En psychiatrie

Le 16/12/2017
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par HaiKulysse
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Thèmes / Obscur / Fantastique
HaiKulysse a remporté la grande bataille visant à cutupiser la Zone à la gloire de Burroughs. Les zonards se sont volatilisés, le site désert est en cendres et le Tératauteur danse nu du sommet de sa colline en scandant sa prose aléatoire en signe de chant de victoire. Voici le premier des trois textes célébrant la défaite de la coalition zonarde. Lorsque vous le lirez vous allez vous prendre sans nul doute 3 ou 4 points de folie. Ce n'est pas bien grave, il contient un psychiatre embedded. La littérature underground est bien faite in fine. Fin d'un cycle, le programme passe en mode essorage des consciences.
Ça se passe aujourd’hui, avec un verre à la main, une Dunhill dans l’autre, la musique des orages embryonnaires en arrière fond.
D’une voix brisée, grave ou neutre, ou avec une tonalité froide, ou méticuleuse, je devais raconter le réel de l'homme en me servant de mes souvenirs.
J'ai échoué.
L’île où le goulag repose, semble cependant ouverte, à présent. On avait été invité par le docteur David Livingstone, un ami d’enfance…
C’était un bon psychiatre, accueillant les nouveaux venus sur la terre ferme de son île, au large de Bandol.
On s'était dit que les portes de l’Ile où nous devions accoster ne devaient plus jamais se refermer… Quelle erreur !
On s’était retrouvé tous prisonniers de l’île du Psychiatre, c'était arrivé comme ça, comme une histoire…
Ses hommes avaient arrêté le chant des fontaines.
Il ne restait plus que la falaise… et quelques mots griffonnés à la hâte sur le carnet du Docteur sans y croire vraiment :
"On m'a ouvert le ventre au chapitre des entrailles ; on m'a sommé de rester là, à errer de miroir en miroir, on m'a dit : tout ça ne t'appartient plus."
C'est donc ici même que les ombres des défunts réapparaissent, un endroit semblable à l'enfer où tous ces vagabonds forment une foule courroucée, en laissant les souffrances à ceux qui ont tant souffert.

Le Psychiatre nous avait dit tout ça sans gêne ni désarroi comme une incantation poétique que seul un esprit morbide aurait pu concevoir. Et nous dansions, raides après le shit et les packs de bière ; dans les yeux des rêves toujours vrillés, des tortures et de nouveaux sens.
Notre petite nature de princesse au petit pois renaclait parfois et parfois aussi, très tard dans la nuit, on voyait d''insatiables danseuses poursuivre de leur humeur factieuse l'ombre imprécise du matin ; le matin on n'écrivait jamais de poèmes sombres.
On attendait la nuit pour libérer les hyènes.

Sur l'île du Psychiatre, brûlé à l’éther l’ensemble de mes œuvres flasques avait été remplacé en parodies de romans noirs, ce qui ne valait pas la peine.

Il restait encore un texte hors piste : Marseille-Cassis. Une longue marche sur la route comme si on était fier de descendre de la génération de Jack Kerouac, comme si on prétendait encore qu'on pouvait écrire sur la route.

Donc j'étais resté là, immobile devant le feu de joie, j'avais compris que j'atteignais enfin le frisson, l'ombre d'une révélation ; des bouteilles de vodka vides jonchaient le sol, j'avais peur de heurter une borne invisible du cosmos, un quasar glacial, un entonnoir immonde, peut-être la fin de toutes mes heures d'ennui.

A lui seul, ce feu de joie, cet autodafé aux couleurs de cobalt, laissait dans les âmes un insurmontable testament sur l'autel où les larmes de mes proches coulaient religieusement.

Initiateurs d’hypnose comme des moutons grégaires, ici naquit de nos unions, l’enfant artificiel dans le silence astral ; il vécut, ici, sous les nappes de sables.
Les Great loosers de la galaxie ont gémis avant de repartir, vagabonder le long des berges du Rhône.
Et se plonger à nouveau dans une contemplation subliminale : par exemple, un coquelicot abîmé par le temps.
Quand Cody est rentré au petit jour du continent, crasseux, vaincu par une démocratie infantile, j'étais en train d'arroser les géraniums.
Tous deux, nous utilisions la même guimbarde pour accueillir les touristes en goguettes.

J'ai dit à Cody que j'allais dénicher sous les nappes de sables un puits et j'ai ajouté que la légende de l'Eldorado était au fond (j'en étais convaincu) "à condition d'en payer le prix !"

L'autre jour, j'étais à la recherche du shaker du druide, je traînais dans le quartier de l’homme-au-singe, comme par exemple, cette Rue des Orphelins aux doux regards d’ivoires où je passe mon temps à raconter ce qu’il y avait avant sa désagrégation.
Jusqu’à ce que la neige en poudre dilue les caractères des mots.

Je file alors le long de ces chemins illusoires et gagne le seuil de la maison, le bercail.


Encore sonné par cette singulière victoire, au 12 Rue du Corps Qui exulte
J'ai écris un Haïku à ma mère jusqu'à ce que les rêves estompent les funérailles de Johnny !