Il y avait de l’argent à se faire.
Les mecs ont bien compris que quand t’es clivant, les vues pleuvent. Il faut surtout maîtriser la punchline, seul moyen d’être écouté par les jeunes, enfin ceux qui sont nés après Internet.
Il aborderait donc de manière viriliste et radicale les thèmes à la mode, tout en cassant du woke, puis il animerait tout cela avec des mèmes de Soral, Papacito, Conversano, le Raptor, des références percutantes, si possible homophobes, islamophobes, racistes, antisémites, tous les trucs qui font mouche sur le forum blabla 18-25 ans de Jeuxvideo.com.
Les mecs ont bien compris que quand t’es clivant, les vues pleuvent. Il faut surtout maîtriser la punchline, seul moyen d’être écouté par les jeunes, enfin ceux qui sont nés après Internet.
Il aborderait donc de manière viriliste et radicale les thèmes à la mode, tout en cassant du woke, puis il animerait tout cela avec des mèmes de Soral, Papacito, Conversano, le Raptor, des références percutantes, si possible homophobes, islamophobes, racistes, antisémites, tous les trucs qui font mouche sur le forum blabla 18-25 ans de Jeuxvideo.com.
Il se filmait à contrejour mais ne cachait pas sa silhouette sculptée par des années de musculation - activité prisée par ses followers qui ne lui auraient jamais accordé de crédit s’il avait eu un « corps de lâche » comme les « hommes-soja » qu’il humiliait. Sa voix était ferme, son débit rapide, ses logorrhées ne laissaient pas le temps de réfléchir et privilégiaient le bon mot à la pensée profonde.
Il avait cerné plusieurs sujets juteux : le réchauffement climatique, les vaccins contre le covid, le grand remplacement…, et avait compris qu’il ne fallait pas sous-estimer l’esprit de meute : l’individu veut se sentir à part, mais pas seul. Ainsi, plus un sujet faisait consensus dans les médias mainstream, plus ses abonnés se sentaient forts, intelligents, au-dessus des moutons bien-pensants. Mieux encore, les antagonistes ne pouvaient s’empêcher d’intervenir en commentaires, initiant des clashs interminables qui boostaient la visibilité des vidéos.
Il y avait parfois des conflits intéressants. Cette néoféministe, par exemple, qui réduisait tout à sa vision #Meetoo, elle ne loupait aucune occasion de ferrailler, et lui s’en délectait, rajoutant de l’huile sur le feu en MP : « Non, tu as tort, l’alien de Ridley Scott n’est pas la représentation d’un mâle alpha misogyne, l’alien est juste une espèce nuisible comme tous les wokistes dans ton genre ! D’ailleurs il ne baise jamais ! même si, c’est vrai - notre influenceur en herbe le concevait après coup - l’alien a une tête en forme de bite et ne pense qu’à se reproduire. »
Dans les commentaires, il se contentait de moqueries laconiques pour ne pas décevoir ses abonnés, mais les messages privés qu’il adressait à la fameuse Olympe de Bazouges devenaient plus longs, voire, dût-il se l’avouer, plus nuancés.
*
Elle, passait l’essentiel de son temps devant Netflix. La célèbre plateforme était la seule à proposer des films et des séries qui passent le test de Bechdel-Wallace, autrement dit, qu’il y ait au moins deux femmes, qu’elles dialoguent l’une avec l’autre et qu’elles parlent d’autre chose que d'un homme. Marre des séries cisgenres hétéronormées ! Il était enfin possible que les LGBTQIA+ soient représenté·e·s, que les esprits progressent, même si la seule personne non binaire qu’elle connaissait était un·e véritable emmerdeur·se, même si toutes ces productions étaient visiblement loin de réduire le sexisme dans le monde - le combat devait bien commencer quelque part.
Elle commanda un burger-frites sur Deliveroo et regarda la fin d’Alien, où l’exhibition de Sigourney Weaver en petite culotte prouvait bien que, malgré la validation du Bechdel-Wallace, des hommes étaient encore aux commandes avec leur foutu male gaze. Elle approuva le point de vue de l'influenceur artistique Noam sur sa chaîne ArtCore, trop beau avec sa nouvelle couleur de cheveux, et rédigea ensuite une critique sous la vidéo du Golem, cet influenceur réac’ qu’elle adorait contredire pour mettre en évidence tous les paradoxes aberrants de son discours de droitardé.
En vrai, le Golem n’était pas si con en MP. Il y avait même quelque chose de mystérieux et attirant à ce qu’il ne montre que sa silhouette sur ses vidéos, une silhouette qui laissait deviner un corps robuste aux muscles saillants. Non. Il était hors de question de se laisser tenter par ses désirs de jeune femme conditionnée par le patriarcat. D’ailleurs, lorsque le Golem lui proposa une rencontre dans le monde réel, elle refusa d’abord, puis, une idée l’illumina, une idée qui permettrait de frapper un grand coup, pour une fois.
*
Il en rêvait nuit comme jour. Olympe de Bazouges avait l’art de dévoiler des informations qui l’excitaient. Elle pratiquait la danse classique, avait des origines allemandes… Il l’imaginait blonde, aux yeux bleus, avec un corps de rêve. Elle refusait d’envoyer des photos, il ne dévoila donc pas son visage non plus, et lorsqu’il se risqua à lui proposer une rencontre hors du monde virtuel, il ne s’attendait pas à ce qu’elle lui réponde. Pourtant, dès le lendemain, Olympe lui donna carrément rendez-vous chez elle en insinuant que s’il avait des couilles, il savait à quoi s’en tenir.
*
Elle commanda différents accessoires sur Temu, des menottes, un jeu de godes-ceintures de 30 à 50 centimètres, plusieurs trucs hérissés de pointes, un pied de caméra, des micros… Pour frapper un grand coup, il fallait une vidéo de qualité, et toutes ses ordures allaient comprendre la réalité d’un viol.
*
Sans grande surprise, la vidéo du Golem et d’Olympe de Bazouges provoqua un buzz sans précédent.
Il avait adoré sentir ces énormes objets le remplir.
Elle avait adoré lui faire mal et l’entendre supplier.
Il y avait de l’argent à se faire.
Il avait cerné plusieurs sujets juteux : le réchauffement climatique, les vaccins contre le covid, le grand remplacement…, et avait compris qu’il ne fallait pas sous-estimer l’esprit de meute : l’individu veut se sentir à part, mais pas seul. Ainsi, plus un sujet faisait consensus dans les médias mainstream, plus ses abonnés se sentaient forts, intelligents, au-dessus des moutons bien-pensants. Mieux encore, les antagonistes ne pouvaient s’empêcher d’intervenir en commentaires, initiant des clashs interminables qui boostaient la visibilité des vidéos.
Il y avait parfois des conflits intéressants. Cette néoféministe, par exemple, qui réduisait tout à sa vision #Meetoo, elle ne loupait aucune occasion de ferrailler, et lui s’en délectait, rajoutant de l’huile sur le feu en MP : « Non, tu as tort, l’alien de Ridley Scott n’est pas la représentation d’un mâle alpha misogyne, l’alien est juste une espèce nuisible comme tous les wokistes dans ton genre ! D’ailleurs il ne baise jamais ! même si, c’est vrai - notre influenceur en herbe le concevait après coup - l’alien a une tête en forme de bite et ne pense qu’à se reproduire. »
Dans les commentaires, il se contentait de moqueries laconiques pour ne pas décevoir ses abonnés, mais les messages privés qu’il adressait à la fameuse Olympe de Bazouges devenaient plus longs, voire, dût-il se l’avouer, plus nuancés.
*
Elle, passait l’essentiel de son temps devant Netflix. La célèbre plateforme était la seule à proposer des films et des séries qui passent le test de Bechdel-Wallace, autrement dit, qu’il y ait au moins deux femmes, qu’elles dialoguent l’une avec l’autre et qu’elles parlent d’autre chose que d'un homme. Marre des séries cisgenres hétéronormées ! Il était enfin possible que les LGBTQIA+ soient représenté·e·s, que les esprits progressent, même si la seule personne non binaire qu’elle connaissait était un·e véritable emmerdeur·se, même si toutes ces productions étaient visiblement loin de réduire le sexisme dans le monde - le combat devait bien commencer quelque part.
Elle commanda un burger-frites sur Deliveroo et regarda la fin d’Alien, où l’exhibition de Sigourney Weaver en petite culotte prouvait bien que, malgré la validation du Bechdel-Wallace, des hommes étaient encore aux commandes avec leur foutu male gaze. Elle approuva le point de vue de l'influenceur artistique Noam sur sa chaîne ArtCore, trop beau avec sa nouvelle couleur de cheveux, et rédigea ensuite une critique sous la vidéo du Golem, cet influenceur réac’ qu’elle adorait contredire pour mettre en évidence tous les paradoxes aberrants de son discours de droitardé.
En vrai, le Golem n’était pas si con en MP. Il y avait même quelque chose de mystérieux et attirant à ce qu’il ne montre que sa silhouette sur ses vidéos, une silhouette qui laissait deviner un corps robuste aux muscles saillants. Non. Il était hors de question de se laisser tenter par ses désirs de jeune femme conditionnée par le patriarcat. D’ailleurs, lorsque le Golem lui proposa une rencontre dans le monde réel, elle refusa d’abord, puis, une idée l’illumina, une idée qui permettrait de frapper un grand coup, pour une fois.
*
Il en rêvait nuit comme jour. Olympe de Bazouges avait l’art de dévoiler des informations qui l’excitaient. Elle pratiquait la danse classique, avait des origines allemandes… Il l’imaginait blonde, aux yeux bleus, avec un corps de rêve. Elle refusait d’envoyer des photos, il ne dévoila donc pas son visage non plus, et lorsqu’il se risqua à lui proposer une rencontre hors du monde virtuel, il ne s’attendait pas à ce qu’elle lui réponde. Pourtant, dès le lendemain, Olympe lui donna carrément rendez-vous chez elle en insinuant que s’il avait des couilles, il savait à quoi s’en tenir.
*
Elle commanda différents accessoires sur Temu, des menottes, un jeu de godes-ceintures de 30 à 50 centimètres, plusieurs trucs hérissés de pointes, un pied de caméra, des micros… Pour frapper un grand coup, il fallait une vidéo de qualité, et toutes ses ordures allaient comprendre la réalité d’un viol.
*
Sans grande surprise, la vidéo du Golem et d’Olympe de Bazouges provoqua un buzz sans précédent.
Il avait adoré sentir ces énormes objets le remplir.
Elle avait adoré lui faire mal et l’entendre supplier.
Il y avait de l’argent à se faire.