La loi du Talion - La grenouille et les 3 frères (1)

Le 12/02/2017
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par Cuddle
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Rubriques / La loi du Talion
Contrairement à ce que laisserait penser le titre du 1er volet : Il n'y a ni trace de Didier Bourdon, pas plus que de Bernard Campan, ni même Pascal Légitimus dans ce texte. Œil pour Œil, dent pour dent, carac pour carac, PV pour PV... la loi du Talion revue à la sauce RPG fanatsy par Cuddle qui entame un second feuilleton de genre en parallèle de Les Sept. Toujours très bien écrit et immersif mais à la différence de la première télénovela onirico-médiévale, celle-ci semble s'inscrire dans une trame plus linéaire. Cela dit c'est peut-être une fausse impression, il faudrait attendre avec impatience la suite pour se faire une idée à ce sujet. Très clairement, l'admin grande prêtresse Britneyspearesque lance un sort 50+1D100/2 sur la ligne éditoriale et annonce clairement son intention de mener une OPA sur la Zone. Attendons-nous donc à un grand remplacement prochain des zonards par des nerds adeptes de Warhammer sur plateau, GN et également des concours de cosplay. Je suis aussi résigné que Michel Onfray dans son livre "Décadence" livré avec une prescription de Prozac : une civilisation zonarde sur le point de disparaître et une nouvelle sur le point d'éclore ? Après tout quelle différence tant que ça reste bien écrit et inspiré. Je me fais gâteux, je me répète mais cette année la Zone aura un Stand au ComicCon 2017. Quoi qu'il en soit : la suite ! la suite ! la suite !
-    On va se faire disputer ! Maman ne veut pas qu’on joue dehors quand il pleut.
-    Furtout qu’elle dit qu’on falit tout après.
-    Ça va Gabriel, fais pas ton bébé ! Et pis Martel tu la boucles parce que moi je la veux cette grenouille !
Martel sauta à pieds joints dans une flaque d’eau et éclaboussa ses petits frères en éclatant de rire. Le vent se leva brusquement et fit chanter les roseaux près du lac. Ils se trouvaient au sein de vastes collines au centre desquelles le fameux lac abritait de nombreuses espèces végétales et animales. Le soleil avait été voilé par une succession de nuages gris et une pluie fine s’abattit sur eux lorsqu’ils aperçurent au loin des cavaliers arpenter un sentier jusqu’à leur maison de campagne. Celsius était préoccupé par ses grenouilles et il continua ses recherches d’explorateur sans se soucier de la venue de ces étrangers. Gabriel retourna lui aussi à ses occupations et se mit à son tour à sauter de flaque en flaque sous les protestations de Celsius qui voyait ses précieuses grenouilles prendre la fuite au fond du lac. Et alors que les deux frères se disputaient bêtement, Martel, l’aîné, ne pouvait détacher son regard des soldats en armures de plates complètes dont les heaumes à tête de crapaud étaient ornés de plumes bouffantes, caractéristique principale des armées des anges de sang. Les armoiries de la famille Shayatan, représentant un bouc ailé, voletaient au grès du vent au dessus de la petite troupe.

Leur mère sortit brusquement de la maison et sembla furieuse de leur présence importune. Certains cavaliers descendirent de cheval alors qu’une poignée se détacha du groupe pour se diriger dans leur direction. Instinctivement, Martel se mit devant son frère comme pour le protéger. De par son jeune âge, Gabriel ne comprenait pas pourquoi ces hommes venaient chez eux armés alors que derrière lui, Celsius poussa un cri de victoire :
-    Je l’ai eu cette rosse !
Durant une fraction de seconde, le temps sembla se figer. Sans comprendre, il vit l’un des soldats abattre son fléau sur le corps de sa mère qui s’écrasa brutalement sur le sol sous la puissance du choc. Avec une fureur terrible, le soldat répéta son geste jusqu’à-ce que les cris s’estompent et disparaissent enfin. Gabriel resta immobile, choqué par la scène qui venait de se dérouler, mais ce ne fut pas le cas de Celsius qui, les yeux ronds, lâcha sa grenouille et prit ses jambes à son coup. Un des soldats le vit détaler comme un lapin, il sortit son arbalète avec une rapidité déconcertante et décocha un carreau qui alla se loger dans les omoplates de Celsius. Le corps de l’enfant s’affaissa dans les roseaux dans un bruit étouffé. Il était mort sur le coup. Plein de rage, Martel chercha à se battre avec ses ravisseurs sous les rires moqueurs des soldats qui l’entouraient. Gabriel se mit à pleurer et un des hommes pointa son pantalon mouillé en riant à gorge déployée. Ils s’emparèrent alors de Martel et le traînèrent vers le lac avec difficulté.
-    Fuis Gabriel…fuis…Marmonna-t-il le visage tuméfié.
Mais ce dernier était tétanisé. Il ne pouvait se détourner des soldats qui assénaient des coups de poings à son frère. Les mains gantées de fer et d’acier s’acharnaient à briser les os pour mieux le maitriser et une fois que la résistance fut moindre, ils s’employèrent à le noyer dans le lac en chantant une curieuse chanson.

Des bruits de sabots retentirent derrière lui et lorsqu’il releva la tête, il croisa les yeux glacials de son père qui annonçaient une vengeance insatiable. Verchiel descendit de son cheval, sortit sa francisque et d’un revers de main trancha la gorge du premier des quatre soldats. Le sang coula à gros bouillon d’une plaie béante et l’homme s’écroula à genoux dans un dernier râle d’agonie. Le père enjamba le cadavre et continua sa folie meurtrière. Les autres soldats avaient dégainé leur arme et se tenaient prêt à parer. Équipé de son épée lourde, Verchiel fendit le fer avec le premier de ses adversaires, il évita une attaque mortelle et d’un coup puissant lui trancha le torse de long en large. Le coup avait été si violent que le plastron s’était enfoncé dans sa cage thoracique. Le troisième soldat chargea sur lui, les deux bras en l’air prêt à le pourfendre de son épée mais le père fut plus rapide. Il s’écarta sur le côté, passa derrière lui et lorsque l’homme se releva, lui trancha net la tête. Le heaume à tête de crapaud alla rouler dans les roseaux dans une giclée sanglante sous le regard horrifié du dernier soldat. Ce dernier lâcha son arme et détala à toute allure à travers la vallée. Le regard perçant de Verchiel se posa sur lui, sa respiration se fit plus rauque, son cœur s’accéléra.

Sans aucune prise sur lui-même, la mutation se mit en marche. Les os se brisèrent, ses membres s’allongèrent brusquement, il tomba à quatre pattes et son dos se courba pour mieux courir. Il tourna son visage de bête hirsute en direction de sa proie, projeta ses membres postérieurs en avant et se mit en chasse sous le regard ahuri de Gabriel. La créature qui était son père rattrapa sa proie et bondit sur elle avec une agilité déconcertante. Il lacéra le dos de sa victime d’un geste vif et arracha d’un coup de mâchoire la jugulaire dans une gerbe de chair et de sang. Et alors que le charognard dévorait sa victime, Gabriel regarda alors ses mains et se demanda si lui aussi, il pouvait se transformer en monstre.