I.P. war (2eme partie)

Le 19/12/2005
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par Lapinchien, Tyler D
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Rubriques / I.P. war
IP War premier du nom ne m'avait pas laissé un souvenir impérissable. Celui-ci est criblé de fausses réclames tordues et dépeint une société d'addicts à la pub et aux procès, c'est assez amusant. On a du mal à se dépêtrer de l'intrigue bordélique à souhait et on comprend rien à cette rébellion des objets ménagers. Mais c'est suffisamment débile pour ne pas s'ennuyer.
Scène 3 :

8 h47 : Tom joue quotidiennement aux happygames depuis plus de cinq ans. Déjà affublé de sa combinaison de travail, il observe attentivement l'écran de la happyborne qui trône au milieu du trottoir. Les résultats des mises de la veille défilent sous ses yeux. Soudain, un sourire sardonique éclaire son visage alors que la borne glousse :

"BRAVO cher Hardcore Gamer,
J'suis heureux de t'annoncer,
Qu'pour les prochaines 24 heures,
Une totale immunité
Sur les infractions mineures
au code pénal, t'as gagné !"

Tom laisse éclater un ricanement sonore. Intrigués, quelques passants se retournent. L'un d'eux s'approche, de sa démarche légèrement chaloupée de pète-dans-la-soie en train de zoner : "bin alors mon pote, qu'est-ce que c'est qui te fait rire comme ça ? en général les pauv' nazes en salopette dans ton genre ils évitent de se la ramener en public" Tom ne se départit pas de son sourire. C'est la victime parfaite. D'un geste rapide, il s'empare de sa casquette, qu'il porte à la cool sur le côté et la lance sur la chaussée. En impactant le sol, des sonorités rap hardcore trans pikatchu sortent du chapeau :

« Si tu t’la pète t’es la bête de la fête mais arrête la moquette et mets ta casquette CASSTET, ça en jette. »

"putain mec mais t'es pas fou nan ? tu sais combien elle coûte c'te CASSTETE ? profite de ton cul tant qu'il t'appartient encore, parce que tu vas encaisser le procès de ta vie." Une voiture manque d'écraser le précieux couvre-chef, qui s'envole, roule jusqu'au bord de la chaussée et tombe entre les immeubles jusqu'à la chaussée du niveau inférieur qui passe six mètres en-dessous. Le gars se précipite vers un escalier « les ennemis . Celui-ci éclate une nouvelle fois de rire et se dirige vers le bar le plus proche .

8h49 : Jerry est au volant de son fourgon Happyware. Le feu vient de passer au vert. Il démarre à toute vitesse. Il doit livrer un portable chez un particulier avant 9 h. Mais soudain, un mec plonge devant ses roues, apparemment pour essayer d'attraper quelque chose qui traîne sur la chaussée. Il donne instinctivement un grand coup de volant pour éviter la collision, mais il percute une voiture qui était en train de le dépasser. Un poids lourd qui arrivait par derrière et qui n'a pas le temps de freiner écrase d'un seul coup les deux véhicules. Le fourgon de Jerry froissé comme une boule de papier laisse poindre une mélodie en boucle, entrecoupée de larsens, sur laquelle tous les badauds qui passent par là se mettent à exécuter une chorégraphie millimétrée, soulevant le véhicule et se le passant de mains en mains dans un déluge de pirouettes, de cabrioles et de sourires commerciaux :

« L’moins cher des utilitaires,
C’est ton beau HOOVER !
Sa taule molle est en faux fer,
C’est ton beau HOOVER !
En cas d’accident, c’est clair,
C’est ton beau HOOVER !
Y aura du monde au cim’tière,
C’est ton beau HOOVER ! »

En cours de route, les danseurs qui portent le Hoover s'essuient la bouillie de viscères et de cervelle qui leur coule sur la tête, ça fait pas très glamour.

8h52 : un message électronique élaboré automatiquement se propage dans une partie du circuit en fibres optiques qui parcourt toute la ville : "contact... accident fourgon happyware #458MP69 - conducteur décédé - marchandise perdue - instructions : facturer perte à famille conducteur - trouver remplaçant pour livraison #78454-5986OY8 avant 9 h.

8h55 : Tom a commandé des injections hors de prix : deux grammes de mescaline enrichie aux sécrétions hypophysaires de hamster nourri exclusivement aux graines de pavot, et quelques décigrammes de jus de champignons hallucinogènes récoltés sur des bouses de buffles amateurs de cannabis. Pendant que le patron lui prépare tout ça, il s'enfile une petite piquouse d'hormones sexuelles de lapin de garenne, puis se dirige vers un autopussy pour soulager l'érection qui en résulte. Il déboutonne sa braguette et s'enfonce dans le vagin en silicone humidifié qui en même temps se met en devoir de lui aspirer le membre pour augmenter son volume. L’autoréclame se met alors en route pour couvrir le coût de ce service gracieusement offert sur une douce mélopée féminine inspirante :

« Si t’as pas d’meuf sous la main,
Et qu’tu dois vider tes couilles,
L’autopussy c’est certain,
Ira pas t’filer la chtouillle…

Quand on est un gros branlos,
Et qu’on veut pas s’fatiguer,
L’autopussy, c’est gratos,
T’as même pas à t’la toucher !»

Excité par les hormones, Tom donne des grands coups de reins dans l'autopussy qui se met à se balancer d'avant en arrière. Au bout de quelques secondes, il sent déjà monter la sève et se prépare à une jouissance qu'il sent vigoureuse. Mais juste au moment où il éclate, son portable se met à vibrer dans sa poche pectorale, ce qui le surprend, parasite ses sensations de plaisir et gâche son orgasme. On l'appelle certainement pour assurer l'interim sur une livraison foirée. Il a beau avoir l'immunité, il ne peut pas se permettre de ne pas aller travailler durant les heures qui viennent. Ca le met dans une foutue rage. On n'a pas intérêt à venir le faire chier, maintenant. Il se dirige vers le bar pour embarquer ses seringues avant de partir.

En chemin, il passe à côté d'un gringalet assis à une table, recroquevillé sur sa bonbonne crachant son message promotionnel :

« Comme le dit ma mère,
Rien n’vaut un bol d’air !
Car l’air c’est super !
Consomme vit’ de l’air !
L’air de rien c’est cher,
Mais çà va te plaire !
Respire Mogolfi’ AIR ! »

Tom lui arrache le masque et la bouteille. Il jette un oeil à l'étiquette : "pur air de la montagne naturellement parfumé à la résine de pin - moins de 0.1% de CO2 - sans parfum artificiel et sans oxygène ajouté". Ca doit pas être mauvais à respirer, ça. Le type n'ose même pas ouvrir sa gueule pour protester. Il se contente de sortir un petit calepin pour y noter le matricule de Tom, qui est cousu sur sa combinaison. Celui-ci lance à la mauviette : "Tu passeras le bonjour au procureur de ma part, pauvre con." Quand il s'empare des seringues et qu'il fait mine de partir sans payer, le barman lui propose même de se faire voler d'autres produits ; on voit qu'il pense déjà aux dommages et intérêts qu'il espère toucher. Amuse-toi bien sombre crétin. Tom claque la porte en explosant de rire.

9h15 : Tom s'est enfilé l'intégralité du contenu des seringues. Il arrive enfin devant la baraque où il doit livrer ce putain de portable happyware. Elle lui fait des grimaces en déformant ses fenêtres, comme une gamine qui voudrait se foutre de sa gueule. "Attends un peu espèce de salope. Je vais te montrer qui est le boss." Mais lorsqu'il immobilise le fourgon, le décor refuse de s'arrêter d'avancer. Le goudron glisse sous les roues du véhicule et la rue toute entière défile aléatoirement, en se déformant, comme si elle était montée sur un tapis roulant. Il se décide quand même à ouvrir la portière et à poser un pied au sol. Il est obligé de s'agripper à la carosserie pour ne pas être emporté par le mouvement. Pour ne rien arranger, un essaim de chauves-souris vient lui mordre les oreilles. Il essaie de les écraser avec la tapette à mouches, mais elles sont trop grosses. Les passants n'ont pas l'air gênés par l'écoulement incessant de la rue. Ils se sont transgormés en dinosaures rampants qui le regardent d'un air craintif. Heureusement, ils n'ont pas oublié leurs chaussures de golf.

9h27 : Malgré tout, il n'a fallu que quelques secondes à Tom pour arriver à faire face à tous les dangers. Il se trouve déjà devant la porte arrière du fourgon. Il y a plusieurs piles d'ordinateurs portables, mais ce ne sont pas tous des happyware. Ils le regardent tous en serrant des dents, prêts à mordre. Dans le doute, il en prend un de chaque pile, au hasard. Il y aura toujours celui qu'il faut dans le tas.

9h36 : Après avoir victorieusement échappé aux attaques sans merci des plantes carnivores qui peuplent le jardin, sans laisser s'évader les portables qui sous ses bras se contorsionnent dans tous les sens en essayant de griffer et de mordre, il pénètre enfin dans la villa. A l'intérieur, c'est tout sombre et ça ressemble à une cage thoracique. Les murs sont tapissés d'une matière organique qui sécrète une gelée verdâtre. Tom se grouille de trouver le panneau où il doit brancher le portable avant que les aliens ne flairent sa précense. Sa respiration s'accélère, il devient fébrile. Aussitôt qu'il les a posé les monstres par terre, ils se mettent à se chamailler, puis à se battre entre eux pour savoir qui va être branché. Il n'a pas que ça à faire. Les aliens rôdent dans le coin, il doit sortir au plus vite. Et comme ils sont tous très énervés, il choisit le moins combatif d'entre eux pour réduire au maximum le risque de se faire mordre. Mais il a à peine le temps de le connecter et d'appuyer sur la mise en route que les autres, jaloux, se jettent sur lui, toutes dents dehors. L'espace d'un éclair, il voit apparaître dans l'obscurité la silouhette d'un alien. Son coeur s'emballe, et il perd connaissance.

scène 4 : 9h57

Deux yeux écarquillés par la terreur balaient l'obscurité du salon. Conchita, armée d'un rouleau à pâtisserie, se tient aux aguets, prête à frapper sur n'importe quoi ou n'importe qui, qui essaierait de l'approcher. Une abondante quantité de sang s'échappe d'une plaie dans son cuir chevelu. L'hémoglobine coule sur son visage. Elle ne sait pas trop ce qui lui est arrivé. Elle s’est juste relevée avec un gros mal de crâne dans le noir complet. Quelqu’un a dû la frapper par derrière, le système d’alarme s’est alors déclenché, l’électricité a été coupée et les rideaux de fers ont chu bloquant toutes les sorties. Y a un raffut monstre dans la cuisine… Elle s’y engouffre en tremblotant…

« Montre toich, voleurch ! La poliche est en routche… Tu t’en tireras pasch comme cha ! », Qu’elle murmure terrorisée alors que dans l’obscurité, elle ne voit que les loupiottes de l’électroménager clignoter anormalement…

Tout d’un coup, un long grésillement la fait sursauter. S’en suit un petit moment de silence pendant lequel Conchita ne sait plus où se tourner… Puis soudain une musique étrange point du vide acoustique… Elle gondole, accélère, ralenti et spasmodiquement crachote ce message :

« J’garde vos aliments au frais,
Les germes, Booh, je les effraie,
Bactéries, j’laisserai pas faire
Je suis l’frigidaire POL-R ! »

La nounou se prend un grand coup de porte de frigo dans le bide. Elle est projetée sur le lave-linge qui se met alors en marche. L’autoréclame se lance venant se mêler à celle du réfrigérateur :

« Pour laver toutes vos guenilles,
Des p’tites tâches aux gros chiassons,
Sachez que je touche ma bille
Achetez l’lave-linge CLEAN-o-TRON ! »

La pauvre femme affalée de tout son corps sur le couvercle de la machine à laver, se relève avec peine. Le cycle enclenché est l’essorage et les vibrations du tambour sur son bas ventre lui remémorent des sensations depuis longtemps oubliés. Elle pousse soudain un grand cri orgasmique tout en serrant avec amour le lave-linge de ses gros bras joufflus. « Mi Amor ! », Qu’elle hurle comme elle mouille autant que la cuve, comme çà bulle dans sa culotte autant que le détergent dans le tambour… Le bruit des autoréclames gâche cependant ce précieux moment de bonheur pur… Aussi excédée, elle se relève et se dirige vers le frigo pour stopper la propagande. « Schaloperie de frigorifico de mierda ! », Qu’elle te lâche alors qu’elle file un gros coup de rouleau à pâtisserie sur le congélo. Mais au lieu, d’arrêter la pub du frigo, l’autoréclame du freezer se lance venant se mêler au brouhaha sonore ambiant :

« Gla Gla Gla fait la pizza,
Fait pas chaud fait l’surgelé,
La glace grelotte de foid,
l’freezer ICEBERG, Sûr je l’ai ! »

Conchita se prend un violent kick de porte de congélateur en travers la tronche et recule groggy… Elle fait deux, trois pas aléatoires, avant de trébucher sur un des aspirateurs arpentant la maison de long en large, aspirateur qui prend alors part à la folle chorale électroménagère :

« J’avale tout sur mon chemin,
Ben dis-donc qu’est ce que je suce !
J’suis l’aspirateur de d’main,
Le MAXISUCKER 2+ »

« Wahaha… », fait Conchita alors que dans sa chute, elle s’est de justesse rattrapée à la portière du lave-vaisselle qui s’ouvre et crache sur elle , toute la vaisselle du petit déj… Aux bris de glace et de céramique se mêle l’autoréclame menaçante de l’appareil :

« Les sauces les plus tenaces,
J’les éradique facilement
Grâce à moi plus d’trace de crasse,
Votre vaisselle, je vous la rends,
Plus nickelle, moins dégueulasse,
Lave-vaisselle LAVECOM England. »

Le visage lacéré de toutes parts, Conchita s’extirpe de la bouche du lave vaisselle qui continue à balancer des plats comme des frisbees qui viennent exploser sur tous les murs de la pièce. Elle réussit un bel home-run en retournant avec dextérité la soupière de la veille à l’aide de son inséparable rouleau à pâtisserie. Le récipient va s’encastrer dans le micro-ondes qui se met alors en marche :

« En moins de dix secondes chrono,
Je délivre des plats de ouf,
Souffle z’y d’su car c’est très chaud,
Choisis l’micro-ondes MALBOUF ! »

Dans son élan athlétique, Conchita finit sa relance en présentant peu diplomatiquement le coin de sa gueule au coin de la table de la cuisine… Trente six chandelles défilent alors qu’elle se met à vriller comme un derviche tourneur… Le rouleau à pâtisserie vient alors cogner la cafetière qui en riposte déverse 1 litre de café bouillant sur les jambes de la vieille femme. Elle hurle comme un chien à la lune et la machine entonne alors un très beau duo avec elle :

« Je prépare un bon café,
Un café pas trop corsé,
Un qui redonne bonne mine,
Pas b’soin d’prendre de cocaïne.
Si t’as des cernes sous les yeux,
K-ftière te rendra heureux ! »

La nounou qui lâche sa batte improvisée se retrouve cul contre la table de travail, ses deux mains en arrière lui ont évité d’être empalée par le robinet de l’évier… « Ya quelquechoch de bicharre ! Caramba ! », S’étonne elle alors qu’elle sent sous sa main gauche une sorte de matière molle sans trop bien cerner ce qu’il y a sous la droite… « Ah ch’est vrai je mixchais de la viandche pour le hachi parmentierch de che choir ! Heu…» Les doigts de sa main droite tâtonnent de bien étranges lames aiguisés…

« Mâche tout,
Mâche tout,
A ta place, je mâche tout
Ki ki mixe ta soupe pour pépère ?
Mieux qu’s’on amylase salivaire ?
Mâche tout,
Mâche tout,
Robot mixeur Mach’ TWO. »

« Flop ! Flop ! Flop ! » Font les bouts des doigts de Conchita alors qu’ils sont broyés et hachés menus par le mixeur… Les « Whhhhaaaaa ouilllllllleee ouilllleee WHHHahaa » qu’elle hurle sont quant à eux couverts par le concert de toutes les machines en mode autoréclame… La panique s’empare de la pauvre employée de maison qui tente maladroitement de se faire un garrot sur le moignon raboté jusqu’à la moelle qu’il lui reste à la place de la main droite… Elle perd tout son sang qui se vide sur la purée de chair et de cartilages qui décorent à présent la table de travail et au moment où prise des spasmes qui accompagnent ceux qui sont saignés à blanc, elle chancelle et perd conscience… La soupière qui contient des dorures fait poindre des étincelles électriques menaçantes dans le micro-onde :

« En moins BZZZ de dix secondes BZZZZZ chrono,
Je délivre des BZZZZ plats de ouf,
BZZZ Souffle z’y d’su car c’est BZZZZZZZ ZZZZ très chaud,
Choisis l’micro-ondes BZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZ »

Au moment où sonne le bip annonçant que la soupière est bien cuite, le micro-onde implose. Conchita est propulsée par le souffle, tête la première, dans le four de la cuisinière qui glorieusement s’époumone sur son slogan préenregistré :

« Le chauffage par induction,
C’est juste bon pour les cons,
Nous c’est au propane qu’on gaze,
Et ta bectance s’ra pas naze,
Les cuisinières ALENVERT
La crème brûlée, elles savent faire ! »

Petit à petit, le gaz s’échappe et inonde les poumons de Conchita… La vie la quitte par à-coups à chaque inspiration…