POKE BOWL NEWS : LA SOUPE

Le 20/07/2025
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par Léa Claisse
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Thèmes / Divers / Sans texte
C’est un texte en voyage. Un road-trip en terres mexicaines, poussière plein les godasses et soleil dans les yeux. Et c’est bien écrit, propre, soigné. Peut-être trop. Tout glisse. Tout est fluide. Il ne se passe pas grand-chose. On devine une scène, un potentiel, mais rien ne vient vraiment troubler la surface. On attend que ça morde, que ça gicle. S’il y a une suite, espérons qu’elle envoie la purée, parce que là, on reste sur sa faim.
Ils devaient venir nous chercher en voiture. Je commençais à m’impatienter. Constance était prête et ne parlait que des deux-trois cafards qu’on avait trouvés dans notre chambre, quelques jours plus tôt. Je n’en avais rien à faire.

L’horloge sonna midi. Il tourna la Mercedes dans la rue.

-    Constance, dépêche-toi !
-    Je suis prête.

On passa par le porche. Je les saluais rapidement, pendant qu’elle faisait les présentations. Elle avait rencontré un groupe de Mariaquis en centre-ville, lors d’un déjeuner avec son équipe de bénévoles. Ils avaient sympathisé rapidement par connaissances croisées. Notre détour à Tequila était l’occasion de tous se rencontrer. De mon côté, j’avais récupéré deux/trois noms de distilleries.

Les montagnes étaient asséchées, et la poussière du sable roux floutait la route. Je sentais le soleil du Far West taper sur la toiture malgré le vent. Le pueblo magico n’était pas si loin de la ville de Guadalajara, et je vis au loin les champs d’agaves. À force de vitesse, je n’apercevais que des lignes vertes.

Estéban décida de faire un détour pour manger aux guinguettes du lac, près du chemin de fer. Sans doute, le dernier du pays. Les rails ferromex contaient les histoires des migrants. Beaucoup de ces derniers suivaient la ligne pour rejoindre la ville de Guadalajara. L’idée d’une route migratoire commune les rassuraient. Peu importe les atrocités comptées, et le nombre de militaires ou de narcos rencontrés, la balade était immortelle.

En s’éloignant du chemin de fer, on se retrouva face au lac. La vie se voulait douce. L’esprit était familial, les enfants se poursuivaient au bord de l’eau. On pouvait les surveiller depuis la terrasse du restaurant. Les tables sobres étaient grandes, et accueillaient chaleureusement les passants. L’odeur des poissons grillés me chatouillaient les narines, et je ne pensais plus qu’à manger. La cuisine était simple, et les poissons grillés constituaient le menu. Ils passèrent la commande, pendant que j’observais l’une des familles qui se promenait aux abords du lac. Un jeune garçon s’amusait avec sa sœur. Ils fabriquaient des cannes à pêche avec les roseaux. Ça ne donnait pas grand-chose, mais ça me rappelait de bons souvenirs. Je souriais, sans vraiment écouter la tablée. Des souvenirs remontaient à la surface. Je pensais au ciel. Mon grand-père nous avaient appris, petits, à lire l’heure avec un morceau de bois. Je me demandais si ça se tentait avec les roseaux.

On venait d’être servi. Je n’avais pas remarqué jusque-là, perdue dans mes pensées, mais les cliquetis des fourchettes sur les assiettes étaient le seul tempo audible. Je me tournais pour jeter un coup d’œil à la salle, assez remplie au final. Puis je retournais à ma tablée. Estéban semblait un peu pâle. Je lui souris.

-    Ça vous dit de faire un tour, après le déjeuner ?

Le plan d’eau semblait convenir à tout le monde. Je m’occupais des réglages du boitier de mon appareil photo, et changeais l’objectif. Les musiciens firent de même.

En s’approchant du lac, je me rendis compte qu’un rassemblement de cowboys semblait se tenir près du chemin de fer. J’étais soudain pressée de prendre des images. Je voulais le bon angle, et je fis rapidement le tour de la scène. Je me pris de jeu avec les enfants qui couraient autour des chevaux, trop près à mon goût. Ma retenue était sans doute visible, car un gamin fit diversion. Il embêtait les anciens, ou voulait me préparer un vrai scénario hollywoodien. Je n’en perdais pas une miette. Il s’approcha. Il voulait voir les photos et s’amuser un peu avec l’appareil. J’avais l’impression qu’il tirait à la carabine. C’était un style. Il m’avait convaincu. Il me laissa prendre la dernière photo du rodéo, et me salua.

Les pick-up suivaient le rail. Le paysage désertique me rappelait l’âme de la frontière. J’entendis la mélodie de mes amis. Sans doute, la résonance des échos de l’eau.

On oublia le pueblo.