Carnets d'un jeune béotien - Chapitre 1 - Friedrich a dit...

Le 02/12/2021
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par Clacker
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Rubriques / Carnets d'un jeune béotien
Nouvelle rubrique de Clacker. Espérons qu'il tiendra le rythme. Aujourd'hui, la variétoche qu'on entend partout, tout le temps. Message de l'auteur : "Voilà, l'idée, c'est de pondre des billets d'humeur hebdomadaires (c'est bien ça qu'on dit quand ça revient toutes les semaines, ou bien ça a un rapport avec les chameaux ?). Une sorte de série qui cause de tout et de rien, voilà, en gros. Je pense que vous saisissez. Bon, maintenant je prends mes cliques et mes claques, et puis je poste ce truc."
Tout à l'heure, en sortant la hyène qui me sert de chien, je suis passé à côté de logements sociaux en construction. Bon, aucun problème avec ça, il faut bien caser les pauvres quelque part, et franchement, à part les murs en carton-pâte, c'est pas mal du tout, comme bicoques. Avec chacune son petit jardin perso, s'il vous plait. Ah, on est loin des HLM à la mode stalinienne. Reste à voir ce que vaut l'isolation en hiver, parce que vous pouvez entendre distinctement une mouche péter dans l'appartement mitoyen.    
Bon et alors, t'es un putain d'agent immobilier, me demanderez-vous ? Pas du tout. Je me contente de faire pisser mon chien, et d'observer.
Le souci, l'élément perturbateur à l'horizon, le voilà : un des gars du chantier, appelons-le Marcello Mastroianni, comme ça, parce qu'il lui ressemble un peu mais surtout de dos, a eu la lumineuse idée de ramener un poste de radio sur son lieu de travail. Parce que, tout le monde le sait, et Marcello ne fait pas exception : c'est toujours plus agréable de trimer en musique.
RIEN N'EST PLUS FAUX QUE CETTE AFFIRMATION A LA CON §§

Il sortait de cet engin du diable une espèce de zouk mâtiné de voix robotique, avec du boum-boum qui vous donne envie de chier.
Quelle brillante idée, Marcello ! Tu me diras, ça donne du coeur à l'ouvrage, quand on a une masse dans les mains et des pulsions de destruction. Le problème, c'est qu'ils sont là pour construire, les zigues.
Marcello, pouce en l'air, bouge son boule en rythme, probablement du coupé-décalé, tout en badigeonnant son parpaing de ciment frais. De toutes parts, les regards meurtriers fusent. Et comme je les comprends. La radio finira très certainement dans la fosse septique, à la suite de son propriétaire légal.
Je l'espère sincèrement.

Croyez-le ou non, cette scène anecdotique m'a donné à penser. Ce bon vieux Friedrich a dit : "la vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil". Bon. Mettons. Mais il y a une suite méconnue à cette citation.
La voici : "blablabla un exil. Mais la musique dite de variété est une immondice sortie du cul de Satan en personne un funeste jour où il avait abusé du chili."
Texto.

Pour rentrer dans des considérations plus étranges, j'ai un ami parfaitement sain d'esprit qui m'a exposé une théorie pour le moins biscornue sur la musique pop.
Il dit qu'aujourd'hui on produit cette daube dans un but précis : exercer une forme d'hypnose sur les consommateurs que nous sommes.
Il dit qu'on balance des fréquences bien particulières à travers toutes ces mélodies merdiques, de façon à modifier imperceptiblement la chimie de notre cerveau. Et remarquons que cette pop abrutissante passe TOUJOURS en fond dans tous les supermarchés du monde.
Oui, lorsque vous soupesez votre sachet de champignons blonds à 4 euros 50 le kilo, Billie Eilish est en train de vous souffler que vous feriez mieux de vous comporter comme une naughty girl, parce que "toutes les gentilles filles vont en enfer", minaude-t-elle.
Ne croyez pas que les paroles de ses chansons me dérangent plus que ça, c'est juste tout naze, dans le fond comme sur la forme, mais le constat, c'est bien que quelqu'un est constamment en train de déverser toutes sortes de conneries dans votre cervelet alors qu'initialement vous êtes là pour acheter vos champotes, tranquilles.
Nom de bleu, pourquoi est-ce que je dois me taper cette diarrhée auditive dans des lieux qui sont déjà stressants et énervants, où on fait la queue pour un bout de bidoche, la queue pour de la poiscaille, la queue pour du frometon, la queue pour faire chauffer la carte bleue, et enfin la queue dans sa bagnole, entouré de types qui nous font des queues de poissons ? Sans déconner, des fois, en rentrant chez moi, je fais la queue derrière mon chien. Comme ça. Trop l'habitude.
Bon, et mon ami bien dans sa tête, il ajoute qu'on peut littéralement dominer les esprits grâce à des fréquences hertziennes précises. Il m'a expliqué que c'était exactement les techniques employées par la CIA à l'époque des expérimentations MK-Ultra, qui visaient à créer des tueurs à la psyché dissociée. Une mélodie de Céline Dion, et pouf ! le type change de personnalité et décide d'aller liquider le président.
Et le pire, c'est qu'il ne se souvient de rien. C'était pas vraiment lui, aux commandes, mais sa deuxième personnalité.
Comme je ne sais plus quel acteur dit dans je ne sais plus quel film : "le meilleur agent secret est celui qui ne sait pas qu'il est agent secret".

Et si je ne sais pas à quel point mon pote a raison, ce que je sais, c'est que toute cette musique daubée me donne effectivement des envies de meurtre.