La famille Bôf - chapitre 02

Le 12/05/2005
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par Lahyenne
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Rubriques / La famille Bôf
Que dire ? C'est toujours aussi anémique au niveau humoristique, mais toujours bien vu au niveau de la caricature, et puis ça se lit tout seul. Ca rappelle des putains de sales souvenirs d'enfance / adolescence, quand on partait faire du camping avec nos connards de géniteurs, alors que tout ce qui nous intéressait, nous, c'était la drogue et les putes.
Le trajet en voiture ...
La jolie R5 rouge filait allègrement sur la route nationale. Le décor défilait et rien ne semblait pouvoir troubler cette jolie journée d’été. Rien à part les 200000 autres connards qui encombraient la voie et obligeaient Robert à rouler encore plus au ralenti que ce que la carriole pouvait permettre à son petit moteur.

- Heureusement que les infos routes disent des conneries, souligna Stéphanie.
- Toi, la ramène pas, répondit gentiment son père. Sinon je t’allonge une avoine, continua-t-il sur le même ton doucereux.
- Voyons Robert, calme toi, les autres gens sont aussi énervés que nous c’est sûr, calma Jacqueline.
- RECORD BATTU ! ! ! hurla Damien à brûle pourpoint.

Il regretta un bon moment cet élan passager où il avait cédé à l’enthousiasme créé par le jeu. Il jura également de devenir ceinture noire de Karaté pour pouvoir tuer Robert en lui plantant ses ongles dans les tempes d’un seul coup. Heureusement, la circulation redevenait un peu plus fluide et Robert s’était donc concentré sur les lignes blanches qu’il faut suivre quand on conduit.

Kiki hurla comme en prémonition de la tragédie, mais nul ne l’entendit, si ce n’est le canari de la voisine qui était partie à la piscine.

Et l’inévitable se produisit. La carriole se détacha en pleine descente et alla s’écraser contre un grand platane. On eut dit, lorsqu’elle explosa, qu’une bombe venait de la détruire [2]. Et Stéphanie vit à travers ses longs cheveux décolorés sa culotte Winnie l’ourson voler doucement jusqu’à une grosse meule de foin. Le suicide lui paraissait dès lors la seule solution pour échapper à une honte certaine, honte qui pourrait bien durer des années et des années. Puis elle préféra jouer l’indifférence en espérant que l’incident serait bientôt clos et oublié.

- Oh ! Maman tu as une culotte qui vole !
- Mais ce n’est pas la mienne Damien, répondit celle-ci du tac au tac.

Stéphanie crut voir une lueur rouge dans les yeux de son démon de frère et commença alors un long travail d’arrachage de cheveux par capillotraction, interrompu par leurs parents qui hurlaient en descendant de la voiture et par la Game-Boy qui bipait à n’en plus savoir que faire.

La risée de tous en ramassant les affaires éparpillées. Le bordel mis en boule dans la voiture, parce que la carriole n’était plus vraiment opérationnelle. Puis il fallut bien repartir. La location aurait dû être récupérée une demi-heure plus tôt, mais il leur restait bien trois heures de route avant d’arriver à Sartoupette-les-Plages.

Et Lagaff leur manquait vraiment cruellement. Auraient-ils seulement une télé là bas ? Damien s’en foutait, soi-disant à cause de sa console portable. Stéphanie boudait à en perdre haleine. Les parents ne disaient rien et n’en pensaient pas moins. Pas plus non plus d’ailleurs. Ce fut dans cette ambiance de cimetière à peine rompue par quelques bips prétentieux de Damien que la voiture arriva au camping.

- Un camping ! Mais c’est horrible !
- Voyons ma fille, fais attention à tes paroles. Un camping, c’est la vie en plein air, les vacances et la détente. Ça n’a rien d’horrible.
- Mais on aura pas de télé ? Et pas de micro-ondes ? Et même pas de musique !

C’est le moment mal choisi où Robert expliqua qu’il y avait bien pensé, mais que le poste ne rentrait ni dans la voiture, ni dans la carriole, mais que on pouvait utiliser - si on y arrivait - l’autoradio en essayant de ne pas trop sucrer la batterie s’il vous plaît. Après la crise de Stéphanie qui ne pouvait pas écouter de cédés sur un lecteur cassette, et celle de Damien qui ne pouvait même pas écouter les matchs de foot [2], Robert calma un peu le jeu. À sa manière, mais il faut avouer que le jeu fut bien calmé, Robert aussi, et qu’il pût ainsi entamer la première bouteille de pinard de sa réserve.

Heureusement que Stéphanie n’avait pas compris que c’était la place que prenait la réserve en question qui l’avait empêché d’emmener son poste.

Après quelques formalités, ils eurent leur emplacement, et purent poser la voiture, ainsi que la tente emportée dans feu la carriole.

Et ainsi débuta la formidable histoire de la famille Bof à la plage.

***

[1] Même si le bruit était tout de même nettement plus métallique.
[2] Parce qu’on captait que radio Sartoupette, qui manquait à l’évidence cruellement de sport en direct.