Suicide (3)

Le 30/08/2012
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par Wilhelm
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Thèmes / Débile / Idiot
Troisième partie de ce feuilleton qui n'en finit plus de s'essouffler, si tant est qu'il avait eu de l'endurance un jour. On retrouve le narrateur un peu con, les clichés sexistes, les fautes de concordance des temps, les dialogues de comédie musicale / projet "la culture à portée de main" dans une cité défavorisée et toutes les joyeusetés qui en on fait le succès mérité lors des premiers épisodes. Je ne veux pas spoiler, hein, mais y'a même un final twist super pas bien amené à la fin. Et de nouveau cette horrible annonce qui me glace le sang : il y aurait une suite en cours d'écriture!
La nuit venue, je fus réveillé à plusieurs reprises par une étrange pulsation qui tambourinait dans ma tête. Ce n'était pas de la douleur, mais un sournois sentiment d'oppressions qui montait et redescendait successivement comme une vague. Verena dormait sur le côté à l'autre bout du lit, en me tournant le dos. Dans ces moments, j'avais l'impression qu'une paire d'yeux m'épiait depuis l'obscurité de la porte de la chambre entrouverte. Lorsque je me levai pour aller intercepter la chose qui m'observait, un bruit de pas étouffé se faisait entendre dans les escaliers, comme pour fuir à mon approche. On aurait dit le galop d'un cheval. Au loin, il me semblait entendre de temps en temps une femme folle qui hurlait mon nom, en parcourant les rues de quartiers lointains, dansant au rythme des battements de mon cœur. Sa voix me rappelait celle de ma mère. J'attribuai ces phénomènes à mon imagination encore sous le choc de l'incident sans m'inquiéter davantage.
Je me suis réveillé dès l'aurore du jour suivant. Tout se déroula comme d'habitude. Je tirai Verena du lit qui ronflait encore pour qu'elle s'affaire aux tâches ménagères que lui imposait son sexe. Quant à moi, je me suis isolé afin de fumer quelques cigarettes dans la véranda avant de me préparer pour aller chez le médecin. J'ai indiqué quel repas ma femme devait me préparer pour midi, puis je suis sorti pour assister au rendez-vous fixé à dix-heures. Le cabinet du docteur était situé dans mon lotissement, à quelques pâtés de maison et je m'y rendis à pied.
Le temps était morne et triste, et le ciel menaçait de pleuvoir à tout moment. Des bourrasques de vent fouettaient mon visage; et parfois je frappais du pied dans un caillou, le faisait ricocher sur la chaussée, dans l'un de ces désespoir de vivre, qui vous noie, on ne sait pourquoi, d'une profonde détresse menant à une nouvelle envie de suicide. Je passai devant mon ancienne maison, celle où ma mère s'est donné la mort. Des herbes folles ont envahie le jardin, et du lierre tapisse désormais le sol, et grimpe sur les murs comme le ferait une infection. Le manoir avait déjà à l'époque une allure triste. Il est maintenant vide et délabré, et se dresse à mes yeux telle la cicatrice d'un passé à jamais révolu. Pourtant, j'aperçois une lueur à la fenêtre de mon ancienne chambre. Un squatter s'y est peut-être introduit. À la fin, j’ai pensé que ce n’était qu'un reflet venu de l'extérieur.
Je continuai mon chemin, et arrivai un quart d'heure plus tard à la salle d'attente du cabinet. C'était une pièce carrée, exigüe et sans fenêtres. Les murs blancs renvoyaient la lueur crue des néons, imprégnant le lieu d'une atmosphère froide et médicale typique aux hôpitaux. Il y régnait une fugitive odeur de maladie mêlée de putréfaction. Quelques misérables personnes âgées aux mains déformées par l'arthrite étaient assises sur des bancs. Debout, une femme au corps opulent s'appuyait face à moi, le dos au mur. J’ai pensé qu’il s’agissait sûrement encore d’une fille ne parvenant plus à poser son cul sur une chaise à cause de son anus déchiré et ruisselant de sperme qui s'est retourné comme un gant au terme de multiples sodomies. Je me suis assis sur un banc inoccupé situé le plus loin de ces viandes humaines qui me dégoûtaient.
J'attendis pendant quelques minutes, l'air grave, m'assoupissant peu à peu tout en fixant le sol, comme le ferait un condamné à mort qui attend l'heure de son exécution. Soudain, la porte d'entrée s'ouvrit d'une rapidité surnaturelle, et un nouveau patient se faufila dans la salle, tout en flottant. Il se dirigea vers moi, fulgurant tel la foudre. Lorsque son corps me toucha, je perçus comme un choc électrique et l'individu s'évapora comme par enchantement. Au même instant, je sursautai comme une personne endormie se réveillant d'un mauvais cauchemar. L’une des vieilles femmes à côté s'inquiéta de ma réaction et me demanda si j'allais bien. J'étais apparemment le seul à avoir été témoin de la venue de cette personne. Mon hallucination fut si fugace que j'ai à peine eu le temps d'entrevoir la chose qui a fondu sur moi. Je pourrais simplement affirmer que la taille de l'homme avoisinait les deux mètres. Il était en outre vêtu d'un vieux caban poussiéreux, et son visage sévère était noyé sous une imposante barbe noire. Je n'ai jamais vécu ce type d'expérience auparavant. Effrayé, je tâchais de ne plus m'endormir et m'occupai en tirant un livre de ma poche.
Quand je fus seul, et après un temps incroyablement long, le dernier patient sortit enfin et le docteur vint me chercher. C'était un homme qui avait dans la quarantaine, le crâne chauve et muni de lunettes épaisses. Il avait la réputation d'être souriant et toujours affectueux avec ses malades. Il me serra amicalement la main, comme le ferait un camarade de régiment. J’avais l’intention de mentir afin qu’il ne sache pas la vérité. Je voulais que toute cette mascarade cesse au plus vite.
Je pris place sur le siège face à son bureau, et il prit la parole:
« Il va falloir que j’examine votre blessure. Laissez-moi y jeter un petit coup d’œil. Comment est-ce arrivé ?
-J’ai été pris dans une fusillade entre deux feux au beau milieu de la rue. La balle a ricoché sur mon crâne.
-En effet, c’est un bien fâcheux incident. Dans ce cas vous auriez du être immédiatement transféré aux urgences. Quoi qu’il en soit, n’ayez crainte. Je vais regarder et pouvoir en décider si une hospitalisation doit s’avérer nécessaire.»
Il avança sa main vers mon front et déplia délicatement mes bandages qui retombaient sur mes joues. Il pointa une espèce de petite lampe à halo sur mes plaies, puis avança quelques outils tranchants en métal sur ma blessure.
« -Si vous avez mal, contentez-vous de lever la main.
-D’accord, mais dites-moi, docteur, c’est grave ?
-Pas de panique. Il n’y a rien de bien méchant. En réalité, j’ai simplement quelques vérifications à faire. »
Il tritura quelques instant dans les anfractuosités causées par l’impact de la balle, balayant la surface osseuse de mon crâne avec je ne sais quelle sonde ou instrument médical. Ses manipulations chatouillaient mon cerveau fébrile. J’étais assez perturbé à l’idée qu’il soit en train de trifouiller à la façon d’un parasite biologique dans ma tête. Je fermai les yeux quelques secondes, et tentai de vider mon esprit. Tout à coup, il rejeta les bandages sur ma tête, et je m’apaisai peu à peu.
« C’est parfait monsieur Gunther. Il n’y a vraiment rien de cassé. Vous serez remis sur pied d’ici quelques jours, tout au plus.
-Je vous remercie, je commence déjà à me sentir mieux à présent. »
J’allai me lever, mais quelque chose dans l’attitude du médecin me glaça soudainement. Son comportement avait changé. Maintenant, il m’observait d’un regard accusateur, ayant l’air de lire dans mes pensées et de me mettre à nu. Je rougis, et je me résolus alors à tout lui raconter.
« Je suis confus, bredouillai-je. Je n’ai pas osé vous avouer que j’ai en fait tenté de mettre fin à mes jours en me tirant une balle dans la tête.
-Je le savais dès la minute où vous êtes entrés ici. Non, ce n’est pas ça que je veux vous entendre dire. Vous avez une chose bien plus importante à m’avouer. »
Nous demeurâmes muets quelques instants. Il sépara chacune de ses syllabes d’un ton incisif et calculateur. Je réfléchis un long moment. Je ne savais absolument pas de quoi il pouvait parler. J’étais pétrifié sur place. Il rompit le silence le premier. Ses paroles m’anéantirent alors complètement.
«Dommage, a-t’il soupiré. Vous nous avez joué la comédie pendant des décennies. Je connais votre secret le plus intime. Si vous vous êtes suicidé, c’est pour une seule et bonne raison qui remonte à votre puberté. Ce que vous avez fait de votre corps à cette époque a alors eu des effets destructeurs sur votre santé physique, puis mentale.»
Chacun de ces mots firent l’effet d’autant de coups de stylets assenés sur mon bas-ventre. Je ne pouvais imaginer un seul instant qu’il ait pu deviner le fait que je me suis volontairement abîmé les organes génitaux lors de ma jeunesse. C’était impensable car je n’avais confié ce fait à personne. J’ai d’ailleurs toujours refusé d’avouer ce fait à moi-même. Pourtant, par un raisonnement diabolique qui m’était totalement incompréhensible, il le savait désormais.
«Si vous êtes plongés dans la plus noire des dépressions depuis tant d’années, c’est à cause de ce que vous avez fait de votre sexe. Votre pudeur excessive vous a forcé à refouler vos fantasmes en vous mutilant. C’est de votre faute si vous en êtes là aujourd’hui. Regardez un peu de quoi vous avez l’air maintenant. Regardez-vous dans la glace. Il va falloir que je répare les dégâts à présent, et il n’existe pas trente-six solutions.
-Comment avez-vous-su ? Murmurai-je, le souffle coupé.»
Il ne semblait plus m’entendre. D’un geste vif, il descendit mon pantalon, puis mon caleçon. Je voulus me débattre, mais mes membres étaient comme paralysés. Il posa la main sur mes bourses, puis trancha lestement à l'aide d'une lancette mon testicule droit qui s'était nécrosé avec le temps, m'arrachant un cri de douleur. Une hémorragie se déclara, et de petits jets de sang ayant la spontanéité d'une éjaculation maculèrent mon ventre, mes bras et ma poitrine. J'assistais impuissant à ma propre émasculation. Le docteur agrippa ensuite mon pénis, puis entreprit de retrousser mon prépuce. Il constata que j'étais affecté d'un phimosis acquis. Cependant, il continua toujours de tirer, jusqu'à ce que ma verge se déchire par l'urètre. Épouvanté, je fermai les yeux. Du sang me giclait jusqu'à la tête. Mon corps en était arrosé, et baignait dans un mélange rougeâtre de pus. À l'aide du même instrument, il racla en surface mon organe sexuel en lambeaux, nettoyant tous les morceaux de chairs qu'il jeta à terre. En ouvrant les yeux, je vis un gros point sombre cerclé de sang, d'un diamètre comparable à celui d'une pièce de deux euros. Il occupait désormais l'endroit où aurait dû se trouver mon pénis. J'en avais le vertige. Ma vision s'est progressivement effacée autour de ce cercle qui agissait comme un trou noir, aspirant la lumière, les couleurs et la chaleur. Tout devenait de plus en plus flou autour de moi. Il s'agrandissait peu à peu, jusqu'au point de m'avaler. Après qu’il ait englobé le médecin, le bureau, puis mon propre corps, je me suis retrouvé dans un vide immense, comme flottant entre deux nuages. Il n'y avait plus rien. C'était le néant. Ce fut pourtant le premier sentiment de délassement que j'eus ressenti depuis bien longtemps.