Prologue : Légèrement en chute libre
C’est un journal sans date, un roman sans fil, une confession sans prêtre. C’est le récit d’un homme qui tombe - doucement, souvent, mais pas toujours avec grâce. Il tombe dans l’amour, dans l’oubli, dans la fête, dans les corps, dans les silences et les story Insta. Il tombe parce que rester debout demande une foi qu’il n’a plus, ou qu’il cherche encore, dans un fond de verre ou dans un battement de cœur mal synchronisé.
Bienvenue dans l’entre-deux. Ce lieu sans panneau de sortie, où l’on vit fort pour ne pas sentir le vide. Où l’intimité devient publique et la pudeur, un luxe qu’on s’accorde quand tout le monde dort. Ce livre est une boîte noire d’atterrissages forcés, de désirs flous et de microdoses d’espoir.
Tu y croiseras un ours tendre à l’humeur bancale, des amantes aussi fugaces que les likes, des colocs borderline, des ex en boucle et des psys sous-payés. Ce n’est pas une fiction. Ce n’est pas une autofiction. C’est un miroir éclaté. Chaque fragment est un “je” qui vacille. Chaque chute est une tentative de vol. Chaque phrase est une main tendue à ceux qui, eux aussi, dansent au bord du gouffre avec le sourire d’un clown triste.
Tu n’es pas seul.
Bonne descente.
C’est un journal sans date, un roman sans fil, une confession sans prêtre. C’est le récit d’un homme qui tombe - doucement, souvent, mais pas toujours avec grâce. Il tombe dans l’amour, dans l’oubli, dans la fête, dans les corps, dans les silences et les story Insta. Il tombe parce que rester debout demande une foi qu’il n’a plus, ou qu’il cherche encore, dans un fond de verre ou dans un battement de cœur mal synchronisé.
Bienvenue dans l’entre-deux. Ce lieu sans panneau de sortie, où l’on vit fort pour ne pas sentir le vide. Où l’intimité devient publique et la pudeur, un luxe qu’on s’accorde quand tout le monde dort. Ce livre est une boîte noire d’atterrissages forcés, de désirs flous et de microdoses d’espoir.
Tu y croiseras un ours tendre à l’humeur bancale, des amantes aussi fugaces que les likes, des colocs borderline, des ex en boucle et des psys sous-payés. Ce n’est pas une fiction. Ce n’est pas une autofiction. C’est un miroir éclaté. Chaque fragment est un “je” qui vacille. Chaque chute est une tentative de vol. Chaque phrase est une main tendue à ceux qui, eux aussi, dansent au bord du gouffre avec le sourire d’un clown triste.
Tu n’es pas seul.
Bonne descente.
Bonne Descente
(Anecdotes du vide)
Pierre Citron
1. Le regard des autres
“C’est comme le regard des autres sur ton intimité avait plus d’importance que ton intimité elle-même.”
- Proverbe Parisien
Quand on me dit que je partage trop ma vie intime sur les réseaux, je me retourne dans mon lit pour dormir encore un peu. Dans des moments sensibles, je me réserve le droit de me protéger de mes propres pulsions. Deux envies, une vie. Le mâle aimé cherche, et trouve, un autre chemin à suivre. Avec un esprit joueur, joyeux, faux-nonchalant et un peu de manque de tact, on s’amuse. Mais un accident est vite arrivé, et il faut prendre du recul pour mieux avancer. Le soir je me moque, le matin on me bloque. Je suis un ours, descendant verseau, et parfois j’oublie que nous sommes des êtres fragiles - tout le monde a ses propres blessures. Surpris par l’orage, la réaction des autres leur appartient. Néanmoins, j’ai provoqué des after-effects hors de mon contrôle. J’aurais pu être plus attentif, mais comment lire entre les lignes quand il fait noir? Ombre et lumière. Je veux des gens qui s’assument et qui communiquent, j’ai des livres à vous donner. Des gens qui savent ce qu’ils veulent. Ne me regardez pas comme ça. Toujours hésiter, jouer sur deux tableaux, se douter, se méfier. J’ai du mal à critiquer, car je connais la chanson. Je la chante de moins en moins, la mélodie m’échappe. Il y a des trucs qu’on doit régler avec nous-mêmes. C’est quand on guérit qu’on comprend, et qu’on apprend à ne plus suivre les mêmes schémas. Réagir, répondre, s’énerver, s’agiter, angoisser, se fâcher, bloquer, se faire mal, analyser, s’excuser, s’expliquer, se disputer. Finalement, ça ne fait que repousser les gens qu’on veut aimer. Mon cerveau balance sur un air de changement. Je suis sur une autre fréquence, une vibration qui me rassure et qui m’apaise. La raison protège nos coeurs en mettant des limites sur nos désirs. Normal. Faut rester vrai. Grave. En mode, ce n’est pas un crime de s’amuser tant qu’on ne perd pas le contrôle du bien et du mal. Parfois on se reconnaît dans un miroir, pas net, troublé, impatient. Pas grave. Les âmes soeurs se perdent et se retrouvent, un nouveau monde nous attend au tournant. Trois jours et un dimanche Des journées mouvementées. Lundi barbecue dans le jardin, que des chouettes gens, même si j’ai fait l’erreur d’inviter trop de mecs. Il y en a un, il vient les mains vides, se permet de tout boire et manger, et en plus il profite du moment où je me charge d’allumer le BBQ pour aller se glisser à côté d’une nana pour la draguer. Le lendemain, en descente, je lui envoie un message de merde mais je m’en fous.
Chaque weekend, je prends des microdoses de MDMA pour m’ouvrir un peu au monde et aux gens, ou pour oublier une ex, ou juste pour la joie de vivre. Peu importe, la vie s’intensifie. De mercredi à hier nous sommes sortis tous les soirs, jeudi avec les deux filles au Mauvaise Foie. Vendredi, une d’entre elles mixait au Cheval Noir. Pendant la journée, sa copine vient me rendre visite pour parler et baiser. Je m’en doutais qu’elle voulait tester l’écrivain belge mais j’en étais pas sûr, de toute façon je ne vois jamais rien arriver. D’abord on parle beaucoup, litérature, amour et vie. Elle calme mon égo de faux-timide, puis elle me demande: “Qu’est ce que t’attends pour m’embrasser?”. On bouge dans la chambre et elle ferme les rideaux. Il fait chaud, la sueur sur nos corps fait mouiller les draps et sa chatte, tout transpire et ma bite glisse dans son corps sans trop de friction. C’est bien mais je ne jouis pas et en la baisant je pense à mon ex. Après, elle me lance: “Pour vivre heureux, vivons caché. Ne dis surtout rien à ma copine, elle t’aime bien.” Les derniers soubresauts avant le calme. J’apprends vite. Les bonheurs essentiels de la vie se cachent quand la moralité se perd. Il y a encore de l’espoir pour mon coeur sensible, tant que ma bite est dure. Je suis un homme simple. J’ai deux émotions: l’amour et la colère. Je partage trop pour ensuite tout supprimer. Ce mal infini, de ne jamais assumer. Le silence, mon unique arme de défense. Je vous pardonne, je me pardonne, pour avancer. Mais je vous emmerde aussi, volontiers.
Pour chaque femme qui m’a blessé, il y en a cinq qui me sauvent du précipice. Si je veux, je peux. Mais comment leur faire confiance? La brutalité des blessures fait des mots mon seul refuge. Des désirs manipulés, des vices cachés. On ne joue pas à aimer, on joue à se mentir. La vie la pute. Le club des autistes C’était un vendredi, le jour préféré des gens aux troubles anxieux, que j’ai voulu m’inscrire au Club des Autistes. Une femme m’explique le principe du club et comment devenir membre. Je signe un papier, mais leur site web ne fonctionne pas, donc je laisse tomber. Le soir, n’ayant pas d’amis, j’ai rendez-vous sur le parvis avec un pote. D’abord il me dit qu’il n’est plus sortie de chez lui pendant des mois, passant son temps à déprimer devant la télé. Deux minutes après, il me raconte sa soirée, une fête d’annif avec des amis. Au bar, il commence à m’expliquer un truc, mais il perds le fil de ses pensées en cours de route, et vas-y qu’il sort pour aller faire une story insta. Je suis sorti pour fumer une cigarette et je suis rentré chez moi sans rien dire. Un verre de vin rouge est largement assez. En rentrant, j’ai l’impression que tout le monde me regarde bizarrement dans la rue. Avoir peur sans objet est devenu mon fond de commerce. L’amour, je n’y crois tellement plus que quand une femme me sourit, je le prends presque comme une insulte.
“Tu es sur le bon chemin”, me disait mon psy quand je lui racontais ma vie. On ne peut pas demander beaucoup plus quand on paie un mec 11 euros la session. Pour ce prix, t’as intérêt à rester Peace. C’est étrange, cette habitude que les gens ont de penser que tout va bien. Le monde part en sucettes et eux ils continuent comme si de rien n’était, à regarder une série ou aller manger dans un resto. Je dis rien, moi. Des maigres, faibles et misérables pensent que je suis plus fort qu’eux. Ils n’ont pas tort, pour autant que j’essaie de les éviter. Les gens aux deux visages, les cons, les faux-culs. Pourquoi pas “Laisser couler les jours me semble être une occupation idéale, parce qu’essentielle.” J’attends la guerre avec impatience. Mon vélo est électrique, mon coeur une pierre. Dégagez, braves gens, calmez-vous. Vos voitures sont trop grandes pour les petites ruelles du monde du futur. Je reviendrais quand je n’aurais plus peur de rater vos soirées. Il faut s’intéresser aux gens pour être heureux. L’environnement détermine mon comportement. Trois ans que j’ai le même boulot de fonctionnaire, j’suis mal barré.
“Tu sais qu’on est là pour toi”, me rassure un ami qui me contacte deux fois par an. “Ecris ton roman.” Tous les débuts sont difficiles. J’ai arrêté de boire pendant deux mois, je mange sainement et je fais des exercices. La piscine, toujours. Je nage pour ne pas me noyer. Fumer, c’est compliqué, mais ce soir j’en ai pas envie. Autant laisser les choses comme elles sont. Ma vie est un gâchis. Depuis 3 ans, je me suis rendu invisible, fade, comme un bon citoyen. Je n’écris presque plus rien. Je gagne bien ma vie mais je suis malheureux. Disons plutôt que je gagne bien ma mort et que j’ai perdu la vie. Traumatisé, j’évite les femmes, cette source éternelle de vie et de joie. J’ai peur, et la peur est l’opposé de l’amour. L’espoir est toujours vivant, mais d’abord il faut écrire. S’isoler, cultiver son malheur. Si vous vous reconnaissez dans mon histoire, vous avez perdu la tête, ou nous sommes tous des âmes perdues. Les deux sont possible. Dehors, une bande de vieillards aigris et sans morale gagne des milliers d’euros par mois pour continuer à foutre le monde en l’air. C’est ce qu’ils appellent la politique, l’économie, le monde des adultes, la guerre, la production, le profit, la virilité. Je crois que mon manque d’énergie vitale est une sorte de résistance contre ce faux-monde. Vivre dans notre époque, comme si ça voulait encore dire quelque chose. Vous suivez un peu l’actualité? Vous pensez qu’il y a encore un avenir pour nous? Alors, pour les enfants… Ils voudront continuer à conduire leurs bagnoles, eux aussi, pendant que la terre s’enfonce dans des océans de pollution. Il n’y a plus de limites.
2. Actes manqués et auto-sabotages
Ah, toutes ces nuits blanches, ces pensées noires qui sont le miroir de nos âmes. Être authentique est le jeu le plus cruel à jouer. J’ai des histoires, magnifiques comme l’océan est profond. Elles resteront non-publiées, jusqu’à ce que le moment soit venu de choquer mon public en existence. Après les tempêtes, avant le calme de la lumière. Il reste deux jours pour remettre les choses en ordre. Nous sommes des experts dans l’art de briser nos propres coeurs. Ne regrette jamais les erreurs que tu as faites, embrasse la confusion. Le rêve est terminé, maintenant la vie peut commencer. Plus tu ressens, plus vite tu guéris. Je me dis que les choses seront différentes, sans les bêtises émotionelles-poétiques, mais en réalité, je prends juste ce dont j’ai besoin et j’écris ce que je veux. C’est tout moi. Je sais mieux que de croire à mes propres déceptions. La soif de la vie doit nous consumer tous. Mes amants sont des illusions illustrées de coeurs brisés et de jours et nuits de plaisirs partagés. C’est mon destin de désirer l’amour. Nous ferions bien de prendre des risques pour perdre ce qui ne nous a jamais appartenu. Tout est à prendre, personne n’appartient à personne. Après un gramme de divertissement instantané, je me suis dit de rester hors ligne aujourd’hui. Le vert est la couleur de la renaissance. Je me sens enfin vivant. S’ignorer c’est ennuyeux. Je pense que j’ai assez de matériel pour mon prochain livre, mais je vais probablement devoir faire encore un peu plus de recherches. Retour rechargé, aéroport, la guerrière de nouvel an vient me chercher, puis on ne se voit plus jamais. Parfait.
Samedi soir, vitamines B, les potes à la Boîte. Dimanche, tes pompes vert-stylés, des ragots, visite musée, du jazz et un cocktail, j’ai tout claqué, pour finir en bonheur, bienveillance et beauté, le poseur déposé. Lundi piscine, la meuf qui gère, encore pompette, after, je prends de la vitamine C. Mardi la descente, piscine, bain de Gong, recalibrer. Mercredi, un parc, un chocolat chaud, des taquineries, une belle énergie, mes disques de Prince, Pilates et Poésie. Jeudi, retrait de permis, rattrapé par la justice. Deux envies, une vie, le mâle aimé, flagrant délit, une dispute animée, deux bars, deux verres, un début de comment faire. Le soir je me moque, le matin elle me bloque. Oui, encore elle. J’ai beau écrire. Vendredi, cerveau reptile, paix intérieure, passage radio et s’ignorer. Pourquoi se faire excuser, et puis non, mais si.
Un accident est vite arrivé, il faut prendre du recul pour mieux avancer. Cette semaine était mauvaise pour l’esprit, douce pour le coeur et amère pour le citron. Je suis un ours, brutal et sans tact, et j’oublie que les femmes sont des êtres fragiles. Surpris par l’orage, je n’ai pas vu les signes. Je pourrais dire que ça n’a rien à voir avec moi, que la réaction des autres leur appartient, mais c’est vrai que je n’étais pas toujours tout nette. J’ai touché à une douleur, provoqué une réaction, et les after-effects sont hors de mon contrôle. J’aurais pu être plus attentif, et la poursuivre, c’est elle que je voulais, finalement. Entre les lignes se cachent souvent des vérités, des sentiments, des comportements qu’on doit assumer. Parfois on se dispute, ça arrive. Elle aboie, je mords.
3. FUIR
Tu sais, y a deux types de personnes dans la vie. Y a ceux qui vivent des histoires simples, avec des réveils à 7h du mat’, des tartines bio, et des relations stables où ils font des puzzles à deux le dimanche. Et puis y a nous autres. Un mardi, elle m’appelle. Simple. Innocent. On s’installe devant un café, on discute un peu, mais rapidement, elle veut bouger. Je suis ce que je devrais fuir. Jeux de maux. On marche jusqu’aux Marolles et on trouve une terrasse. Il fait froid, mais peu importe. On se marre, on enchaîne les conneries, “Mais c’est super!” devient notre gimmick de la soirée. Un mantra un peu ironique, un peu sincère, qui colle à l’ambiance. Après quelques verres, on décide de filer au Baar. D’abord juste pour voir, puis finalement on reste. Il y a une soirée stand-up. Sur place, on commande encore à boire. Elle me parle d’un rencard, un mec avec qui elle est aller voir un concert. Tout se passait bien, jusqu’à ce qu’il devienne hyper lourd, insistant. Ça a mal tourné, ils se sont disputés. Mauvais plan d’un type qui ne comprend pas quand arrêter le progrès social. Je dis rien, je note.
Elle me regarde, un sourire en coin. “J’ai commandé.” Je fronce les sourcils. “Tu veux des sous ?” Elle secoue la tête. “Non, c’est bon.” Son ex est là, elle le repère au fond de la salle et se fige légèrement. Je capte son malaise, alors je parle, j’occupe l’espace, je lui change les idées. Entretemps, la coke est arrivée. On file aux toilettes en alternance. On vit vraiment une époque formidable. En bas, le stand-up commence. On se cale devant la scène, on est tout devant. Mauvaise idée. Parce que moi, dès que je suis face à un micro, même si c’est pas le mien… je parle. Le mec fait une blague moyenne, et je balance : « Y a une meuf après lui, elle est vraiment bonne ! » Pile à ce moment-là… SILENCE. Tout le monde me regarde. Les gens rigolent. Elle aussi, en mode « Mais pourquoi tu fais ça ? » La soirée continue, le temps s’efface. Il est tard quand elle appelle une copine, et plus tard encore quand on finit chez moi en after. Je me retrouve assis sur mon canapé avec deux jeunes nanas magnifiques, je plane un peu. Je commence à espérer. Tu connais cette espèce d’optimisme débile, qui te fait croire qu’une fille qui t’a dit non 8 fois va soudain changer d’avis parce qu’il est 3h du mat’ et l’ambiance est tamisée ? Spoiler : ça marche jamais. On met sa copine dans un Uber et elle me dit qu’on va se coucher. Je lui file des vêtements, mais je la sens tendue. On se glisse dans le lit, chacun de son côté. À un moment, j’essaie de passer un bras sur elle. Elle me repousse, sec. Ok. Message reçu. Mon égo descend plus vite qu’un toboggan humide. Le lendemain, je reçois un bip. “Je voulais pas te réveiller.” Même ses ghostings sont bien élevés. Friendzone 4.0 Les jours passent, et je sens que je suis coincé.
Vendredi, elle me recontacte. Toujours le même rituel. Elle débarque, souriante, lumineuse. Moi, j’ai la gueule d’un mec qui n’a pas dormi depuis 1987. On parle deux minutes, puis elle se barre “aider un pote”. Le soir, elle débarque à la radio. On traîne. Mon ex débarque aussi, enfin, ex est un grand mot. Je l’ai pas vu depuis deux semaines et on est sorti ensemble le temps de deux soirées. Et voici que deux générations se rencontrent. BAM. Mon ex et elle deviennent best friends en trois minutes chrono, comme si elles venaient de découvrir un spa réservé aux traumatisées émotionnelles. Mon ex pourrait être sa mère. Ma vie est une putain de blague. La soirée continue. Je file les thunes, elle passe la commande. Ça sent la lessive coupée. Pas d’effet. C’est peut-être un signe. Peut-être que mon corps me dit : « Si tu dois te droguer pour gérer ta vie, c’est qu’il faut changer de vie. » Mais je suis trop défoncé pour écouter mon corps. J’ai plus d’énergie qu’un hamster sous MD. Elle me balade toute la soirée. Et moi, comme un con, j’espère. Peut-être que je devrais juste la laisser filer. Mais nan. Je continue. Parce que l’espoir, c’est comme une mauvaise drogue : tu sais que ça va te foutre la gueule en vrac, mais tu continues. On bouge à la Boîte. Sur le dancefloor, une nana me fixe. Canon. J’ai envie d’y aller, d’arracher ses fringues, en plein confiance. Mais elle m’appelle, son nounours en main, genre je dors chez toi ce soir, viens! Peut-être que cette fois, elle arrête de me balader. Toute la soirée, elle a fait la meuf sociable, à parler avec tout le monde. Moi, j’étais juste là, un peu jaloux, un peu con. On finit chez moi, après. Le DJ et un pote à lui sont là. On sniffe encore. Je gobe un peu de MDMA, pas grand-chose. Puis ils se cassent. Je suis seul avec elle. Enfin, on est là, mais on n’est pas là. Anesthésié, quelque part ailleurs. Tout d’un coup, elle choppe son sac. “Mon Uber arrive.” Je suis sous le choc. Je pige rien. Elle dit un truc du genre je dois voir un pote mais je suis trop loin, je ne comprends plus rien. Mais donc, elle s’éclipse. Plus tard, un message. “Ne le prends pas mal. Je t’apprécie énormément. Ne te fais pas d’idées, ce n’est pas ça. On se parle demain.” Je joue le mec détaché. “Pas de souci.” Je me dis que je vais dormir. Mais la C me laisse en plan, et mes idées en vrac. Ça tourne, ça cogne. Je lui écris, un message irrité. Besoin d’explications. Le matin, réponse expéditive. “Je n’ai pas à me justifier. Tant que ce n’est pas à cause de toi que je suis partie, basta. Va dormir.” Je laisse couler. Mais je dors pas. Je traîne au café avec un pote, toujours en train de bader. J’essaie de la sonner. Elle me coupe direct. “Ça m’angoisse. Stop.” Je la laisse, elle a raison. On se reparle quelques jours après, et tout roule. Mais elle me reste en travers. Je suis dans la friendzone, mais je devrais peut-être juste lui rentrer dedans. J’ai peur de perdre quoi?
Trois semaines plus tard, elle fait un post sur Insta pour résumer sa vie, et je vois une photo d’un mec, tatoué torse nu, dans un lit avec son nounours. Ah, ouais. J’ai une sale réputation, et ça arrive aux meilleurs, mais là, ça pique un peu. De toute façon, elle finit toujours par s’éclipser. Normalement, je devrais être en couple avec ma deuxième femme, faire des brunchs le dimanche et parler de ma retraite. Au lieu de ça, je sniffe dans des toilettes crasseuses et j’essaie de comprendre une gamine de 25 ans qui vit sa best life. J’ai envie de vous dire que non mais, putain, je kiffe.
4. La suite des choses
Un jeudi, elle appelle. — Tu fais quoi ce soir ? — J’ai émission radio. — Ah ok. Bonne émission. Je t’embrasse. Je vais bouffer avec une copine, je déballe ma vie de player sensible, puis je vais à la radio. Je vois sur Insta qu’elle est en ville. Elle fait la fête jusqu’à 7h du mat. Elle voulait juste se défoncer. C’est la vie. Samedi, elle mixe à la Boîte. Moi, je mixe en journée dans un shop. Gueule de bois de la veille. Shots, bières, avec des mecs biens. Le lendemain, je ramasse. Elle me sonne. “Tu veux pas me conduire au shop ?” Elle veut bien. On se retrouve au Bizaar, où un pote me glisse un peu de MD. Elle me dépose, traîne un peu, essaye des fringues. Puis elle rentre se préparer. Le soir, elle rappelle. Je suis éclaté, mais un pote veut aller voir un concert. J’accepte. Elle me propose de bouffer avec ses potes. Je décline. On se retrouve à la Boîte. Toujours la Boîte. Elle mixe bien, quand elle est en forme, c’est la meilleure. Son pote me dit qu’elle était nerveuse au début. Maintenant, elle gère, grave. On danse. À la fin, elle en a marre. “Vas-y, je prends le relais,” je dis. Je mixe, complètement défoncé à la md. Elle passe poser un morceau, puis se barre. La Boîte se vide. Dehors, elle me remercie. “Tu m’as sauvé la vie.” Elle me propose un after chez un pote. On passe au nightshop, elle prend de la vodka. Elle me demande de porter son sac. “Non.” Je commence à me sentir de trop. Dans le nightshop, son pote lui claque un bisou. Laisse tomber. Pas envie de coke ce soir, j’suis trop en mode love amour. Et surtout, pas envie de rentrer seul à six heures du mat. Quand ils montent dans le Uber, je leur fais un signe. “Amusez-vous bien, les gars.” Ils sont déjà ailleurs, ça parle fort pour rien dire. Je rentre chez moi. Content de mon choix. La md cogne encore. Pas de sommeil. Je me branle trois ou quatre fois. Je suis le roi du monde. Je ne veux pas savoir si elle a baisé l’autre ou si c’était juste un after à rallonge. Le lendemain, un coeur sur Insta. Descente. Je réponds avec un coeur. Fin de l’histoire. J’arrête de la contacter en premier. Tout se mélange Je vois mon psy en après-midi, qui me dit que je dois arrêter de courir après ma propre chute. J’ai envie de coucher avec mon psy. Les sentiments romantiques ou émoustillants envers son thérapeute appartiennent à un phénomène commun appelé “transfert”. Que dire, j’ai besoin de baiser, j’aime bien les femmes. Entretemps, je cours avec des gens perdus dans la nuit bruxelloise et mon psy me dit que c’est une fuite. J’assume. J’ai passé l’âge, mais putain, avec elle… J’ai la forme de mes 40 ans, l’état d’esprit d’un gamin de 17 ans. Trop d’envies. Trop d’attentes. Trop de frustrations. J’ai 52 ans et je vais me retrouver frustré au poste, c’est pas mon genre. Trouver une meuf. Baiser. Ne pas être le plan de secours. Self-control. Vivre ma putain de vie. Ne pas répondre trop vite. Ne pas supplier. Ne pas réagir à chaud. Sortir avec d’autres femmes. Effet miroir, je fais des efforts monumentales tandis que je suis déjà la putain de meilleure version de moi-même.
5. La Chinoise
À ce moment-là, j’aurais pu prendre un break, faire une retraite spirituelle, méditer sur mes choix de vie. Mais nan. Je prends une coloc chinoise, encore une jeune femme. Le dernier gars était super doux et gentil, mais il parlait à peine et restait enfermé dans sa chambre comme un moine en dépression ou un toxico en descente. Un peu d’action ne me ferait pas de mal. Le simple fait que je pense tout ça sans rien dire, en dit long sur moi. Une semaine plus tard, après avoir signé le bail à la banque, on va boire un café au Verschueren. Elle pose sa tasse et lâche : “Ah au fait, tu sais que je suis enceinte ? Je vais avorter la semaine prochaine.” Non, je ne savais pas. “Ah mais j’en parlais au téléphone hier, t’étais dans la pièce, donc je pensais que t’avais entendu.” -“Non, je n’écoute pas tes conversations.” Elle me regarde, surprise. Moi, je ne pense rien. Dès le premier jour, elle commence à m’appeler Sugar Daddy ou “l’ours”. Elle répète sans cesse que je suis vraiment très calme, que je parle très peu. Elle porte mes fringues, laisse le linge trempé dans la machine, balance ses sacs un peu partout dans l’appart. Le premier soir, je rentre et il y a des gens qui dorment sur le canapé. Elle ramène des mecs chelous. Y en a un, en pleine nuit, qui débarque torse nu dans ma chambre. Il la cherchait. Moi, je cherche juste à comprendre où est partie ma dignité. Allez, un peu d’animation, faut pas être coincé, je me dis. Une nuit plus tard, un de ses collègues squatte chez nous “pour une durée indéterminée”. Il n’a pas de logement. C’est aussi lui qui l’a mise enceinte. Il a 20 ans, c’est le cousin d’un DJ parisien. Chaque fois que je tente d’expliquer qu’on n’est pas à l’hôtel mais juste à deux dans un petit appart, elle part en mode passif-agressif. Et puis un jour, elle explose. Crise de rage hystérique. Elle hurle dans l’appart : “ENCULÉ DE MERDE !!!” Moi, pendant ce temps-là, je fais ce que je sais faire de mieux. Je fume une clope et je reste immobile. Zen. Stoïque. Parce que crier, c’est surfait. Quand elle part à la clinique pour l’IVG, elle prend mon bracelet africain, pour se guider spirituellement, précise-t-elle. Elle me sort ça comme si c’était normal.
Je commence à voir des photos de mes affaires sur son Insta, des bouts de ma vie sur son Facebook. Des Citrons ici, des Lazy Rebels par là. Un jour, elle trottine dans l’appart en minishort, jambes interminables. “Alors, t’aimes les jeunes femmes ?” Elle rigole. “Tu vas pas tomber amoureux de moi, hein ?” Je ne sais pas si je dois être flatté ou mal à l’aise. Un soir, je décide d’inviter les voisines pour un dîner tranquille. Elle débarque, en retard, trouble dans son regard, un pote avec elle. Direct, elle se prend la tête avec la voisine qui me plaisait bien. Puis un pote à moi arrive, un perché lui aussi. En cinq minutes, ils sont en train de s’engueuler comme des chiens. Jusqu’à ce qu’elle fonde en larmes. Les voisins se barrent, trop de malaise. Elle se tourne vers son pote et balance, fort, comme pour être sûre que j’entende: “Mon ancien coloc était dingue amoureux de moi, il était tellement jaloux!” Son pote hoche la tête. Elle continue, plus forte: “Ouais, mon cousin… Je l’ai baisé plusieurs fois. Il dit qu’il m’aime. Juste quand je lui annonce que je suis enceinte. Mais quelle idée !” Silence. Elle enchaîne, imperturbable: “J’ai déjà fait quatre dépressions sévères. Je sais de quoi je parle.” Je bois du vin. Beaucoup de vin. J’ignore tout. Être jeune, c’est plus dur qu’avant, je crois. Puis je me fige. Cette folie borderline, je la connais. Deux exes, deux traumatismes. Je les attire, ou je les cherche, je ne sais pas. J’avais presque oublié ces histoires, mais tout revient d’un coup. Un dimanche matin, je me réveille tard. Dans la salle de bain, ça rigole et ça trébuche. Je sais déjà ce qui se passe. Cinq fois, je lui ai dit de dégager ce gamin de 20 ans. Je fais du bruit dans la cuisine. Assiette, lave-vaisselle. Que ça s’entende. Le mec se faufile dehors, il sent la tempête arriver. La Chinoise, elle, part en crise. Elle claque la porte de sa chambre. Se réfugie dans la salle de bain. Elle hurle. Elle gueule. Elle pousse des cris. “J’HABITE ICI ! J’EN AI MARRE ! ENCULÉ DE MERDE !” Elle a besoin d’aide, je pense. Mais moi, je n’en peux plus, je suis trop sensible. Et après on va encore dire que je suis méprisable. C’est vrai qu’une femme qui doit se faire avorter, ça doit être un truc lourd à porter. Je fume une clope, immobile, à table. Une heure plus tard, elle sort la tête du couloir. Elle s’excuse. Comme si elle avait juste fait tomber une fourchette. Et là, elle recommence. “Franchement, tu devrais vraiment commencer à agir NORMALEMENT !” Agis normalement toi-même, je me dis. C’est l’univers qui essaie de me faire une leçon subtile… en m’éclatant la gueule. Des fois, la meilleure aventure, c’est de fermer sa porte à clé et de regarder Netflix. Une femme stable
6. La Normale
Après, du coup, j’ai essayé autre chose, en paralelle, pendant un mois ou deux. Une nana avec deux enfants, une artiste. Elle communiquait super bien, elle était mignonne, elle avait son passé comme tout le monde, mais on rigolait bien, on parlait beaucoup, elle sentait que j’avais besoin d’écoute et elle trouvait toujours les bons mots pour me rassurer. Si j’avais un doute sur ma vie, elle me répondait en aphorismes ou citations spirituelles. Elle avait plus ou moins mon âge, et je me sentais mature avec elle. Mais c’était horrible. C’était trop parfaite et je n’étais pas amoureux ou pas assez mature, ce qui est dire la même chose, en vrai. J’ai vraiment essayé, mais très vite les expos, les pizzas devant un film, le sérieux de la chose, m’ont saoulé. Quand elle m’a dit que je pouvais péter dans le lit, j’ai fait un gros bloquage. Jamais je veux vivre cette vie. Je respecte trop les femmes pour leur imposer ce qui sort de mon cul la nuit. Déjà que je ronfle, que j’écris de la poésie et qu’elles doivent écouter mes conneries quand je parle. Non mais. Faut pas exagérer non plus. Je suis devenu très froid et elle a tout de suite compris le truc. Elle m’a souhaité un bon dimanche et un bel avenir. Elle a préféré se choisir, ce que je comprends. Ce n’est pas que je ne veux pas m’engager dans une relation sérieuse, mais aller trop vite, le côté fusionnel, un peu de danger, limite toxique... ça me parle plus, ça m’inspire. Le plaisir, en dérive Je ne sais pas quoi vous dire, le pourquoi et le comment. Pourtant c’est simple. Je n’avais aucun sens, je voulais juste le plaisir, sans direction. Après des années de jouer au fonctionnaire, je me suis un peu laisser aller. J’étais en colère continue. Tout m’énervait. Je voulais ma dopamine. Je voulais une meuf toxique qui me faisait du mal juste pour que je ressente quelque chose. Le problème, c’est que tout le monde sait que je suis juste un mec hypersensible qui se fait piégé tout le temps. Le gars avec la mauvaise réputation, le mec compliqué. Le mec bizarre qui fume trop et qui réfléchit trop. Oui, c’était une fuite. Et puis je me suis réalisé que, si j’étais mon propre soleil, autant m’allumer. Je ne suis pas suicidaire, mais je suis un peu fatigué par l’existence, parfois. J’ai l’impression que tout est difficile.
Même arrêter la clope, c’est trop dur. Je fume, je réfléchis trop, je regarde Instagram, je bloque des gens, je recommence à les suivre. C’est un cycle infernal.
7. Juju m’écoute
Ma psy m’a dit un truc super intelligent hier : “Il faut être moins dans la réflexion et plus dans l’action.” J’ai pensé: “C’est beau ce que vous dites. Je vais y réfléchir.”Je suis trop gentil, sauf avec moi-même. Je suis comme un distributeur automatique de pardon. Le truc, c’est que j’ai un énorme manque affectif que j’ose même pas assumer. Pourtant, y a des gens qui m’aiment, qui me respectent, qui m’admirent. Mais moi, ça fait 10 ans que je ne me kiffait pas. C’est relou. Je sais que je devrais m’aimer, accepter mes failles, avancer. Je pourrais être heureux, là, maintenant… si je prenais juste UNE initiative. Mais non. Je procrastine. Je me plains. Je réfléchis. Et ça m’énerve. Peut-être que je devrais juste arrêter d’écrire ce genre de messages. Peut-être que je devrais écrire un livre à la place. Peutêtre que je devrais arrêter de scroller Instagram et vivre MA putain de vie. Parce que, au fond, je sais ce que je dois faire pour être heureux. Je sais que je dois sortir de ma zone de confort. Arrêter de fuir. Arrêter de me poser mille questions dès qu’il y a un rayon de soleil. Je sais déjà tout. Je suis libre. Je pourrais partir loin, recommencer à zéro. Bref. Je vais aller nager. Peut-être prendre mon vélo. Peut-être réfléchir encore un peu. Je sais que cet état d’esprit, il va passer. Et un jour, je vais revivre. Peut-être demain. Peut-être dans 10 minutes. Ou peut-être après ma dernière clope. Les pensées jetables méritent d’être jetées
Ce qu’on critique chez les autres est souvent ce qu’on n’assume pas chez nous-mêmes. Garder son calme, mettre ses limites. Rassurer l’enfant pour nourrir l’homme. Laisser couler les choses, ne plus perdre son temps. Vivre. Avec l’âge, on apprécie les gens de plus en plus, on se rapproche de ceux qu’on aime au lieu de les repousser par simple peur ou traumatisme du passé, on répare ce qui ne va pas, on s’excuse si on a déclenché des blessures, on en guérit, on en parle, on en rit, on en pleure, on communique, on assume, on écrit, on apprend, on oublie nos égos, on travaille son empathie, on met de l’eau dans le vin si on veut rester potes ou proches de ceux qui nous font du bien, on met nos limites pour éviter de devoir réparer des liens cassés, on se pardonne, on se donne de l’espace, on reste honnête et bienveillant, on clarifie ses intentions, on devient plus ou moins rationnelle et on agit plus à coeur ouvert, on reste à l’écoute, on fait des efforts à se faire confiance en faisant confiance aux autres, on se remet en question tout en se posant moins de questions sur les détails de la vie, on recherche la paix intérieure tout en restant connecté au monde, et on arrête de croire à ces citations Facebook ou Instagram qui nous bombardent de messages comme quoi on est mieux en paix tout seul, en laissant tomber des gens. On est tous le miroir de l’autre, donc éviter les autres c’est tout simplement ne pas vouloir se connaître soi-même. On est mieux ensemble, avec amour, compassion et joie de vivre, pas chacun dans son coin avec des philosophies de deuxième rang d’un individualisme défaitiste et désillusionné d’une société capitaliste en déclin moralement et humainement, une société dans laquelle plus personne croit encore, une société qui carbure à la mort annoncée des gens blessés par des gens blessés. Non merci, la vie est trop belle. Comment avancer sans bouger Il y a un an, j’écrivais un poème, on m’a viré et j’ai changé mon propre destin. Les poèmes restent les mêmes, les gens changent. La puissance des mots. J’y crois. On est le maître de sa propre vie. Ce qu’on pense, on le devient. Je repousse ceux et celles que j’attire. La femme? Si vous la poursuivez, cela signifie qu’elle doit s’enfuir. Prenez un ticket. L’énergie féminine est libre et expansive, l’énergie masculine est stable et solide. Instagram veut nous séparer, ils veulent faire de nous des consommateurs individuels, en manque, pour acheter des produits qui nous feront oublier qu’on est des êtres sociales. J’ai le droit de changer d’avis, de me perdre dans mes sentiments, d’assouvir mes désirs, d’avancer, de reculer, de gagner et de perdre. Les histoires restent muettes. Ce que j’écris est soit une observation de la réalité qui se répète jusqu’au moment où j’ai appris ma leçon, ou un moyen de manifester une autre réalité.
8. Eloge de la fuite
J’ai senti que je voulais rester, alors je suis parti. J’avais des attentes. Je reste dans ma tête, j’analyse et je juge. Mon interprétation en dit plus sur mon monde intérieur que sur la personne à l’autre bout du fil rouge. Pourtant, je ne fais qu’écouter et me mettre en question. Je veux rester léger, lucide, franche et naïve. Tant pis si je me blesse. Je transforme ma colère matinale en joie de vivre détendu. Bref. Je n’ai pas fait des prises de conscience universelles pour être touché par une série de scènes de vie Parisienne. Il y a des choses qui s’expliquent à l’aveugle. La nuit, je me suis enfuis dans des verres pour éviter des regards curieux. En soirée, on joue à qui se barre le premier. On prends des drogues qui nous donnent un sens d’appartenance. Je bois le verre de trop qui me rends sincère et lucide. Je me réveille entre je sais et je ne veux pas savoir. On s’ignore, on se suit, on unfollow, on s’observe, on se fait des films, on s’enfuit, et finalement, on s’en fout. Tout ça fait partie de notre époque, toutes générations confondues, de 25 à 50 ans. Le désir a ses raisons, que la raison ne désire pas toujours savoir. Une nouvelle lune, des nouvelles intentions. Elle me calme. Elle peint des oiseaux comme des fissures dans la lumière et elle me dis des choses comme “la liberté est importante pour s’abandonner à l’autre”. On serait à vendre, je nous achèterai. Je risque encore de déconner, on ne change pas un ours, mais elle me rassure. Elle sait que je suis dans une période de renouvellement, “mais ça n’empêche pas de vivre des chouettes trucs,” elle me dit. J’apporte mes observations sur la profondeur des nuits qui se mêlent entre plaisir et dérive. Les histoires, ça reste entre nous. On tague quand ça nous arrange. J’accepte vos manières d’être. Ma manière, c’est d’écrire ce que je vis pour rendre le plus intime universel. Je crois que ça s’appelle la poésie. La nuit est remplie de vampires, qui sucent mes maux. Le jour, on se retrouve sur une terrasse ensoleillée, le sourire au visage.
9. Tabula Rasa
Une écolière joueuse de maux inexistants, des masques qui éclatent sans prévenir, la violence comme ultime carte d’une faiblesse évidente. Les ragots glissent sur mon dos, révélant mon vrai visage, tandis que dans le bruit de la ville, le silence demeure ma force. Un livre ouvert ne doit rien avoir de caché. J’ai traversé des épreuves, entre violence et manipulations. Parfois, les gens parlent, inventent, cherchent à semer le doute. Je n’ai aucun contrôle sur ça, mais j’ai le choix de ne pas y accorder d’énergie. La vérité finit toujours par s’imposer d’elle-même. J’ai parfois l’habitude de tout mélanger, de prendre de la distance brutalement, surtout quand je traverse des moments perturbants. Je le sais, et j’assume mes failles humaines. Mais me protéger ne devrait pas nécessiter de justification, et encore moins provoquer des réactions violentes. Je prends mes responsabilités. Ni la fuite, ni la colère ne sont des solutions. J’avance, avec lucidité, entouré des bonnes personnes. La sérénité est mon cap. Je reste ouvert à ceux qui veulent m’accompagner avec bienveillance. Trouver un équilibre, rester lucide et avancer en pleine conscience, c’est le véritable défi. Je choisis aujourd’hui d’avancer sans haine ni rancune. Pardonner ne signifie pas tout accepter, mais simplement refuser d’être alourdi par la négativité. J’espère que chacun, avec le temps, trouvera sa propre paix intérieure. Il m’est impossible de détester qui que ce soit. Mon énergie, je préfère la consacrer à ce qui m’élève : mon art, mes chansons, mes récits. Rien ni personne ne m’empêchera d’aller vers le positif, tout en restant conscient de mes propres limites. Je prends du recul. J’efface l’ardoise. J’écris une nouvelle page et je passe à autre chose.
10. Bonne descente.
La nuit avait été douce-amère. Une de celles qu’on partage sans vraiment s’appartenir. On avait parlé, oui. De tout, de rien, de nos trous noirs à nous. Entre deux lignes, deux confidences, deux silences qui s'accrochaient à nos cils. Elle avait cette manière de poser ses yeux sur moi comme on scrute une tempête sans vouloir s’y perdre. Et moi, j’étais là, encore une fois, à l’aimer en silence. À la laisser revenir, malgré les caprices, malgré les hauts, les bas, les piques d’orgueil et les regards absents. Je me manquais de respect à moi-même, finalement. Je savais bien qu’elle me traitait comme un refuge saisonnier. Mais j’acceptais. J’accueillais. Comme si j’étais né pour ça.
Et puis, le matin a frappé. Violent, cru, sans politesse. Elle était en descente. Fermée. Parano. Comme un animal blessé qui cherche la sortie. Elle voulait partir, vite. Elle ne disait pas pourquoi. Moi, j’étais encore ailleurs, suspendu entre veille et vertige. Et dans ses yeux, juste avant qu’elle tourne le dos, j’ai vu… Un “ouais” qui sonnait comme une excuse. Une attente. Peut-être un baiser. Peut-être juste un signe. Mais j’étais déjà hors de moi. Plus homme. Moins moi. J’ai claqué la porte. Fort. Comme on claque la fin d’un roman mal écrit. Pas contre elle. Contre cette boucle. Contre moi aussi, un peu. Et j’ai balancé : “Dégage. Tu ne fais que profiter de moi.” C’était moche. C’était vrai, un peu. C’était surtout trop. Je m’en suis voulu. J’ai écrit. Deux fois. Des excuses sincères. Pas pour qu’elle revienne, mais parce que je ne voulais pas que cette colère-là me définisse. Je lui ai dit : j’ai pété un câble. J’étais pas bien. Je vois l’impact. Et elle ? Elle a dit : “L’agression et la violence, c’est inacceptable. Reste très, très loin de moi.” Puis blackout. Blocage total. Comme si j’étais un virus. Un danger. Une tâche à effacer. Comme si toute la douleur d’avant n’avait jamais existé. Elle aussi, jouait. Avec mes nerfs. Avec mes silences. Avec l’ambiguïté comme arme de distraction massive. Et moi, je me suis accroché. Trop. Jusqu’à ce que ça craque.
Elle me manque parfois. Mais c’est pas elle. C’est le flou. Le frisson. L’illusion. Ce fantasme d’un lien qu’on aurait pu écrire à deux - si elle avait voulu lire entre les lignes, blanches.
(Anecdotes du vide)
Pierre Citron
1. Le regard des autres
“C’est comme le regard des autres sur ton intimité avait plus d’importance que ton intimité elle-même.”
- Proverbe Parisien
Quand on me dit que je partage trop ma vie intime sur les réseaux, je me retourne dans mon lit pour dormir encore un peu. Dans des moments sensibles, je me réserve le droit de me protéger de mes propres pulsions. Deux envies, une vie. Le mâle aimé cherche, et trouve, un autre chemin à suivre. Avec un esprit joueur, joyeux, faux-nonchalant et un peu de manque de tact, on s’amuse. Mais un accident est vite arrivé, et il faut prendre du recul pour mieux avancer. Le soir je me moque, le matin on me bloque. Je suis un ours, descendant verseau, et parfois j’oublie que nous sommes des êtres fragiles - tout le monde a ses propres blessures. Surpris par l’orage, la réaction des autres leur appartient. Néanmoins, j’ai provoqué des after-effects hors de mon contrôle. J’aurais pu être plus attentif, mais comment lire entre les lignes quand il fait noir? Ombre et lumière. Je veux des gens qui s’assument et qui communiquent, j’ai des livres à vous donner. Des gens qui savent ce qu’ils veulent. Ne me regardez pas comme ça. Toujours hésiter, jouer sur deux tableaux, se douter, se méfier. J’ai du mal à critiquer, car je connais la chanson. Je la chante de moins en moins, la mélodie m’échappe. Il y a des trucs qu’on doit régler avec nous-mêmes. C’est quand on guérit qu’on comprend, et qu’on apprend à ne plus suivre les mêmes schémas. Réagir, répondre, s’énerver, s’agiter, angoisser, se fâcher, bloquer, se faire mal, analyser, s’excuser, s’expliquer, se disputer. Finalement, ça ne fait que repousser les gens qu’on veut aimer. Mon cerveau balance sur un air de changement. Je suis sur une autre fréquence, une vibration qui me rassure et qui m’apaise. La raison protège nos coeurs en mettant des limites sur nos désirs. Normal. Faut rester vrai. Grave. En mode, ce n’est pas un crime de s’amuser tant qu’on ne perd pas le contrôle du bien et du mal. Parfois on se reconnaît dans un miroir, pas net, troublé, impatient. Pas grave. Les âmes soeurs se perdent et se retrouvent, un nouveau monde nous attend au tournant. Trois jours et un dimanche Des journées mouvementées. Lundi barbecue dans le jardin, que des chouettes gens, même si j’ai fait l’erreur d’inviter trop de mecs. Il y en a un, il vient les mains vides, se permet de tout boire et manger, et en plus il profite du moment où je me charge d’allumer le BBQ pour aller se glisser à côté d’une nana pour la draguer. Le lendemain, en descente, je lui envoie un message de merde mais je m’en fous.
Chaque weekend, je prends des microdoses de MDMA pour m’ouvrir un peu au monde et aux gens, ou pour oublier une ex, ou juste pour la joie de vivre. Peu importe, la vie s’intensifie. De mercredi à hier nous sommes sortis tous les soirs, jeudi avec les deux filles au Mauvaise Foie. Vendredi, une d’entre elles mixait au Cheval Noir. Pendant la journée, sa copine vient me rendre visite pour parler et baiser. Je m’en doutais qu’elle voulait tester l’écrivain belge mais j’en étais pas sûr, de toute façon je ne vois jamais rien arriver. D’abord on parle beaucoup, litérature, amour et vie. Elle calme mon égo de faux-timide, puis elle me demande: “Qu’est ce que t’attends pour m’embrasser?”. On bouge dans la chambre et elle ferme les rideaux. Il fait chaud, la sueur sur nos corps fait mouiller les draps et sa chatte, tout transpire et ma bite glisse dans son corps sans trop de friction. C’est bien mais je ne jouis pas et en la baisant je pense à mon ex. Après, elle me lance: “Pour vivre heureux, vivons caché. Ne dis surtout rien à ma copine, elle t’aime bien.” Les derniers soubresauts avant le calme. J’apprends vite. Les bonheurs essentiels de la vie se cachent quand la moralité se perd. Il y a encore de l’espoir pour mon coeur sensible, tant que ma bite est dure. Je suis un homme simple. J’ai deux émotions: l’amour et la colère. Je partage trop pour ensuite tout supprimer. Ce mal infini, de ne jamais assumer. Le silence, mon unique arme de défense. Je vous pardonne, je me pardonne, pour avancer. Mais je vous emmerde aussi, volontiers.
Pour chaque femme qui m’a blessé, il y en a cinq qui me sauvent du précipice. Si je veux, je peux. Mais comment leur faire confiance? La brutalité des blessures fait des mots mon seul refuge. Des désirs manipulés, des vices cachés. On ne joue pas à aimer, on joue à se mentir. La vie la pute. Le club des autistes C’était un vendredi, le jour préféré des gens aux troubles anxieux, que j’ai voulu m’inscrire au Club des Autistes. Une femme m’explique le principe du club et comment devenir membre. Je signe un papier, mais leur site web ne fonctionne pas, donc je laisse tomber. Le soir, n’ayant pas d’amis, j’ai rendez-vous sur le parvis avec un pote. D’abord il me dit qu’il n’est plus sortie de chez lui pendant des mois, passant son temps à déprimer devant la télé. Deux minutes après, il me raconte sa soirée, une fête d’annif avec des amis. Au bar, il commence à m’expliquer un truc, mais il perds le fil de ses pensées en cours de route, et vas-y qu’il sort pour aller faire une story insta. Je suis sorti pour fumer une cigarette et je suis rentré chez moi sans rien dire. Un verre de vin rouge est largement assez. En rentrant, j’ai l’impression que tout le monde me regarde bizarrement dans la rue. Avoir peur sans objet est devenu mon fond de commerce. L’amour, je n’y crois tellement plus que quand une femme me sourit, je le prends presque comme une insulte.
“Tu es sur le bon chemin”, me disait mon psy quand je lui racontais ma vie. On ne peut pas demander beaucoup plus quand on paie un mec 11 euros la session. Pour ce prix, t’as intérêt à rester Peace. C’est étrange, cette habitude que les gens ont de penser que tout va bien. Le monde part en sucettes et eux ils continuent comme si de rien n’était, à regarder une série ou aller manger dans un resto. Je dis rien, moi. Des maigres, faibles et misérables pensent que je suis plus fort qu’eux. Ils n’ont pas tort, pour autant que j’essaie de les éviter. Les gens aux deux visages, les cons, les faux-culs. Pourquoi pas “Laisser couler les jours me semble être une occupation idéale, parce qu’essentielle.” J’attends la guerre avec impatience. Mon vélo est électrique, mon coeur une pierre. Dégagez, braves gens, calmez-vous. Vos voitures sont trop grandes pour les petites ruelles du monde du futur. Je reviendrais quand je n’aurais plus peur de rater vos soirées. Il faut s’intéresser aux gens pour être heureux. L’environnement détermine mon comportement. Trois ans que j’ai le même boulot de fonctionnaire, j’suis mal barré.
“Tu sais qu’on est là pour toi”, me rassure un ami qui me contacte deux fois par an. “Ecris ton roman.” Tous les débuts sont difficiles. J’ai arrêté de boire pendant deux mois, je mange sainement et je fais des exercices. La piscine, toujours. Je nage pour ne pas me noyer. Fumer, c’est compliqué, mais ce soir j’en ai pas envie. Autant laisser les choses comme elles sont. Ma vie est un gâchis. Depuis 3 ans, je me suis rendu invisible, fade, comme un bon citoyen. Je n’écris presque plus rien. Je gagne bien ma vie mais je suis malheureux. Disons plutôt que je gagne bien ma mort et que j’ai perdu la vie. Traumatisé, j’évite les femmes, cette source éternelle de vie et de joie. J’ai peur, et la peur est l’opposé de l’amour. L’espoir est toujours vivant, mais d’abord il faut écrire. S’isoler, cultiver son malheur. Si vous vous reconnaissez dans mon histoire, vous avez perdu la tête, ou nous sommes tous des âmes perdues. Les deux sont possible. Dehors, une bande de vieillards aigris et sans morale gagne des milliers d’euros par mois pour continuer à foutre le monde en l’air. C’est ce qu’ils appellent la politique, l’économie, le monde des adultes, la guerre, la production, le profit, la virilité. Je crois que mon manque d’énergie vitale est une sorte de résistance contre ce faux-monde. Vivre dans notre époque, comme si ça voulait encore dire quelque chose. Vous suivez un peu l’actualité? Vous pensez qu’il y a encore un avenir pour nous? Alors, pour les enfants… Ils voudront continuer à conduire leurs bagnoles, eux aussi, pendant que la terre s’enfonce dans des océans de pollution. Il n’y a plus de limites.
2. Actes manqués et auto-sabotages
Ah, toutes ces nuits blanches, ces pensées noires qui sont le miroir de nos âmes. Être authentique est le jeu le plus cruel à jouer. J’ai des histoires, magnifiques comme l’océan est profond. Elles resteront non-publiées, jusqu’à ce que le moment soit venu de choquer mon public en existence. Après les tempêtes, avant le calme de la lumière. Il reste deux jours pour remettre les choses en ordre. Nous sommes des experts dans l’art de briser nos propres coeurs. Ne regrette jamais les erreurs que tu as faites, embrasse la confusion. Le rêve est terminé, maintenant la vie peut commencer. Plus tu ressens, plus vite tu guéris. Je me dis que les choses seront différentes, sans les bêtises émotionelles-poétiques, mais en réalité, je prends juste ce dont j’ai besoin et j’écris ce que je veux. C’est tout moi. Je sais mieux que de croire à mes propres déceptions. La soif de la vie doit nous consumer tous. Mes amants sont des illusions illustrées de coeurs brisés et de jours et nuits de plaisirs partagés. C’est mon destin de désirer l’amour. Nous ferions bien de prendre des risques pour perdre ce qui ne nous a jamais appartenu. Tout est à prendre, personne n’appartient à personne. Après un gramme de divertissement instantané, je me suis dit de rester hors ligne aujourd’hui. Le vert est la couleur de la renaissance. Je me sens enfin vivant. S’ignorer c’est ennuyeux. Je pense que j’ai assez de matériel pour mon prochain livre, mais je vais probablement devoir faire encore un peu plus de recherches. Retour rechargé, aéroport, la guerrière de nouvel an vient me chercher, puis on ne se voit plus jamais. Parfait.
Samedi soir, vitamines B, les potes à la Boîte. Dimanche, tes pompes vert-stylés, des ragots, visite musée, du jazz et un cocktail, j’ai tout claqué, pour finir en bonheur, bienveillance et beauté, le poseur déposé. Lundi piscine, la meuf qui gère, encore pompette, after, je prends de la vitamine C. Mardi la descente, piscine, bain de Gong, recalibrer. Mercredi, un parc, un chocolat chaud, des taquineries, une belle énergie, mes disques de Prince, Pilates et Poésie. Jeudi, retrait de permis, rattrapé par la justice. Deux envies, une vie, le mâle aimé, flagrant délit, une dispute animée, deux bars, deux verres, un début de comment faire. Le soir je me moque, le matin elle me bloque. Oui, encore elle. J’ai beau écrire. Vendredi, cerveau reptile, paix intérieure, passage radio et s’ignorer. Pourquoi se faire excuser, et puis non, mais si.
Un accident est vite arrivé, il faut prendre du recul pour mieux avancer. Cette semaine était mauvaise pour l’esprit, douce pour le coeur et amère pour le citron. Je suis un ours, brutal et sans tact, et j’oublie que les femmes sont des êtres fragiles. Surpris par l’orage, je n’ai pas vu les signes. Je pourrais dire que ça n’a rien à voir avec moi, que la réaction des autres leur appartient, mais c’est vrai que je n’étais pas toujours tout nette. J’ai touché à une douleur, provoqué une réaction, et les after-effects sont hors de mon contrôle. J’aurais pu être plus attentif, et la poursuivre, c’est elle que je voulais, finalement. Entre les lignes se cachent souvent des vérités, des sentiments, des comportements qu’on doit assumer. Parfois on se dispute, ça arrive. Elle aboie, je mords.
3. FUIR
Tu sais, y a deux types de personnes dans la vie. Y a ceux qui vivent des histoires simples, avec des réveils à 7h du mat’, des tartines bio, et des relations stables où ils font des puzzles à deux le dimanche. Et puis y a nous autres. Un mardi, elle m’appelle. Simple. Innocent. On s’installe devant un café, on discute un peu, mais rapidement, elle veut bouger. Je suis ce que je devrais fuir. Jeux de maux. On marche jusqu’aux Marolles et on trouve une terrasse. Il fait froid, mais peu importe. On se marre, on enchaîne les conneries, “Mais c’est super!” devient notre gimmick de la soirée. Un mantra un peu ironique, un peu sincère, qui colle à l’ambiance. Après quelques verres, on décide de filer au Baar. D’abord juste pour voir, puis finalement on reste. Il y a une soirée stand-up. Sur place, on commande encore à boire. Elle me parle d’un rencard, un mec avec qui elle est aller voir un concert. Tout se passait bien, jusqu’à ce qu’il devienne hyper lourd, insistant. Ça a mal tourné, ils se sont disputés. Mauvais plan d’un type qui ne comprend pas quand arrêter le progrès social. Je dis rien, je note.
Elle me regarde, un sourire en coin. “J’ai commandé.” Je fronce les sourcils. “Tu veux des sous ?” Elle secoue la tête. “Non, c’est bon.” Son ex est là, elle le repère au fond de la salle et se fige légèrement. Je capte son malaise, alors je parle, j’occupe l’espace, je lui change les idées. Entretemps, la coke est arrivée. On file aux toilettes en alternance. On vit vraiment une époque formidable. En bas, le stand-up commence. On se cale devant la scène, on est tout devant. Mauvaise idée. Parce que moi, dès que je suis face à un micro, même si c’est pas le mien… je parle. Le mec fait une blague moyenne, et je balance : « Y a une meuf après lui, elle est vraiment bonne ! » Pile à ce moment-là… SILENCE. Tout le monde me regarde. Les gens rigolent. Elle aussi, en mode « Mais pourquoi tu fais ça ? » La soirée continue, le temps s’efface. Il est tard quand elle appelle une copine, et plus tard encore quand on finit chez moi en after. Je me retrouve assis sur mon canapé avec deux jeunes nanas magnifiques, je plane un peu. Je commence à espérer. Tu connais cette espèce d’optimisme débile, qui te fait croire qu’une fille qui t’a dit non 8 fois va soudain changer d’avis parce qu’il est 3h du mat’ et l’ambiance est tamisée ? Spoiler : ça marche jamais. On met sa copine dans un Uber et elle me dit qu’on va se coucher. Je lui file des vêtements, mais je la sens tendue. On se glisse dans le lit, chacun de son côté. À un moment, j’essaie de passer un bras sur elle. Elle me repousse, sec. Ok. Message reçu. Mon égo descend plus vite qu’un toboggan humide. Le lendemain, je reçois un bip. “Je voulais pas te réveiller.” Même ses ghostings sont bien élevés. Friendzone 4.0 Les jours passent, et je sens que je suis coincé.
Vendredi, elle me recontacte. Toujours le même rituel. Elle débarque, souriante, lumineuse. Moi, j’ai la gueule d’un mec qui n’a pas dormi depuis 1987. On parle deux minutes, puis elle se barre “aider un pote”. Le soir, elle débarque à la radio. On traîne. Mon ex débarque aussi, enfin, ex est un grand mot. Je l’ai pas vu depuis deux semaines et on est sorti ensemble le temps de deux soirées. Et voici que deux générations se rencontrent. BAM. Mon ex et elle deviennent best friends en trois minutes chrono, comme si elles venaient de découvrir un spa réservé aux traumatisées émotionnelles. Mon ex pourrait être sa mère. Ma vie est une putain de blague. La soirée continue. Je file les thunes, elle passe la commande. Ça sent la lessive coupée. Pas d’effet. C’est peut-être un signe. Peut-être que mon corps me dit : « Si tu dois te droguer pour gérer ta vie, c’est qu’il faut changer de vie. » Mais je suis trop défoncé pour écouter mon corps. J’ai plus d’énergie qu’un hamster sous MD. Elle me balade toute la soirée. Et moi, comme un con, j’espère. Peut-être que je devrais juste la laisser filer. Mais nan. Je continue. Parce que l’espoir, c’est comme une mauvaise drogue : tu sais que ça va te foutre la gueule en vrac, mais tu continues. On bouge à la Boîte. Sur le dancefloor, une nana me fixe. Canon. J’ai envie d’y aller, d’arracher ses fringues, en plein confiance. Mais elle m’appelle, son nounours en main, genre je dors chez toi ce soir, viens! Peut-être que cette fois, elle arrête de me balader. Toute la soirée, elle a fait la meuf sociable, à parler avec tout le monde. Moi, j’étais juste là, un peu jaloux, un peu con. On finit chez moi, après. Le DJ et un pote à lui sont là. On sniffe encore. Je gobe un peu de MDMA, pas grand-chose. Puis ils se cassent. Je suis seul avec elle. Enfin, on est là, mais on n’est pas là. Anesthésié, quelque part ailleurs. Tout d’un coup, elle choppe son sac. “Mon Uber arrive.” Je suis sous le choc. Je pige rien. Elle dit un truc du genre je dois voir un pote mais je suis trop loin, je ne comprends plus rien. Mais donc, elle s’éclipse. Plus tard, un message. “Ne le prends pas mal. Je t’apprécie énormément. Ne te fais pas d’idées, ce n’est pas ça. On se parle demain.” Je joue le mec détaché. “Pas de souci.” Je me dis que je vais dormir. Mais la C me laisse en plan, et mes idées en vrac. Ça tourne, ça cogne. Je lui écris, un message irrité. Besoin d’explications. Le matin, réponse expéditive. “Je n’ai pas à me justifier. Tant que ce n’est pas à cause de toi que je suis partie, basta. Va dormir.” Je laisse couler. Mais je dors pas. Je traîne au café avec un pote, toujours en train de bader. J’essaie de la sonner. Elle me coupe direct. “Ça m’angoisse. Stop.” Je la laisse, elle a raison. On se reparle quelques jours après, et tout roule. Mais elle me reste en travers. Je suis dans la friendzone, mais je devrais peut-être juste lui rentrer dedans. J’ai peur de perdre quoi?
Trois semaines plus tard, elle fait un post sur Insta pour résumer sa vie, et je vois une photo d’un mec, tatoué torse nu, dans un lit avec son nounours. Ah, ouais. J’ai une sale réputation, et ça arrive aux meilleurs, mais là, ça pique un peu. De toute façon, elle finit toujours par s’éclipser. Normalement, je devrais être en couple avec ma deuxième femme, faire des brunchs le dimanche et parler de ma retraite. Au lieu de ça, je sniffe dans des toilettes crasseuses et j’essaie de comprendre une gamine de 25 ans qui vit sa best life. J’ai envie de vous dire que non mais, putain, je kiffe.
4. La suite des choses
Un jeudi, elle appelle. — Tu fais quoi ce soir ? — J’ai émission radio. — Ah ok. Bonne émission. Je t’embrasse. Je vais bouffer avec une copine, je déballe ma vie de player sensible, puis je vais à la radio. Je vois sur Insta qu’elle est en ville. Elle fait la fête jusqu’à 7h du mat. Elle voulait juste se défoncer. C’est la vie. Samedi, elle mixe à la Boîte. Moi, je mixe en journée dans un shop. Gueule de bois de la veille. Shots, bières, avec des mecs biens. Le lendemain, je ramasse. Elle me sonne. “Tu veux pas me conduire au shop ?” Elle veut bien. On se retrouve au Bizaar, où un pote me glisse un peu de MD. Elle me dépose, traîne un peu, essaye des fringues. Puis elle rentre se préparer. Le soir, elle rappelle. Je suis éclaté, mais un pote veut aller voir un concert. J’accepte. Elle me propose de bouffer avec ses potes. Je décline. On se retrouve à la Boîte. Toujours la Boîte. Elle mixe bien, quand elle est en forme, c’est la meilleure. Son pote me dit qu’elle était nerveuse au début. Maintenant, elle gère, grave. On danse. À la fin, elle en a marre. “Vas-y, je prends le relais,” je dis. Je mixe, complètement défoncé à la md. Elle passe poser un morceau, puis se barre. La Boîte se vide. Dehors, elle me remercie. “Tu m’as sauvé la vie.” Elle me propose un after chez un pote. On passe au nightshop, elle prend de la vodka. Elle me demande de porter son sac. “Non.” Je commence à me sentir de trop. Dans le nightshop, son pote lui claque un bisou. Laisse tomber. Pas envie de coke ce soir, j’suis trop en mode love amour. Et surtout, pas envie de rentrer seul à six heures du mat. Quand ils montent dans le Uber, je leur fais un signe. “Amusez-vous bien, les gars.” Ils sont déjà ailleurs, ça parle fort pour rien dire. Je rentre chez moi. Content de mon choix. La md cogne encore. Pas de sommeil. Je me branle trois ou quatre fois. Je suis le roi du monde. Je ne veux pas savoir si elle a baisé l’autre ou si c’était juste un after à rallonge. Le lendemain, un coeur sur Insta. Descente. Je réponds avec un coeur. Fin de l’histoire. J’arrête de la contacter en premier. Tout se mélange Je vois mon psy en après-midi, qui me dit que je dois arrêter de courir après ma propre chute. J’ai envie de coucher avec mon psy. Les sentiments romantiques ou émoustillants envers son thérapeute appartiennent à un phénomène commun appelé “transfert”. Que dire, j’ai besoin de baiser, j’aime bien les femmes. Entretemps, je cours avec des gens perdus dans la nuit bruxelloise et mon psy me dit que c’est une fuite. J’assume. J’ai passé l’âge, mais putain, avec elle… J’ai la forme de mes 40 ans, l’état d’esprit d’un gamin de 17 ans. Trop d’envies. Trop d’attentes. Trop de frustrations. J’ai 52 ans et je vais me retrouver frustré au poste, c’est pas mon genre. Trouver une meuf. Baiser. Ne pas être le plan de secours. Self-control. Vivre ma putain de vie. Ne pas répondre trop vite. Ne pas supplier. Ne pas réagir à chaud. Sortir avec d’autres femmes. Effet miroir, je fais des efforts monumentales tandis que je suis déjà la putain de meilleure version de moi-même.
5. La Chinoise
À ce moment-là, j’aurais pu prendre un break, faire une retraite spirituelle, méditer sur mes choix de vie. Mais nan. Je prends une coloc chinoise, encore une jeune femme. Le dernier gars était super doux et gentil, mais il parlait à peine et restait enfermé dans sa chambre comme un moine en dépression ou un toxico en descente. Un peu d’action ne me ferait pas de mal. Le simple fait que je pense tout ça sans rien dire, en dit long sur moi. Une semaine plus tard, après avoir signé le bail à la banque, on va boire un café au Verschueren. Elle pose sa tasse et lâche : “Ah au fait, tu sais que je suis enceinte ? Je vais avorter la semaine prochaine.” Non, je ne savais pas. “Ah mais j’en parlais au téléphone hier, t’étais dans la pièce, donc je pensais que t’avais entendu.” -“Non, je n’écoute pas tes conversations.” Elle me regarde, surprise. Moi, je ne pense rien. Dès le premier jour, elle commence à m’appeler Sugar Daddy ou “l’ours”. Elle répète sans cesse que je suis vraiment très calme, que je parle très peu. Elle porte mes fringues, laisse le linge trempé dans la machine, balance ses sacs un peu partout dans l’appart. Le premier soir, je rentre et il y a des gens qui dorment sur le canapé. Elle ramène des mecs chelous. Y en a un, en pleine nuit, qui débarque torse nu dans ma chambre. Il la cherchait. Moi, je cherche juste à comprendre où est partie ma dignité. Allez, un peu d’animation, faut pas être coincé, je me dis. Une nuit plus tard, un de ses collègues squatte chez nous “pour une durée indéterminée”. Il n’a pas de logement. C’est aussi lui qui l’a mise enceinte. Il a 20 ans, c’est le cousin d’un DJ parisien. Chaque fois que je tente d’expliquer qu’on n’est pas à l’hôtel mais juste à deux dans un petit appart, elle part en mode passif-agressif. Et puis un jour, elle explose. Crise de rage hystérique. Elle hurle dans l’appart : “ENCULÉ DE MERDE !!!” Moi, pendant ce temps-là, je fais ce que je sais faire de mieux. Je fume une clope et je reste immobile. Zen. Stoïque. Parce que crier, c’est surfait. Quand elle part à la clinique pour l’IVG, elle prend mon bracelet africain, pour se guider spirituellement, précise-t-elle. Elle me sort ça comme si c’était normal.
Je commence à voir des photos de mes affaires sur son Insta, des bouts de ma vie sur son Facebook. Des Citrons ici, des Lazy Rebels par là. Un jour, elle trottine dans l’appart en minishort, jambes interminables. “Alors, t’aimes les jeunes femmes ?” Elle rigole. “Tu vas pas tomber amoureux de moi, hein ?” Je ne sais pas si je dois être flatté ou mal à l’aise. Un soir, je décide d’inviter les voisines pour un dîner tranquille. Elle débarque, en retard, trouble dans son regard, un pote avec elle. Direct, elle se prend la tête avec la voisine qui me plaisait bien. Puis un pote à moi arrive, un perché lui aussi. En cinq minutes, ils sont en train de s’engueuler comme des chiens. Jusqu’à ce qu’elle fonde en larmes. Les voisins se barrent, trop de malaise. Elle se tourne vers son pote et balance, fort, comme pour être sûre que j’entende: “Mon ancien coloc était dingue amoureux de moi, il était tellement jaloux!” Son pote hoche la tête. Elle continue, plus forte: “Ouais, mon cousin… Je l’ai baisé plusieurs fois. Il dit qu’il m’aime. Juste quand je lui annonce que je suis enceinte. Mais quelle idée !” Silence. Elle enchaîne, imperturbable: “J’ai déjà fait quatre dépressions sévères. Je sais de quoi je parle.” Je bois du vin. Beaucoup de vin. J’ignore tout. Être jeune, c’est plus dur qu’avant, je crois. Puis je me fige. Cette folie borderline, je la connais. Deux exes, deux traumatismes. Je les attire, ou je les cherche, je ne sais pas. J’avais presque oublié ces histoires, mais tout revient d’un coup. Un dimanche matin, je me réveille tard. Dans la salle de bain, ça rigole et ça trébuche. Je sais déjà ce qui se passe. Cinq fois, je lui ai dit de dégager ce gamin de 20 ans. Je fais du bruit dans la cuisine. Assiette, lave-vaisselle. Que ça s’entende. Le mec se faufile dehors, il sent la tempête arriver. La Chinoise, elle, part en crise. Elle claque la porte de sa chambre. Se réfugie dans la salle de bain. Elle hurle. Elle gueule. Elle pousse des cris. “J’HABITE ICI ! J’EN AI MARRE ! ENCULÉ DE MERDE !” Elle a besoin d’aide, je pense. Mais moi, je n’en peux plus, je suis trop sensible. Et après on va encore dire que je suis méprisable. C’est vrai qu’une femme qui doit se faire avorter, ça doit être un truc lourd à porter. Je fume une clope, immobile, à table. Une heure plus tard, elle sort la tête du couloir. Elle s’excuse. Comme si elle avait juste fait tomber une fourchette. Et là, elle recommence. “Franchement, tu devrais vraiment commencer à agir NORMALEMENT !” Agis normalement toi-même, je me dis. C’est l’univers qui essaie de me faire une leçon subtile… en m’éclatant la gueule. Des fois, la meilleure aventure, c’est de fermer sa porte à clé et de regarder Netflix. Une femme stable
6. La Normale
Après, du coup, j’ai essayé autre chose, en paralelle, pendant un mois ou deux. Une nana avec deux enfants, une artiste. Elle communiquait super bien, elle était mignonne, elle avait son passé comme tout le monde, mais on rigolait bien, on parlait beaucoup, elle sentait que j’avais besoin d’écoute et elle trouvait toujours les bons mots pour me rassurer. Si j’avais un doute sur ma vie, elle me répondait en aphorismes ou citations spirituelles. Elle avait plus ou moins mon âge, et je me sentais mature avec elle. Mais c’était horrible. C’était trop parfaite et je n’étais pas amoureux ou pas assez mature, ce qui est dire la même chose, en vrai. J’ai vraiment essayé, mais très vite les expos, les pizzas devant un film, le sérieux de la chose, m’ont saoulé. Quand elle m’a dit que je pouvais péter dans le lit, j’ai fait un gros bloquage. Jamais je veux vivre cette vie. Je respecte trop les femmes pour leur imposer ce qui sort de mon cul la nuit. Déjà que je ronfle, que j’écris de la poésie et qu’elles doivent écouter mes conneries quand je parle. Non mais. Faut pas exagérer non plus. Je suis devenu très froid et elle a tout de suite compris le truc. Elle m’a souhaité un bon dimanche et un bel avenir. Elle a préféré se choisir, ce que je comprends. Ce n’est pas que je ne veux pas m’engager dans une relation sérieuse, mais aller trop vite, le côté fusionnel, un peu de danger, limite toxique... ça me parle plus, ça m’inspire. Le plaisir, en dérive Je ne sais pas quoi vous dire, le pourquoi et le comment. Pourtant c’est simple. Je n’avais aucun sens, je voulais juste le plaisir, sans direction. Après des années de jouer au fonctionnaire, je me suis un peu laisser aller. J’étais en colère continue. Tout m’énervait. Je voulais ma dopamine. Je voulais une meuf toxique qui me faisait du mal juste pour que je ressente quelque chose. Le problème, c’est que tout le monde sait que je suis juste un mec hypersensible qui se fait piégé tout le temps. Le gars avec la mauvaise réputation, le mec compliqué. Le mec bizarre qui fume trop et qui réfléchit trop. Oui, c’était une fuite. Et puis je me suis réalisé que, si j’étais mon propre soleil, autant m’allumer. Je ne suis pas suicidaire, mais je suis un peu fatigué par l’existence, parfois. J’ai l’impression que tout est difficile.
Même arrêter la clope, c’est trop dur. Je fume, je réfléchis trop, je regarde Instagram, je bloque des gens, je recommence à les suivre. C’est un cycle infernal.
7. Juju m’écoute
Ma psy m’a dit un truc super intelligent hier : “Il faut être moins dans la réflexion et plus dans l’action.” J’ai pensé: “C’est beau ce que vous dites. Je vais y réfléchir.”Je suis trop gentil, sauf avec moi-même. Je suis comme un distributeur automatique de pardon. Le truc, c’est que j’ai un énorme manque affectif que j’ose même pas assumer. Pourtant, y a des gens qui m’aiment, qui me respectent, qui m’admirent. Mais moi, ça fait 10 ans que je ne me kiffait pas. C’est relou. Je sais que je devrais m’aimer, accepter mes failles, avancer. Je pourrais être heureux, là, maintenant… si je prenais juste UNE initiative. Mais non. Je procrastine. Je me plains. Je réfléchis. Et ça m’énerve. Peut-être que je devrais juste arrêter d’écrire ce genre de messages. Peut-être que je devrais écrire un livre à la place. Peutêtre que je devrais arrêter de scroller Instagram et vivre MA putain de vie. Parce que, au fond, je sais ce que je dois faire pour être heureux. Je sais que je dois sortir de ma zone de confort. Arrêter de fuir. Arrêter de me poser mille questions dès qu’il y a un rayon de soleil. Je sais déjà tout. Je suis libre. Je pourrais partir loin, recommencer à zéro. Bref. Je vais aller nager. Peut-être prendre mon vélo. Peut-être réfléchir encore un peu. Je sais que cet état d’esprit, il va passer. Et un jour, je vais revivre. Peut-être demain. Peut-être dans 10 minutes. Ou peut-être après ma dernière clope. Les pensées jetables méritent d’être jetées
Ce qu’on critique chez les autres est souvent ce qu’on n’assume pas chez nous-mêmes. Garder son calme, mettre ses limites. Rassurer l’enfant pour nourrir l’homme. Laisser couler les choses, ne plus perdre son temps. Vivre. Avec l’âge, on apprécie les gens de plus en plus, on se rapproche de ceux qu’on aime au lieu de les repousser par simple peur ou traumatisme du passé, on répare ce qui ne va pas, on s’excuse si on a déclenché des blessures, on en guérit, on en parle, on en rit, on en pleure, on communique, on assume, on écrit, on apprend, on oublie nos égos, on travaille son empathie, on met de l’eau dans le vin si on veut rester potes ou proches de ceux qui nous font du bien, on met nos limites pour éviter de devoir réparer des liens cassés, on se pardonne, on se donne de l’espace, on reste honnête et bienveillant, on clarifie ses intentions, on devient plus ou moins rationnelle et on agit plus à coeur ouvert, on reste à l’écoute, on fait des efforts à se faire confiance en faisant confiance aux autres, on se remet en question tout en se posant moins de questions sur les détails de la vie, on recherche la paix intérieure tout en restant connecté au monde, et on arrête de croire à ces citations Facebook ou Instagram qui nous bombardent de messages comme quoi on est mieux en paix tout seul, en laissant tomber des gens. On est tous le miroir de l’autre, donc éviter les autres c’est tout simplement ne pas vouloir se connaître soi-même. On est mieux ensemble, avec amour, compassion et joie de vivre, pas chacun dans son coin avec des philosophies de deuxième rang d’un individualisme défaitiste et désillusionné d’une société capitaliste en déclin moralement et humainement, une société dans laquelle plus personne croit encore, une société qui carbure à la mort annoncée des gens blessés par des gens blessés. Non merci, la vie est trop belle. Comment avancer sans bouger Il y a un an, j’écrivais un poème, on m’a viré et j’ai changé mon propre destin. Les poèmes restent les mêmes, les gens changent. La puissance des mots. J’y crois. On est le maître de sa propre vie. Ce qu’on pense, on le devient. Je repousse ceux et celles que j’attire. La femme? Si vous la poursuivez, cela signifie qu’elle doit s’enfuir. Prenez un ticket. L’énergie féminine est libre et expansive, l’énergie masculine est stable et solide. Instagram veut nous séparer, ils veulent faire de nous des consommateurs individuels, en manque, pour acheter des produits qui nous feront oublier qu’on est des êtres sociales. J’ai le droit de changer d’avis, de me perdre dans mes sentiments, d’assouvir mes désirs, d’avancer, de reculer, de gagner et de perdre. Les histoires restent muettes. Ce que j’écris est soit une observation de la réalité qui se répète jusqu’au moment où j’ai appris ma leçon, ou un moyen de manifester une autre réalité.
8. Eloge de la fuite
J’ai senti que je voulais rester, alors je suis parti. J’avais des attentes. Je reste dans ma tête, j’analyse et je juge. Mon interprétation en dit plus sur mon monde intérieur que sur la personne à l’autre bout du fil rouge. Pourtant, je ne fais qu’écouter et me mettre en question. Je veux rester léger, lucide, franche et naïve. Tant pis si je me blesse. Je transforme ma colère matinale en joie de vivre détendu. Bref. Je n’ai pas fait des prises de conscience universelles pour être touché par une série de scènes de vie Parisienne. Il y a des choses qui s’expliquent à l’aveugle. La nuit, je me suis enfuis dans des verres pour éviter des regards curieux. En soirée, on joue à qui se barre le premier. On prends des drogues qui nous donnent un sens d’appartenance. Je bois le verre de trop qui me rends sincère et lucide. Je me réveille entre je sais et je ne veux pas savoir. On s’ignore, on se suit, on unfollow, on s’observe, on se fait des films, on s’enfuit, et finalement, on s’en fout. Tout ça fait partie de notre époque, toutes générations confondues, de 25 à 50 ans. Le désir a ses raisons, que la raison ne désire pas toujours savoir. Une nouvelle lune, des nouvelles intentions. Elle me calme. Elle peint des oiseaux comme des fissures dans la lumière et elle me dis des choses comme “la liberté est importante pour s’abandonner à l’autre”. On serait à vendre, je nous achèterai. Je risque encore de déconner, on ne change pas un ours, mais elle me rassure. Elle sait que je suis dans une période de renouvellement, “mais ça n’empêche pas de vivre des chouettes trucs,” elle me dit. J’apporte mes observations sur la profondeur des nuits qui se mêlent entre plaisir et dérive. Les histoires, ça reste entre nous. On tague quand ça nous arrange. J’accepte vos manières d’être. Ma manière, c’est d’écrire ce que je vis pour rendre le plus intime universel. Je crois que ça s’appelle la poésie. La nuit est remplie de vampires, qui sucent mes maux. Le jour, on se retrouve sur une terrasse ensoleillée, le sourire au visage.
9. Tabula Rasa
Une écolière joueuse de maux inexistants, des masques qui éclatent sans prévenir, la violence comme ultime carte d’une faiblesse évidente. Les ragots glissent sur mon dos, révélant mon vrai visage, tandis que dans le bruit de la ville, le silence demeure ma force. Un livre ouvert ne doit rien avoir de caché. J’ai traversé des épreuves, entre violence et manipulations. Parfois, les gens parlent, inventent, cherchent à semer le doute. Je n’ai aucun contrôle sur ça, mais j’ai le choix de ne pas y accorder d’énergie. La vérité finit toujours par s’imposer d’elle-même. J’ai parfois l’habitude de tout mélanger, de prendre de la distance brutalement, surtout quand je traverse des moments perturbants. Je le sais, et j’assume mes failles humaines. Mais me protéger ne devrait pas nécessiter de justification, et encore moins provoquer des réactions violentes. Je prends mes responsabilités. Ni la fuite, ni la colère ne sont des solutions. J’avance, avec lucidité, entouré des bonnes personnes. La sérénité est mon cap. Je reste ouvert à ceux qui veulent m’accompagner avec bienveillance. Trouver un équilibre, rester lucide et avancer en pleine conscience, c’est le véritable défi. Je choisis aujourd’hui d’avancer sans haine ni rancune. Pardonner ne signifie pas tout accepter, mais simplement refuser d’être alourdi par la négativité. J’espère que chacun, avec le temps, trouvera sa propre paix intérieure. Il m’est impossible de détester qui que ce soit. Mon énergie, je préfère la consacrer à ce qui m’élève : mon art, mes chansons, mes récits. Rien ni personne ne m’empêchera d’aller vers le positif, tout en restant conscient de mes propres limites. Je prends du recul. J’efface l’ardoise. J’écris une nouvelle page et je passe à autre chose.
10. Bonne descente.
La nuit avait été douce-amère. Une de celles qu’on partage sans vraiment s’appartenir. On avait parlé, oui. De tout, de rien, de nos trous noirs à nous. Entre deux lignes, deux confidences, deux silences qui s'accrochaient à nos cils. Elle avait cette manière de poser ses yeux sur moi comme on scrute une tempête sans vouloir s’y perdre. Et moi, j’étais là, encore une fois, à l’aimer en silence. À la laisser revenir, malgré les caprices, malgré les hauts, les bas, les piques d’orgueil et les regards absents. Je me manquais de respect à moi-même, finalement. Je savais bien qu’elle me traitait comme un refuge saisonnier. Mais j’acceptais. J’accueillais. Comme si j’étais né pour ça.
Et puis, le matin a frappé. Violent, cru, sans politesse. Elle était en descente. Fermée. Parano. Comme un animal blessé qui cherche la sortie. Elle voulait partir, vite. Elle ne disait pas pourquoi. Moi, j’étais encore ailleurs, suspendu entre veille et vertige. Et dans ses yeux, juste avant qu’elle tourne le dos, j’ai vu… Un “ouais” qui sonnait comme une excuse. Une attente. Peut-être un baiser. Peut-être juste un signe. Mais j’étais déjà hors de moi. Plus homme. Moins moi. J’ai claqué la porte. Fort. Comme on claque la fin d’un roman mal écrit. Pas contre elle. Contre cette boucle. Contre moi aussi, un peu. Et j’ai balancé : “Dégage. Tu ne fais que profiter de moi.” C’était moche. C’était vrai, un peu. C’était surtout trop. Je m’en suis voulu. J’ai écrit. Deux fois. Des excuses sincères. Pas pour qu’elle revienne, mais parce que je ne voulais pas que cette colère-là me définisse. Je lui ai dit : j’ai pété un câble. J’étais pas bien. Je vois l’impact. Et elle ? Elle a dit : “L’agression et la violence, c’est inacceptable. Reste très, très loin de moi.” Puis blackout. Blocage total. Comme si j’étais un virus. Un danger. Une tâche à effacer. Comme si toute la douleur d’avant n’avait jamais existé. Elle aussi, jouait. Avec mes nerfs. Avec mes silences. Avec l’ambiguïté comme arme de distraction massive. Et moi, je me suis accroché. Trop. Jusqu’à ce que ça craque.
Elle me manque parfois. Mais c’est pas elle. C’est le flou. Le frisson. L’illusion. Ce fantasme d’un lien qu’on aurait pu écrire à deux - si elle avait voulu lire entre les lignes, blanches.