Politique

Le 17/02/2008
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par Nico
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Thèmes / Obscur / Anticipation
Comme souvent chez Nico, un texte étrange, sans explications. On subit juste les règles déviantes d'un monde inconnu, où le héros est torturé par des objets domestiques animés. Les textes volontairement hermétiques, des fois ça passe très bien, là ça m'a surtout laissé perplexe et rien d'autre. Dur d'être positif dans ces conditions, même si ça se lit très bien.
Comme tous les matins, il garde la tête sous l’eau jusqu’à l’étouffement. Lorsqu’il sent son corps s’enfoncer lentement comme dans un océan, alors seulement, il fait un effort incroyable pour se relever. Assis dans la baignoire, il lui faut plusieurs minutes pour reprendre son souffle. Il met sa main droite sur son cœur comme pour lui ordonner de ne pas battre aussi fort. Lentement son visage revient du rouge au blanc habituel.
Il se lève et commence à se sécher. Autour de lui, à son passage, les objets se déforment. Les miroirs se brisent, les horloges fondent et les vêtements se froissent au contact de sa peau.

Habillé il va dans la cuisine pour le petit déjeuné. La pièce est vide et les murs sont recouverts de plaques de tôle. Seule au milieu il y a la chaise en acier vissée au sol. Il s’assied et la porte se referme. Le verrou s’enclenche bruyamment. Des menottes métalliques se referment autour de ses poignets et de ses tibias. Il est attaché à la chaise. La lumière vire au rouge.
Alors la machine descend lentement du plafond. Il la regarde dans les yeux, la mâchoire crispée, d’un air de défi. La machine s’arrête en face de lui, à quelques centimètres de son visage. Un clic et brutalement les deux bras métalliques se jetèrent sur sa mâchoire et le forcent à garder la bouche ouverte. Alors le gros tuyau sort lentement de la machine et se rapproche de lui.
Il commence à frémir mais soutient toujours le regard de la machine. Le tuyau s’enfonce dans sa gorge. Le contact avec le caoutchouc lui donne déjà envie de vomir mais il ne le montre pas. D’un coup le tuyau s’arrête et la machine se met à vrombir. Le pétrole brut commence à couler. Il englue lentement toute sa bouche.
Il commence déjà à suffoquer mais ne le montre pas. Il sert les poings et continue de fixer la machine. Ses muscles se contractent, ses veines saillent. Mais le pétrole descend dans sa gorge. Son corps commence à ne plus lui répondre, la douleur grandit. Il lutte pour garder les yeux ouverts. Bientôt il ne peut plus. Tout son corps se met à trembler frénétiquement. Il essaye en vain de se libérer. Ses yeux se ferment. Ses doigts s’écartent. Ses cris sont étouffés par le pétrole. Il brûle de l’intérieur. C’est comme s’il se remplissait de feu liquide.

Il sort de la cuisine en pouvant à peine marcher. Il se traîne, plutôt. Sa cravate se noue toute seule autour de son cou. Elle serre trop et il a du mal à respirer.
Dehors la voiture l’attend. Il monte dedans. A peine s’est-il assis sur la banquette arrière que la berline démarre. Il n’y a pas de chauffeur.
Dans la voiture ses mains commencent à trembler. Sa peau bouge sur sa chair. Son visage se tord horriblement. Il crie, il hurle. Il s’arrache des lambeaux entiers de peau. Tout le brûle. Bientôt il ne voit et n’entend plus rien, pas même ses hurlements de douleurs.
Alors il se roule sur le sol de la voiture. Le sang gicle partout. Sa peau fond et se répand sur le tapis. Ses organes et ses entrailles se détachent. Il essaie en vain de les rattraper, mais la souffrance l’immobilise complètement. Des bras à tentacules sortent de son ventre et s’attachent partout. Ses os se brisent.

La voiture s’arrête. Deux hommes ouvrent la portière, sortent le corps et le mettent sur le fauteuil. Il reprend conscience, doucement. La douleur s'appaise. Un rictus déforme son visage. C'est presque un sourire. Les épreuves du matin sont finies. Le rideau s'ouvre. Il est face à la caméra.

- Mes chers concitoyens…