George Michael

Le 04/01/2017
-
par Mill
-
Rubriques / Le cri de la chtouille
Finalement, on était plutôt content qu'il la ferme; le Mill. Finalement, la Zone était en vacances de Mill et C'ETAIT BIEN ! Le bavard le plus lourdingue de la Zone nous revient avec un Cri de la Chtouille déjà lu dans une radio locale et c'est, ma foi, c'est frais, c'est doux, c'est chiant, c'est du Mill, paraît qu'y en a qui aiment. Pour écouter la douce voix de l'énergumène : https://soundcloud.com/user-862514891/le-cri-de-la-chtouille-decembre-2016-george-michael
Décidément, les scénaristes de Walking Dead sont vraiment des salauds. Ils ont même tué George Michael. George Michael, dont le nom de famille est un prénom, ce qui pourrait signifier qu'il appartenait à la race des serial killers, comme Guy Georges, par exemple, ou Emile Louis, ou encore Jean-Thierry Mathurin (là ça en fait carrément trois, c'est la classe absolue, hein, chapeau bas, je m'incline, bravo Jean-Thierry), ou enfin cette vieille crapule d'Herbert Léonard, qui contribua, en son temps, au grand massacre de la chanson populaire française des années quatre-vingt, en collaboration discrète mais effective avec à peu près tout le monde à l'époque, mais je tiens toutefois à citer le nom de Didier Barbelivien qui, lui, n'est toujours pas mort et je ne m'en réjouis pas.
    
    George Michael a donc passé l'arme à gauche et c'est une nouvelle qui me laisse pantois. Il va de soi, tu t'en doutes, cher auditeur, que la disparition de l'artiste ne m'apporte aucune espèce de satisfaction, et ce parce qu'elle survient beaucoup trop tard. Mourir aujourd'hui, très cher George Michael, ne rime à rien, puisque le mal est fait depuis quarante ans, mes oreilles ont déjà été souillées des milliers de fois par Wake me up, Faith ou je ne sais quelle roucoulade lancinante et sucrée, donc, j'avoue, je suis un peu déçu. J'aurais tant aimé ressentir, une fois de plus, cette joie immense et délectable qui m'avait envahi à la mort de Lemmy. Ce jour-là, je m'étais dit : « Ha ! Vous voyez bien qu'il est pas immortel, bande de cons ! » On peut qualifier cette réaction de mesquine, je dis pas, mais je ne vais tout de même pas me cacher, bordel de cul : la mort de Lemmy a prouvé à tous les grands rockers que l'esprit rock ne soutient pas la chair, que la boisson ne conserve pas plus que le formol, et qu'on va tous mourir un jour, avec ou sans guitare saturée, je hais les légendes qui imposent des canons, des lignes de conduites et de sordides auto-justifications, merci Lemmy, c'était un bon concert, maintenant ta gueule et place aux jeunes.

    J'aurais aimé également savourer la mort de George Michael avec la même sérénité qu'à l'annonce de celle de Bowie : même les icônes meurent. Les « gueules » de l'histoire du rock, celles qui traversaient la culture pop, et par là-même toute la culture moderne issue des années soixante. Bowie avait la stature d'un Lennon ou d'un Morrison - bon, disons toutes proportions gardées - et il est quand même mort. Tout le monde y passe, les gars, c'est cool. Il n'y a rien de plus démocratique que la mort.

    J'aurais aimé également m'en foutre à peu près autant que de celles de, je sais pas moi, Michel Delpech ou Cruyff. Et en toute honnêteté, j'en suis pas très loin.
    Mais j'y arrive pas. Pas totalement.

    Attention, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : George Michael, l'artiste, je m'en cogne mais alors sévère. Musique insipide, paroles ineptes, des mélodies franchement nazes, parfois volées à d'autres, bref : pour moi, George Michael, en tant que membre éminent de la grande communauté des musiciens de cette planète n'évoque qu'un bof suprême et dédaigneux, même si je me dois de reconnaître, et ce sans réserve d'aucune sorte, que l'enfoiré chantait divinement bien, avec cette voix merveilleuse, puissante, inspirée. Après tout, on peut chanter très bien de la merde très nulle.

    Il va de soi que toutes mes affirmations se veulent absolument subjectives et qu'elles expriment une opinion qui ne regarde que moi. Je n'essaie de convaincre personne, je partage juste un point de vue.

    George Michael est mort, étouffé, peut-être par un poil pubien, allez savoir, c'est en tout cas ce que semblent sous-entendre la plupart des pseudo-biographes du dimanche qui se fendent de courts articles sur le net, ici ou là, puisqu'ils en sont encore à évoquer une vie affective tumultueuse, une sexualité débridée, et tout ce qui leur passe par la tête pourvu que ça enflamme l'imaginaire des cons que nous sommes, pardon, que vous êtes, et pourvu que ça tape en-dessous de la ceinture puisque, comme chacun le sait aujourd'hui, George Michael couchait volontiers avec des mecs, ce qui faisait de lui une tapette, une folle, un pédé, une tante, un inverti, un sodomite et j'en passe.

    Ah foutu monde de merde. J'aurais aimé me réjouir franchement de la mort d'un artiste qui me faisait chier depuis tout petit parce que je détestais sa musique à peu près autant que celle de Sabrina, de Bros, de A-ha ou de je ne sais quels sombres héros du top 50, toutes des musiques de merde, aseptisées, formatées, des sous-Michael Jackson, dont, par ailleurs, je vomis l'oeuvre à peu près autant que celle de Prince - enfin, pas tout Prince, y a vraiment des trucs complètement barrés chez Prince - ou je ne sais quel autre connard à qui il vous arrive d'attribuer du talent, voire du génie, juste parce que vous avez tiré un coup en écoutant sa musique en plastique à l'âge de quinze ou seize ans, franchement comme critères esthétiques on fait mieux.

    J'aurais aimé me fendre d'un magistral éclat de rire mais comme ce salaud était de la jaquette, je n'ai pas le droit. Et ça me gonfle ! « Ouais tu dis ça parce que t'es homophobe. » Non, je dis ça parce que je n'aime pas sa musique, je n'ai jamais aimé sa musique et je n'aimerai jamais sa musique parce que ce n'est pas de la musique au sens où moi je définis la musique, à savoir une création originale qui ne rappelle pas trente-six mille trucs entendus trente-six mille fois à des époques différentes, et que l'on peut écouter en fermant les yeux et sans se dire que le clip est vraiment trop cool. Je rappelle que le clip est l'ennemi numéro un de la musique. De fait, méfiez-vous des bons clips. L'image vous détourne du son, que vous le vouliez ou non.

    Et pourtant, bordel de merde, j'aimais bien George Michael, l'homme.
Evidemment, il ne me manquera pas parce qu'il n'était ni mon ami, ni un membre oublié de ma famille à rallonge, ni un hamster et j'aime beaucoup les hamsters, ni un grand homme de lettres dont les incessantes lectures m'auraient marqué à vie, je pense par exemple à Borges, Stephen King ou François Cavanna, mes trois auteurs préférés, mais voilà, George Michael, contrairement à Bowie, ou même à Leonard Cohen, que j'ai toujours admiré, eh ben, George Michael, vraiment, ça s'explique pas, je l'aimais bien. Alors je sais pas trop pourquoi, hein, peut-être parce qu'il ressemblait à l'idée qu'on pouvait se faire d'un grand frère à la fois beau et cool, et pourtant assez humble dans sa façon d'envisager le gloire, la renommée, la richesse, peut-être parce qu'il avait été - du moins à mes yeux - un homosexuel discret avant de devenir un défenseur de la cause, deux positions apparemment contradictoires mais qui méritent autant de respect l'une que l'autre, peut-être parce que le morceau Freedom, dont j'aimerais tout de même souligner qu'il ressemble tout de même beaucoup à Sympathy for the devil des Rolling Stones, m'avait plu parce qu'il évoquait très justement ce qu'il était censé représenter, c'est-à-dire un appel déchirant à la liberté et à la tolérance, peut-être parce qu'il s'est engagé contre la guerre en Irak, ou peut-être aussi parce qu'il n'a pas essayé de tirer le moindre profit de son incroyable collaboration avec les membres survivants du groupe Queen.

    En résumé, la mort de George Michael, au fond, je m'en fous, mais elle vient conclure une année de merde comme on n'en avait pas connu depuis un bon moment. Et peut-être même qu'elle annonce une année bien pire. Moi, sincèrement, 2017, je passe. J'ai pas envie d'aller voter. Entre la peste, le choléra, Ebola et diverses maladies infectieuses, ça donne pas envie d'aller fourrer dans l'urne. A gauche, y a que des cons. A droite, c'est pareil mais en pire. Pour arbitrer le tout, une fasciste notoire qui veut faire croire à tout le monde que le fait qu'elle soit une femme ne contredit aucunement son discours passéiste.

    Et pis quoi encore, on va encore passer l'année à pleurer des artistes à la con, des sportifs débiles et Dieu sait quels blaireaux dont le cœur ne manquera pas de cesser de battre parce qu'il faut bien qu'on meure à un moment ? Non parce que ça, ça commence à me saouler aussi. Et ça pleure sur les réseaux sociaux, et ça crie au génie, et ça balance des platitudes du genre « c'est toujours les meilleurs qui partent les premiers », et ça sait jamais fermer sa gueule quand il faut... En fait, excusez-moi hein, je sais que je me répète un petit peu, mais vous êtes des cons, voilà. Pas raisonnables pour deux ronds, toujours prêts à croire à croire n'importe quelle connerie pourvu qu'elle provienne d'un site dit « d'information libre », toujours prêt à partir en guerre pour une vétille. Il y a deux mois, un de mes contacts Facebook critiquait lourdement un texte d'humour noir qui s'appliquait à taquiner gentiment l'angoisse des méridionaux face à la pluie et aux intempéries. Et ce contact Facebook disait, dans un commentaire assassin : « On déconne pas avec les intempéries. »

    Mon dieu, effectivement, si on commence à s'étriper en évoquant la pluie et le beau temps, c'est que, ben, soit ça va vraiment très mal au sein de notre espèce de singes à poils ras, soit on a un grave problème de QI négatif à régler. De fait, peut-être que notre espèce est en danger justement à cause de ce grave problème de QI. C'est peut-être une idée à creuser, ça...

    Je ne vous souhaiterai donc pas la nouvelle année mais ça n'a rien de personnel. Je préfère m'en tenir à une position réaliste et vous souhaiter en conséquence « bon courage, tenez-bon, essayez d'atteindre 2018, même si, a priori, les chances pour que la situation s'améliore semblent s'amenuiser à mesure que le temps passe ».

    Et pis je vais vous dire un truc : je crois que moi non plus je ne suis pas raisonnable. Je regarde Walking Dead, cette série pour masochistes qui parvient à nous faire accepter que la mort nous guette et qu'il n'est pas d'issue possible. Je garde ouvert mon compte Facebook alors que mon fil d'actualité m'apporte chaque jour la preuve renouvelée que l'être humain n'est qu'une poche vide qui se nourrit des autres pour chier sa bile véreuse, ses hontes, ses mensonges et ses jugements de cons. Et parfois même je continue de croire qu'il existe de belles âmes, des rêves et des espoirs. Des rêves et des espoirs de quoi, j'en sais rien, mais j'arrive encore à m'illusionner. Et pourtant, je picole plus, j'ai arrêté la drogue et je crois pas en Dieu.

    Bon, j'arrête là. J'ai pas de conclusion, pas de coda, pas de blague de fin. Mais j'ai quand même envie de vous rappeler que, selon le calendrier musulman, nous sommes actuellement en 1438 de l'hégire et que la nouvelle année tombera le 22 septembre. Selon le calendrier Nanakshahi, celui des Sikhs, l'année débute le 14 mars, et le 1er mars pour les Francs-maçons. L'Eglise orthodoxe considère que l'année ne commence que le 1er septembre, et pourquoi pas, soyons fous, alors que les Indiens lui préfèrent le 22 mars, date à laquelle le single Please Please Me, des Beatles, devient numéro un en Grande-Bretagne, mais ça n'a probablement rien à voir. Pour les Ethiopiens, l'année commence le 11 septembre, ce qui intéressera évidemment les conspirationnistes chevronnés, alors que le calendrier berbère place le jour de l'an au 14 janvier, mais les Berbères le fêtent trois jours à l'avance, ce qui n'arrange rien. En terme de complexité, je vous invite évidemment à vous plonger dans les calculs ésotériques qu'implique le calendrier hébraïque. Franchement j'ai rien pigé et pourtant je lis du Umberto Eco d'une main et je me branle de l'autre, c'est dire si je suis malin.

    Tu m'as compris. Le nouvel an, je lui pisse au cul. Si t'as besoin d'un prétexte pour boire et faire la fête, t'as qu'à enterrer ton cerveau. Merci, bonsoir.