La retenue en société 2

Le 16/04/2003
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par Arkanya
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Thèmes / Polémique / Société
Ca me fait clairement chier de publier un article ni drôle ni revendicatif ni sombre ici, mais par simple amitié avec Arkanya qui a prouvé pour tout un tas d'autres raisons qu'elle est très zonarde, je le fais quand même, c'est donc une réponse directe au mini-article de Clax, 'la retenue en société' (à lire avant donc)
Se museler pour quoi faire ? Les bases mêmes de la vie en société passent bien par la communication.
D’après Clax, le tri est à faire. Oui, c’est vrai, le tri est à faire, mais au moins autant le tri des gens que le tri de leurs paroles. Les mondanités, les trucs débiles, les “tics”, les discours préformatés, c’est pas vraiment ce qui caractérise une personne. Souvent elle ne peut pas s’en empêcher, pour une bonne raison, c’est une sorte de vernis qui sert à présenter une version de soi qui semble acceptable. D’ailleurs, bien souvent, les gens en ont conscience et un trait d’humour les désarme automatiquement et fait tomber le masque en même temps qu’il ouvre vers une communication plus constructive. S’arrêter à cette première impression des gens, n’est-ce pas les juger aussi, les cataloguer ? D’ailleurs le fait de juste les regarder sans broncher, en tirant une gueule de trois mètres genre “c’est-des-conneries-ce-que-tu-dis” est tout sauf une absence de réaction. Par contre ça n’encourage pas l’autre à franchir la distance des convenances. La politesse sert alors à mettre l’autre en confiance, à lui montrer qu’on peut aller plus loin, qu’on n’a pas besoin de se cacher.
Quand on a dépassé cette phase de première approche, les “conneries” qui sortent de la bouche des gens sont davantage l’image de ce qu’ils pensent. Mais la politesse, c’est comme une langue universelle qui saute les générations et les divergences. Si je dis à l’autre ce que tu dis c’est des conneries, si je me met en colère, si je “balance tout”, je perd ma crédibilité auprès d’une bonne moitié de l’auditoire, et finalement ça paraît plutôt normal. Alors que le simple fait de dire “je ne suis pas d’accord avec toi parce que…” ouvre vers un dialogue et permet bien souvent de se rendre compte que l’autre est quelqu’un de bien, même si ses opinions portent à controverse.
Après il y a le problème des convenances de la hiérarchie. Qu’est-ce qui empêche de dire à son patron “je pense avoir suffisamment travaillé sur ce dossier pour en garantir le contenu, si l’orientation que j’ai prise n’est pas en accord avec ce que vous vouliez, j’en suis désolé, mais nous pouvons voir ensemble les corrections à apporter” ? Il me semble que c’est quand même plus utile pour l’ambiance qui va régner dans le bureau et pour la progression du-dit dossier que de se taire en ruminant dans son coin et en virant de lui faire bouffer les feuilles et le bureau avec. D’ailleurs le simple fait de demander avec un grand sourire niais et un air de totale innocence à la pétasse qui s’occupe des salaires pour quelle raison elle me compte 6 jours de congés au lieu de 5 comme sur sa feuille à elle la rend coupable et il y a plus de chance qu’elle se confonde en excuses bredouillantes et s’empresse de rectifier cette erreur que si je la traite de pétasse, et ça apporte autant de satisfaction de la voir s’aplatir. La diplomatie (la vraie, pas celle qui veut dire que l’on se laisse systématiquement marcher sur les pieds) empêche alors que l’autre rebondisse sur l’agressivité et y trouve justification. Par exemple, si un abruti grille le cédez-le-passage et manque de m’emplafonner il se met bien souvent tout de suite à râler pour se protéger. Un grand sourire le désarmera et l’énervera bien plus qu’un affrontement direct. Et c’est tout aussi jouissif.
Tout ça pour dire qu’on est forcément influencé par l’entourage, et heureusement, sinon il ne servirait à rien de réfléchir et de partager sa vision des choses, parce que cela voudrait dire qu’on influencerait pas les autres non plus, et donc par exemple qu’il serait complètement débile d’écrire des articles dans le genre de celui-ci. L’idée c’est non pas de se sentir prisonnier de l’influence des autres, mais de comprendre qu’on peut aussi apporter sa contribution. Les idées des autres servent aussi à faire avancer les siennes propres, à ne pas laisser végéter un raisonnement figé et anachronique. Et justement le fait même de se taire ou d’envoyer tout valser est peut-être plus un manque d’arguments qu’une réelle réaction.
Enfin, tout ça c’est mon avis, ne vous gênez pas pour m’influencer de votre opinion, au contraire !