Les aventures d'Hector Paillasse, anti-héros nihiliste et mesquin

Le 17/04/2006
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par Ventoline
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Thèmes / Polémique / 2006
Ce texte inachevé trainait depuis des lustres dans les textes en attente, et Vento a eu la bonne idée de le remanier pour la Saint-Con. Hector Paillasse est un enfoiré aigri qui travaille dans un Quick. Le portrait est fignolé et fidèle, et le texte parfait si il ne s'achevait pas ainsi en queue de poisson, sans crémation avérée.
L'autre jour j'ai jeté un bouquin dans une poubelle, une grand-mère m'a traité de fasciste.
Je m'appelle Hector Paillasse et je hais l'humanité.

Vieille folle.
Pourquoi tu viens me chercher des poux au lieu de profiter de la tranquillité du parc ? En plus il était nul ce bouquin.
T'es de ces cons qui croient aux symboles.
Là ou je considère un alliage d'atomes en forme d'encre et de papelard, toi la vieille tu y vois un symbole de liberté, tu l'as vu à la télé.
Ceux qui esquintent les livres sont les ennemis de la liberté, le livre c'est noble, il faut le respecter.
T'es de ceux qui me forçaient à finir des plats dégueulasses, parce que tu as vu à la télé que des malheureux mourraient de faim, et que ta mère et sa mère avant elle on dit que c'est ce qu'il faut faire. Mais j'ai plus souvent vu des pauvres fouiller des poubelles que mon caca.
Je hais les symboles.
Pas pour tout ce qu'ils me font subir, mais parce que je suis trop intelligent pour en profiter comme ce tas d'cons.
Du coup la vieille, à défaut de te torturer je shoute dans ton chien.
Kaï ! Voila tout le plaisir que j'espère de cette vie.

Je m'appelle Hector Paillasse et je hais l'humanité.
Je pourrais me suicider, mais l'instinct de conservation m'en empêche, du coup puisqu'il faut bien occuper ses jours je voue ma vie à sa perte. Rigoler sur un tas de cadavres, voilà bien la voie de l'homme sage.
Je ne changerais rien à l'histoire, mais je continue.
À ce titre vous pourriez me considérer comme une âme romantique et blessée, mais ça me ferait horreur: je suis l'antéchrist. J'ai juste pas beaucoup de moyens.
Une sonnerie de merde, des yeux qui s'ouvrent, il est sept heures la vie continue.
Ces enfants de putain de kellogs me font mal au bide, mais faut manger sinon vers 10 heures on a des aigreurs.
Je me dis voila ma vie.
C'est quoi ?
Hein ?
Le monde est mythomane. Le monde pense vivre un film. Mais même un antihéros refuserait ces vieux kellogs pourris, ces tracasseries si minables qu'elles en deviennent majeures, toute cette foutue peur. Parce que tout ça c'est trop vrai, qu'il n'y a foutrement nul-part où aller.

Bah si. Au Quick.

Au boulot quoi.
Pour se réaliser au sein d'une équipe motivée.
Pour profiter d'avantages sociaux.
Pour les tickets restos.

Viens z'y, viens manger la merde qui sort de mes mains.
Ici c'est l'irréalité, la dégradation, et t'as un dvd avec ton menu.
Y'a rien de plus absurde qu'un Quick, ça n'a pas de sens.

Et voila cinq heures que je m'y prostitue pour des bides, gros service assurément, ça ne désemplis pas.
La tension est palpable, tant du côté des bides que des larbins; c'est la lutte pour manger, la lutte pour gagner de l'argent pour manger.
Je tiens ma caisse de bon argent bien frais avec Courage quand soudain j'aperçois une poule dans ma file de bide. Puis quatre puis cinq poules, et ça c'est l'apocalypse sans les flammes.
Les poules, ces SALOPES JE VEUX LES VOIR MORTES.
Pot de gouache sur leurs sales gueules viscelardes, jeans tailles basses, manteaux blancs ou roses, c'est une poule.
Et celles là j'y suis abonné, depuis ce jour où j'ai renversé un coca light sur la chef des poules.
Maintenant elles prennent ma file à chaque fois et développent sur moi leurs techniques d'assassinat mental. Dieu merci j'ai pas une sale gueule, parce que ces chiennes ne vénèrent rien de plus que la vanité esthétique. Princesses de f2.
Alors elles prennent le parti de me traiter comme un attardé, comme un gars d'la ferme j'ai cru comprendre, elles évoluent comme un banc de poissons mutants de couleurs vives, hurlent pour mieux parler à mots couverts, ruinent ma consistance.
Car je dois le concéder, leur vitalité me fait peur, horriblement peur.
Je ne sais absolument pas comment répondre à de tels assauts, je subis ma peine gratuite avec terreur. À toute chose il se trouve une réponse quelque part, mais on ne m'a simplement pas appris à faire face à ça, un tel maelström de vacuité.
Quand je pense avec quelle froideur je pourrais lacérer leurs visages hideux, ça me soulage un peu. Mais l'épitaphe du weirdo qui torture une belle et forte jeune fille me refroidit. Et pourtant si elles abusent de ma faiblesse mentale, ça ne serait que justice que j'abuse de leur faiblesse physique, ça serait ça la vie dans un monde juste. Pas de place pour les faibles de mon espèce ici. Du répondant que diable.

"..."

La FIn Du SErViCe §§ Sauvé par le gong ! Soyons nihiliste ! le temps nous sauvera de tout après tout, hein ?
Un répit pour méditer la défaite.

Pour le coup je rentre chez moi et je m'écroule sur mon lit.

Sept heure, une sonnerie de merde, et..PUTAIN 10H, j'ai dormi trois putains d'heures de trop BORDEL DE PUTAIN DE MERDE j'ai raté le début du SERVICE, je vais me faire VIRER, ou est mon PUTAIN de PANTALON, mes CLOPES ?? Je suis à la RUE si je perds ce taff à la CON, du FEU, un BRIQUET, merde mes CLES.
Je cours jusqu'à l'arrêt de bus, je cours après le bus, le bus ne s'arrête pas, je fais du stop, les voitures ne s'arrêtent pas, je cours jusqu'au quick.
Devant la porte je pense à toute misère du monde, pour me présenter avec 4 heures de retard chez le manager, avoir l'air essoufflé et misérable est un minimum. Toc toc.
-Je suis DÉSOLÉ, ma copine (haha) est partie au travail avec mes clés, et même de l'intérieur il faut mes clés pour ouvrir ma porte !... (good one)
-Tu sais combien j'ai perdu ? Tu sais ce que ça me coûte tes retards ?

Monsieur le manager échelon 3, c'est un requin en carton. Il s'imagine venir de la cité et joue son délire de racaille reconvertie à qui veut l'entendre. Tout le monde en connait au moins un comme ça: la volonté de s'en sortir, le travail dur, l'ascenseur social, les principes, la famille, et plus que tout le sentiment d'être un héros moderne et pragmatique, un exemple pour la nation si injuste avec ses frères par ailleurs.

-Hé ho ? Ducon ? Tu penses à quoi là ?
-...! Excusez-moi. Je vous jure ça arrivera plus.
-Les gars comme toi je les vois venir, regarde-toi un peu.

Son petit bureau est plein de posters de bmw série 3 et y'a que ça mon frère : 100 km/h en 3sec 7, V8, jantes alu. Je vais te dire un truc t'as vu, un jour je l'aurais. Je sais je l'aurais.

-Ouais je sais... C'est en ce moment y'a trop de stress, franchement j'y tiens à ce taff (t'as vu ?), mais c'est la galère ah ouais, j'ai même plus de voiture parce qu'on la brûlée et j'avais pas assez de thunes pour payer l'assurance alors t'as vu. (hahaha)
-Ah ouais ? Ah ouais je vois...

Ca ça t'a calmé sale con.