Il faut se suicider malin : faire chier les vivants

Le 26/05/2008
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par Mill
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Rubriques / Il faut se suicider malin
Suite de la rubrique à succès 'il faut se suicider malin'. Y aura définitivement que les boulets et les abrutis pour être choqués par ça, parce que sinon c'est de l'humour des années 60, bien conventionnel et assez rase-mottes. Les pointes agressives ne sont pas légion. Et contrairement aux autres épisodes, c'est pas du didacticiel, mais un mélange de considérations diverses et de digressions ennuyeuses dont on pourrait largement se passer.
[message de l'administrateur : cette page fait partie de la Zone (http://www.lazone.org), site à vocation humoristique. Le texte qui suit ainsi que les commentaires sont à interprêter comme de l'humour (ça parait évident au vu des méthodes de suicide fantaisistes décrites par l'auteur). Vous ne trouverez aucun conseil sérieux pour se suicider sur cette page. Si c'est ce que vous cherchiez, faites demi-tour. Si l'humour vous intéresse, vous êtes le bienvenu. Le texte comme le site est toutefois fortement déconseillé aux âmes sensibles, notre humour étant volontiers agressif et cynique.]
Devant le succès incontestable de notre rubrique « Il faut se suicider malin », le reste de l’équipe et moi-même avons décidé de poursuivre notre œuvre de bienfaisance. Pour que le suicide demeure un produit de qualité ludique et attractif, nous avons dégagé une série de conseils et suggestions rassemblés sous l’appellation de « règles d’or ». Avouez que ça en jette.

    Evidemment, il ne s’agit pas de reproduire ici même le listing des différentes méthodes selon leur degré d’efficacité. Pour cela, reportez-vous aux différents didacticiels disponibles sur la Zone ainsi qu’aux premiers épisodes de notre rubrique. Nous sommes conscients que nos lecteurs vraiment fidèles ne le restent jamais très longtemps, surtout s’ils appliquent à la lettre le moindre de nos sarcasmes, et nous nous en félicitons. En effet, notre programme fonctionne au poil et si de nouvelles modalités d’auto-abrègement de vie nous viennent à l’esprit, ne vous inquiétez pas, vous y aurez droit.
    Les règles d’or d’ « Il faut se suicider malin » comportent une dynamique commune qui consiste à causer des dommages concrets (de nature psychologique ou autre) à ceux que le langage courant ne nous laisse d’autre choix que de les appeler les « vivants ». J’en vois deux qui ricanent et je ne peux pas leur en vouloir. Je leur rappelle tout de même que j’ai les noms, les caméras de surveillance sont branchées et notre service de sécurité n’a pas dérouillé un seul gauchiste depuis le 6 février 1934. Pour dire s’ils ont envie de cogner.
    Au lieu de vous marrer connement, écoutez un peu, vous apprendrez peut-être quelque chose.
    Tout d’abord, il importe de saisir pleinement le concept de « vivantitude » dans toute sa complexité (à noter que le terme de « vivantitude » n’a rien du barbarisme. Il s’agit, au contraire, d’un mot savamment élaboré au sein de la rédaction en collaboration avec une éminente linguiste de centre-droit dont l’étiquette politique clairement revendiquée fit sourire plus d’un béotien lors des dernières présidentielles). Ainsi serez-vous étonnés d’apprendre, fientes incultes que vous êtes, que les « vivants » composent l’écrasante majorité de la population mondiale actuelle. A ce sujet, les statistiques sont formelles.
J’irai plus loin encore, et ça, c’est mon droit en tant que chroniqueur à succès, la plupart de ces personnes ignorent qu’elles sont vivantes. Elles subissent leur traintrain de fourmis besogneuses, ou, le cas échéant, leur pathétique existence ancrée dans le chômage et la dépression, et en arrivent ainsi à reléguer à l’arrière-plan de leur caboche vérolée le fait qu’elles respirent encore, que l’oxygène ainsi collecté n’a pas cessé de nettoyer leur système sanguin, lequel continue passablement d’alimenter leur cœur qui, par voie de conséquence, s’obstine à jouer du tamtam. C’est beau, la science.
Faire chier ces gens-là, voilà une mission d’ordre divin, mission qui nous incombe, certes, mais à laquelle je vous encourage à souscrire : malmenez-leur les cahouettes pour qu’elles se rappellent leur douteux statut d’êtres vivants. Asticotez-les sans relâche jusqu’à ce qu’elles vous hurlent, excédées : « Cessez de nous pourrir la vie-heu ! »
    Soyons clairs, toutefois : faire chier les vivants revient à s’opposer stupidement, aveuglément, béatement à l’ordre des choses. Or, s’opposer, c’est chic, glamour, hype. Je veux en être. Toi aussi, tu veux en être, parce que c’est tendance.
    De plus, en outre et par ailleurs, pourquoi devrions-nous supporter leur propagande incessante sur les bienfaits de la vie ? La vie, c’est nul. Tout le monde vit. C’est d’un banal ! Personnellement, ça me dépasse. Halte au prosélytisme bisounours ! La vie, c’est moche, c’est dur, c’est chiant, et vachement trop long sur la fin. Vous suivez, ou pas ? Nous nous appliquerons gentiment à leur faire prendre conscience du fait qu’ils sont en vie pour qu’ils s’aperçoivent (ou qu’ils se rappellent subitement, hein, sait-on jamais ?) que leur « élan vital » ne sert strictement à rien. Autant crever, non ?
    Ces gens-là méritent la mort. Je ne vois nulle autre échappatoire. Des vivants qui ne savent plus ce qu’ils sont… J’ai dans ma besace un autre terme pour les qualifier : des frustrés. Voilà ce qu’ils sont, une fois ramenés à leur plus simple expression. Ces pisse-mégots n’assument rien. Ils trouillent devant la mort, source incontestable de bonheur et de jovialité, se refusent à toute existence effective pour se cacher sournoisement derrière le miroir sans tain de leur paraître insipide, ce qui ne veut absolument rien dire, mais j’aime beaucoup alors je garde.
    Parce qu’ils rechignent à se changer eux-mêmes, parce qu’ils n’ont pas les couilles ne serait-ce que d’essayer et qu’ils LE SAVENT - ah, les salauds - leurs carcasses si rigoureusement similaires exhalent uniformément cette aigreur imprégnée d’agressivité qui vous prend aux naseaux lorsque vous vous retrouvez dans le métro aux heures de pointe. Face à de telles flatulences, une seule attitude nous semble ici appropriée : le mépris. Attention, pas n’importe lequel. Il convient de se montrer ostentatoire et belliciste, voire de mauvaise foi. Prenez exemple sur Glaüx. Lisez ses commentaires, admirez la verve, prenez une claque. Et surtout, surtout, tâchez de lui répondre qu’on rigole un peu.
    
    A en juger par vos regards vides et vos mines déconfites, vous n’avez toujours pas compris pourquoi il faut absolument faire chier les vivants. Je dois d’ailleurs m’efforcer de partir du postulat que vous êtes des crétins finis - et ce n’est pas un très gros effort, croyez-moi. Les vivants ne veulent pas mourir. Ca ne vous suffit pas, à vous ? Hé, les pouilleux du bulbe ! Tout le monde meurt. Faut vous y faire, bande d’idéalistes en carton-pâte. Il n’existe pire absurdité que celle qui consiste à convoiter la vie éternelle. Ce genre de rêves psychologiquement instables et politiquement louches vous mèneront droit dans le mur. Dire que c’est justement au nom de ces platitudes, lieux communs et lapalissades que l’on nous impose chaque jour que dieu ne fait pas car je suis athée un véritable diktat sur la santé, l’hygiène, la nutrition… Il faudrait ne plus fumer, s’arrêter de boire, bronzer à l’ombre et manger bio, enfiler des capotes pour se branler, des gants-latex avant de masser, des crèmes de protection, des masques de chirurgien, le tout à grand renfort d’assurances tout risque, ben oui, j’ai le sens des réalités, moi, m’sieur.
    Il vous en faut plus, n’est-ce pas ? Je ne vous ai pas convaincus. Mon instinct de présentateur-vedette d’une rubrique-phare de la Zone ne se trompe jamais : j’ai le lobe gauche de l’oreille droite qui me gratouille en dehors du dedans, et comme disait le paternel, si c’est pas un mauvais présage, je m’extirpe l’intestin grêle et j’en fais des guirlandes. J’ai omis de mentionner un détail qui remportera très certainement votre adhésion, indécis sudoripares de mes deux : il y a trop de vivants dans le monde. La surpopulation, ça n’évoque rien pour vous ? Y a rien qui résonne là-dedans ? Allo, la lune ? J’en fais trop ? Bon, d’accord, j’en fais trop, mais par pitié, cessez de pondre aux quatre vents vos quintaux de larves bêlantes et souillées, parce que, par le saint chibre de l’abbé Prévost, ON EST DEJA ASSEZ DE CONS ICI-BAS ET CA COMMENCE A SENTIR !
    C’est sûr, les enfants, c’est sympa. On peut les violer. On peut aussi les faire bosser comme des déportés pour pas un rond, les faire courir dans les champs de mines ou les embaucher comme soldats. Pratiques, pas chers, fiables, promis à un brillant avenir dans l’estomac d’un asticot. On peut aussi les tabasser à mort pour se délasser ou les échanger contre des invits au sein de la très VIP salle de rédaction d’Il faut se suicider malin. Nous sommes friands de petits plats.
    Malheureusement, certaines gens bien attentionnées n’hésitent pas à déshonorer la salutaire profession de parents indignes et s’efforcent d’élever leurs enfants avec la tendresse, l’amour et l’affection qui leur ont fait défaut. Ca donne une génération de décérébrés qui dépensent le pognon de papa en dansant la tektonik devant des jeux débiles et très chers, et confondent la Shoah avec une chanteuse de variété issue des entrailles de mon cul. Bref, les enfants, c’est des vivants, des futurs cons, des futurs vieux.
    Les vieux, ça aussi, y en a trop. On pourrait croire que, par définition, le vieux constitue une espèce en voie de disparition. Hélas, la réalité démontre que nos sociétés occidentales endurent actuellement une grave invasion de vieux. D’où la droite au pouvoir. Un vieux, ça vote à droite. Un jeune, ça ne vote pas. Ou alors, à droite. Parce qu’y a aussi les jeunes vieux. Un phénomène qui ne date pas d’hier et probablement amené à empirer par les temps qui courent si nous n’y mettons pas le holà.
    Excusez-moi une seconde, je crois que j’ai marché sur un truc flasque et mou. Une flaque de pus, peut-être… Ah, on me signifie qu’il s’agit d’Ingrid Bétancourt. Pardonnez-moi, Ingrid.
    Bon, j’en étais où ?
    Ah, oui. Les vivants. Pourquoi faut les faire chier… Non seulement ils ne veulent pas mourir, mais en plus ils veulent également vous empêcher de mourir. Ils appellent ça l’ALTRUISME. Je sais, on dirait un mot éreinté par Djamel Debouze. Quoi qu’il en soit, moi j’appelle ça une atteinte à la liberté individuelle. Le libre-arbitre, ça existe, et c’est pas moi qui le dit, mais Saint Thomas d’Aquin - à moins que je ne confonde avec Guillaume d’Occam ou Guy Roux, désolé, mais moi, sans mes fiches, j’ai du mal.
    Cette tyrannie du vivant, ce despotisme minable qu’exercent les vivants à l’encontre de … heu… nous se traduit au quotidien par des interdictions pures et simples que l’on masque hypocritement sous le sceau sacré de la PREVENTION. D’où la ceinture dans ma bagnole. Et si je tiens à traverser le pare-brise sans payer d’amende post-mortem, hein ? Cette glorieuse société de merde qui est la nôtre préfère nous envoyer calencher à Verdun plutôt que d’accorder l’extrême-onction à ses suicidés. Y a pas à tortiller du falzar pour poser son toffee, comme le disait si bien Tata Roberta, travelo notoire opérant rue Blondel : chacun sa chtouille et les microbes seront bien gardés. Ici même, là maintenant, « Il faut se suicider malin » s’engage solennellement, corps et âme, cul et chemise, bibop et loula, dans cette lutte brutale contre le système afin de défendre notre droit le plus fondamental en tant qu’être humains : crever. Nous nous montrerons féroces et sans concessions, impitoyables et sans pitié (je redonde beaucoup en ce moment) : pas de quartier et jusqu’à la mort.
    La vôtre, bien entendu.

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