Section I - la nuit

Le 01/08/2006
-
par Pansho
-
Thèmes / Obscur / Nouvelles noires
Pansho pensait rallonger ce premier (et dernier ?) épisode d'une énigmatique série. Mais étant sans nouvelles, je publie. Le texte est très étrange, l'atmosphère pesante et glauque, genre vieille série noire transbahutée dans le monde des rêves génétiquement modifiés. Le style colle impeccable, malheureusement le manque de repères et le fait que ce soit encore inachevé rend le truc peu compréhensible.
Vendredi 14 juillet 2006 - 17h34 - Gare ferroviaire d'Ol'Zö - Région du Levant
Dès ma descente du Möka-Express ligne 02 reliant Ol'Munöz et Ol'Zö je sens la crasse se lover contre ma nuque. Une belle crasse, limite agréable après celle que je viens de côtoyer 6 heures durant dans un wagon poisseux et faisandé.
Au premier coup d'oeil, le hall délabré de la gare Zöanne ressemble à un vaste foutoir, les palpables circulent, se noient, s'échangent à une vitesse dingue. La nébuleuse mafieuse de l'est a fait de ce terminus son showroOm ; sous la faible lumière des quelques néons encore en état de marche se massent les étalages truffés de drogues diverses et variées avec leurs pipes et autres accessoires garantissant la meilleure défonce jamais atteinte.
Le reste, la pénombre en quelque sorte est réservée aux activités plus juteuses comme le bizness d'organes, d'humains, de jeux et de territoires. Festival des gueules douteuses.
Aucunes milices gouvernementales à l'horizon, Le Kokelikö, la chambre actuellement au pouvoir ne contrôle plus la région du Levant et plus particulièrement Ol'Zö la métropole est de öO. Elle se contente de taper dans les petits fours que la nébuleuse lui offre et s'en va en week-end avec femmes et enfants la conscience tranquille.
Je découvre cet endroit pour la première fois, J'ai pourtant la fibre nomade mais la ville d'Ol'Zö était jusque là, passée à la trappe. Sa réputation instable et dangereuse n'en font pas une destination où il fait bon s'écarter les doigts de pieds avec la paille de son cocktail. Une main se pose sur mon épaule.
- Hé gars! TazöOn?...TazöOn?
Je me retourne. Wah ses yeux! Enfin sa tête même. Boursouflée. Il enchaîne:
- Quoi qu'est-c'qu'y a? T'cherches un truc plus violent?
- ...Je cherche "La Nuit" tu connais?
- "La Nuit"? Qu...Ouais j'connais bien, va falloir qu'tu glandes encore quelques heures...
Capte rien à ce que je raconte. Transpire des tempes. P'tit dealer de TazöOn. Rien à voir.
Je le plante sur son bout de quai vexé d'avoir parlé à ce connard qui ne manquera sûrement pas de balancer sa p'tite anecdote devant d'autres connards bien plus gros et bien plus informés. A l'avenir fermer ma gueule en premier. Chaleur, puanteur, fatigue...
Faut que je m'extirpe de ce brouhaha.

Je m'appelle ZamöOth, ZamöOth Liqim. Pas la peine de s'attarder dessus, mon géniteur n'a jamais daigné me raconter l'histoire de ce nom, si histoire il y a, et de mon côté j'en ai toujours eu rien à foutre. D'ailleurs il n'y a guère plus que les administrations öOannes qui utilisent ce blaze, Tous les autres se sont mis d'accord pour employer le mot "Jaune".
Jaune comme mon visage qui parfois se permet même de virer au verdâtre selon mes humeurs.
Mon teint a soudainement tourné sable au cours de ma 17ème année. Surpris et flippé, j'ai tout de suite cru qu'une saloperie de virus avait décidé de se la couler douce sur ma carcasse. Et puis, après moults consultations médicales et diagnostics insignifiants à base de mauvaise "pigmentation de la peau" je tournais la page me cachant derrière des prétextes bidons à chaque fois qu'un enfoiré venait me tanner à ce sujet.
Evidemment ce n'est pas facile d'oublier quand ce visage de zombie te saute dessus chaque matin ou que les gens se hâtent de mettre les bouts en te voyant, j'ai retrouvé quelque peu ma sérénité grâce aux gélules de tazöOn...Aaaah le TazöOn...
Sombre merde euphorisante...Rude...Une merveille. Sous TazöOn je joue avec mon visage, j'en ai plus rien à secouer, j'invente, cette couleur jaune devient source de récit dans les soirées arrosées, j'occupe le premier plan.
Au début j'ingurgitais à chaque baisse de moral c'est à dire à un rythme soutenu, j'étais complètement labouré h24 mais radieux et c'était bien là l'essentiel.


Cap vers la sortie de cette foire aux enculés, mes fringues trempées de sueur me collent à la peau et j'ai le gosier tapissé de poussière.
Sur mon chemin je stoppe devant un vendeur ambulant, un gros barbu au front bas me déleste de 3 Kä en échange d'une boîte fraîche de Mc Manamän; bière blanche élaborée par les Frères du Layön, une communauté religieuse bien comme il faut implantée dans le nord du pays qui "survie" grâce à sa brasserie. Voilà pour le recto de la version officielle, le verso, lui, est moins reluisant, il cause de communauté de fanatiques dégénérés et d'orgies sexuelles aromatisées houblon avec des jeunes croyants. Malgré ça il faut bien reconnaître qu'ils produisent un col blanc de qualité, pour moi le meilleur de öO.
J'écluse ça fissa. Joie, rôt et moral sensiblement en hausse.

Radieux mais pas en bonne santé, il faut bien que le TazöOn récupère quelque chose en contrepartie; une prise quotidienne entraîne surtout des tuméfactions aléatoires sur n'importe quelles parties du corps mais aussi des suées considérables.
La puissance de ces effets secondaires varie selon la constitution de la personne qui gobe, pour ma part, les enflures n'était pas très importantes et facile à camoufler, mais les suées...
J'avais 20 ans et déjà des tonnes de gélules derrière moi quand mes lobes d'oreilles se sont mis à perler, le jour, la nuit, en soirée, au boulot, sur les chiottes, même sous la douche je différenciais les gouttes d'eau des gouttes de sueur.
    

Goulées d'air frais. Le centre d'Ol'Zö s'offre à moi, smog et gratte-ciel charbon au programme. La populace Zöanne tire la gueule et traîne le pied. Je place la face de ma serviette ornée du "2" orange de façon à ce qu'elle soit bien visible. Patiente.
Des sourcils s'étonnent et continuent leur route, mon faciès recommence ses conneries. Je finis par repérer 2 hommes, enfin plutôt 2 briques en gabardines marchant dans ma direction le pas alerte contrairement aux autres:
- Monsieur Liqim?
- Oui...
- Bonjour vous avez fait bon voyage?
- Non j'ai pass...
- Très bien veuillez nous excuser nous n'avons pas beaucoup de temps à vous allouer et "La Nuit" est impatient de s'entretenir avec vous.
- Ah...Pas de problèmes je comprends parfaitement d'ailleurs je suis moi auss...
- En route! Il ne fait pas bon discuter ici.
Tout penaud je leur emboîte le pas, mes nouveaux potes ne sont pas comme qui dirait, très démonstratifs mais ils ont peut-être leurs raisons et je ne connais pas encore les codes de cette charmante bourgade.

Vendredi 14 juillet 2006 - 18h01 - Morgue Quartier Alissän d'Ol'Zö - Région du Levant

- Alors Bäan tu me le trouves ce putain de rapport !?
- Ca va, ça va...Calme papillon tu vas nous faire un malaise.
- Mais non ça va pas justement ! Qu'est-ce que t'as branlé avec ce papier ?
- Yop c'est bon j'ai ! Alors...mmm...Le sujet répond au doux nom de Väleri Stömbabwé dit "La Nuit", âge 43 ans, profession paysagiste. Ah ! paysagiste à Ol'Zö la magnifique il y en a qui ne doute de rien...
- Continue ducon.
- Célibataire, Côté famille ils sont aux abonnés absents. Il a été trouvé aujourd'hui vers 16h00 en train de nager la brasse dans son coagulant dans une impasse près de la gare. 2 balles, 1 en pleine ganache et l'autre...Sous l'aisselle droite !
- Hé merde ! Pas d'autopsie pour celui-là, aide moi à l'emballer