Les aventures de Thrash Boy - 1er volet

Le 13/07/2008
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par Mill
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Thèmes / Obscur / Anticipation
Mill passe 80% de ce texte à décrire son personnage. Pire que ça, c'est une description uniquement physique : rien sur ses pensées ou son histoire, tout sur sa super coupe de cheveux. Je veux bien que le Trash Boy en question ait un look intéressant, mais on est pas à un défilé de mode. Heureusement, y a un deuxième épîsode qui arrive derrière. Espérons qu'il s'y passera quelque chose et que Mill nous décrira pas un réverbère ou un pigeon tout du long.
    Le jeune zonard à gueule de loup attendait patiemment au fond de sa ruelle hermétique. SA ruelle, ouais. Essaye un peu d'la lui piquer : tu t'y casseras les dents. Question de territoire. Hermétique? Aussi. Rien n'y rentre, rien n'en sort. Le genre de couloir de la mort où t'attends pas cent-sept ans avant qu'un bourreau de sixième zone vienne te caresser les organes internes à coups de 220. Si tu rentres là-dedans, mon gars, t'es mort. Y a pas d'aut' mot.
    Quant au loup du début, j'préfère éviter d'vous l'décrire comme qui dirait dans l'détail. Des fois qu'il s'reconnaîtrait. Il s'rait bien capable de v'nir me chercher, parce que balance, délateur, chivato, soplon! Disons juste une masse d'os, avec des muscles secs, une peau abîmée, comme désquamée par endroits. Nosferatu peut aller s'rhabiller, mec. Trop beau, trop clean, limite banal. Là, j'vous parle d'un phénomène, le chaînon manquant entre les punks not-so-dead et les personnages hagards d'un vieux Fulci mal torché : le regard visqueux, les yeux vairrons, deux dents noires et les autres pas alignées pour deux ronds, le nez quinze fois fracassé. Du coup, il en reste plus rien. Des cheveux filasses, décolorés à l'acide chlorydrique, taillés à la faux, une oreille à moitié arrachée, criblée de ferraille aux formes ésotériques. Le tout glissé dans des fringues t'imagines même pas qu'on ait l'idée d'les porter. Un morceau de jeans par-ci, qui tient avec des agraffes, du cuir, par petits bouts pas propres, et des boutons immondes récupérés Dieu sait où lors d'une guerre improbable. Et pour faire bonne mesure, tu m'éclabousses tout ça de sang, tu me le roules dans la poussière, la fange, la suie, l'huile de vidange. Malcolm Mc Laren serait capable d'apprécier. Sauf que ce clown tiendrait pas deux secondes en face d'un individu comme Thrash Boy.
    Il devisait sereinement en lui-même, une main occupée à tripoter une tête de nourrisson fraîchement arrachée le matin même, et s'apprêtait, sans le savoir, à repartir en chasse. Dans la famille des prédateurs, Thrash Boy n'avait rien à envier aux goules, vampires et autres garous de la Hammer. Avec son allure de keupon apocalyptique, il flanquait une trouille bleue à n'importe quelle personne sensée que happait son regard. Il se déplaçait avec la grâce inepte d'un cyborg rafistolé, semblait singer en permanence un dessin de Druillet et n'émettait jamais le moindre son. Une enveloppe vide, en quelque sorte, une coquille creuse. Jamais le moindre mot, jamais de cri. Jusqu'à ses organes qui semblaient soumis au même mutisme : pas de bruit de respiration, encore moins d'éternuements, de toux, de flatulences.
J'crois bien qu'c'est ça qui me foutait vraiment en panique : ce genre de type, tu l'entends pas arriver. Sa main te chope sans prévenir et te tire en arrière. Un geste brusque et rapide, d'une violence inouïe. T'en as qui crèvent direct. Coup du lapin et j'en passe. Les autres ne durent pas beaucoup plus longtemps. Thrash Boy les balance par terre, puis leur flanque ses Rangers entre les deux yeux : explosion du cartilage. En général, ceux qui en arrivent là ont tendance à se laisser quelque peu porter par les événements. De là à dire qu'ils tendent l'aut' joue...
Thrash Boy jeta le petit crâne entre deux poubelles éventrées, s'essuya vaguement sur la jambe de son futal, posa un pied devant l'autre. Il marqua un léger temps d'arrêt au bout de sa ruelle. Pas de sentinelle cette fois. Apparemment, la bande de la rue d'à côté avait compris le message de la dernière fois : ça ne servait à rien de le guetter. Plus insaisissable que Thrash Boy, y avait pas. Plus furtif, plus impitoyable, plus taré, pas possible. Et n'allez pas non plus imaginer que les caïds du coin étaient des tendres. Des tueurs, des violeurs, tout pareil que Thrash Boy. Sauf qu'ils bouffaient pas leurs victimes. Et capables de communiquer, au moins. Thrash Boy, lui, ne parlait pas, ne mouftait pas. Il vous massacrait en moins de deux, vous dévorait s'il avait faim, et vous laissait pourrir dans tous les cas. Pour lui, vous n'existiez pas, vous n'aviez aucun sens, aucune justification.
"Oh, merde, les mecs! On décanille. C'est Thrash Boy."
Il se mit à courir. Vite. En quelques secondes, il avait d'jà rattrapé le petit Tox, une espèce de nabot râblé, tout droit sorti d'une sitcom pour dégénérés. Un coup de coude bien fléchi assené sur l'omoplate, un craquement d'os... Le gars s'étale de tout son long, son menton claque, un filet de sang de chaque côté de la mâchoire. Thrash Boy lui saute sur la nuque. CRAC! Le bruit résonne jusqu'ici, hein, Lieutenant? L'autre pousse un râle et crève. Tant mieux pour lui : Thrash Boy a faim.
Mais si vous permettez, mon Lieutenant, je m'esquive...