Enfance

Le 24/09/2003
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par Herpès
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Thèmes / Obscur / Introspection
Draz s'est dépassée en se mettant dans la peau d'une jeune fille tourmentée, abordant un thème à la Clax avec un style qui dénote de ses progrès impressionnants. Une fiction sombre et malsaine qui vaut le détour.
Un dernier coup d’œil au miroir : elles sont toujours là, ancrés sur ma peau telle une tache de rouille indélébile. Ce sont les seules traces de ce que tu m’as fait subir pendant tant d’années. Je sens encore l’odeur de ma chaire brûlée lorsque tu t’amusais à écraser tes mégots sur ma poitrine naissante, sous prétexte qu’une petite fille n’a pas le droit de grandir.
Mais la douleur physique, n’importe qui peut la dompter : elle n’est qu’éphémère et fini toujours par disparaître. Reste la morsure morale, celle infligée de nombreuses fois et qui remonte à la surface pour un prétexte quelconque.
Il est temps que je m’habille. Pull et pantalon noirs, comme de rigueur depuis ces dernières années. Il faut que personne ne connaisse l’existence de tes « jeux ». C’est toi même qui me l’avais dit. Et toujours cette honte de devoir laver mes draps en cachette, de frotter les taches de ce sang souillé que tu faisais couler de mon corps. Je me souviens l’attente sous ma couette, le temps qu’Elle s’endorme, le bruit de tes pas sur le plancher grinçant, peur de voir la porte s’entrebâiller et ton odeur se répandre autour de moi, le tressaillement quand tu posais tes mains sur moi. Pour le reste, je ne l’ai pas oublié, je l’ai seulement enfoui au fond de ma mémoire, et c’est cela qui fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Tu n’avais pas le droit de me toucher : tu m’as volé mon enfance, ma jeunesse, mon innocence, je te priverais de la vieillesse indolente dont tu rêves tant.
Profite bien de tes dernières heures Papa, parce que ce soir, tu vas crever…