Anomaly (3/n)

Le 18/02/2021
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par Lapinchien
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Rubriques / Anomaly
Ce texte synthétise, c'est à dire à mon sens, n'est-ce pas, tout ce qui fait de la zone "La Zone". Ma gueule, certes, mais j'explique quand même. D'abord, il s'agit d'une scène de séquestration à domicile. Et n'est-il donc jamais arrivé, à chacun d'entre-nous, de se sentir otage ici même ? Bien sûr que si ! Essayez de vous barrer, pour voir. Essayez seulement. On voudrait partir, faire quelque chose de nos vies, peut-être même prendre soin de nos proches ou conduire un dirigeable au-dessus d'un volcan (ce qui revient au même) mais NON ! LC nous a, comme qui dirait, attachés à une chaise avec son gros scotch. Comme un enfant trop enthousiaste qui ne veut pas laisser ses copains rentrer chez eux et les cloue au parquet de sa chambre. Bon. Une scène de séquestration, donc. Comment résister à tant de charme ? Ensuite, Richard Gotainer. Plus Zonard tu meurs. Mais c'est pas fini, regardez-moi ce titre, sans déconner ! Celui qui trouve un sens à ce titre, nous lui offrons une table basse, un bon d'achat de 30 euros chez Décathlon, et peut-être même une nuit dans une tente Quechua avec ClaCker, ça mange pas de pain. Et puis enfin matez-moi CES DIALOGUES GROS COMME DES IMMEUBLES ET PUTAIN DE DRÖLES ET C4EST 9A QU ON VEUT DU PEUNCH BORDEL ET 9A IL SAIT FAIRE L.C VOUS POUVEZ LUI CONFIER VOS GOSSES §§ MOI J4AVAIS PAS RI AUTANT DEPUIS LONGTEMPS ALORS MERCI TAULIER MERCI DE NOUS AVOIR TOUS CLOU2S AU PARQUET ET EMBALL2S DANS TON VIEUX SCOTCH. VIVE LA ZONE §§ PARCE QUE NOUS VOUS DEVONS PLUS QUE LA LUMIERE § NOUS VOUS OFFRONS AUSSI LA FLAMME §§
Je ne lui ai pas laissé la moindre chance. Opération commando dans son domicile en pleine nuit. Je casse une vitre et m'introduis dans le living. Pas le temps de tergiverser. Ni une, ni deux, direction la chambre à coucher. Bien sûr il s'était pieuté. Il a eu la peur de sa vie quand il m'a vu avec le fusil de chasse pointé sur son nez.
"Fredé... ric... Beig... beder ?", Qu'il m'a questionné.
- "AH MAIS TU FAIS MOINS LE MALIN? HEIN? GOTAINER? DANS BANGA YA DE L4EAU?JUSTE C4QU4IL FAUT§ YA QUOI DES FRUITS DANS BANGA ? Bordel, sors de ta couche et suis moi. Au moindre écart j'te bute."
Il était en robe de nuit. Il s'est levé alors qu'imperturbable je le pointais avec le canon. Je l'ai conduit vers la cuisine puis je lui ai demandé de s'asseoir sur une chaise où je l'ai ligoté avec mon gros ruban de scotch.

Alors qu'il tremblait comme une feuille, je lui ai déroulé les règles à respecter s'il ne voulait pas que je le flingue. "Il y a un Gotainer de trop dans cette pièce alors on va jouer à un petit jeu. Voici un paquet de cartes avec des noms de marques inscrites dessus. Je les mélange bien puis chacun à notre tour on en pioche une au hasard, on lit bien fort la marque puis dans la foulée on enchaîne avec une petite pub improvisée. Le premier qui sèche à perdu. Bien sûr il faut que la pub soit dans un style Gotainer Powa sinon c'est perdu. Bon je commence."

« Chocapic », comme c'est intéressant. Je me lance.

« Au p'tit déj et au goûter,
Choc Choc Choc faut en manger.
Ton bidon va adorer.
Tout choco et plein de blé.

Qu'on m'en apporte, s'il vous plait !
C'est si bon avec du lait.
Si j'ai pas mes Chocapic,
J'crois qu'j'vais braquer la boutique.

Chocapic, wé wé wesh grosse. »

Il y eut un petit silence. Gotainer et moi, on se fixait au fond des yeux. L'enjeu était de taille.
- Bon je me suis un peu raté sur le slogan de fin mais on va dire que c'était mon tour de chauffe. Je ne serais pas aussi clément avec toi. Vas-y, pioche une carte avec les dents et tends-la moi.

« Danone », je t'écoute.

« C'est si frais et si fondant. (...)
Tu m'en prives, j'te pète les dents. (...)
J'crois qu'j'suis accro au calcium : (...)
Miam Miam le yaourt Danone ! (...)

Il contient des bactéries (...)
Et des probiotiques aussi. (...)
Il te r'fait en intégral (...)
Toute la flore intestinale. (...)

Danone : Donne m'en, darone. »

- C'était pas mal. Il y avait bien la Gotainer's touch forcément. Quelques hésitations. Je ne t'en tiens pas rigueur pour cette fois mais reprends-toi. C'est mon tour.

« Destop », comme c'est original.

« Glou ! Glou ! Glou ! Glou !
Tes W.C. font : Glou ! Glou !
Ya des chances pour qu'ils soient bouchés.
Tire la chasse ils vont déborder.

Tu t'acharnes avec ta ventouse.
V'la l'conseil si t'as pas d'flouse :
Achète Destop. Une goutte suffit.
Et les bouchons, tu les oublies.

Destop : C'est comme un laxatif pour les canalisations. »

-Qu'on ne vienne pas me reprocher d'être à coté de la plaque. C'est ton tour, Richard.

« Nutella », prometteur.

« Des tartines, des tartines,
Oui mais des Nutella.
J'aime que les Nutella.
Me raconte pas d'histoires, me rapporte pas de comptine.

Des tartines, des tartines,
Nous, les Orangs-Outans,
On s'en fout complètement.
La déforestation ? Cherche pas tu m'embobines.

Des tartines, des tartines,
Je veux une tétrachiée
D'huile de palme à en crever.
Quoi c'est cancérigène ? Tu te paies ma bobine.

Nutella, étale-moi. »

- C'est pas mal, Richard, on voit que tu masterises ton sujet. Je sens que je vais en baver...
- Frédéric, attends, je ne vois vraiment pas où tu veux en venir avec ton jeu.
- J'ai pas demandé à avoir le Gotainer Power, moi. Comme j'te l'ai dit, il y a un Gotainer de trop ici bas et faut bien trouver un moyen de nous départager et...
- Tu n'es pas un mauvais publicitaire, Beigbeder. Si je t'inspire tant mieux mais saches qu'il y en a des centaines comme toi et...

J'ai tiré dans la porte du frigo pour lui montrer que je ne plaisantais pas. Des tas de condiments ont explosé salopant la cuisine du sol au plafond.

-S'il y en a des centaines alors je les tuerai tous. Peu importe le temps que ça prendra... LA DECALCO DE LA MENTALO ... OH PUTAIN 9A ME REPRENDS... Tu vois j'en peux plus TURLUTUTU CHAPEAU POINTU LE SAMPA C4EST SYMPA ET 9A VAUT LA SAMBA...
- Frédéric, je crois que tu souffres de troubles psychotiques. Les neuroleptiques peuvent t'aider. Bien plus qu'une battle entre toi et moi et...

J'ai shooté sur lui cette fois mais Gotainer a réussi à esquiver le tir en basculant sa chaise en arrière. Une fois au sol je n'ai pas remarqué qu'il avait attrapé un gros bout de verre d'un bocal fendu qui jonchait par terre à portée de main. Je l'ai relevé alors qu'il commençait déjà à se défaire de ses liens en toute discrétion.


« Adidas », C'est à moi.

« Quand j'enfile mes Adidas,
Je sens que j'ai trop la classe.
Sans mentir, c'est de la godasse.
De quoi pé-cho d'la grognasse.

À p'tites foulées, sans échasses,
Tu parcours les grands espaces.
Essentielles, quand tu t'déplaces.
J'ai fini ma master-classe.

Adidas, les pompes funèbres. »

- Je sais ce que tu vas me dire, Richard, le slogan sort de nulle part et obscurcit le message. Et puis je restreints un peu trop la cible. Mais fais pas la fine bouche. Bon c'est ton tour.

Et c'est à ce moment précis que j'ai vu Gotainer courir au niveau de la porte de la cuisine. J'ai tiré. Je l'ai manqué. C'est au moment où il passait la porte d'entrée que j'ai fait mouche. Sa tête a explosé comme une grosse pastèque. Il y avait des bouts de cervelle partout.