Interview de Costes

Le 27/01/2006
-
par Costes, nihil
-
Dossiers / Interviews
Costes s'est fait un nom dans le milieu underground grace à ses performances extrêmistes et ses disques chargés de violence, totalement auto-produits. C'est une surprise de le voir publier un roman chez Fayard, une grande maison d'édition. Pour l'occasion, je lui ai posé les questions les plus stupides qui me venaient à l'esprit. Pas de problème : le bonhomme est plutôt sympathique et son humour largement zonard.
Costes a un CV bien rempli. Chanteur scatologue réputé et auto-produit, il a enchainé les disques parodiques et/ou ultra-violents, s'attirant l'admiration des tarés de tout poil et la haine des bien-pensants.
Ses shows bordéliques, pornos et déjantés sont des sommets de brutalité et d'imbécillité jouissive. Costes se plait à se baigner dans le sang, dans la merde et le sperme. Il aime éructer et vagir.
35 disques, 20 trash-opéras, 5 long-métrages et une vingtaine de court-métrages à son actif, puis un premier roman, 'Viva la merda'.
Ceux qui n'ont pas entendu parler de ses performances ou de ses disques se souviendront peut-être de lui en train d'imiter la truie sous la menace du flingue des héroïnes du film 'Baise-moi' de Virginie Despentes et Coralie Trin Thi. Ou, tout au moins, en train de réclamer un fist-fucking à Vincent Cassel et de se prendre des grandes claques dans la gueule dans 'Irreversible' de son pote Gaspar Noé.

Jusque là, comme on s'en doute, les grosses boites de disques ou d'édition avaient évité Costes comme la peste, ce qui ne l'avait pas empêché de bâtir une grosse réputation grâce à Internet et au bouche à oreille. On a de la peine à croire qu'une maison d'édition bien propre sur elle comme Fayard, s'acoquine de bonne grâce avec cet agitateur. C'est pourtant le cas puisqu'il sortent le nouveau roman de Costes 'Grand Père' en février 2006.

En vieux routier du net, Costes connaissait la Zone et m'a proposé de l'interviewer pour parler de ce roman. Résultat...
Question : tu suces ?
Costes : Je rêve de sucer et de me faire enculer, mais je suis jamais passé à l’acte.

Question : t’avales ?
Costes : Dans mon rêve j’avale tout et je baise sans capote; En vrai, je baise jamais et ne fais que me branler.

Question : tu bouffes du gnou ? Hein oui salope que tu bouffes du gnou ?
Costes : C’est quoi du gnou? Tu veux dire du genou? Tu veux dire que je prend des genoux dans le cul?! Faut pas exagérer! Juste des poings.

Question : tu sors ton premier roman en février, qui raconte la vie de ton grand-père. On peut savoir ce que sa vie a de tellement plus passionnant que, mettons, la mienne ?
Costes : Sa vie fut carrément un milliard de fois plus puissante que les notres. Bon dans notre tête, on vit peut-être très fort, mais ça peut pas se comparer avec les épopées des ancêtres. Mon grand-père a été cosaque et a massacré la Russie. Mon grand-père a été légionnaire et a massacré le Maroc. Mon grand-père a tué l’amant de sa femme et a été au bagne. Mon grand-père s’est évadé et a fui en Amazonie. Mon grand-père a été chercheur d’or et a massacré les indiens...
Bon, à la fin, je reconnais, il a fini par tomber dans notre merde de modernité : Il se bourrait connement devant la télé comme on roule notre pétard devant la télé. Mais ca il le faisait à 70 ans, pas à 20 ans. Si on veut se comparer à ce genre de vieux, faut se comparer à lui à 70 ans. Si on se compare à lui à 20 ans, on sera derrière sur tous les plans. Sa vie, c'est un roman d’aventures extrèmes, folles, forcenées mais vraies. Une époque où la rélaité dépassait la fiction et pulvérisait les mots.

Question : le roman s’appelle « Grand-père ». T’as pas été foutu de trouver un consultant en marketing viral pour trouver un titre plus original que ça ?
Costes : C’est vrai que le service marketing a grave tiré la gueule quand ils ont vu le titre! Mais Grand Père, ça veut pas dire papi gateux gateau tout le monde se fout de sa gueule. Ca veut dire GRAND PERE, sans tiret, quelqu’un de plus grand que nous et qui nous a engendré. Dieu le père dans la peau du grand-père. Ouvrez les yeux sur les vieux!

Question : il y a combien de morts dans ton bouquin ?
Costes : Des millions de victimes innocentes écrasées comme des fourmis et pleurées étatiquement, un vieux mort dans un piaule pourrie et personne pour le pleurer. L’histoire du 20eme siècle quoi : on pleure sur l’Histoire à la télé et on laisse crever son voisin de palier.

Question : il y a des explosions ?
Costes : Ya beaucoup de morts décapités au sabre. Mais au-delà de 100.000, faut des explosifs.

Question : tu entretiens quel rapport avec la littérature en général et avec l’écriture en particulier ?
Costes : Je n’entretiens aucun rapport avec la littérature, ni avec quoique ce soit. Je ferme les yeux et je vis dans ma tête. Je suis un faux aventurier moderne, je suis pas un Grand Père, moi.

Question : on te connaît comme artiste underground et tu t’es fait un nom en utilisant les circuits alternatifs. Ca te fait pas un peu mal au cul de publier un roman chez Fayard et de te taper une tournée promo ?
Costes : Je suis très heureux d’être publié chez Fayard parce que l’équipe de gens qui s’occupe de mon livre est exceptionnellement intelligente, passionnée et honnête. quand tu dis Fayard, tu penses peutêtre gros business? Et quand tu manges un yaourt Danone, ça te fais mal au ventre? Et quand tu roules dans ta R16 pourrie, tu penses aux milleirs d’immigrés crevés pour la boulonner pour toi? si à chaque fois qu’on fait quelquechose, on analyse toute la chaine des interactions de A à Z, on peut plus rien faire de peur de se souiller. Faire son truc honnêtement, avec passion, à fond, ça c’est l’essentiel. Que ça soit à Fayard ou dans une cave obscure.

Question : tu penses vendre beaucoup de bouquins ? C’est un aspect des choses qui t’intéresse ?
Costes : Fondamentalement, mon souci a été d’écrire le livre le meilleur possible, le plus intense, le plus passionnant à lire, quelquechose de terrible qui ébranle la tête jusque dans les couilles. Une fois l’oeuvre fini, je suis cureiux de voir l’effet qu’elle fera sur les autres. Comme un boulanger fier de son bon pain, je serai heureux si d’autres l’apprécient.

Question : tu te vois en train d’accorder une interview à Michel Drucker ?
Je ne sais pas qui est Michel Drücker. Mais j’accorderai une interview à tous ceux qui m’en demanderont, aussi dures ou cons que pourraient être leurs questions. Ce sera à moi de trouver les bonnes réponses.

Question : je viens d’un site qui s’appelle la Zone, c’est un site sur lequel tu es déjà passé ou on a été sélectionnés dans le cadre d’une campagne marketing comme cœur de cible potentiel ?
Costes : L’attaché de presse de Fayard informe les grands médias de la sortie de mon roman, mais il n’y a aucune campagne marketing de Fayard visant le milieu indépendant. C’est moi qui informe de la sortie de mon roman dans ce milieu les gens que j’apprécie et qui m’apprécient.
Maintenant, c’est certain que les sites internet indépendants sont bien plus pointus sur la culture qui bouge que les grand médias.

Question : je considère personnellement la violence et la haine dans l’art comme salutaire. Est-ce que c’est un choix de ta part d’être vulgaire, sale, choquant dans ton œuvre, ou est-ce que tu subis cet état de fait ?
Costes : Je crois comme toi, et comme Beaudelaire, que l’art doit fondamentalement représenter le Mal. La représentatiçon du Bien est parfaitement faite par les moralistes. L’exploration du Mal est l’apanage des artistes. Nous voulons des noirs démons velus qui dansent dans le marécage de sang, nous voulons vomir nos pires cauchemars. Assez du faux art conceptuel de merde qui montre des poutrelles rouillées sur des rond-points et des tickets de métro à Beaubourg! Casser l’urinoir de Duchamp était une bonne idée.
    
Question : la première fois qu’ai pris contact avec ton univers, c’était il y a quelques années en surfant sur ton site web. A l’écoute de quelques chansons, j’ai hâtivement jugé que t’étais un connard de nazi à moitié dérangé, impression confirmée par le fait que des assos anti-racistes t’aient intenté des procès. Il m’a fallu l’avis de plusieurs personnes et quelques articles pour comprendre que tu fais dans la dénonciation et pas dans le premier degré. Ca t’emmerde pas qu’un tas de gens puissent passer à coté de ton œuvre à cause d’une première impression douteuse ?
Costes : Les gens qui sont réellement interessés par l’art, ne peuvent croire longtemps que je suis un criminel! Combien de gens croient que les massacres dans les films sont réels? Si on considère que l’art doit représenter le Mal, ne pas représenter le racisme ou le nazisme qui sont des grands maux de notre temps, serait lamentable hypocrisie. On peut représenter une femme torturée violée mais pas une race? Tout le mal doit être exhibé sur l’estrade de l’art comme sur l’estrade du gibet. La position des anti-racistes qui attaquent l’art en faisant semblant de croire que la fiction égale la réalité, est intenable.

Question : j’ai une certaine fascination pour les artistes capables de se mettre dans la peau des pires ordures de la planète, mais de l’incompréhension aussi. Ca t’emmerde pas de beugler des slogans racistes ou antisémites à la première personne ?
Costes : Je beugle toutes sorte de choses, à la première, à la deuxième, à la troisième et à la multitude de personnes. Je suis moi, l’autre, nous, vous et TOI.
Moi ça m’emmerde pas de beugler en rentrant dans la peau de TOI; Mias peutêtre bien que TOI, ça le gène d’entendre tous ses fantasmes étalés dans les oreills de ILS ?

Question : quelle est ta relation avec ton public en particulier et avec les masses en général ? Est-ce que tu aspires à la notoriété et à la reconnaissance ?
Costes : Je n’ai pas de relation physique avec le public. J’ai des relations de grande amitié et reconnaissance avec tous ceux qui m’ont soutenu, apprécié et dont j’apprécie aussi les oeuvres et les attitudes. Ce sont des interactions entre gens honnêtes et passionnés qui vont jusqu’au bout de leur vie. c’est peutêtre pas la partouze colletive, vu que je sors jamais et bosse seul tout le temps; Mais c’est une respect mutuel par email !

Question : est-ce que tu aimes vomir ?
Costes : La dernière fois que j’ai vomi, j’ai réussi à me filmer la bouche juste au moment où ça jaillissait sans salir la camera. alors j’étais content.

Question : je te confirme que pas mal d’artistes marchent sur tes pas. Tu te verrais bien en chef de file d’un mouvement artistique ? Et si oui est-ce que tu suces bordel ?
Costes : Attend, attend, lache moi la tête. normalement c’est pas le chef de file qui suce. C’est le chef qui se fait sucer, merde!

***

Toutes les infos sur le roman : http://jeanlouiscostes.org