Explosions, 8.6 et caleçons

Le 25/05/2025
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par Stadecaca14
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Thèmes / Obscur / Anticipation
Long récit d'action et d'anticipation par Stadecaca14, dont le pseudo, encore une fois, laisse rêveur. Le héros et son acolyte incarnent des assassins du futur dans un monde détruit par la géopolitique et la crise écologique. Au programme, de la baston, de superbes trouvailles et un hommage déguisé au personnage de Groot, l'homme-arbre des Gardiens de la galaxie. Super texte, à la fois sombre et fantaisiste, malgré une maîtrise aléatoire de certains outils narratifs.
Chris Watson et Edward Walden s’avancent dans la purée de pois bistre des Bordures. Derrière eux, le train démarre dans un enfer de crissements. Watson grince des dents, son long manteau de cuir usé giflant la brume. Foutu RER. S’il y a quelque chose qu’il ne regrette pas de l’Arrière, c’est bien cette monstruosité ambulante ! Tous ces gens, ce bruit, cette puanteur rance - mélange d’urine, de sueur et d’essence - le ramenèrent à ses jeunes années, quand, pour travailler, il devait y passer une heure par matinée. Il soupire, moitié soulagé, moitié nostalgique. Au loin, les phares de la locomotive disparaissent dans la pénombre naissante. Les quelques passagers qui sont descendus à cet arrêt titubent sur les marches, abrutis de fatigue, puis se fondent dans la grisaille environnante. Bien après qu’ils aient disparu, Watson se les imagine ramper jusqu’à leur dix mètres carré plastifié. Pauvres diables.
« Bon, on va rester longtemps ici à se geler les miches, Wat’s ? »
La voix éraillée de son compagnon chasse ses tristes considérations. Il se tourne et le mire avec affection : courts sur pattes, les vêtements rapiécés, la face tavelée et mal rasée, Edward Walden a tout du junkie des Bordures. D’ailleurs, c’est de là qu’il vient. Tout comme Watson. Enfants, ils s’étaient juré de changer le monde et ils se sont accrochés à cette promesse toute leur vie, luttant contre le courant. Ils ont toujours tenté de sauvegarder une petite part de l’Arrière et y sont presque parvenus. Mais la planète a fondu, puis s’est désagrégée sous leurs yeux. Le conflit nucléaire entre l’Amérique et la Chine avait - en plus de rendre inhabitable 80 % de la surface - précipité la chute de tous les systèmes politiques. Un grand chaos s’était ensuivi, les survivants s’écharpant pour des lambeaux de pouvoir, jusqu’à ce que les Écopistes - des anciens actionnaires complètement tordus - et leurs Greffes imposent un régime, certes totalitaire et déresponsabilisant, mais stable. Watson s’était raccroché à cette stabilité, dégoûté par la violence et le vertige de la liberté. Au départ, son copain d’enfance l’avait suivi, puis s’était émancipé. Walden travaillait à sa façon, à savoir avec des SPROTCH, de la 8.6 et des explosions, ce qui ne correspondait pas au modus operandi des Écopiste. Ceux-ci l’avaient gentiment écarté des missions de Watson, et les deux amis s’étaient brouillés, Walden accusant Watson de ne pas respecter leur promesse. Pourtant, quand celui-ci avait recontacté son ami d’enfance, le petit homme bourru avait immédiatement répondu présent, et après quelques verres dans un misérable bar de la Bordure, tout était redevenu comme avant. Ils…
« Wat’s, je te jure que si je reste une minute de plus sur ce putain de quai à me branler la nouille, je me casse au premier tripot du coin et je me fous une murge. »
Watson époussette ses manches usées, chasse l’invisible crasse de son jean noir et enfile son chapeau. Un chef-d’œuvre de vannerie qui lui donne l’air d’un épouvantail timbré et grisonnant. Il se tourne vers son copain de toujours et lance :
« S’cuse vieux, j’étais dans mes pensées. »
L’autre grommelle, en enfilant son célèbre béret rapiécé :
« Ça te réussit pas la soixantaine.
- Faut croire. »
Leurs deux silhouettes voûtées descendent les marches métalliques et débouchent sur la place de la gare. Ses pavés craquelés, à l’origine blancs cassés, sont devenus gris, recouverts par la crasse et la pollution. Des mauvaises herbes émergent des fissures, le lierre rampe sur les murs, couvrant des tags depuis longtemps délavés. Un panneau de verre, défiguré par un impact, indique « nvenue à Choisy-le-roy » et clignote de temps en temps. Des lampadaires sont postés au coin de cette esplanade fantôme et diffusent une lumière jaune, conférant une teinte poisseuse au brouillard. Saisi d’un doute, Watson demande :
« Rassure-moi Wald, tu te souviens pourquoi on est là ? »
Le petit homme trapu grommela dans sa barbe hirsute. Puis lâcha un rot. Watson fronça les sourcils et dit :
« Pardon ? Tu peux répéter, j’ai pas entendu.
- N’est là pour les slibards.
- Mais encore ?
- Pour les slibards maléfiques qui bouffent l’esprit des gens. »
Watson se passa une main sur le visage. Il avait l’impression de nager en plein délire. Voir son vieux copain tituber dans les brumes polluées de leur enfance et grommeler ces mots lui donnait une profonde impression de non-sens. « Le monde part en couille », pensa-t-il tout en regardant les façades crasses des immeubles. Des taudis, pas rénovés depuis les années 2030. Tout en angles, en blocs gris et fades, en synthétique, en fausse asymétrie, comme pour dire à ses occupants « mais si mais si, vous êtes unique ». À l’époque, ils appelaient ça « design ». Watson secoue la tête. Des conneries. Il avait toujours pensé que la propriété foncière idéale, c’était une baraque cossue en campagne, avec un toit de chaume, des poutres goudronnées et des façades enduites de chaux. Sauf que le goudron et la chaux étaient interdits par les Écopistes, que les campagnes n’existaient plus, remplacées par d’immenses champs gérés par l’intelligence artificielle. De toute façon, posséder quelque chose relevait de l’impossible, puisque la Collectivité s’était emparée de tous les biens matériels. Les gens étaient obligés de louer un appartement à l’État, remplissant ainsi les caisses des Écopistes, qui se servaient de cet argent pour créer de titanesques panneaux solaires et de monstrueuses éoliennes marines. L’argument de la préservation du paysage avait cessé d’être quand les microplastiques avaient commencé à s’agglomérer à la surface de l’océan, éradiquant par la même occasion toute forme de vie sous-marine. Bref.
Ils passent devant un Resox, ces zombies incapables de détacher leurs yeux de leurs téléphones. Son visage tiré est éclairé par la lumière bleue de l’écran. Watson le regarde avec pitié. Il doit avoir vingt ans. Walden grommelle « putain d’saloperie » et se met à jouer nerveusement avec sa canette de 8.6.
Leurs bottes de cuir résonnent sur le sol bitumé tandis que les brumes s’épaississent. Au loin, un grondement se fait entendre. C’est la Plaine qui s’éveille. Un chaos d’usines automatisées et ultra-polluantes qui fournissent le « pays » en textile, meuble, électroménager et autres biens de consommation. Les Bordures font office de tampon : toute la nuisance sonore et toxique est absorbée par les millions de pauvres parqués ici, rendant le climat propice au désespoir et à la violence. Pas de milice ni de police : ici, seule la « loi de la nature » - comme diraient les Écopistes - règne. La population se régule et s’administre seule - d’où le nombre élevé de morts. Dans ces brumes rôdent des hommes et des femmes qui n’ont d’humains que le nom. Pourris d’excroissances cancéreuses et de Greffes défectueuses non homologuées par les Écopistes - qui détiennent le monopole - certains ressemblent à de véritables monstres. On les appelle les Bordels. Watson frissonne rien que d’imaginer en croiser un. Sa propre Greffe - une bosselure sur sa main gauche - le démange, signe que d’autres s’agitent non loin. Walden s’exclame, le faisant sursauter :
« Ben alors vieux, il t’arrive quoi ? Tu m’as l’air tendu.
- Rien. C’est juste que croiser des Bordels me rend toujours nerveux.
- T’inquiètes pas va, leurs fausses Greffes peuvent rien contre les nôtres. Celles de ces putains d’Écopistes sont les meilleures qui existent.
- Peut-être, mais j’ai soixante balais. J’ai plus les mêmes réflexes.
- Rooh, tu vas pas recommencer avec ça »
Il se fendit d’un énorme rot, dont l’écho s’étouffa dans la purée de pois, puis reprit :
« Si t’avais dû mourir, c’était pendant notre dernière mission au Permafrost. C’est pas trois Bordels et une poignée de Resox qui vont t’arrêter. »
Walden grogne « humpf » et se plonge dans ses pensées. C’était il y a vingt-deux ans. Un peu après la guerre nucléaire qui avait rasé la moitié du globe, le permafrost avait achevé sa fonte, libérant un gène giganthrope, qu’une fourmi avait avalé. Cette conne était devenue aussi grande qu’un cheval et avait fondé un empire qui avait dévoré l’entièreté de la population scandinave, avant d’être stoppé par Watson et Walden grâce aux Greffes surpuissantes que les Écopistes leur avaient accordées en urgence. Un de leur exploit parmi tant d’autres. Ce souvenir lui arracha un soupir nostalgique. C’était la bonne vieille époque.
Ils atteignirent la Seine, une longue bande glauque et grise, qui charriait comme d’habitude les résidus du Centre. Les brumes dansaient entre les silhouettes des déchets, leur donnant l’air d’énormes créatures affluant à la surface. Watson frissonna et se détourna. Une énième aberration de la Collectivité. Ils longèrent la Seine, croisant de nouveau un Resox qui tournait en rond en portant un écran plat. Ses bras anorexiques tremblaient de maintenir l’énorme télévision face à lui. Les deux compagnons l’ignorèrent. Ce genre de spectacle était courant, dans la Bordure.
Après dix minutes de marche dans le smog, ils atteignirent enfin leur objectif : l’usine. C’est là que les cafards-espions du gouvernement avaient été écrasés. Un frisson traversa Watson, remontant le long de sa colonne vertébrale, réveillant ses rhumatismes. L’usine avait quelque chose de… décalé. Avec ses grands murs de brique rouge, ses grilles de fer torturées et ses allées silencieuses, on l’aurait dit sortie d’un vieux film en 2D. Un panneau rongé par l’humidité avait sûrement indiqué la fonction de cette structure, mais la rouille avait dévoré les lettres. Quelques touches de peinture s’y accrochaient, lui donnant l’air d’une bouche grande ouverte. Hors du temps. Un vestige, tellement proche des Écopistes qu’ils n’avaient pas pensé à s’en débarrasser. Watson sourit et posa une main nostalgique sur la grille coulissante. Verrouillée. Il soupira, et sortit une gourde de Carburant quand Walden s’exclama :
« Attends Wat’s. Tu vas attirer l’attention. Gardons nos Greffes pour quand ça va vraiment barder. »
Watson se figea. Son ami avait raison. Une bonne Greffe pouvait en détecter d’autres. Ces derniers temps, il avait tendance à utiliser son pouvoir sans réfléchir. Il accomplissait son devoir de justicier comme une machine. Enfin justicier… lors de sa dernière mission, il avait dû massacrer un groupuscule néo-libéraliste, rares survivants des idéologies mortes. Justicier…
Quand il se secoua, Walden était déjà en train d’escalader les grilles, s’aidant de leurs motifs entrelacés pour s’élever. Watson grommela « c’est plus de mon âge ces conneries », avant d’entamer l’ascension. Il avait une vue plongeante sur le caleçon de son ami, qui, comme d’habitude, était troué. Arrivé en haut, il bondit et grimaça de douleur quand ses articulations craquèrent.
« Ben alors mon con, c’était quoi ce bruit de papy ? »
C’était Walden, qui, lui, avait atterri sans encombre.
« J’te l’ai dit Wald, j’ai plus l’âge.
- J’vois ça ouais. T’es sûr que ça va aller pour ce soir ?
- Ça va, c’est pas des culottes psychopompes et une vieille usine de l’Arrière qui vont m’arrêter. On a déjà vécu pire.
- Tu l’as dit. »
Le silence s’abattit comme une énième couche de brouillard, enserrant la gorge de Watson d’une gangue inquiétante. Il avait beau dire, l’endroit n’avait rien de rassurant, tout comme l’affaire qui l’entourait. Apparemment, l’usine servait de repaire à l’entreprise Thor’Ô. Apparue il y a deux mois, elle avait commercialisé des culottes et caleçons contraceptifs, sur le même principe que les vieilles méthodes à anneaux : les fibres électromagnétiques envoyaient des impulsions de chaleur sur les organes là où il fallait pour que les spermatozoïdes et les ovules crèvent. Du moins, c’est ce que Watson avait compris : la science, c’était pas son fort. Ces produits, en accord avec la politique anti-nataliste des Écopistes, avaient vite trouvé des financements. Leur prix les avait rendus très attractifs, les habitants des Bordures comme ceux du Centre se les étaient arrachés. Puis d’un coup, ils avaient été rappelés. La Collectivité avait prétexté un défaut de fabrication mettant en danger les consommateurs. La vérité, c’est que les sous-vêtements, d’une manière qu’on ne comprenait pas encore, prenaient le contrôle de leurs porteurs et rongeaient peu à peu leur esprit, les rendant complètement fous, du moins selon les quelques témoignages recueillis. La plupart des « infestés », disparaissaient des radars environ une semaine après l’achat de leur caleçon, slip ou culotte Thor’Ô.
La Collectivité était en alerte rouge, les Écopistes s’affolaient, et comme toujours dans ce genre de cas, ils avaient demandé à Chris Watson, le héros du siècle, d’intervenir. Le vieil homme grisonnant avait invoqué la dangerosité et l’importance de la mission pour faire appel à Walden. Ce devait être grave, car son patron avait accepté sans hésiter une seule seconde. Ils avaient pour mission de découvrir l’instigateur de ce bordel, de l’exécuter et de détruire l’usine après avoir récupéré les plans. La technologie de Thor’Ô intéressait les Écopistes.
Rompant le silence, Walden s’exclama :
« Ça va être du gâteau cette affaire. »
Puis il sortit une 8.6 de son sac, décapsula la canette, qui émit un « pshiiit » nostalgique, parfaitement adapté au décor. Un « gloupgloupgloupgloup » retentit dans la pénombre brumeuse, suivi quelques secondes plus tard d’un « aaaah ». Walden avait rechargé sa Greffe. Il écrasa sa bière sous son talon, la compacta dans son poing buriné et déclara après un grand rot :
« C’est bon chef, on peut y aller.
- Tu devrais t’en envoyer une deuxième. »
Le petit homme râblé roula des yeux :
« T’abuses Wat’s, on va pas avoir plus de deux-trois Bordels à buter ici. »
Malgré tout, il engloutit une autre 8.6 et se retrouva avec une deuxième munition. Watson hocha la tête, sortit son Carburant - une mixture amère mélangeant d’innombrables plantes - et l’avala en grimaçant. Sa Greffe s’agita, lui rugissant de tout détruire.
« Eh beh, c’est pas de la gnognotte ton Carburant.
- Ouais, j’ai eu le temps de tester des nouveaux mélanges depuis la dernière fois. C’est dégueu mais ça fait le taff. »
Sur ces mots, il s’avança, faisant claquer son long manteau de cuir. Un grand parc s’ouvrait devant lui. Parsemé de conifères, de bouleaux, et nivelé de nombreux talus, il avait, comme les bâtiments, un air d’antan. Ceux-ci étaient reliés entre eux par des allées qui serpentaient entre les arbres. Le brouillard donnait à ce minuscule bosquet une allure mystérieuse et Walton se surprit à s’imaginer un loup-garou surgir d’entre les sombres frondaisons. Il secoua la tête en souriant vaguement, puis détailla les différentes parties de l’usine. Toutes trois étaient bâties avec de grosses briques orange qui lui rappelaient les façades de Londres - avant qu’elle ne soit immergée par la montée des océans. L’une des constructions, cubique et haute, devait servir d’entrepôt. Une autre, de la taille d’une petite barre d’immeubles, servait sans doute de locaux pour les employés, si employés il y avait. Ce devait être le cas puisque les cyberespions de la Collectivité n’avaient découvert aucun usage illégal de droïde dans les environs.
La dernière structure s’élevait haut vers le ciel et possédait une gigantesque cheminée et des crénelures rectangulaires recouvertes d’une feuille d’aluminium tout le long de son toit. D’énormes fenêtres couvraient toute la façade visible par Watson. Bien. Ça leur ferait une porte de sortie en cas de besoin.
Sans se concerter, ils se mirent à marcher vers le plus grand bâtiment, écrasant l’herbe humide sous leurs pieds bottés. L’attention de Watson était tellement tendue vers l’énorme structure qu’il ne vit pas l’homme se jeter sur lui du haut d’un arbre, un couteau rouillé à la main. Il perçut un mouvement flou au coin de sa vision, puis entendit un grand SPROTCH, qui résonna dans les brumes. Un corps s’écrasa un peu plus loin tandis que Walden s’avançait pour récupérer sa canette de 8.6, qui, sous l’effet de sa Greffe, s’était momentanément transformée en un véritable boulet de canon, réduisant le haut du corps de l’assaillant en une masse sanguinolente et dégoulinante d’esquilles.
Le petit bonhomme baissa le pantalon de l’assassin et découvrit un slip de bain rouge vif estampillé « Thor’Ô ». Watson jura, Walden resta silencieux et reprit sa route, l’air de rien. Autour, les branchages s’agitaient. Une menace planait dans l’air. Le vieillard grisonnant prépara sa Greffe, et quand une femme aux cheveux gris et crépus sauta d’un tronc, une scie à la main, il l’empala avec une branche de bambou, sortie de sa main tendue. Un lasso de ronces s’enroula autour du couteau de cuisine que brandissait l’homme qui s’avançait furtivement dans son dos. Watson soupira, tira sur son lasso et forma une couche d’écorces de chêne autour de ses phalanges, qui se brisa en échardes mortelles quand il l’abattit sur le front de l’assassin, lui ouvrant le crâne sur toute sa longueur. Un vrombissement retentit et il se baissa, juste à temps pour voir une canette de 8.6 perforer de part en part sa victime, ainsi que l’homme qui se tenait derrière et s’apprêtait à l’empaler avec une barre de fer taillée en pointe. Il jura, sauta en arrière, hérissa ses doigts d’épines imprégnées de spores toxiques et les jeta sur les trois femmes hirsutes qui attaquaient Walden tandis que celui-ci buvait une autre 8.6. Le camarade de Watson ne prit même pas la peine de se baisser et se tourna avec flegme pour voir les trois assaillants s’étouffer dans leur bave tandis qu’un virulent poison les rongeait. Alors qu’un dernier ennemi s’approchait de lui, il sortit une batte, de sous son manteau et s’en servit pour fracasser son crâne chauve et parsemé de pustules. Un grand SPROTCH recouvrit les râles d’agonie. Walden adorait tout ce qui faisait sprotch.
Watson épousseta ses manches, respira un grand coup, puis inspecta les cadavres. Tous portaient un sous-vêtement Thor’Ô. Alors qu’il s’apprêtait à parler, un bruit de cavalcade ondula entre les branchages. Il jeta un regard à Walden, et ils se mirent à courir vers la grande usine. Rester dans le bosquet ne leur était d’aucune utilité : l’ennemi devait disposer de nombreux scions à sacrifier pour fatiguer les deux héros. Il fallait qu’ils atteignent leur chef, ou ils s’épuiseraient sur le menu fretin. Soudain, il perçut qu’une Greffe s’activait dans son dos. Il généra un bouclier en écorce de séquoia géant et une terrible force le projeta quelques mètres plus loin. Merde. Il y avait un Bordel dans le coin. Il guetta les environs et vit une silhouette tordue se dissimuler derrière un arbre. Grossière erreur. Il puisa dans son Carburant et fit pousser une branche à toute allure là où s’était caché le Bordel, enfonçant un épieu de vingt centimètres de rayon dans son crâne. Même si sa Greffe lui permettait de se régénérer - ce qui était fréquent avec les Bordels - avec une telle blessure, il ne s’en sortirait jamais. Il se releva et rejoignit Walden, qui n’avait même pas pris la peine de s’inquiéter du sort de son ami.
Le petit homme mal rasé était occupé à regarder les immenses portes d’entrée tout en se grattant le cul. Watson soupira, puis le rejoignit. Derrière, une horde d’ennemis accouraient, tenant en leurs mains une masse hétéroclite d’armes rouillées plus ou moins effilées. Walden s’exclama en se tournant vers lui :
« Dis Wat’s, je peux ? »
L’intéressé resta silencieux et se pinça les sinus.
« Eh vieux répond ».
Il soupira et se tourna vers son compagnon. Celui-ci le regardait avec des grands yeux brillants, légèrement ivre. Watson grommela :
« C’est bon, tu peux y aller.
- T’es le meilleur. »
Il sortit une 8.6 écrasée, l’empoigna fermement, puis se mit en position de lancer, le corps tendu. Comme à chaque fois, Watson crut voir le métal briller avant que Walden le projette de toutes ses forces vers la horde dépenaillée. Quand la canette entra en contact avec le premier homme, elle explosa, le souffle illuminant la nuit et écartant la brume polluée. Quand la lumière décrut, une gerbe de membrures s’abattit sur la terre glaise. Watson détourna le regard tandis que son ami partait d’un grand éclat de rire extatique. Le cœur au bord des lèvres, il poussa les portes et entra dans l’usine.
À l’intérieur, l’air était immobile. Il distinguait avec peine les contours tortueux des machines qui remplissaient presque la totalité de l’espace. Un bref coup d’œil lui permit de repérer une passerelle qui faisait le tour de la salle, surplombant l’ensemble. L’escalier se trouvait à l’opposé, soit à une quarantaine de mètres. À droite et à gauche, deux portes, menant sans doute aux quartiers des contremaîtres. Un local technique à dix mètres sur la gauche. Tout en buvant sa gourde de Carburant - il lui en restait quatre - il vit la porte s’entrebâiller.
Il s’élança et surprit un homme vêtu d’un costard de l’Arrière armé d’une masse couverte de clous. Il lui ouvrit la gorge et perçut une Greffe s’agiter faiblement, puis s’éteindre. Un Bordel de moins. Tout en surveillant les alentours, il arracha le pantalon de costume du cadavre, dévoilant un slip noir qui moulait d’énormes couilles. Watson découpa avec précaution une bande de tissu et l’examina. Elle paraissait étonnement tiède et avait une texture… duveteuse. Il siffla. Pas étonnant que tout le monde s’arrache ces sous-vêtements : on aurait dit de la haute couture, comme on en faisait dans l’Arrière. Il voulut continuer son investigation, mais un vrombissement retentit, suivi d’un sprotch, étouffé cette fois. Eh merde. Il devait s’agir d’un Bordel possédant la capacité de se renforcer.
Il louvoya entre les machines, esquivant les tuyaux, ses yeux s’arrêtant sur chaque coin d’ombre. De l’un d’eux surgit une femme complètement nue, à l’exception d’une culotte fuchsia. Il lui trancha la carotide à l’aide d’un couteau de bambou, et continua sa course comme si de rien n’était. Il perçut l’action d’une Greffe devant lui et sans réfléchir une seconde, transperça d’une solide branche de hêtre le gigantesque ballon métallique et le Bordel qui se trouvait derrière. Le sang et l’essence giclèrent, l’odeur de ce dernier liquide se diffusant dans tous la salle.
Watson eut juste le temps de penser « eh merde » et de faire une vingtaine de mètres en courant, avant qu’un brandon enflammé soit jeté sur le gazole. Des flammes d’un jaune malsain jaillirent, éclairant la pièce d’un faisceau horrifique. En un coup d’œil, Watson identifia trois silhouettes au niveau de la rambarde. L’une d’elles portait une arbalète. Il projeta dans sa direction une rafale d’échardes empoisonnées, puis se mit à couvert, évitant de justesse un carreau. Un nouveau râle vint se mêler au concert des agonisants. Bien.
Il hocha la tête, sortit de son abri et élimina les deux autres perchés sur la rampe, puis se dirigea vers l’escalier. Au pied de celui-ci, il retrouva - comme il s’y attendait - un Walden ensanglanté. Sa batte était brisée en deux et il la jeta sur le sol, tout en en sortant une deuxième de sa doublure. Il rayonnait, le visage éclairé par la lueur démente des flammes jaunes. Une odeur de plastique fondu imprégnait l’atmosphère. Walden, une main dans la poche et son arme sur son épaule, demanda :
« Alors, combien ?
- Six.
- C’est tout ? Putain, tu t’améliores pas. J’en ai buté neuf. »
Watson se sentit gêné. Pour Walden, tout ceci n’était qu’un jeu. Il avait beau être efficace, redoutable même, ses airs de brutes cachaient un tempérament enfantin qui mettait Watson mal à l’aise. C’est peut-être aussi pour ça qu’il avait arrêté de travailler avec son ami. Parce qu’il faisait mieux que lui et pire que lui.
Ils montèrent les escaliers puis arrivèrent sur la passerelle. Le brasier dévorait la pièce, révélant de gigantesques machines pleines d’intrications incompréhensibles aux yeux de Watson. Il se secoua, puis avança vers les portes menant aux quartiers des contremaîtres. Il se servit d’une liane pour clencher la poignée. Au moment même où la porte s’entrebâillait, un homme sorti en donna un grand coup de couteau là où aurait dû se trouver Watson. Walden lui éclata le crâne avec sa batte et l’envoya valser dans l’enfer en contrebas. Puis il finit sa 8.6 et l’écrasa dans son poing tanné.
« On peut y aller ?
- Ouaip. »
Prudemment, ils s’engouffrèrent dans la gueule des ténèbres et refermèrent la porte, évitant ainsi que le contre-jour ne les dévoile et ne dissimule leurs adversaires. De ce que Watson put discerner, un long couloir s’élançait, puis se divisait et partait dans deux directions différentes. Les compagnons se jetèrent chacun dans un coin. Bien leur en fit : un objet vola vers leur position initiale et s’écrasa brutalement contre le chambranle. Profitant du raffut, ils s’élancèrent à pas feutrés vers le lanceur du projectile. Ils atteignirent le bout du corridor et tombèrent sur cinq ennemis, qu’ils éliminèrent en un clin d’œil.
Peu de Greffes arrivaient à la cheville des leurs, et personne ne les maîtrisait aussi bien qu’eux. Mais ce qui les avait maintenus en vie ces longues années malgré leur vie exaltante, c’était leur talent. Ils étaient des virtuoses, des meurtriers en puissance, les plus grands tueurs que la Terre ait jamais connus. Heureusement, ils étaient nés à une époque pendant laquelle massacrer relevait de l’intérêt public. D’où leur statut de héros. Ils assassinaient pour l’humanité. Watson secoua la tête. Ce n’était pas le moment de penser à ça. Il s’agenouilla au chevet d’une femme, déchiqueta son pantalon et inspecta sa culotte. Derrière, Walden grimaça et dit :
« Sale vicelard.
- Ça fait des années que je bande plus, Wald.
- C’est ça ouais. »
Watson sourit, puis inspecta le tissu. Certaines fibres luisaient, on aurait dit qu’elles pulsaient très lentement, comme des monstres ensommeillés. Réfrénant son malaise, il empocha la culotte et se releva. Ça ne lui plaisait pas, d’avoir un de ces machins dans son manteau. Ils se mirent à longer les murs, éliminant sans difficulté les quelques ennemis qui se dressaient devant eux. Au détour d’un couloir, ils rencontrèrent un Résox plongé dans son écran. La lumière bleue éclairait son visage jeune, aux traits allongés comme ceux d’un fantôme.
Watson prépara sa Greffe, puis se figea. Ce pouvait être son gosse. Peut-être que s’ils passaient lentement, il ne réagirait pas. Peut-être que… un vrombissement coupa court à ses réflexions. La canette de 8.6 fonçait vers le Résox, mais celui-ci releva d’un coup ses yeux sanglants et ses traits se brouillèrent, stigmate d’une mauvaise Greffe. Malgré tout, il s’élança à toute vitesse, levant un bras hypertrophié et couvert de pustules. Il envoya valdinguer Watson contre un mur. Celui-ci réussit à amortir le choc en générant des feuilles dans son dos, mais déjà le Résox se jetait sur lui, son appendice monstrueux tendu vers sa gorge. Alors qu’il s’apprêtait à lui dévisser le cou, sa tête explosa dans un grand SPROTCH et l’aspergea de bouts de cervelle. Watson eut un haut-le-cœur et ferma très fort les yeux, pour échapper à la vision de cette face juvénile éclatée par la canette de Walden. Sa voix éraillée retentit dans le couloir, dégoulinante d’ironie :
« T’avais raison vieux, c’est plus fait pour toi tout ça. Qu’est-ce qui t’a… »
Watson discerna une silhouette au bout du couloir et par réflexe, jeta Walden à terre en lui fouettant les jambes à l’aide d’une branche. Au même moment, un coup de feu éclata et une balle alla rebondir contre le mur. Eh merde. Les Écopistes avaient - dès leur arrivée au pouvoir - interdit les armes à feu et détruit l’ensemble de la production mondiale. « Pour un monde plus naturel », comme toujours. Ça arrangeait bien les porteurs de Greffes, celles-ci étant - en principe - octroyées par la Collectivité à titre exceptionnel, leur conférant ainsi un pouvoir presque absolu. Le problème, c’est que de petits malins, souvent des collectionneurs riches et tordus, avaient réussi à soustraire quelques-unes de ces armes.
Un nouveau coup de feu retentit et Walden poussa un juron, se jetant derrière un mur dont le bitume vola en éclat. Puis ce fut le silence, leurs respirations précipitées, l’obscurité ambiante et la présence de l’autre, mortel et hostile. L’autre, qui, bizarrement, s’enferma dans la salle d’où il venait. Les deux compagnons échangèrent un regard interloqué, puis prudemment, très prudemment, ils s’avancèrent vers cette mystérieuse porte. Pour une fois, ils étaient désavantagés et Watson s’en trouvait… désarçonné. Ces derniers temps, il se reposait beaucoup trop sur ses pouvoirs et…
« On y va ? »
C’était Walden, qui s’était déjà avancé et qui le regardait avec des yeux luisants d’agacement. Watson soupira, puis lui emboîta le pas. Depuis le début de cette mission, il avait le sentiment d’être emporté vers quelque chose de dangereux, de fatal, et son instinct lui intimait que ce mystère mortel se trouvait derrière cette porte métallique. Au-delà de cet homme au pistolet, il y avait quelqu’un qui…
« Bon Wat’s il t’arrive quoi aujourd’hui ? T’es à la ramasse. »
Walden affichait un air franchement hostile et parlait à voix haute alors même qu’un type potentiellement capable de les réduire en charpie les attendait non loin. Watson fronça les sourcils, irrité par le comportement puéril de son ami. Soudain il se sentit accablé, fatigué par cette mission insensée. Il avait envie d’en finir. Il s’avança tout en vidant d’un trait son avant-dernière Recharge.
« Ok, on y va. »
Il arma sa Greffe et avant que Walden ait le temps de se préparer, défonça la porte à l’aide d’un tronc qu’il fit naître de son ventre, envoyant valser le bout de métal sur la silhouette du type, qui s’écarta au dernier moment. Watson pénétra dans la pièce. Oblongue, fermée, avec en son centre une trace rectangulaire, signe qu’il s’agissait d’une ancienne salle de réunion. Une lueur verte provenant d’un voyant « issue de secours », éclairait vaguement l’endroit. L’homme, remis de sa surprise, leva de nouveau son arme, mais Watson projeta une liane à toute vitesse, qui s’enroula autour du chien de l’arme. Une torsion du poignet envoya l’engin mortel glisser sur le sol.
La sensation d’avoir gagné fit frissonner Watson, retardant l’exécution de l’homme d’une microseconde, microseconde qui permit à l’autre de claquer des doigts. Claquer des doigts ? Un très mauvais pressentiment s’empara de Watson, qui s’entoura d’une armure flexible de lierre, juste avant que tout explose autour de lui.
Par réflexe, il s’instilla une toxine dans les veines, toxine qui accéléra brutalement toutes ses fonctions vitales. Il en subirait les conséquences plus tard, mais cela lui permit de s’ébrouer et de se relever, indemne. Du moins, c’était ce que son corps lui disait, mais avec l’adrénaline et la toxine, il n’était pas sûr. Il se redressa, prépara ses épines et discerna le visage de son assaillant. Des traits tirés, figés par la chirurgie, un sourire grotesque, des cheveux blancs dressés comme une tour sur sa tête, des dents neiges et une peau d’albâtre. Martoni ? Alain Martoni ? Que faisait un des principaux piliers des Écopistes - celui-là même qui l’avait commandité pour ses premières missions - que faisait un tel homme ici, et pourquoi l’attaquait-il ?
Il n’eut pas le temps de s’interroger plus avant : le regard étoilé de son ennemi croisa le sien et il claqua des doigts. Mais cette fois, Watson était prêt. Il se jeta sur le côté juste à temps, car une déflagration embrasa l’air là où il s’était trouvé une seconde plus tôt. Il avait en face de lui un des hommes les plus dangereux de l’époque : Martoni pouvait générer de petites explosions en claquant des doigts. Watson n’allait pas pouvoir le vaincre seul, il lui fallait l’aide de Walden.
Le problème, c’est que Walden le regardait les bras croisés, d’un air vaguement amusé, adossé contre un mur. Watson se figea, atterré, ce qui lui valut d’essuyer la moitié d’une explosion, qui brisa la dernière fiole de Carburant qu’il lui restait. Il gueula :
« Merde Wald, qu’est ce que tu branles ? Viens m’aider ! »
L’intéressé lui fit un sourire goguenard, puis répondit :
« Pourquoi faire vieux ? Tu te débrouilles très bien seul. »
Watson grogna, puis hurla :
« Déconne pas, c’est pas un jeu Wald ! »
Une explosion l’empêcha de continuer et il se baissa, tout en courant vers Martoni. Pendant ce temps, Walden fronça les sourcils et répondit :
« Je ne joue pas vieux. Comme toi, je suis en train d’éliminer la principale source de danger pour mon avenir. »
Watson s’élança vers Martoni et généra un sabre de bambou dans son avant-bras droit. En même temps, il s’entoura de la même armure de lierre que tout à l’heure, mais la renforça. Walden ricana et continua en criant :
« La différence entre nous c’est que toi, tu réfléchis à court terme. Moi, j’anticipe. »
Martoni leva un bras et claqua des doigts. Une lueur de triomphe brilla dans son regard tandis que Watson se retrouvait entouré de flammes… pour en ressortir indemne. Il se précipita vers Martoni désormais sans défense, amorça son bras pour lui trancher la carotide, quand tout à coup quelque chose le percuta, brisant ses côtes et concassant ses organes. La sensation fut terrible, comme si on lui broyait tout le corps. Il cracha du sang et quand son corps s’écrasa contre le mur, sa vision se troubla. Il épuisa son Carburant restant et s’injecta sa toxine stimulante, mais cela accentua juste sa douleur. Il ne pouvait plus se relever, aucune partie de son corps ne répondait. Sa colonne vertébrale était sans doute cassée. Il ne put que regarder, impuissant, Walden s’avancer vers lui et ramasser sa canette de 8.6. La lueur verte qui illuminait la pièce lui donnait l’air fatigué, trouble. Watson ne put l’articuler, mais tout son corps hurlait « pourquoi ? ». Son ami de toujours soupira puis dit :
« Tu sais Wat’s, je suis désolé. Vraiment. J’aurais préféré ne pas en arriver là. Mais quand j’ai appris qu’ils t’avaient foutus sur le coup, je savais qu’il fallait que j’intervienne. T’as beau vieillir, t’aurais réussi à foutre en l’air mon beau plan, c’est sûr. T’es un putain de héros après tout, et fallait un autre héros pour t’arrêter, tu comprends ? C’est pour ça que je suis revenu. Je comptais te laisser jouer au petit toutou avec les Écopistes jusqu’à ce que je les bute tous, mais t’as pas pu rester tranquille dans ton coin. Il a fallu que t’acceptes cette mission, que tu t’inclines devant ces fils de putes, comme tu le fais depuis vingt ans. »
Il marqua une pause, ajusta son béret et sortit sa batte, puis, tout en l’essuyant avec un chiffon crasseux, continua :
« Je vais changer le monde Wat’s. Je vais renverser les Écopistes, détruire la Bordure, libérer les Résox, annihiler les Greffes, raser la Plaine, brûler toutes les connaissances, les sciences, et quand j’aurais fait ça, je vais buter tous les terriens, sauf une poignée de pauvres gens qui n’ont jamais rien eu. Et je vais leur offrir la planète, pour qu’ils recommencent tout de zéro. T’inquiètes pas, je serais là pour les aider. »
Son arme nettoyée, il s’avança, les yeux brillants. Puis, il se positionna au-dessus de Chris Watson, bien campé sur ses deux pieds et repris, d’une voix douce :
« Ce sera beau, vieux. Il y aura des forêts vertes, des champs de blé dorés, des mers bleues. Nos vêtements dureront pour la vie, on cultivera le sol, on construira nos maisons avec les ruines des gratte-ciels. On maîtrisera nos existences. Comme ce qu’on s’était promis, Wat’s. »
Edward Walden, en larmes, leva sa batte, et cette histoire se termina sur un grand SPROTCH.