Le Déconte de Noël : Deux boules, une guirlande, dans une étroite cheminée.

Le 23/12/2016
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par Lourdes Phalanges
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Dossiers / Contes de fées
Quand on s'y attend le moins, Lourdes Phalanges déboule, pète ta porte à grands coups de hache, t'attrape par le cou, t'éclate la tronche deux trois fois sur ta table avant de te raconter une belle histoire tout en te faisant bouffer un à un les feuillets du bouquin. Petit conte de Noël ou de Hanukkah ou de la Sainte Surconsommation si c'est ta religion, toi, ami du lectorat. Originellement, Lourdes Phalanges voulait lancer une initiative de calendrier de l'avent mais il est très bon pour la laïcité zonarde que très peu d'entre nous l'aient suivi dans son putch. Aussi sa contribution se voit-elle classée dans le dossier "Contes de fées" officiellement exhumé et réouvert pendant toute la trêve des confiseurs si vous êtes d'humeur à écrire et poster des contes bien débiles sur la Zone. Cette année, la tendance sera punkoïde trash à paillettes.
Il était une fois dans une réalité tangible, un homme. Le Dernier plus précisément. Il avait Tout, Tout ce que certaines personnes avaient pu désirer pour lui. Mais le Dernier Homme n’était toujours pas heureux. Le soir de Noël, quand d’autres se gavent de mets et de présents imposés, le Dernier Homme se rendit en Laponie, emprunta le traineau d’un vieillard saoul et assoupi, maigre comme une brindille, croulant sous un tas de lettres jaunies. Puis, il s’envola dans la nuit enneigée.



D’une longue et solide guirlande rouge sang, le Dernier Homme façonna un lasso et entreprit d’attraper toute la chienlit de ce monde : riches pauvres mort-vivant à crédit, pauvres riches équarrissant les traditions à coups d'abstractions, banquiers punk et inversement, les intellectuels poules-pondeuses de concepts tout contents que la révolution qu’ils appellent de leurs voeux ne pénètre pas leur salon; putes pudiques, puritains obsédés, enculés mal-embouchés; les demi-mous, les moyens, les «houla, c’est trop compliqué pour moi», les inconséquents défenseurs de cause, les traitres sur qui ont peut compter, les primo-poètes maudits renâclant les rimes asséchées du nihilisme monothéiste et autres mousseux divers du Spectacle Mondialisé : Ils étaient tous là, se tenant la main et s'élevant dans les airs, tractés par le traineau. Passé la stratosphère, ils prirent feu et le Dernier Homme gagna le cosmos, suivie de la plus fabuleuse guirlande de filsdeputerie jamais créée.

Mais le Dernier Homme n’était toujours pas heureux. Calciner le Mal n’avait pas fait régner le Bien pour autant, d’autres mauvaises herbes pousseraient en remplacement, et les arracher, encore et encore, n'y changerait rien malheureusement.

Il abandonna sa planète, toujours suivie de sa flamboyante et agonisante guirlande, parcourant le cosmos à la recherche d’un nouveau foyer. Il essaya de s’installer ici et là, mais le Dernier Homme n’était toujours pas heureux pour autant. Il passa des dizaines de Noëls seuls, avec pour seul compagnon le silence de l’univers.

Par une nuit enneigée, Le Dernier Homme se posa sur une morne planète abandonnée. La tempête soufflait et il trouva refuge dans une modeste maison. Il fouilla les placards et dégota un manteau rouge mité, beaucoup trop grand pour lui. Il l’enfila afin de ne pas mourir de froid, puis monta à l’étage et quelle ne fut pas sa surprise quand il découvrit une montagne d’enveloppes et de lettres, poussiéreuses et rongées par le temps. Il brûla le tout et entreprit de cultiver son jardin.

Un beau matin ensoleillé, on frappa à la porte. N’en croyant pas ses oreilles, Le Dernier Homme s’approcha lentement de l'entrée. Il tourna la poignée et devant ses yeux ébahis, apparu une femme immensément belle, à la chevelure étincelante, aux yeux bleue comme mille océans, et aux seins massifs comme les rochers de Sisyphe. L’Homme sourit car il était heureux.

Ils se marièrent et vécurent heureux, repeuplant la planète de leur seul Amour. Jusqu’au jour où la Femme mourut. l’Homme en fut très attristé, se bâfrant à n’en plus finir et découpant des bûches pour alimenter sa cheminée. Les Fils et les Filles de l’Homme s’inquiétèrent, envoyant une foultitude de lettres aux vieil homme bedonnant. Ce dernier fut si touché, que la nuit venue, il s’envola sur son traineau pour tous les remercier. L’occasion pour lui de voir à quel point la chienlit avait vite repoussée.

Cette nuit là, l’Homme en rouge mourut à son tour mais tous les enfants qui avaient su être sages se réveillèrent avec un seul et même cadeau : un lasso façonné dans une longue et solide guirlande rouge sang.

MORALITE

Si Morale il y a
Tu la connais déjà
Arme toi
De patience
Mais également de ces nouveaux fusils à pompe Armalite AR-10




Fin