La Saint-Con cosmique

Le 16/04/2006
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par Prototype Nucléique
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Thèmes / Saint-Con / 2006
Le Prototype Nucléique est un étrange animal, peut-être même un artiste qui sait. En tous cas un beau schizoïde, qui dissocie le narrateur omniscient et l'auteur, l'un brûlant l'autre, enfin je crois. Je n'ai rien compris à son texte, si subtilités il y a ça m'est passé au dessus du crâne. Seule la scène de crémation m'a interessé, parce que délirante.
Ce texte n’est pas de lui. Cette phrase non plus. Ce qui suit non plus. Il l’a volée sur le site de l’amicale des pyromanes réunionnais. Le « qui » de la quarante-septième ligne lui a été aimablement cédé par un politique célèbre dont je tairais le nom.
En ce qui me concerne, je suis le narrateur omniscient et omniprésent. Ce texte étant son dernier, j’ai pris quelques largesses pronominales que je vous serai grès de tolérer, à l’inverse de l’auteur qui, dans un égocentrisme odieux, n’a pu souffrir que sa création soit entachée d’une semence étrangère. Je le laisse donc meubler, à quoi bon s’y opposer, la fin est déjà écrite par mes soins.
Vide cosmique. Je plane dedans. Je suis l’anomalie.
Le noir et l’obscurité. Excessivement loin de toute forme d’existence.
Ici, l’Univers tend vers le néant.
Je perçois, parmi un certain nombre, une réaction chimique. Un acide ribonucléique vient de se dupliquer.
J’attends, c’est mon boulot après tout. Percevoir, attendre, et à l’occasion, faire quelque chose.

1-L’AME
Ca n’existe pas. Il n’a pas d’âme.

2-LA LOGIQUE
La ville s’accorde admirablement avec la pluie. Le système y égraine les perles d’une civilisation défaillante. La roue tourne et les gens s’empifrent. Les voitures poursuivent leur course au pétrole, pendant que les piétons errants se font écraser par des automobilistes maladroits. Sélection naturelle déréglée.
C’est la gueule en sang et les phalanges éclatées qu’il s’affale sur son lit. Bourré jusqu’à l’os, le dos courbaturé par les poings qui l’ont martelé toute la soirée. Des hommes qui deviennent des bêtes, une dispute, et des visages ensanglantés, des corps qui en retiennent d’autres, les muscles secs et tendus à craquer dans une lutte statique et acharnée. Des paroles de sourds sont prononcées dans la nuit glaciale.
Je vais le défoncer / Arrête / Je vais le défoncer / Arrête
Et puis l’explosion, la furie, des coups de pieds jetés aux visages, des cris de douleurs. Le bruit sourd du coup qui s’abat dans l’obscurité. Le silence d’un affrontement suffoquant de haine. Des petits bourgeois qui s’étripent jusqu’à l’épuisement. L’alcool annihile la douleur. Des dents, des cotes, des pouces se cassent, les sangs s’étalent sur les chemises. Les cris des filles. La bave et la pluie s’écoulent dans le bruit des halètements exténués de deux corps incapables d’en finir.
Il n’a pas de crocs.

3-LA BEAUTE
La période de coït du paon dure tout le printemps. Durant la parodie nuptiale, le mâle, élève ses rectrices et déploie ses plumes sus caudales en éventail. Les femelles accourent à cette parade et, poliment, adoptent les postures caractéristiques indiquant qu'elles sont disposées à s'accoupler, tapies sur le sol face au mâle, les ailes mi ouvertes. A ce signal, le paon referme rapidement sa magnifique traîne et s'accouple successivement avec toutes les paonnes.
Mais il n’a pas de plumes.

4-LA RAISON
Il aime être aimé, le plaisir, et aimer, un peu.
L’agencement photonique qu’il offre aux rétines correspond aux attentes de récepteurs plus ou moins bandants. Mais la séduction, dès lors qu’on l’envisage techniquement, n’est régie que par le culte du moi, ce qui l’oblige à choisir et à se ronger les doigts jusqu’aux nerfs. Car choisir, il n’en a jamais été capable. Il est plus simple de vouer sa vie aux néants, qu’à autre chose. On est libre de meubler l’entre-clope à sa guise, tandis que l’espoir vous condamne à agir.
L’enfant découvre la perception en même temps que la raison. La seconde naissant des blessures infligées par la première, il arrive, selon les circonstances, qu’un déséquilibre se crée. L’homme, a choisi la seconde. Ce qui en soit n’était pas idiot. Par définition d’ailleurs. Mais je suis le roi des crétins. Et si le cerveau est capable de penser, il n’existe que pour savoir si la banane se mange, selon sa couleur. Pas pour inventer des concepts, tels que celui du gag relatif à la peau dudit fruit.
Dépassée par le sentiment, la pensée ne peut être créatrice. Elle n’est que conscience, mitigée. Et la conscience n’est rien d’autre que la transcendance de l’ego à travers l’univers et même, quelle cupidité, la métaphysique.
Il n’a pas d’esprit. L’homme n’est que moi, et il a fait la connerie de s’en apercevoir. Le mot est lâché.

Aujourd’hui, et croyez moi, il s’agit bel et bien d’aujourd’hui, j’ai tout détruit. Au cœur de la matière, il suffit de décocher une petite check box, et tout inverser. C’est mon job. Cycliquement, je coche, j’attends un peu, je décoche, et ça recommence. Alors aujourd’hui, j’ai décoché, il était temps. Ceux qui doutaient d’Einstein, vont être rassuré, il a raison.
Ce coup ci, j’ai pris mon temps, pour savourer un peu le spectacle. Mine de rien, c’est assez chiant comme taf.
J’ai commencé par lui. Parce qu’il écrit comme un cochon.

J’ai d’abord déchecké les molécules d’oxygène qui traînaient dans son sang. De la lave en fusion coula alors dans ses veines. Dissolvant toute sa plomberie interne, des effluves de sang bouillant suintait par tous ses pores. Il hurla. Et s’affaissa sur son putain de bureau. Après j’ai annihilé ses yeux. Des flammes jaillissaient de ses orbites et la douleur fut telle qu’il trouva la force de se lever, en gerbant et toussant des marées de sang et de boyaux en lambeaux.
Planplan, son immonde clébard, enfermé avec lui dans la pièce s’était réfugié sous le lit et miaulait de terreur face au spectacle. Petit fumier. Je te l’ai déchécké direct, il a disparu en une étincelle.
Puis il s’est agenouillé, carbonisé et sanguinolent, sur son tapis Ikea de merde. Dans l’ordre, j’ai ensuite dissout les parois de sa vessie, fait cramer doucement ses testicules, l’une après l’autre, puis, ses mains, son tapis (de merde), et le vagin de sa mère, avant de l’achever, qu’il l’entende couiner comme une chienne de l’appartement voisin pendant qu’il finissait d’agoniser.
Je l’ai laissé brûler à petit feu. Puis j’ai sélectionné « Check All », je me suis gratté l’oreille, et j’ai cliqué «».

Aussi présomptueux que cela puisse paraître, toutes les choses ont une origine. Mais pas de fin. Quand sclérosé par l’acrania qu’il choyait, le civilisé retournera pourrir la terre qui l’a porté, son fils ira élever les enfants de sa putain dans la même grotte dégueulasse d’obscurité.