avoué leur amour à quelques jours d'intervalle. Cela l'a beaucoup émue. Ils portent chacun une chemise dont le col est ouvert, un pantalon de toile, des chaussettes. Atahulfo préfère les chaussures de sport et Arwen les mocassins. Lorsqu'elle a compris cette différence profonde de leur personnalité elle a été enchantée de son propre sens de l'observation… Elle est si heureuse lorsqu'elle réalise à quel point elle est intelligente. Gwen est allée au vernissage de l'exposition de la galerie de son ami galeriste. La galerie de son ami galeriste est composée d'une pièce carrée qui a quatre côtés et d'une pièce pentagonale qui en a cinq. Elle croise son ami Arwen qui travaille pour la grande chaîne de télévision d'un maçon. C'est un ancien gauchiste. Sommé de choisir entre l'argent, la gloire et ses idées, il a choisi les deux premières et renoncé à ses idées. Ça tombait bien. Justement il n'en avait plus. Il y a beaucoup de jeunes gens. Certains sont même hétérosexuels, d'autres mourront du sida. Heureusement, tous sont venus par la rue de Seine. Elle croise la rue de Buci. Arwen est un homme exceptionnel. Il a emprunté la lime à ongle de Gwen. Il aime beaucoup les femmes, l'argent, le pouvoir et les ortolans. Certains sont médisants, et Arwen en a connu parfois qui se prétendaient ses intimes, ont même soutenu qu'il était socialiste. Il a été très impressionné par les prédictions de sa voyante, Lisbeth Fessier, qui lui a assuré qu'il mourrait après avoir mangé des ortolans. Depuis, Arwen les dissimule sous une serviette blanche avant de les avaler. Comme si cela changeait le cours des choses. Les grands hommes ont parfois de ces naïvetés. Gwen est heureuse d'être une femme. Si elle était un homme, elle ne serait pas pareille. Une foule bigarrée et insolite descend la rue Danton. Des jeunes femmes gracieuses avoisinent des hommes beaux. Gwen s'accroche au bras d'Atahulfo. Il a une chemise rouge avec un col largement ouvert sur son torse brun. Ses chaussettes sont vert clair, ses yeux noirs et le ciel est bleu. Dans un coin du paysage un disque jaune. C'est le soleil qui brille aussi dans son coeur. Gwen est arrivée chez Atahulfo. Il la serre dans ses grands bras malgré son insistance elle se refuse à lui. Sa première nuit d'amour sera sponsorisée par Durex et l'Oncle Vania. Le lendemain elle posera pour Paris Match et elle accordera une interview de sept minutes trente à une grande chaîne de télévision privée. Atahulfo a compris ses motivations. Ses caresses se font moins pressantes. Ce midi Gwen déjeune avec Arwen. Ils se retrouvent parfois dans l'arrière salle d'un petit café et refont le monde. Ils sont isolés du reste des vivants. Il y a quatorze gardes du corps devant la porte et deux cars de CRS à chaque extrémités de la rue. Arwen lui parle de sa bergerie, de ses arbres, de son âne, de ses voyages, de ses écoutes téléphoniques. Gwen lui demande des nouvelles de sa lime à ongle. Il lui rapportera dans une semaine : il n'a pas tout à fait fini de se limer les canines. En clignant des yeux, il lui dévoile ses nouvelles dents. Elles sont plus courtes et cela lui confère un charme supplémentaire. Quand Gwen était jeune elle était moins âgée qu'aujourd'hui et son petit frère est mort. Cela lui a fait beaucoup de peine. Pendant un an elle a été triste. Puis elle a décidé que son chagrin était terminé. Pour la récompenser Atahulfo lui a offert un poisson rouge. Il cligne des yeux. Elle l'a appelé Tonton. Gwen a mis son nouveau chemisier émeraude pour la première fois. Elle se sens bien dedans, elle se sent légère. Elle marche dans la rue de Rennes puis tourne dans la rue du Four. Elle s'attable à la rhumerie et elle regarde passer les gens. Ils ont l'air triste et le regard vide. Quel dommage qu'ils n'aient pas d'amis galeristes, artistes ou homosexuels. Leur vie serait transformée. Atahulfo regarde Gwen. Comme il est beau. Elle a couché avec lui et aussi avec Arwen. Leurs grands corps sécurisants lui plaisent tous les deux.
Atahulfo a un ami homosexuel qui lui frôle parfois l'épaule d'un air complice. Il se laisse faire. Comme il est gentil. L'ami d'Atahulfo vivait avec un garçon qui est mort du sida. C'est le sort des artistes. Que c'est triste. Le monde qui les entourent est hostile. Les gentils homosexuels meurent du sida, les présidents de la république ont des enfants adultérins. Mais, heureusement, la rue Saint-Jacques coupe toujours la rue des Écoles avant de se diriger vers la Seine. Ils déjeunent tous les trois, Atahulfo, Gwen, et Arwen. Arwen est jaloux parce que Gwen a couché avec Atahulfo. Gwen est si belle. Atahulfo parle de lui, Arwen de Gwen et Gwen de Gwen. Chacun est content. Ils passent un moment d'une intensité extraordinaire. Ils réalisent combien la vie est merveilleuse. Arwen est parti hier à Londres. Que va-t-il faire en Angleterre alors que Gwen est à Paris. Ne veut-il plus déambuler avec elle dans la rue Monsieur-Le-Prince, obliquer rue Bonaparte avant de tomber en extase devant Saint-Sulpice ?
Son comportement échappe à Gwen. Il loge chez une Amie de Gwen, une de ses amies qui a quitté l'école Normale pour ouvrir une galerie d'art près de la City. Arwen a essayé de la joindre plusieurs fois. Gwen fait répondre par sa mère qu'elle n'est pas là. Lapinchien lui a appris qu'il a une aventure avec une femme mariée. C'est ignoble, Gwen ne le supporte pas. Bouh, qu'elle est triste. Le matin au petit déjeuner, Arwen met du nutella sur ses tartines. Il a une manière délicieuse, bien à lui, d'accomplir ce geste. Il affirme que mettre du nutella est une opération délicate car, si la couche est trop fine, on n'en sent pas le goût et, si elle est trop épaisse, c'est écoeurant. Arwen affirme que l'étalage du nutella est un acte aussi important que la lecture de Diderot ou la visite d'une exposition. Il a une force de persuasion extraordinaire, Gwen en ai toute retournée. Arwen s'est disputé avec Tulia, l'amie dépressive de Gwen dont le grand-père était plénipotentiaire, qui soutient que rien ne vaut la gelée royale. Ils ont failli en venir aux mains. C'est vraiment beau de tenir autant à ses idées. Nihil est mort hier d'une overdose de drogue. Gwen lui avais pourtant dit d'arrêter de se piquer, qu'il finirait par casser sa seringue. A la crémation Gwen a retrouvé Atahulfo qu'elle n'avait pas vu depuis quelque temps. Ils ont des amis communs, des idées communes, Ils sont d'accord sur tout. Mais, curieusement, Ils ne sont jamais devenus des amis intimes. Arwen en a profité pour sauter sur Gwen. Elle n'a pas pu se dérober mais elle l'a traité de tous les noms. Ses yeux bleus, sa voix mâle, ses grandes mains et sa moto noire l'envoûtent. Ils se sont aimés comme des enfants dans la pénombre d'une chambre close, avec du papier au mur et de la peinture au plafond. Ils sont sortis par la rue Saint-André-des-Arts, Ils ont tourné à droite puis à gauche dans le boulevard Saint-Germain avant de remonter le Boulevard Saint-Michel et d'obliquer dans la rue Racine. Ils ont descendu la rue Condé et Gwen s'est aperçu qu'elle avait rejoint son point de départ. Gwen part en week-end avec Atahulfo. Elle va emporter les vingt volumes des Rougon-Macquart et les mémoires de Saint-Simon. Atahulfo va relire l'Histoire de France de Jules Michelet et La Comédie humaine de Balzac. Il emporte aussi le dernier tome du journal de Pascal Sevran et quatre boites pour Athalie, sa chienne labrador. D'elle il dit ; avec toi c'est le seul être humain qui n'a jamais essayé de me trahir. Ils se lisent des passages à haute voix. C'est à celui qui trouvera le plus beau. Atahulfo gagne toujours. Un jour, au milieu d'un extrait de Zarathoustra de Nietzsche il a lu à Gwen une recette de tante Marie. Elle ne s'en est pas aperçue tout de suite. Quel farceur. Le ciel est bleu. Les nuages sont blancs et deviennent noirs quand il y a de l'orage. Pour voir le soleil il faut que Gwen lève la tête mais elle n'aperçoit plus ses chaussures. Elle a les joues fraîches et les mains brûlantes. Son coeur est tiède comme une pomme de terre chaude. Elle sent que, peu à peu, elle donne un sens à sa vie sans que personne ne l'a jamais aidée. Quand elle a soif, elle boit, quand elle a faim, elle mange, quand elle a sommeil elle dort. La nuit vient après le jour, le soleil après la pluie. mardi suit lundi mais précède mercredi. Tout cela est fascinant. Gwen est fascinée. Elle se fascine. Et, et en plus, la rue Monsieur-le-Prince traverse toujours la rue Racine. Gwen est toujours aussi brillante et intelligente et elle croit qu'elle n'a jamais autant plu aux hommes que maintenant. Elle a des amis galeristes, anglophones ou homosexuels et ses entrées à la télévision. Hélas, de Paris elle a perdu le plan. Gwen devrait peut-être se limer les dents.

END

= commentaires =

Arkanya

Pute : 0
    le 03/03/2003 à 19:21:06
Si je comprends bien, Gwen n'est pas une vraie personne, c'est la Emma Bovary de La Zone.
Arwen

Pute : 0
hé bé    le 03/03/2003 à 19:30:24
heuuu
hé bé
Lapinchien

tw
Pute : 8
à mort
...    le 03/03/2003 à 19:45:27
Arwen , t'as trébuché sur une patte de chaise ou quoi ?
Gwen

Pute : 0
Pour parapher Arwen    le 03/03/2003 à 20:01:29
"hé bé". Euh pas tout lu, mais je reviens dès que j'ai fini de bouillir (petit souci de la vie de tout consommateur confronté à un service, con, clients, pas beaucoup plus évolués, peuplée d'opératrices à la con).
Gwen

Pute : 0
Bon    le 04/03/2003 à 00:21:44
au moins sait-on maintenant que Dipsy est de Paris. Ou qu'il a un écran 23" lui permettant de lire les putain de plans de Maporama.
Je sais pas qui est cette Gwen, mais pour emmener les Rougon-Macquart dans sa valise, faut vraiment être con... En parlant de Pascal Sevran, c'est gentil de me renvoyer à la gueule mon réveillon du passage à l'an 2000 dans l'appart' qu'il louait... à un ami homosexuel. 'faisait longtemps que je ne m'étais pas lamentée sur cette terrible histoire tiens...
En tout cas, Arwen, si tu as une moto, je vais peut-être laissée ma pruderie de côté (le temps que tu me la légues... enfin seulement si c'est au-dessus du 750, je laisse pas mes principes de côté pour n'importe quoi non plus).
Marrant Dipsy et bien écrit.
Djinny

Pute : 0
b    le 07/03/2003 à 13:21:55
terriblement bien ecrit...
un coté trés absurde dans l'ecriture... m'a fait pensé un peu a du ionesco ..
Arkanya

Pute : 0
    le 07/03/2003 à 16:10:28
Ca m'a pluôt fait penser à l'Ecume des Jours, mais je sais pas trop pourquoi
nihil

Pute : 1
void
void    le 07/03/2003 à 16:16:47
Peut-être parce que ça se passe pendant le jour ?

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