Asylum - Cellule 211 (épilogue)

Le 24/05/2007
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par nihil
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Dossiers / Asylum
Le professeur Tchekov, le fil conducteur de toute la série Asylum revient sur le devant de la scène pour cet épilogue qui manque d'une certaine dose de violence et de disjoncte pour servir de bouquet final. C'est plutôt une fin sombre et calme, sinistre. Ce qui après le déferlement de violence, de psychopathologie brutale qui s'est enchaînée durant sept épisodes, n'est peut-être pas un mal.
Cellule 211 - Chaufferie principale du deuxième étage
C'en était terminé. C'était là le bout du chemin.
La porte de la cellule 211 se rabattit avec un sourd claquement. Là, derrière, c'était l'enfer. Un enfer tiède et obscur comme la matrice originelle. La chaudière envahissait tout l'espace, monstre de noirceur suintante, vibrant et claquant sans plus s'arrêter. C'était l'origine du mal, la source de toute la confusion qui régnait à l'étage depuis des jours. La maladie qui s'était répandue, insidieusement, jusqu'à venir le détruire lui, sept cellules plus loin, perturber ses nuits et faire pourrir sa sérénité intérieure. Le professeur avait été contraint de faire installer cette chose antique, énorme et poisseuse, sur les injonctions des services d'hygiène. La dépense l'avait mis sur la paille, et son bruit de fond permanent couplé à l'hystérie collective des patients avait eu raison de son calme.
Elle se mit à nouveau en marche, et c'était comme se trouver face à l'épicentre d'une secousse sismique. Les murs se mirent à trembler, et des lignes de scories ruisselèrent entre les carreaux qu'on avait disposés à la place du capiton arraché. Le professeur regarda vibrer avec horreur les lourds tuyaux qui entraient dans les murs, les structures de fonte, le panneau de contrôle. C'était comme une bête antique tapie dans l'ombre, comme une infection mécanique qui s'était répandue dans toute la cellule et avait percé les parois de ses pseudopodes. Des filets de graisse glissaient des plaques mal vissées.

Chaude, chaude matrice, comme un utérus de femme, bombé et rugueux. Ton eau brûlante qui court dans les canalisations, par à-coups, comme le sang pulsé depuis un organe énorme et mécanique. C'était chaud, c'était vivant. C'était la seule chose encore vivante dans tout l'étage. Avec lui. Plus pour longtemps.

218, 217, 216, 215…

Le processus s'achevait, les bêtes malades avaient toutes été abattues par sa main. Il était le gardien scrupuleux d'un troupeau de cadavres. Toutes les petites cases qui s'alignaient entre ici et son bureau ne contenaient plus que des morts silencieux. Le chœur frénétique des fous s'était éteint. Et maintenant que les malades n'étaient plus, il fallait s'occuper de la cause de l'infection. Arracher le mal à la racine. Là, devant lui, la chrysalide noueuse et empesée où avait germé la pathologie.

214, 213, 212…
211.

Nombre de tordus tous plus dégénérés les uns que les autres, ligotés, abrutis de calmants. Et qui, tous, l'un après l'autre, s'étaient unifiés une dernière fois, dans une osmose cataclysmique, pour une prière disjonctée à la Déité-Machine. Celle-là même qui trônait devant lui. La petite tumeur bouillonnante de vie pathologique au centre d'un infini dédale de couloirs, d'escaliers, de cellules. La carie dans la dent, le ver dans la pomme.

Hélène, Hélène… Le professeur Tchekov plaqua son dos à la chaudière vrombissante, et plaça le canon de son arme entre ses dents. Cause, conséquence, cause, conséquence. Il avait tranché une à une les boutures au lieu de s'attaquer en premier lieu à la racine. Son doigt caressait la gâchette, pressait doucement. Il ne manquait presque rien, et l'intense vibration qui se communiquait maintenant à tout son organisme par ses omoplates risquait à chaque seconde d'enclencher le geste fatal.
Hélène, vois ce que tu as fait de moi.