Syrte

Le 20/02/2012
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par Kolokoltchiki
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Thèmes / Obscur / Autres
Ce cours texte s'appuie sur le thème du soldat/guerrier agonisant et qui ne sait plus trop où il se trouve, sentant sa fin venir. Ce pourrait tout aussi bien s'appeler "une aprèm' à la plage de Pleumeur-Bodou", pour peu que vous changiez le personnage en Hollandais à short, à bob Heineken et à sandales-chaussettes.
Le goût du sable et du sang dans la bouche. Quelque chose au travers de l'estomac. La souffrance, la vraie, celle des martyrs.
Il se traîne sur le sol aride. Le sang y forme une inquiétante trainée sombre. Mon sol. Mon sang.
Le peuple doit suivre son guide même dans la mort. Mais il sait que c'est terminé. Le peuple a rallié les rangs des rats. Toujours plus nombreux. À détruire ce que j'ai construit ces quarante dernières années. À ronger le pays, en prônant la révolution, la guerre civile. Un semblant de rire lui secoue les tripes. Il crache son sang sur le sol. Il méprise leur simple existence. Les infidèles, qui vivent dans l'ignorance. Ils mourront. Il le sait. Tout le monde meurt. Continuer à marcher. Vite. Insurgés. Ils n'auront rien. Rien de moi. Je ne leur donnerai rien. La fin est certaine. Une pluie de feu s'est abattue sur le convoi. Colère des hommes. Puis les rats sont sortis de terre, et ont attaqué de toute part. Courir et combattre. Il a aboyé des ordres. Les quelques hommes qu'il lui restait ont répondu à l'appel. Protégeant leur maître jusqu'aux derniers instants. Puis ils sont tombés, un à un, et il a fallu fuir. De la chair trouée qui fond. Des explosions. Il regarde le soleil, serrant toujours sa poitrine. Il doit être midi, peut être plus. Il est trop tard pour combattre. Il n'y a plus d'échappatoire possible. Les cris et les balles se rapprochent. Les rats. Les traîtres. Il ne reste plus beaucoup de temps. Mon sang, c'est leur sang, le sang du peuple. Sur mes mains, sur leurs mains. Quarante deux ans. Le silence. Se cacher.

Il a eu du mal à ramper. Il n'ira pas plus loin maintenant. Seul, contre tous. Comme toujours. Dans un trou. Obligé de me terrer dans un trou comme un animal. Il les hait. Ils se rapprochent, il peut l'entendre. Des fusillades au loin. Il tente de prendre son arme à sa ceinture, mais la douleur est insupportable. Je n'y arriverai pas. Sa jambe saigne aussi. Dos contre le béton, il attend. Il ne pense pas à son passé. Et l'avenir est écrit. Survivre. La seule préoccupation. J'ai mal. Seule pensée. Il fait sombre, et son sang continue à se répandre. Il attend, recroquevillé dans le tunnel. Ce qui est fait est fait. Il ferme les yeux, respire difficilement et pense au silence. Il arrive déjà à l'entendre. Ça finit là où ça a commencé. Cette pensée le réjouit. Aucun regret, aucun pardon. Le silence. Les rats sont là. Il le sent.

Houa hna !

« Il est ici. »


Le destin. Il n'attend pas. Au bout du tunnel. Il sait comment ça se termine. Ils n'auront rien.

Seul Allah me jugera.