Convulsion

Le 05/10/2006
-
par Womble
-
Thèmes / Obscur / Propagande nihiliste
Une scène de baise intensément sordide, violente et nauséeuse. Pas besoin d'intrigue ou de long développement : on se prend chaque phrase sur le coin de la gueule, on souffre avec les protagonistes, on ressent leur colère au fond des tripes, on s'embourbe dans les sensations les plus dégueulasses. Un vrai souffle d'air vicié.
Le mur est crade. Définitivement. Des générations de crachats, de chewing-gum collés, de graffiti à la va-vite, de vomis d’alcooliques, de pisse de chien, de clochards, l’ont rendus à cette état. Le froid, le froid mord le mur, aspire la lueur du réverbère. Ce mur est déjà mort, ce froid est aussi sale. Une blatte écrasée gît à coté d’une canette qui a subit le même sort. Ce n’est plus l’ennui, mais la crainte qui parcours le recoin vide.
Elle gémie, elle crie, ce n’est ni du plaisir, ni de la peur. De la haine. Elle crie son dégoût d’elle-même. De ce morceau de viande qui la traverse. De son corps à elle qui n’est plus qu’un morceau de viande. Un morceau de viande. Il ne lui appartient même plus. Peu importe son état. Ce qui lui donne la nausée, c’est qu’elle ressente encore. Quelques vagues frissons issus de son bas ventre qu’elle refuse d’assimiler à du plaisir. La nausée.

Cette odeur de pisse froide qui émane du sol. Les feuilles désagrégées d’un journal qui n’appartient à personne. La banane pourrie et la cendre froide qui dégueulent des poubelles en vagues constantes. La marée de merde dégoulinant les angles. Et les poubelles. Le parfum des mégots crevés. Cet organe. Ces tripes retournées qui s’expulsent, se déversent, emplissent l’atmosphère. La décomposition, vivante, la pourriture se nourrissant d’elle-même.

Les entrailles révulsés, il veut jouir. C’est un spasme, une convulsion qui se guette. Il ne se rejette en arrière que pour repartir. En avant que pour retourner. Ca tape, il tape. Ce bruit de chair molle qu’on claque. Mollement. Qui claque. Frénétiquement. La mâchoire serrée, les veines à en péter. Un amas qui s’agite, sur lui-même, sur un autre. Qui s’agite. Ca pénètre, avance comme si ça ne pourrait pas s’arrêter. Et ça s’arrête, reprends son élan, et recommence. Indéfiniment. Plus fort.

L’endroit se déteste. Il déteste tout. Il aime tout. Il accueille tout le monde. Tous les bienvenus à la digestion de soi. Ca vit, et ça ne vit pas vraiment comme ça. Une digestion de soi par soi. La puanteur, la pourriture qui s’en produit retourne nourrir ce qui l’a produit. Se nourrit elle-même. D’elle-même. Et ça éclate, s’étale, lentement rejoint tout. Ca se digère, et éclate à nouveau. Ca stagne constamment et ça vibre. Plus fortement que la vie.

Elle va vomir, s’évanouir, crever. Elle ne tiendra pas. Elle ne sait pas, elle l’espère. Crever. Crever encore. Pour ne pas sentir son corps. Pour ne pas se sentir lié à ça. Et ça tape. Encore. Et ça bouge, sans cesse. La lumière bouge devant ses yeux. Comme si le reste du monde se secouait autour d’elle. Elle va crever. Il faut qu’elle crève. Il faut s’en arracher. Ce corps insoutenable. Ce corps qui se hait. Qui se nie. Se dégager, s’échapper. Crever. Tout mais crever.