Têtes brûlées

Le 14/04/2008
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par Kolokoltchiki
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Thèmes / Saint-Con / 2008
Bah merde alors. Pendant que les grands anciens de la Zone en bavent pour pondre des textes peu inspirés, un inconnu au pseudo imprononçable vient leur en remontrer. Le texte est sautillant et teigneux, proche des contributions traditionnelles, à base de plan machiavélique et de viande crâmée dans la joie et l'allégresse. Un texte de Saint-Con bien basique, pas parfait ni drôlissime, mais frais et amusant.
Aujourd’hui, jeudi 10 avril 2008, je suis tout excité. C’est ma première Saint Con. Alors pour l’occasion, j’ai décidé de frapper fort, de vous en mettre plein la vue. Et dans un évènement comme celui là, le meilleur moyen de se démarquer reste encore de cramer un maximum de connards en un minimum de temps. Il me faudra donc un endroit plein de cons. Mais pas de vieux cons, comme on en trouve au supermarché, à la campagne ou au Sénat. Non, je veux de la chair fraîche. Du jeune con. Miam. Je m’en lèche les narines à l’avance.
Je me lève avec une sacré trique, ce funeste matin d’avril. Et cela n'est pas uniquement dû au fait que j'ai extrêment envie d'uriner. Il est 6h15, et je me dis que mon érection sonne comme une prédiction. Le temps de rassembler mon matériel et me voilà partit pour ce qui s’annonce comme une future journée de deuil national. Déjà dans le métro, j’aperçois certaines de mes victimes. Un des plus beau représentant de l’espèce actuelle s’assied à coté de moi, jean moule-burne et musique électronique à fond dans les oreilles. Je dois me concentrer très fort dans ma tête pour me retenir de commettre quelques atrocités avant l’heure.
Aux environ de 7h00, j’arrive enfin à mon but ultime. Mon jardin d’Eden. Mon Columbine à moi. Le lycée public Montaigne, Paris, 6e. J’en ai presque la larme à l’œil.

Je parviens à me glisser dans l’établissement sans aucune difficulté, me mêlant à mes semblables, tout en gardant en tête la mission que je me suis confié. Ici, c’est une véritable infection : le nombre de cons au mètre carré est tellement élevé que j’ai du mal à me déplacer dans les couloirs étroits de cette antre démoniaque. J’aperçois d’ailleurs quelques affreux spécimens parader devant plusieurs jeunes femelles à peine en âge de copuler. Les cons en question font partis de l’une des pires catégories des vantards inutiles. Maigres, boutonneux et autoproclamés rebelles, les skateurs méritent de mourir rapidement. Et sur le bûcher s’il vous plaît. Oh oui, j’entends déjà le crépitement que feront leurs cheveux gras en s’embrasant…
La sonnerie retentit alors, et les adolescents s’empressent de rejoindre les salles de cours où leurs professeurs nazillons leur enseignent la discipline et les extrapolations linéaires.

Je me promène dans les couloirs à présent déserts et j’en profite pour refaire l’inventaire : dans mon sac à dos, deux bouteilles de deux litres de napalm maison et trois plaquettes de 500 grammes de mastic artisanal, fabriqué à partir de balles de ping-pong et de peroxyde d’acétone ; dans le sac de sport préalablement placé dans un casier verrouillé, un jerrican de cinq litres d’essence et de napalm. Bien. La cible ? Là où il y aura le plus d’élèves bien sûr. Le réfectoire. A midi trente tapante.

Après avoir subtilisé la clef au vieil alcoolique qui occupe le poste de concierge, je me glisse discrètement à l’intérieur de la cantine pour y préparer mon massacre.
Tandis que je place l’explosif sous une table, j’imagine ce que diront les cons du journal de 20h. Ils feront sûrement allusion à des affaires soi-disant similaires. Ils essaieront de trouver les motivations du « déséquilibré mental auteur d’un épouvantable attentat à la bombe dans un lycée parisien ». Ils accuseront la violence à la télévision, les jeux vidéo, la société, l’école, le heavy métal, Al-Quaïda, les déceptions amoureuses, la Zone, la drogue … Mais la réalité est beaucoup plus simple. Tellement simple que même eux pourraient comprendre. Parfois, dans la vie, il arrive un moment où on prend conscience de sa situation, mais aussi de celle des autres, et on se rend compte qu’on est majoritairement entouré de cons qui la plupart du temps nous font royalement chier. C’est un peu comme qui dirait la cerise qui fait déborder le vase. On décide alors de reprendre les choses en main. Après, eh bien, chacun le fait à sa manière. La mienne prend la forme d’un gigantesque barbecue.

Midi. Tout est prêt. Les lycéens commencent à arriver pour manger la pourriture qui leur sert de repas de midi. Il ne manquait plus qu’eux.
La demi heure qui suit est la plus longue de ma vie. Mais je suis obligé de patienter, pour qu’il y ait plus de torches humaines, et parce que j'aime l'organisation. Midi trente, c'est midi trente, pas vingt ni trente-deux. Alors j’attends, et j’observe.
De ma table je peux apercevoir un gros. Je hais les gros. Ça fait pas de sport mais qu’est ce que ça bouffe. En plus, la plupart d’entre eux savent qu’ils sont énormes mais ils continuent à manger tout le temps. Je trouve ça gerbant. A le voir engloutir ses frites pleines de sauce, on pourrait croire que c’est son dernier repas. Ça l’est, certes, mais il n’est pas sensé le savoir. Ce gros con a juste besoin de montrer aux autres qu’il assume ce qu’il est. Gros. Et con.
C’est comme ces moches, mais vraiment moche, qui se bornent à mettre des minijupes et des décolletés plongeant (sur le vide bien souvent). Ça me donne envie de vomir puis de les frapper violemment au visage avec un objet de préférence très dur. Ou très pointu.

Et puis il y a tous les autres. Les cotoyer devient une habitude, mais lorsqu'on les observe d'un point de vue objectif, on se rend compte de ce qu'ils sont vraiment, tous sans exeption. Des branleurs, des imbéciles heureux, des sous-merdes. A force de vouloir être différent, ils finissent par tous se ressembler. Une caricature de caricature.

Il y a le gothique-romantique qui se croit « subversif » car il se plante des lames de rasoir dans les bras.
Il y a les petites putes suceuses de bites, plus maquillées que Miss France et plus lascives que les Pussycats Dolls.
Il y a aussi le rocker-poète au pantalon déchiré qui a la barbe qui commence à pousser, ce qui fait de lui l’objet de vénération de la bande de pseudo-hippies-fumer-de-joints qui le suit sans cesse.
Il y a ces putains de binoclard colés à leurs calculatrice.
Il y a les bougnoules Lacoste vendeur de shit.
Il y a les adolescents fluorescents, adorateurs de musique pop inaudible.
Il y a les fils à papa, bien propre sur eux, et certains d'avoir une vie bien rangée toute tracée.
Ca va être de toute beauté.

Le refectoire est bondé. Le désordre règne, et le vacarme est assourdissant. Ca sent un mélange de sueur, de parfums écoeurants et de légumes bouillis. Dans trente secondes, ça sentira le brûlé.
Je me lève. Personne ne semble me remarquer. Je sors le jerrican de mon sac. Je l'ouvre, et j'allume mon briquet. Je passe toujours inaperçu au milieu de ce ramassis de déchets vivants. Seul quelques uns d'entre eux semblent me voir, mais ils ne comprennent absolument pas ce qu'il se passe. Une élève de terminale assise face à moi me fixe, le regard éteint.

Je l'allume.

La jeune fille s’enflamme en un instant, illuminant le réfectoire d’une lueur effrayante. Une seconde plus tard, l’enfer se déchaîne. Le liquide répand une trainée de feu à travers la salle et les hurlements se mêlent au crépitement des flammes. Alors que la fumée commence à envahir l'espace, la première bombe explose, fauchant au passage plusieurs adolescents. La masse grouillante de lycéens s'écrase contre les portes de secours, que j'ai préalablement bloquées et par lesquelles ils tentent de fuir. Ils sont fait comme des rats. Un lycéen en flamme, qui était encore un caïd il y a quelques instants, pleure et appelle sa mère. Une grosse truie, qui s’empiffrait de crème au chocolat, fond littéralement ; sa graisse s'embrase en crépitant. La chaleur active la seconde charge explosive. Cela transforme encore un peu plus la cantine en champ de bataille. Le sol est couvert de cendres et l'air devient irréspirable. Ils hurlent encore plus fort. La plupart n'appelle plus à l'aide mais se contente de prier. Mais c'est inutile, car les prières n'arrête pas le feu. Rien ne peut stoper l'extermination de tous ces cons. Ils n’ont que ce qu’ils méritent.
L'odeur de viande grillée me donne la nausée, mais je reste au milieu du brasier pour pouvoir contempler mon oeuvre. Oh putain de Dieu que c'est beau ! Des tourbillons de flammes envellopent mes anciens camarades, les réduisant en petits tas de riens.

L'alarme incendie sonne au loin, mais on l'entend à peine. Elle semble provenir d'une autre dimension. Ici, c'est mon propre monde. Le chaos et la mort. Ca y est, je suis rock'n'roll, naturellement au dessus. Dylan, Eric, faites moi une place, j'arrive.