Le courrier des lecteurs - Un des nombreux syndromes de P.K.Dick

Le 04/03/2017
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par Lapinchien, Clacker
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Rubriques / Le courrier des lecteurs
A cette lecture je reste sans voix. Ébahie par les propos de Clacker, ça y est, je rentre en transe. Je deviens comme les fans de Justin Bieber et je me mets à crier très fort tellement je suis excitée. Je saute sur mon lit et rebondit encore et encore en me laissant porter par les paroles du gourou qui a avalé sa sœur. Comme une overdose de menstruation, tout gicle sur le pavé dans une remontée acide, je chuchote à ton oreille schizophrène "Laisse-là sortir, elle veut prendre forme". Mais je m'égare, on retiendra donc qu'il y a pas mal de névrosé sur ce site et ça me rassure.
@Clacker

Ave Grand Tacatac,
Ô toi le poète qui dépeins un si subtil univers mandevillien dans La Ruche, ton bestiaire y est si bien torché que tu laisses Buffon et LaFontaine à la traîne, à des millions d'années lumières de ton éclat infini. Tes intrigues y sont si bien ciselées qu'à la lecture de chaque feuilleton, de nombreux scénaristes de télénovela brésiliens font des burn out à la chaîne, certains même écoutent en boucle du Barry Manilow depuis. Les Muses te gangbanguent, l'Inspiration t'irradie. C'est un constat. Alors comme je n'ai pas spécialement envie de te poser la question écueil dont tout le monde connait à l'avance la réponse, à savoir d'où viennent tes influences, d'où tires-tu ta puissance créatrice et le souffle dévastateur de ton storytelling unique, je préfère te proposer un petit défi littéraire : Si la Zone était l'Olympe moderne, pourrais-tu, en un paragraphe ou deux et en prenant quelques zonards actifs et historiques pour en faire les avortons des Dieux grecs anciens, improviser une petite scène avec des rires enregistrés dépeignant l'administration de nos contemporains par des déités consanguines dégénérées aux attributions nouvelles. Vas-y fais nous rêver ! Je me touche le kiki d'avance. Merci.
@ Lapinchien

Vous commencez par me définir comme un tacatac. Voilà qui est rude d'entrée de jeu, me voilà ravalé à la simple image de deux boules qui s'entrechoquent, comme ce jouet éphémère à la mode des années 70, merci Wikipedia, merci monsieur Lapinchien. Au moins, j'en touche une pour faire bouger l'autre, c'est déjà une petite victoire. Mais vous restez infiniment mesquin, puisque vous n'êtes pas sans savoir que cette comparaison me plonge directement dans les affres de ma psychée troublée. Ne faites pas l'innocent, vous saviez que la sexualité et l'identité de genre sont les problématiques centrales de mes plus grandes névroses, et de certaines psychoses à l'occasion. Vous vouliez poser le doigt dessus, et remuer le couteau dans la plèvre. Je vais vous dire, lorsque j'étais encore dans le ventre de ma mère, le corps médical fut incapable de localiser mon chibre à l'échographe, en cela mes parents pensaient hériter d'une mignone petite fille brune comme le diable qu'ils auraient volontier appelé Claquette. Ils se réjouissaient d'avance de pouvoir m'expliquer le fonctionnement du cycle menstruel et le krav maga pour latter les harceleurs de rue à coups de savates et la pilule qui rend cardiaque et le chantage affectif. J'aurais pu devenir maîtresse d'école et nymphomane, et faire des photocopies de mes tétons en salle des professeurs. J'aurais pu être lesbienne et jouer du ciseau autrement qu'avec mes collages d'hybrides humains-animaux. J'aurais fait du cheval et connu l'orgasme avant le premier petit-ami. J'aurais fait exprès de me trémousser en slibard dans le salon familial devant les amis de mon père. Mais non, en fait j'avais un kiki qu'on n'avait pas vu. J'avais même plus qu'un kiki. J'avais une soeur jumelle, que les médecins ont très certainement vue, mais qu'ils ont "oublié" de mentionner à ma mère. La vérité c'est que j'ai avalé cette petite madame, cette moitié de moi-même. Je l'ai vampirisé. Voilà pourquoi ils n'ont rien dit. Pour ne pas stresser la génitrice, j'imagine, avant qu'elle mette bas un petit veau attribué d'une modeste barre de navigation. Il m'arrive de l'entendre pleurer dans certaines cavités de mon inconscient, cette dame. Elle pleure tellement fort qu'il pleut sur mon corps, croyez-le ou non. Ca somatise de partout, je ne peux plus me raser et contempler mon visage glabre sans m'imaginer gonflé d'oestrogènes et même il m'arrive, tenez-vous bien, d'avoir mes règles. Ne me demandez pas comment, je n'ai pas eu le courage d'aller consulter. Elle me sort par le corps, cette soeurette, elle en saigne encore, et ce n'est pas faute de lui avoir demandé conseil. Quand elle ne pleure pas, elle fait la tête. Je crois qu'elle m'en veut, définitivement, de l'avoir mangée. Et moi je lui en veux de ne pas s'être donné la peine de me manger. A quel poucentage fait-elle partie de moi ? A-t-elle son mot à dire sur mon mode de vie, controle-t-elle en partie mes pensées et mes actions ? Je ne saurais le dire. Mais j'espère très sincèrement alléger sa souffrance en la positionnant comme figure récurrente de mes textes, en me vivant à travers ses yeux, et en la décrivant aussi subtilement que je pourrais me décrire. Ce ne sont pas les muses qui me gangbanguent, ni l'inspiration, ce sont les différentes facettes d'un fantôme.
Heureusement, peut-être, avec le recul, qu'elle n'est pas de ce monde. Nous aurions vécu l'amour le plus trangressif qui soit face aux règles les plus fondamentales de l'humanité. Alors, peut-être ai-je matière à relever le défi que vous me lancez ? La consanguinité est un sujet qui ne me quitte pas.
Mais tout cela vous le savez déjà, cher Lapinchien.

Votre obligé,
Clacker