L'effet papillon

Le 15/10/2007
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par God
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Thèmes / Obscur / Autres
Bon l'effet papillon, l'enchainement incessant des causes et des conséquences, c'est du classique pour se torcher une intrigue à peu de frais. C'est presque ce qui a remplacé la bonne vieille fatalité des tragédies grecques. Tout ça pour dire que se servir de l'effet papillon comme fondation pour une histoire, ça peut passer, mais se contenter de déblatérer sur le concept, ça n'a vraiment aucun intérêt.
Toutes les histoires ont un point de départ. La mienne comme toutes les autres. Mais le point d'arrivée dépend de chacun.
Dans une vie, des milliers de choix s’offrent à des milliers d’individus, qui prennent des milliers de décisions qui influencent des milliers d’autres vies. Seulement personne ne le sait.
Personne, peut être pas. Il y a moi. Et puis je suis sûre de ne pas être la seule à y penser. Après tout je ne dois pas être la première terrienne a avoir l’esprit tordu.
S’il y a bien une chose qui ne manque pas sur Terre, ce sont bien les gens tordus. Les gens dans le bus, les gens dans la rue, les gens au lycée, même les gens à l’Elysée. C’est vous dire si ça atteint tout le monde. Personne n’est à l’abri d’une pensée étrange, une minute, une seconde, ou même une fraction de seconde, personne, non, même pas toi qui me lis.
Penses au nombre de personnes en train de faire la vaisselle à cet instant précis, attention, quatre, trois, deux, un, top !
Voilà, bravo. Tu viens d’avoir une pensée étrange. Si c’est la première de ta vie, je te conseille de faire un vœu, non pas que je sois superstitieuse, mais disons qu’un vœu, ça ne se refuse pas. Si ce n’est pas la première fois, eh bien je te remercie de ta participation à ce petit test très stupide qui prouve bien que j’avais raison. De toute façon j’ai toujours raison.

Enfin, après ce petit test sans intérêt quelconque, passons aux choses sérieuses. L’influence que le moindre coup de vent de travers a sur la vie des gens. Prenons un exemple. Un coup de vent un peu fort, provoque la légère chute d’un chêne de deux cent ans d’age sur une petite fille. Elle meurt. Sur le coup bien sûr, ne vous inquiétez pas elle n’a pas souffert. C’est en tout cas ce qu’on dira à ses parents, dans le couloir immaculé d’un hôpital ou des centaines de gens naissent et meurent chaque jour. La mère pleurera, gémira, suppliera, hurlera, priera. Tout plein de verbes tristes en -a. Le père, enfermé dans le cliché selon lequel les garçons ne pleurent pas, gardera sa rancune et son chagrin pour lui. Tel un de ces murs immaculés, il regardera cette femme qu’il connaît depuis des années déverser tout le chagrin du monde devant lui, à ses pieds, sur le beau linoléum immaculé. Immaculé comme leur vie à partir de maintenant. Car il n’y aura plus cette petite chipie pour mettre du chocolat sur le canapé, ni pour dessiner sur les murs, ni pour faire des cauchemars et les réveiller à trois heures du matin. Il n’y aura plus rien. Rien que l’autre, le mur ou l’éponge, tout dépend du référentiel.
Elle sombrera dans la déprime, plus noyée chaque jour par les flots de larmes qu’elle déversera. Lui sombrera dans l’alcool, plus révolté chaque jour par l’injustice. Cette faute à personne, ce coup de vent mal placé, alors qu’il lui faudrait justement un coupable, quelqu’un à cogner. Alors il deviendra violent, car si personne n’est coupable, tout le monde l’est. Même sa propre femme. Ils perdront leur emploi, leurs amis, leur famille. Ils oublieront de promener le chien et de nourrir le poisson rouge. Qui mourront, d’une manière ou d’une autre. Dénoncés par une voisine, ils seront attaqués en justice par la Spa. Et cetera, et cetera. Tout ça à cause d’un coup de vent. A cause d’un tsunami. A cause d’un ouragan. Un ouragan sur leurs vies.