Selfist - A mon image #TDM2015

Le 19/06/2015
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par Lourdes Phalanges
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Thèmes / Semaines Textes De Merde / Semaine 'textes de merde' 08
Lourdes Phalanges nous offre un #TDM2015 que personnellement je ne trouve pas spécialement pourri. Il me fait un peu penser à une séquence du b2ok1 de Chuck Palahniuk 'FIGHTCLUB' qui aurait été réécrite par Kafka, ou d'une scène du film de David Fincher tiré de ce livre dont le script aurait été retouché par David Lynch, sauf que Edward Norton et Brad Pitt seraient tous les deux interprétés John Malkovich. #JeSuisCharlieKaufman et spéciale dédicace à Lourdes Phalanges qui n'aime pas les sous-références sous-cinématographiques. Du coup, ce texte est tiré de quel film déjà ?
- «Et donc c’est une pute ?»

- «Une flute mon capitaine, une flute !»

(Rires du public)

J’éteins la télé. La boite à images. La médiocrité. La doxa. La doxa médiocre mise en images. C’est pas la finance mondialisée le problème, ni même nos élites corrompues, ni même la société du spectacle. Non. Le véritable problème c’est...
...

Je poste le texte tel quel, ils se démerderont. C’est cryptique, obscur. A mon image. Ils en ont pas des masses des monologues inspirés sur l’état de l’Etat, et les tas du Monde pyramidal. J’écris ça avec ma chair et mes chaines se défont. Ecrire c’est briser ses chaines au final. Ecrire, C’est Livrer Tout Ce Qu’on A En Dedans. Ecrire, c’est faire rouler le poids de l’Existence entre ses Doigts. Je prends un selfie. D’abord mental : je cadre, vérifie la luminosité. Et je prends mon cellulaire et je selfise. Tchouik qu’il fait le téléphone et je poste sur les réseaux sociaux. J’attends. Ca like rapidement. Je suis content. Je vais faire des pâtes. Un haïku me viens. Je le tape sur l’appli bloc note, à côté d’une foultitude d’intro de textes. Je prends un selfie. Tchouik. Je poste. Les pâtes sont cuites. Je les mange. Je vais me coucher. Seul. La solitude me pèse comme le rocher de Sisyphe. Je m’endors. Seul.

Un éclair strident se fait entendre dans le ciel étoilé de cette nuit d’été. Je me réveille. Un peu moins seul, la moiteur nocturne me tient compagnie. Je prends un selfie. Tchouik. Quand soudain un étrange personnage fait son apparition dans ma chambre à coucher plongée dans le noir de jais nocturne. Il se déplace vers moi. Seul. Et tint à peu près ce langage :

Je suis l’assiette de pâtes de Stéphane.

La panique me prend, mon sang ne fait qu’un tour, je suis frappé d’effroi, mon coeur bat la chamade, mes cheveux se hérissèrent.

J’eu une peur bleue.

Quand soudain, une autre forme opaque et fantomatique surgit de l’obscurité et dit d’une voix indescriptible à la fois rauque et bienveillante :

Je suis l’assiette vide et sale de Stéphane.

L’indicible. L’inconnu. Les mots me manquent pour faire part de mes sentiments immédiats. Ma gorge se noue comme se nouerait la corde du pendu autour de son cou bien trop fragile. L’indicible.

L’inconnu.

L’un connu ====> Moi

Eux ===> L'inconnu

Soudainement, une troisième voix, presque semblable aux deux précédentes, brise le silence de la nuit comme se briserait un souvenir heureux sur le mur de l’oubli.

Je suis le visage embrumé de Stéphane quand il se réveille.

En me rendormant, je m’évanouis.
Le lendemain, je devine la rosée fraiche mais ne peux la gouter. Les 3 êtres de cette nuit sont toujours là et me fixent. Ils me ressemblent. Ce sont mes sosies. Des copies de moi-même. Je me lève et je les bousculent. Je regarde le miroir qui me renvoi mon reflet. A moins que ce ne soit l’inverse. Je me sens faible, malade, nauséeux. Comme si une force mystérieuse me vidait de mon énergie. Je prends un selfie. Tchouik. Je m’affaiblis un peu plus.

Je suis le visage faible, malade, nauséeux de Stéphane.

Je suis maudit.

Mots dits.

Maux dit.

Tchouik

Je suis le burger à 18 euros du food-truck tenu par des traders au chômage.

Tchouik

Je suis l’ex de Stéphane qui veux montrer la bague hors de prix offerte par ce dernier à tous ses amis virtuels
Vie-rituelle, rituel de vie, où les frontières floues font transparaître l'incapacité de vivre.

Tchouik

Je suis ce pays étranger que je ne verrais jamais qu’à travers l’objectif de mon GSM

Stéphane s’affaiblissait un peu plus à chaque selfie. Il devenait livide, transparent, diaphane.

Ses sosies-selfies l’envahissaient. Selfsies. Tchouik

Je suis cet acteur de seconde zone dont Stéphane était fan ado et qui maintenant bosse au MacDo

Tchouik

Stephane se disait qu’il allait se réveiller, que c’était un rêve, un rêve dans un univers parallèle : un univers parallèle dans lequel les rêves sont en fait la réalité. Une réalité virtuelle. A moins que ça ne soit l’inverse. Stéphane était perdu. J’étais perdu. QuiestilQuisuisje ? Les selfies de mon selfie sur les réseaux répandus, éparpillés, disponibles à autant d’exemplaires qu’il y a de smartphone sur cette planète. Les plus likés étaient les plus puissants.

Tchouik

Peu à peu, plus personne ne su qui était le Stéphane originel. Mais qui s’en souciait ?

Tchouik...

Je poste le texte tel quel, ils se démerderont. C’est cryptique, obscur. A mon image.