La philosophie de mes couilles

Le 21/04/2018
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par Blaireau
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Thèmes / Saint-Con / 2018
Blaireau débarque pour philosopher entre une allitérations et un grattage de burnes sur l'opposition apparemment irrémédiable entre deux de nos auteurs les plus fondamentaux : Montaigne et Daniel Balavoine. Lequel des deux périra dans les flammes ? Message complémentaire de l'auteur : "Quel site de gros nazes. Je me frotte les couilles sur vos tronches."
J'ai la peau des roupignoles qui pèle et pas qu'un peu. De jolies petites squames diaphanes s'en détachent et s'accumulent dans mon slip ou mon pyjama; quand je me déshabille, elles s'envolent, légères comme l'air, et je me retrouve au milieu de ce petit nuage, à communier avec la peau morte de mes couilles. Parfois, j'élève au ciel mes bras graciles, j'ose un rond de jambe; enhardi, j'esquisse un entrechat; alors, je danse, je danse langoureusement avec ces miettes putrescentes de moi-même. Danse avec ses squames: voilà au moins qui n'aura pas engendré une génération de Kevin.

Philosopher, c'est apprendre à mourir, nous assène Montaigne. Mais la vie ne m'apprend rien, rétorque Daniel Balavoine, qui voulait juste choisir un train et s'égara pourtant dans un hélicoptère. Il faut donc philosopher pour s'arrêter de vivre, mais d'abord s'arrêter de vivre pour philosopher. Et les gens se débrouillent tout de même pour mourir: comment s'y prennent-ils ? Soit les gens sont très forts, soit Montaigne est très con, soit c'est Balavoine (ça m'arrangerait que ce soit Montaigne, Balavoine ayant déjà bien cramé). Puisqu'en outre c'est une question de vie ou de mort, somme toute d'un intérêt général pour l'humanité, souffrez que je m'attarde à résoudre ce problème. Alors, les gens seraient-ils très forts ? Pour être vraie, cette proposition doit s'appliquer sans exception à tous les éléments de l'ensemble gens qui se trouvent avoir vécu, comme Myrto, la jeune Tarentine (un vaisseau la portait aux bords de Camarine), ou comme Albert Einstein, fortiche dans son genre, mais aussi comme Montaigne et Balavoine eux-mêmes, qui ne peuvent avoir raison en même temps, et d'autant moins s'ils sont très forts. C'est donc l'un ou l'autre, les Essais ou l'Aziza. Or, la vie ne m'apprend rien : l'homme qui énonce cette proposition n'affirme-t-il pas au minimum avoir appris cela, que la vie ne lui apprend rien ? Non, car il pourrait l'avoir toujours su, dès avant sa naissance: voyez Platon et la réminiscence. En revanche, s'il fallait philosopher pour apprendre à mourir, n'y aurait-il vraiment jamais eu le moindre petit malin pour s'abstenir de philosopher et accéder à la vie éternelle ? Nous vivons dans ce monde où des trésors d'ingéniosité retorse sont déployés pour frauder le fisc, dépouiller son prochain, gagner une place dans la file à la caisse et, cependant, nul ne serait encore parvenu à gruger l'infâme philosophie ? On ne me le fera jamais croire, et c'est entendu : Montaigne est un con.

Mais, me demanderez-vous, imbéciles bafouillant d'inanes récriminations, quel est le rapport entre ces deux paragraphes ? C'est dans le titre, couillons.

J'ai de moins en moins de peau sur les burnes, mais j'ai une vieille cheminée en pierre du seizième siècle, contemporaine de Montaigne et qui tire toujours très bien. Tout Montaigne s'y consume. Et devinez quoi ? Un coup de tisonnier, et tout Montaigne se consumant s'élève en un nuage de petits morceaux de feuilles noircis, ardemment soulevés par le souffle brûlant de l'âtre, auxquels, me dénudant, je viens mêler mes propres exfoliations et, une fois de plus, je danse, je danse avec fureur ma victoire sur la philosophie de mes couilles.