Kill Boule & Bill

Le 16/04/2021
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par Glandeur
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Thèmes / Saint-Con / 2021
Retour d'un auteur peu présent sur le site pour sa participation à la Saint-Con 2021. Texte très bien écrit malgré le mix d'univers peu probable tels kill Bill, Boule et Bill et d'autres que vous découvrirez par vous même. Mention spéciale pour la chanson de MC Solaar.
- Bonjour, Caroline.
- Bonjour, Caroline.
- Bonjour, Boule. Bonjour, Bill.

Caroline n'en croyait ni ses yeux ni ses oreilles. Ces deux fils de pute trônaient au centre d'un repas de famille et, le plus amicalement du monde, s'adressaient à elle avec un calme insupportable. Un groupe de mariachis en fond sonore rendait l'insupportable inconcevable.

Elle se tenait à l'entrée de la pièce, l'arme à la main.

Bill s'adressa aux quatre tortues géantes attablées avec eux. L'instinct maternel de Caroline lui avait déjà fait comprendre que ces monstruosités issues de leur exposition en bas âge à un fluide mutagène n'étaient autre que la couvée qu'elle avait cru perdue cinq ans plus tôt. Sa soif de vengeance envers Boule et Bill redoubla. Elle rengaina néanmoins son sabre.

- Dis bonjour à maman, Leonardo.
- Bonjour, maman.
- Dis bonjour à maman, Raphaël.
- Bonjour, maman.
- Dis bonjour à maman, Donatello.
- Bonjour, maman.
- Dis bonjour à maman, Michelangelo.
- Bonjour, maman.
- Tu ne te joins pas à nous, Caroline ? On a commandé des pizzas. Les enfants aiment beaucoup les pizzas.
- Je suis venue te tuer, Bill. Et toi aussi, Boule.
- Papas, elle est méchante, maman ?
- Non, Leonardo, maman n'est pas méchante. Elle est juste très en colère contre tes papas. Vois-tu, tes papas n'ont pas été très gentils avec maman.
- C'est le moins qu'on puisse dire, Boule.
- Vos papas ont mis chacun une balle dans la tête de maman, les enfants. Ça a fait bang ! bang ! mais ça a fait pschit, et hop ! revoilà maman, sexy comme jamais dans sa carapace, et très remontée. On le serait à moins.
- Votre maman n'est-elle pas magnifique, les enfants ?
- Si.
- Davvero, è bellissima.
- Veramente.
- Miam, miam, la bonne pizza aux anchois.
- Tes enfants ne sont-ils pas les plus jolies petites tortues du monde, Caroline ?

La tueuse anciennement connue sous le nom de Black Turtle ne répondit pas. Son instinct de mère ne pouvait vaincre son sentiment de répulsion à la vue de ces grosses tortues humanoïdes en train de se goinfrer de pizzas. Ils lui avaient même pris cela. Son amour maternel.

C'est pourtant bien pour les œufs qu'elle s'apprêtait à pondre qu'elle avait tenté de fuir le monde de violence qui était le sien avec Boule et Bill. Elle était partie, maso, avec un vieux macho qu'elle avait rencontré dans une station de métro. À la suite de cette douloureuse déception sentimentale, d'humeur chaleureuse, Boule et Bill étaient devenus brutaux.

Laissée pour morte par leur groupe de tueurs, elle était finalement sortie du coma contre toute attente et avait alors traqué et impitoyablement massacré l'un après l'autre tous les membres du Détachement International des Chéloniens Assassins. Le corps mutilé de monsieur Coupon-Dubois marinait dans un marais solognot. Le chat Caporal était mort étouffé dans la chatte à la veuve du colonel Stick, dont la tête avait déserté le corps avec un entrain inattendu. Travaillé au deux cent vingt volts avec application, Pouf avait longtemps appelé sa mère en pleurant comme une petite merde avant que son cœur ne lâche. Le père de Boule, amputé de tous ses membres, gisait dans le coffre de sa vieille 2 CV. Sa blonde épouse éviscérée s'était longuement déversée sur le carrelage de sa cuisine, tressautant interminablement dans ses boyaux comme un lapin à piles Duracell.

Caroline dégaina son katana. Les mariachis s'envolèrent par la fenêtre.

- Les enfants, si vous alliez jouer dans les égouts avec votre vieux rat ? suggéra Boule.
- Je lui ai marché dessus sans le faire exprès, confessa Michelangelo. Il ne bouge plus.
- Allez tout de même jouer dans les égouts, ordonna Bill.

Les jeunes tortues mutantes obéirent en traînant quelque peu les pattes. Boule se leva pour aller mettre un disque sur une platine vinyle. La voix de Neil Diamond chantant « Sweet Caroline » s'éleva dans la pièce.

- La haine d'un être n'est pas dans nos prérogatives, Caroline.
- Je suis l'as de trèfle qui pique ton cœur, Caroline.

Ces deux infâmes salopards tentaient de l'amadouer.

- Je ne suis pas passée pour être présente dans votre futur. Pauvres cons, vous n'avez aucun avenir.
- Cette tortue a le droit de se venger, Bill.
- Et nous méritons de mourir, Boule.

Bill se baladait à poil, comme d'habitude, et Boule arborait son éternelle salopette bleue. Bill différait des autres en ce sens qu'il n'avait pas à mettre un costume pour être Bill. Quand il se réveillait le matin, il était Bill. Alors que Boule devait mettre une salopette.

Cette petite salope rouquine de Boule eut un éclair de génie.

- Je crois bien que ça va être un bain de sang, Bill.

- Quoi ? Un bain ! hurla le cocker en un réflexe pavlovien.

Soudainement terrifié, Bill s'élança devant lui en courant comme un dératé, plus véloce et inarrêtable qu'une coulée pyroclastique. Caroline, surprise, fut bousculée et projetée en l'air. Quand elle retomba, Boule la tenait en joue.

- Tu l'as dans le cloaque, ma belle. Lâche ce sabre et assieds-toi.

Ce n'était plus le même film et Neil Diamond enchaîna sur « Girl, you'll be a woman soon ». Boule se mit à danser en faisant des V de la victoire devant ses yeux jusqu'à ce que Bill revienne enfin pointer ses longues oreilles penaudes dans les parages.

- Attache-moi cette petite radasse, couillon. On va la flamber dans le jardin.




Les petites pattes de Caroline était attachées dans son dos à la grille du barbecue.

- Z'y va ! bouge le gros orteil, grosse.
- Nous allons maintenant t'enseigner la technique des cinq bidons et de l'allumette qui fait s'enflammer le corps.
- C'est beaucoup de bidons, Boule.
- C'est la technique, Bill.

Les cinq bidons furent donc déversés. L'allumette fut allumée. Caroline tentait avec fureur de se débattre.

- Enfoirés de petits enculés de m...

L'embrasement la saisit dans cette envolée lyrique. Une odeur de kératine brûlée se répandit très vite dans le jardin. Les flammes étaient belles, ardentes, et montaient haut dans le ciel.