La ferme tenait à peine.
Quatre murs pourris, des planches gondolées, un toit qui pissait l’eau. Une baraque qui crachait la poussière et la moisissure.
Le silence n’y était jamais total : toujours un grincement, un rongeur, un truc qui râclait quelque part.
Silène et Maëlle y vivaient comme deux punaises sous une pierre. Deux sœurs trop maigres, trop crevées, tannées par les années de merde. Leurs mains coupaient, grattait, portaient. Elles vivaient à genoux, à plat ventre, la bouffe dans des gamelles fendues, les vêtements qui puaient la sueur même propres.
Le chat, c’était juste un truc de vivant, un petit reste de quelque chose qui respire sans faire chier. Il dormait dans le foin, il pissait sur les draps, il chauffait le bas du lit.
Et puis, plus rien.
Silence. Une gamelle pleine depuis deux jours. Le vent dans les poutres.
C’est la grange qui a parlé.
Des traces au sol. Pas nettes. Collantes. Sombres.
Et au fond : le chien.
Le vieux bâtard, trop gros, trop lent, les yeux mouillés, le flanc qui battait comme un moteur au bord de l’arrêt.
Il puait la viande crue.
Il avait du sang jusque dans les oreilles.
Maëlle a vu les bouts de poil dans sa gueule.
Silène a vu les os. Minuscules. Blancs. Un bout de patte.
Le chat avait été déchiqueté comme un chiffon sale.
Elles ont rien dit.
Elles ont juste su.
Il fallait le crever.
Pas une décision. Une évidence.
Pas un cri, pas un mot. Le chien devait payer. C’était pas de la justice, c’était du nettoyage.
Elles ont tout préparé. Pas comme des folles. Comme des ouvrières.
Une corde, une bêche, un vieux couteau de cuisine.
Pas pour faire bien. Pour faire mal.
La nuit, elles l’ont attrapé.
Le chien s’est laissé faire au début, la queue qui bat.
Puis il a compris.
Il a grogné. Tenté de fuir.
Trop tard.
Elles lui ont sauté dessus.
Maëlle s’est fait mordre. La chair du poignet déchirée, le sang qui coule chaud.
Silène lui a foutu un coup de genou dans la gueule.
Le chien a couiné, s’est tordu.
La corde a cisaillé son cou.
Il s’est pissé dessus. Un truc chaud et amer.
Elles l’ont plaqué, étranglé, poignardé. Pas propre. Pas net.
Pas un coup. Plusieurs.
Dans le ventre. Dans la gorge. Dans la gueule.
Elles criaient en même temps. Comme si elles se vidaient.
Quand ça s’est arrêté, il restait plus qu’un tas chaud, qui fumait.
Du sang partout. Des touffes de poils collées à leurs bras. Des traces de morsure.
Elles ont laissé le corps là.
Pas de trou, pas d’enterrement.
Juste un cadavre gonflé qui pue, qui attire les mouches.
Les jours ont passé dans l’odeur.
La viande tournait. Les asticots sortaient du cul du chien.
Maëlle saignait toujours. Silène avait de la fièvre.
Elles parlaient pas. Elles regardaient.
Elles dormaient peu. Elles mangeaient pas. Elles vomissaient des fils de bave jaune.
Le cadavre est resté là.
Au milieu. Comme une table. Comme un meuble.
Elles s’asseyaient à côté. Elles fumaient. Elles crachaient.
Parfois Maëlle pissait dessus. Silène le frappait avec une pelle, pour rien.
Y’avait plus de but.
Juste la fatigue.
Juste la crasse, la merde, la puanteur, les cris dans la gorge.
Et ça suffisait.
Ça tenait debout, comme elles.
Quatre murs pourris, des planches gondolées, un toit qui pissait l’eau. Une baraque qui crachait la poussière et la moisissure.
Le silence n’y était jamais total : toujours un grincement, un rongeur, un truc qui râclait quelque part.
Silène et Maëlle y vivaient comme deux punaises sous une pierre. Deux sœurs trop maigres, trop crevées, tannées par les années de merde. Leurs mains coupaient, grattait, portaient. Elles vivaient à genoux, à plat ventre, la bouffe dans des gamelles fendues, les vêtements qui puaient la sueur même propres.
Le chat, c’était juste un truc de vivant, un petit reste de quelque chose qui respire sans faire chier. Il dormait dans le foin, il pissait sur les draps, il chauffait le bas du lit.
Et puis, plus rien.
Silence. Une gamelle pleine depuis deux jours. Le vent dans les poutres.
C’est la grange qui a parlé.
Des traces au sol. Pas nettes. Collantes. Sombres.
Et au fond : le chien.
Le vieux bâtard, trop gros, trop lent, les yeux mouillés, le flanc qui battait comme un moteur au bord de l’arrêt.
Il puait la viande crue.
Il avait du sang jusque dans les oreilles.
Maëlle a vu les bouts de poil dans sa gueule.
Silène a vu les os. Minuscules. Blancs. Un bout de patte.
Le chat avait été déchiqueté comme un chiffon sale.
Elles ont rien dit.
Elles ont juste su.
Il fallait le crever.
Pas une décision. Une évidence.
Pas un cri, pas un mot. Le chien devait payer. C’était pas de la justice, c’était du nettoyage.
Elles ont tout préparé. Pas comme des folles. Comme des ouvrières.
Une corde, une bêche, un vieux couteau de cuisine.
Pas pour faire bien. Pour faire mal.
La nuit, elles l’ont attrapé.
Le chien s’est laissé faire au début, la queue qui bat.
Puis il a compris.
Il a grogné. Tenté de fuir.
Trop tard.
Elles lui ont sauté dessus.
Maëlle s’est fait mordre. La chair du poignet déchirée, le sang qui coule chaud.
Silène lui a foutu un coup de genou dans la gueule.
Le chien a couiné, s’est tordu.
La corde a cisaillé son cou.
Il s’est pissé dessus. Un truc chaud et amer.
Elles l’ont plaqué, étranglé, poignardé. Pas propre. Pas net.
Pas un coup. Plusieurs.
Dans le ventre. Dans la gorge. Dans la gueule.
Elles criaient en même temps. Comme si elles se vidaient.
Quand ça s’est arrêté, il restait plus qu’un tas chaud, qui fumait.
Du sang partout. Des touffes de poils collées à leurs bras. Des traces de morsure.
Elles ont laissé le corps là.
Pas de trou, pas d’enterrement.
Juste un cadavre gonflé qui pue, qui attire les mouches.
Les jours ont passé dans l’odeur.
La viande tournait. Les asticots sortaient du cul du chien.
Maëlle saignait toujours. Silène avait de la fièvre.
Elles parlaient pas. Elles regardaient.
Elles dormaient peu. Elles mangeaient pas. Elles vomissaient des fils de bave jaune.
Le cadavre est resté là.
Au milieu. Comme une table. Comme un meuble.
Elles s’asseyaient à côté. Elles fumaient. Elles crachaient.
Parfois Maëlle pissait dessus. Silène le frappait avec une pelle, pour rien.
Y’avait plus de but.
Juste la fatigue.
Juste la crasse, la merde, la puanteur, les cris dans la gorge.
Et ça suffisait.
Ça tenait debout, comme elles.