Rêve : le dernier couloir

Le 25/09/2005
-
par M. Con
-
Dossiers / Rêve
M. Con, qui fait en général dans le rabelaisien, s'essaie ici à la littérature sombre et onirique. Dans l'idée, ce rêve bizarroïde est sympa, mais le style empêche qu'on puisse l'apprécier à sa juste valeur. Les phrases sont très lourdes, les tournures pénibles, c'est à la limite du lisible. L'action est lente et confuse, on s'ennuie pas mal. La fin, plus sobre et plus concrète est plus digeste, mais trop tard pour arranger notre opinion.
Hébété, égaré, complètement perdu dans ma solitude, j’évolue sans comprendre et sans raison dans l’obscur silence qui m’enveloppe. Depuis combien de minutes, d’heures, de jours suis-je dans cet univers monstrueux dont je ne distingue presque rien si ce n’est quelques vagues contours et ces formes fluides qui s’évaporent, s’évanouissent dans les parois vivantes de ce labyrinthe au hasard de ma progression laborieuse ?
A chaque pas, lentement, pesamment, mes pieds nus s’enfoncent dans un sol mou. Est-ce de la boue visqueuse qui s’insère entre mes doigts de pieds tel un lit d’excréments en phase de décomposition ? De la mousse spongieuse dans un monde marécageux, moisissure putride qui m’absorbe tandis que des sangsues m’élèvent au rang de garde manger ?…..
Un pas…. Encore un. Je me traîne.

Clapotis vaseux qui résonne. Goutte qui suinte dans les replis tortueux. Autour de moi une brume grisâtre, nauséabonde flotte sur le sol en tourbillons de fumée aux formes ectoplasmiques. Parfois je frôle vaguement des aspérités qui serpentent en veines sur le boyau qui m’enveloppe. J’ai perpétuellement une effroyable sensation d’instabilité, de flottement, tout semble gigantesquement haut, disproportionné, déséquilibré, déplacé comme si j’étais un gnome chez des géants.

Qu’est ce que je fais là ? Combien de temps ? Où je suis ?

Une chaleur moite, étouffante me fait transpirer. L’odeur dominante qui m’engourdit presque, je la définie comme un relent de fosse à décantation. J’en ai la nausée. Une envie de vomir, mon ventre se contracte, quelques spasmes, ma gorge se serre, on m’étrangle de l’intérieur comme lorsque l’excès d’alcool m’entraînait aux petits matins la gueule dans un caniveau pour balancer un liquide infecte dans des râles primaires.
Instinctivement je veux porter ma main au visage avant qu’il ne soit trop tard mais mes mains en coupe portent un truc lourd qui semble laisser couler un liquide chaud sur mes doigts crispés et poisseux..

Mais bon dieu, qu’est-ce que je porte dans mes mains ?

La réalité affolante, impossible, me fait défaillir, elle prend sa forme cauchemardesque lorsque j’ouvre mes mains et que tourbillonnent mes yeux dans le vide à la rencontre du sol. Je tremble, mon cœur s’emballe, je bascule, ma déraison m’entraîne dans l’univers de la folie illogique, nouveau spasme. A tâtons mes mains fébriles récupère une partie de moi dans la fange. Je hurle mais aucun son ne sort de mes lèvres grimaçantes figées dans un rictus stupide….
C’est ma tête que je portais et c’est mon sang qui coulait de mon cou tranché à mes doigts jusqu’au sol avide et vampirique qui me boit.

Je suis debout, errant dans le noir en portant ma tête et je vis toujours !… Je vis !…

Combien de temps mes tempes ont explosées d’effroi en cadences sur les murs vivants, avant que le fantôme sans tête que je semble être devenu reprenne son errance dans la folie, mais que signifie le temps ? Résonne alors comme un appel libérateur le cliquetis métallique d’une clé qui tourne dans une serrure rouillée, une grille qui grince, une porte que l’on ouvre au fond du boyau. Enfin un bruit ! une explication ! une réponse ! Sans savoir ni où je suis, ni où je vais, ni le pourquoi, ni la raison, mes pas s’enfoncent à nouveau dans le bourbier puant à la rencontre de la grille.

Dans un geste silencieux, presque noble, j’empoigne fermement mes cheveux poisseux et soulève ma tête à bout de bras comme une lanterne pour voir plus loin plus haut. Un lent mouvement circulaire, puis je me descends jusqu’au le sol et rien, toujours rien, juste l’interminable boyau au sol mou. Je me retourne, mes yeux hagards détaillent sans émotions mon corps tronc aux vêtements maculés de sang séché….Je ne ressens aucune émotions aucune surprise, uniquement une immense résignation sur mon sort.

Une main blanche surgit du néant et se pose fermement sur mon épaule trempée de sueur tandis qu’une voix terne me murmure : « C’est l’heure ».

Une vieille chaise que l’on tire grince des pieds sur le ciment et vient se figer devant moi. L’étoffe rugueuse et protectrice qui m’enveloppait glisse le long de mon corps jusqu’à mes pieds. J’ai froid. On me soulève de ma couche, me traîne jusqu’à la chaise. Je ressens le grésillement de moustiques d’une machine chaude qui courre et vibre sur la peau de ma nuque. Je fixe le vide devant moi sans réagir tandis qu’un liquide infecte brûle mon ventre vide et que de la fumée acre me pique les yeux et empli mes poumons. Je recrache le tout. Une cigarette tombe de mes lèvres sèches, quelques gouttes d’alcool coulent aux commissures.

Je n’ai rien dit, je ne dirais rien, je ne parlerai pas, inutile de leur crier que je suis innocent à quoi cela servirait il ? Des visions de mon errance dans le boyau me reviennent, mon dernier voyage, mon dernier rêve, mon dernier tourment.

Bruit sec du tissu que l’on déchire autour de mon cou. Je tremble. Par la lucarne les premières lueurs de l’aube donnent aux êtres qui me cernent un aspect austère de vautours. Les êtres me soulèvent fermement sous les bras, mes mains sont liées dans mon dos, bruits de pas cadencés dans le long couloir éclairé par des plafonniers diffusant un halo pisseux. Je me sens emporté, traîné rapidement jusqu'à une cour ceint de hauts murs gris sales comme s’il fallait se débarrasser d’une corvée.

Et je la vois, elle, presque majestueuse, ma mort programmée m’attend. Mon dernier rendez vous avec l’humanité. Lame brillante dans le soleil naissant de mon dernier jour.

« Courage » murmure la voix de l’être en noir au visage de glace.

Courage ? Qu’est ce que le courage vient faire ici ? Ais je eu seulement un autre choix ?
Je pense à ces femmes que je n’ai pas eu, au sourire du gosse que j’étais il n’y a pas si longtemps, je revois ma mère …. Ils me basculent comme un paquet de linge sur le socle de bois. Etrange impression de mon ventre écrasé fusionnant avec ma camarde. Ultime instant où mes yeux voient les dérisoires pavés usés de la cour silencieuse. Je pense au panier dans lequel va finir ma tête et je sens mon entrejambe se mouiller, j’ai honte. Dans son glissement la lame m’apporte l’évasion définitive. Ce sera une belle journée la vie va conti….