Métamorphobite

Le 05/04/2006
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par Abbé Pierre
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Thèmes / Débile / Idiot
L'abbé nous refait un remake pornographique de la Métamorphose de Kafka. Le narrateur de ce texte se transforme non pas en cancrelat géant mais en bite. Oui. Désolé. Prenez vous en à l'auteur, merci. Le résultat est assez faiblard en fait, là on s'attendrait à un gros délire hilarant et azimuté, on s'ennuie pas mal et on rigole pas beaucoup. L'idée de départ est bonne, mais l'Abbé a oublié de rajouter les gags.
Non. Pas une bite.
Qu’est ce que vous voulez faire, de nos jours, d’une bite solitaire ? Elle aurait un socle, oui, un moteur, ça passerait encore, mais une bite, comme ça, lâchée dans la nature par quelque intervention divine qui commence d’ailleurs sérieusement à me gratter les couilles... Je vous résume un peu ce que j’ai enduré, je me suis transformé en queue. Y’a pas à dire, ça a quelque chose de dérangeant. J’avais la fâcheuse manie, lorsque j’étais encore humain, de me gratter la tête. Avez-vous déjà vu une bite se gratter le gland toute seule ? Bien sûr, c’est ce genre de moment crucial où on remarque, lors d’une rupture spatio-temporelle tragique, que nos boules n’ont pas de doigts. Mais moi, je suis là, en plein milieu de mon salon, sur mon canapé, avec ma femme qui va rentrer dans quelques minutes du boulot et je fais le con en m’interrogeant sur les facultés utilitaires d’une queue que j’aurais espérée polyvalente. J’aurais pu tenter d’écarter les deux parties de mon gland pour faire un appel d’air et tenter le parapente jusqu’à un endroit où me cacher. J’aurais voulu créer une rythmique sympathique en frappant mes couilles l’une contre l’autre dans l’espoir qu’un des sexes en congés de la ville me prenne en pitié. On aurait peut-être pu en faire un dessin animé. The amazing sex sound. Et non. Je suis condamné à la rigidité d’une érection interminable, je me sens très vieille branche sur le coup.

Je n’ai plus qu’à rester ici et à évaluer mes perspectives d’avenir. J’avais toujours rêvé d’être acteur porno, lorsque j’étais jeune, peut-être que c’est un boulot qui se pratique à domicile maintenant. Mon plus gros problème se posera certainement pour les dialogues mais, si ils se focalisent là-dessus, ils ne remarqueront pas mon absence de bras. Et viendra le temps des capotes en or, puis tupperware, utilisable plusieurs dizaines de fois sans risque de débordement. La branlette hermétique, c’est un concept qui paie.

Enfin, ce qui me gêne le plus dans cette histoire, c’est le fait que ma vie de couple va être sérieusement contrariée dans quelques instants. Je l’aime beaucoup, ma femme, mais elle acceptera jamais de faire tout le boulot en ce qui concerne la maison. Avec un branchement adéquat, mon seul rôle pourra être le remplacement de la lampe de chevet. Mais, sérieusement, avoir une ampoule au gland, ça doit faire mal et les pansements spécialisés ne sont sûrement pas en vente sur le marché. Je crois que ce qui risque le plus de nous éloigner, c’est le chien. Elle n’en veut plus depuis des années et je ne me vois pas bien opposer résistance dans cet état. Je crains que ça ne se finisse en dispute et on va finir par se cracher à la tronche. Là réside mon plus fort argument, l’éjaculation faciale.

La porte s’ouvre et elle s’approche du canapé. Sans un mot, quoique j’aurais eu du mal à l’entendre, son mot même si elle me l’avait soufflé dans l’urètre et fait de moi l’un de ces ballons qu’on transforme selon l’envie en chien, girafe ou mitraillette et qui n’aurait servi à rien, on a pas de gosses, nous, ça nuit à la santé du couple il parait, enfin, sans un mot, ses lèvres viennent se coller à moi, si, à moi, la bite, et sa bouche m’engouffre dans ma totalité. Après quelques instants d’abandon buccal, elle relève la tête et me regarde, étonnée.

« -Eh, chéri, t’as vraiment une tronche d’autiste aujourd’hui, on dirait que t’es pas là, qu’est ce qui s’passe ?
-Je..hum..quoi..je..non..je me suis transformé en queue, tu vois bien et.. »

(Je vous explique, ma femme aime bien tout comprendre et savoir de ma vie. A cause de sa journée, elle n’a pas dû bien remarquer ma transformation et ça l’aurait chagrinée que je ne lui en fasse pas part.) A ces mots, elle me balance un coup de chaussure à talon si fort que je me sens presque vomir. Elle me regarde après puis sourit.
« Tu diras à ton cerveau de pas aller se balader la prochaine fois même si il a trouvé un terreau plus fertile en dedans de tes couilles. Tous pareils. Tous ».
Je vomis, alors. Elle est perspicace ma femme, c’est pour ça que je l’aime beaucoup.