Apprécier jusqu'à la petite mort

Le 16/09/2006
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par M. Yo
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Thèmes / Obscur / Triste
Perte de conscience et de dignité, découverte d'une certaine forme d'autisme dans une relation, réflexion sur l'addiction, y a bien des moyens positifs de lire ce qui reste finalement qu'une connerie d'histoire sentimentale à la con. L'écriture est sobre, l'ambiance crépusculaire et le sujet fort rebattu et fort chiant. Sentiments mitigés donc.
Seuls. Elle et moi. Le Elle qui s’écrira toujours avec un E majuscule. Le Elle qui s’impose comme une évidence. Comme si c’était écrit. Comme si tout ça n’était qu’un film dont nous serions les acteurs.
Il fait sombre. On se distingue à peine. Le silence est intense, on le sentirait presque du bout des doigts, omniprésent, mais amical, chaleureux, presque complice. Ce n’est pas un silence pesant, angoissant. Non. C’est un silence serein. Reposant. Pourquoi nous parler ? Les mots seraient si dérisoires. Aucun mot, aucune phrase, serait elle rédigée par le plus talentueux des poètes, ne saurait exprimer le désir qui brille dans mes yeux. Je l’épie, la regarde, l’espionne. Je la contemple. Mon regard s’attarde un moment sur ses courbes harmonieuses. Elle est si petite, si fragile. Telle une poupée de porcelaine à manier avec délicatesse, un faux mouvement la briserait en milles éclats.

« Je t’aime… »

Je fais doucement glisser ma main le long de son dos. « Je serais allé au bout du monde pour te trouver ce soir. J’étais à bout. J’ai tant besoin de toi. »

Elle ne répond rien, bien sûr. Elle gardera son attitude hautaine jusqu’au bout. Et c’est si bon comme ça. Mes mains descendent encore plus bas, tremblent d’impatience. Sa peau est douce, si lisse, sans aucun défaut. Ses formes frisent la perfection. Son odeur est enivrante, forte et douce à la fois. Son goût…

« Laisse moi boire à ta source ! »

Fini les caresses tendres et affectueuses. J’ai besoin d’elle. Je la veux, tout de suite, et c’est avec vigueur et fermeté maintenant que mes mains empoignent ses courbes si fines. Elle n’oppose aucune résistance, mais paraît à la fois si distante, si lointaine. Sa peau est fraîche, presque froide. Mon amour, ma déesse, tu sembles si frêle et vulnérable… Et en même temps intouchable, insensible. Indomptable.

A quel jeu jouons nous exactement ? Qui domine réellement l’autre ? Bien sûr, c’est moi qui décide, moi qui prends les initiatives, moi qui donne la mesure, qui bat la cadence. Mais soyons honnête. En aucun cas tu ne te soucies de moi. Tu ne ressens rien, je suis le seul de nous deux à être dépendant de l’autre. Totalement dépendant. L’addiction dans son sens le plus pur, le plus fort, le plus violent aussi.

J’approche ma bouche de ta divine embrasure. Doucement d’abord, puis goulûment, je me délecte de cette si singulière essence coulant de ton intime orifice. Jusqu'à en perdre la raison, jusqu’à ce que cette folie me ronge, jusqu’à cette étrange sensation, mélange de joie furieuse et de douce mélancolie, extase de tristesse euphorique, sentiment d’omniscience là où pourtant nos sens se brouillent, certitude de contrôle absolu là où pourtant nos mouvements nous échappent…

Je t’aime et m’enivrerai de toi jusqu’à ne plus tenir debout. Je t’aime et m’enivrerai de toi jusqu’à ce que la dernière goutte soit expulsée et avalée. Ma douce… Ma délicieuse… Ma bouteille de Zubrowska.