Le feu purifie #SAINT-CON 2017

Le 14/04/2017
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par Lourdes Phalanges
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Thèmes / Saint-Con / 2017
Dans ce récit rondement mené, LP nous gratifie de son point de vue sur le Con de la St-Con, autrement dit, lui. Et effectivement, la tendance de cette année est bien de se cramer soit même, soit les autres (observation vérifiée et validée par notre LC national). Quoi qu'il en soit, dans ce texte bien écrit, que j'ai trouvé parfois poétique, LP nous narre de manière philosophique les procédés de la crémation (je corrige un peu mon propos de peur de SPOIL le lecteur). Un texte prometteur qui pourrait remporter quelques votes, donc conseil d'admin, si vous croisez LP dans les couloirs, vous le poussez pour avoir une chance de gagner.
Il y a toujours plus con que soi, c’est la phrase qu’on répète et qu’on se répète pour ne pas complètement sombrer, mais à vrai dire, quand on décide d’ausculter réellement l’humain, à l’instar de... allez... pouf pouf : Nietzsche, Jünger, ou n’importe quel autre allemand capable de manier aussi bien une plume qu’un fusil - l’allemand de base en somme - on se rend bien compte que le seul con que l’on connaisse, c’est soi même.
Je ne reviendrai pas sur les millénaires de philosophie qui ont fait notre grandeur et que les larves égratignent chaque années dans leurs copies de bac, mais connais-toi toi même et tu verras que le con véritable, c’est toi. Le seul qui te mente vraiment, qui t’aime, puis te déteste, le seul qui narre chichement une histoire sans rebondissements, cette petite voix qu’on appelle conscience, faute de mieux. Le seul qui tapine, concède, meugle et recommence, incessamment. Le lâche, qui accuse. Le seul responsable de sa connerie, palpable, celle que l’on tient entre ses mains tous les jours et qu’on étale partout autour de soi. Créateur et créature à la fois.

Rien d’inéluctable, cependant. Passez cet état de fait que seul l’effort physique intense - sexe, guerre, sport, même si le premier ne vaut pas la deuxième, et la deuxième s’apparente plus de nos jours au troisième : le sacrifice pour une cause plus grande que ses couillasses et sa gamelle ayant été remplacé par les intérêts économiques de vieux pétomanes sans gonades et trop nourris - semble annihiler, et vous laisserez place à la toute puissance pragmatique de la Nature. Qui dort dine, qui court pine, et ce, pour mieux mourir.

Brûler de la graisse, en stocker, respecter les cycles, sans griffonner entre temps que les Hommes sont, Ô Mon Dieu, cruels et lâches quand tout va bien et juste cruels quand tout va mal.

Voilà pourquoi, après avoir tenté en vain de brûler tout ce qui me passait sous la main, livresquement j’entends, je décidais de réduire en cendre le seul con valable à mes yeux : moi. D’abord, mon Moi, non pas à doses excessives de drogues récréatives en tout genre, car cette fuite en avant n’est là que pour mieux nous faire rechuter dans la cage dorée de la conscience de sous-singe façon je t’aime moi non plus. Non, il convenait d’éliminer mon Ego, de penser contre moi, d’enfin devenir ce que je suis vraiment : un mammifère à haut potentiel, seulement limité par les lois physiques, les seules valables, entre nous.
Ensuite, le Surmoi : le confort bourgeois et la domestication ont engendré le psychologisme et mis fin au règne du Beau, du Vrai et du Bien au profit du mensonge généralisé, du législatisme et de l’infantilisation.
Enfin, le Ça, plaisir humide du totalitarisme mou du psychologisme susnommé. Les rêves ne devraient être là que pour entrevoir le Valhalla, pas pour faire reluire tes problèmes de quéquettes.

Méthode de combustion : épuisement de la chair, des muscles et des articulations, mise en branle sismique du système nerveux via une activité physique intense. J’ai bien évidemment commencé par le plus immédiat, le plus instinctif, et au demeurant le plus utile aux chasseurs cueilleurs d’il y a quelques millénaires : la course à pied. Puteputepute, épargne moi ton «running», tes vidéo de motivation et ton marketing d’«héros du quotidien», je table sur du définitif : courir jusqu’à l’épuisement, m’écrouler sous un chêne increvable plutôt qu’aux pieds d’un collègue de bureau.

Mais tel un sculpteur devant sa motte de glaise, je restais insatisfait, et le con ultime que j’étais demeurait entier et souriant. J’ai commencé à avoir meilleur teint, l’activité sportive aidant à oxygéner mes cellules. J’avais «le feu sacré !» s’écria même un con toujours moins con que moi : crédit, branlette et sucre raffiné.

Il convenait donc de napalmer tout ça. Boxe, MMA, musculation : je fracassais autrui, tordais les cervicales, m’arrachais la peau sur des tatamis crasseux. En vélo sur la voie rapide, à frôler les poids lourds,
et quand on me parlait de culture, je ne dégainais plus, je tranchais simplement : clef de bras, de genoux, étranglement sanguin entre deux verres de vins. L’escalade aussi, qui aurait dû m’inspirer d’autres allitérations malignes, tir à l’arc, à la carabine, puis Glock, Remington, Zastava...

Le sexe, bien entendu, en évitant le cliché du découenneur en série - plutôt artisan, plutôt boucher de campagne, avec le tablier tâché et le sourire charmant. Une belle blonde, d’abord introvertie, puis pleinement explorée.

Par faute de temps, je passe mon tour concernant la guerre. Pas que je sois contre, c’est même, à mon humble avis de con racé, une catharsis à peu de frais, un formidable outil de cohésion et d’homogénéisation, ainsi qu’une source d’inspiration infinie pour tout ce qui touche aux valeurs séculaires. Sans oublier une opportunité commerciale de belle envergure. Et on voit du pays. D’abord celui des autres, puis le sien, quand la chose devient civile, ce qui, blague à part, amplifie largement les éléments précédents. Et donne raison à un autre allemand. Et à un autrichien. Mais c’est presque pareil.

Ensuite : Les travaux manuels. Abattre des arbres la nuit, construire une porte, une poutre, puis tout ce qu’il a autour, seul dans une clairière reculée : poncer, tailler, poncer à nouveau, sans oublier le trou bien profond, pour les plus curieux.

Mais le con que j’étais devenait endurant.

N’être plus que mouvement, ne plus entretenir le monologue intérieur. J’avais brûler le gras, le mou, à l’intérieur, mais toujours ce risque, de libérer le con. Sculpter le corps, il restera l’esprit.

Laisser les autre cons, ces cons à moitié, pas assez con pour m’égaler, trop comme ci ou comme ça, mais jamais aussi con que moi. Rien ne sert de pourrir, il faut périr à point. Vous voyez, je recommence...

Historiquement, la chimie du feu était basée sur le triangle du feu. Au début des années 1980, une quatrième partie, connue sous le nom de radicaux libres, fut identifiée. Aujourd’hui, il est bien connu que la chimie du feu est basée sur le tétraèdre du feu, qui consiste en oxygène, carburant, chaleur et les radicaux libres sans lesquels aucune combustion avec flammes n'est possible. On passe donc de la trinité aux quatre saisons, aux cycles, à l’éternel recommencement.

Je fus méthodique. La maîtrise du feu est importante dans l'évolution humaine. C'est l'une des premières preuves de notre humanité. En effet, l'homme est le seul animal qui a non seulement domestiqué le feu, mais qui a aussi été capable de le reproduire à volonté.

Le meilleur combustible ? L’hydrogène ? Tentant car dur à éteindre mais trop compliqué à transporter et trop cher. Ce sera donc la bonne vieille énergie fossile.
Pour le comburant, ce fut plus aisé : cette chère oxygène, qui fait qu’un incendie est à portée de main à chaque instant.
Concernant l’énergie d’activation : Etincelles, flammes, briquet, silex ? Trop convenu. Voir la blonde se retourner sur le lit me donna cependant une idée.

Je pensais d’abord m’immoler dans la cabane mais pour d’évidentes raisons dramaturgiques, j’optais finalement pour le haut d’une colline, en pleine nuit.

J’escaladais, accompagné de la blonde, dernière victime de ma connerie, transportant tout le nécessaire à une belle crémation. Arrivés à destination, nous nous déshabillèrent avant de nous asperger d’essence. Mue par une musculature imposante et une volonté qui l’était tout autant, la friction de mon sexe à l’intérieur de son con produisit assez d’énergie pour entrainer la combustion.

Difficile de vous décrire les sensations, c’est une expérience. Je pourrais vous parler longuement de l’odeur, de l’aspect charbonneux, de la peau qui glisse sur l’os, mais c’est à vivre, assurément. C’est un Point de Non-Retour qu’on finit par accepter. C’est peut être ça, les fameux radicaux libres, le lâcher prise.
Aux environs de 400 000 ans, avec l'apparition des premiers foyers aménagés, se développe vraisemblablement autour du feu une vie sociale plus organisée. Le feu a été un formidable moteur d'hominisation. Il éclaire et prolonge le jour aux dépens de la nuit ; il a permis à l'homme de pénétrer dans les cavernes. Il réchauffe et allonge l'été aux dépens de l'hiver ; il a permis à l'homme d'envahir les zones tempérées froides de la planète. Il permet de cuire la nourriture et, en conséquence, de faire reculer les parasitoses. Il améliore la fabrication des outils en permettant de durcir au feu la pointe des épieux. Mais c'est surtout un facteur de convivialité.
Je me consumais et m’aperçus alors, non sans surprise, que d’autres cons avaient suivi mon exemple, des points enflammés apparaissant ici et là autour de moi, sur toute la surface du globe : dans les villes, les forêts; sur les plages, les marais.

Il existe 4 classes de feux :

- Classe A, s’il s’agit d’un combustible solide ex. : bois, papier, tissu, …

- Classe B, s’il s’agit d’un combustible liquide ex. : alcool, essence, éther, huiles, …

- Classe C, s’il s’agit d’un combustible gazeux ex. : acétylène, propane, méthane, ...

- Classe D, s’il s’agit de combustibles spéciaux ex. : sodium, potassium, phosphore, ...

Celui ci était de classe mondiale.

Cela devait être beau, cette boule de feu, qui tournait autour d’une autre boule de feu, dans le silence de l’espace. Un tour complet sur elle-même en 24 heures, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, provoquant l’alternance des jours et des nuits. Tous ces cons qui flambaient, cet éternel recommencement.