Carnets d'un jeune béotien - Chapitre 2 - La meilleure chose au monde...

Le 14/12/2021
-
par Clacker
-
Rubriques / Carnets d'un jeune béotien
Second texte de la chronique hebdomadaire de Clacker, Carnets d'un jeune béotien. Cette fois-ci il nous cause sexologie et plus particulièrement de première fois au pieu (ce qui s'accorde bien avec le thème du béotien donc mais avec le recul et la désillusion de l'homme d'expérience)
Imaginez les chevaliers de la table ronde de la cantoche en train de dresser un plan de bataille pour mener à bien la quête du Graal. Et par Graal, je veux dire le calice qui aura recueilli, non pas le sang du Christ, mais le sperme juvénile de ces boutonneux à la mentalité médiévale, en pleine puberté.
C'était ça, la mission ultime, quasi-divine, que s'étaient donnés mes camarades de classe.
En d'autres termes, il s'agissait de BAISER une fille, pour de vrai.
Parce que la branlette, ils maîtrisaient, et ça devenait un brin convenu, comme sujet de discussion.
Il y en avait toujours un pour nous sortir que forniquer était la meilleure chose au monde, qu'il avait joué à touche-pipi avec sa cousine, que ça c'était passé tout naturellement ; pourtant il se gardait d'entrer dans les détails, et arborait un air mystérieux parfaitement insupportable.
D'ailleurs, personne ne le croyait jamais, peu importe ce qu'il inventait.

Je dois dire que j'étais largué par toutes ces considérations. L'acte de masturbation, même, ne m'apparaissait pas fondamental à mon épanouissement.
Je me suis rattrapé sur ce point, depuis.

Mais combien de romances écrites avec les pieds nous le serinent, combien de chansons dégoulinantes de miel en font l'éloge, combien de sinistres connes tentent de se persuader elles-même que la toute première fois est une expérience unique, sacrée, presque cosmique ?

La meilleure chose au monde, dit-on, à tel point que certains sont prêts à s'offrir une pute comme première fois. Imaginez le degré de frustration de l'homme qui n'a jamais trempé son biscuit, et qui écume les rues glauques d'une agglomération quelconque, au volant de son tacot un dimanche, à trois heures du matin, en zyeutant des filles de l'est à mini-jupes ras-la-paquerette. Imaginez aussi sa déception, au moment de l'acte.

Parce qu'on peut dire ce qu'on veut, et nous faire miroiter les délices infinis de la baise, le dépucelage n'a rien d'un rêve éveillé. Je me souviens, lorsque j'étais étudiant et que ma petite amie était venue me voir dans ma cage à lapin, de mon désarroi absolu quand nous nous sommes couchés ensembles. Nous nous étions déshabillés comme des automates, chacun dans son coin, et j'avais éteint la lumière avant de la rejoindre - ou plutôt de lui monter dessus, puisque les dimensions du paddock ne me donnaient pas la possibilité de faire autrement.
Nous sommes restés figés de longues minutes, avant que je sente un bout de nez glacé me frôler la pomme d'Adam. Ragaillardi par cette approche, je me suis dit que c'était le moment. Et puis je n'ai pas su quoi faire. J'avais l'impression d'être tombé en catalepsie. D'être un manchot, ou un homme tronc.
Le temps passe lentement quand vous êtes au pieu avec une fille, que vous savez qu'il doit se passer quelque chose, et qu'il ne se passe rien.
Finalement, j'ai eu le courage de souffler à la demoiselle que je n'avais jamais coïté. Elle m'a avoué, soulagée, qu'elle non plus n'avait pas vu le loup.
Deux novices en amour, dans le même plumard, puceaux et maladroits.
Tant bien que mal, on s'est débrouillés pour conclure l'affaire. C'était une première expérience catastrophique pour chacun de nous, mais enfin, on y était arrivés. Je ne vous fais pas de dessin.

Avec le recul, j'en garde un bon souvenir.
Rappelez-vous que c'est en forgeant qu'on devient un as du marteau.

Alors coïtez, bande de glands.