L'envol

Le 22/01/2005
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par Tyler D
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Thèmes / Obscur / Introspection
Tiens, un bon coup de dégout de la part de Tyler, qui s'en prend à l'humanité dans sa globalité, notamment à son refus effrené et imbécile de la mort. C'est plus amer que colérique, et plus philosophioque que rentre-dedans.
Si on me proposait l’immortalité je n’en voudrais pas. La vie n’est rien sans la mort.
L’humain est le plus malade de tous les animaux. Celui qui a été forcé de se mettre à penser pour tenter d’échapper à sa souffrance. Il a inventé toute une panoplie de concepts pour donner un sens à l’univers qui l’entoure, et surtout à ses tourments et à sa mort. Dans la démarche d’interprétation des phénomènes où il est enfermé, il s’est cru puissant, il a cru que ses explications, plus généralement ses idées, représentent quelque chose, et il a finit par les confondre avec le monde lui-même. Sa folie est apparue au grand jour lorsqu’il a commencé à croire en un univers inaccessible aux sens, à se créer des dieux censés régir la nature. Avec l’évolution de la pensée, il s’est mis à croire en l’existence et au règne de notions toujours plus pernicieuses et aussi démentes que la Justice ou l’Egalité, notions centrées sur la conception d’un Absolu protecteur. En réalité, même s’il n’est pas enfermé dans un système d’explications arbitraires et insipides, que l’on appelle mystères ou religions ou philosophies, il passe son temps à penser pour oublier sa mort et il vit comme s’il était éternel.

Lorsque la vie ne m’apportera plus rien de nouveau ou que je n’aurai plus la possibilité d’en jouir, lorsque je ne banderai plus, que je serai devenu sourd ou aveugle, je la saluerai et je m’envolerai. Ne sont-ils pas pitoyables ceux qui s’accrochent désespérément à une parcelle de vitalité toujours plus faible, enfermés dans un hôpital, repliés sur leur propre néant ?

Beaucoup espèrent piteusement mourir dans leur sommeil, en présumant qu’ils ne verront pas leur mort se pointer, histoire d’avoir pu l’oublier jusqu’au dernier instant. D’autres se figurent qu’ils pourront estomper le face à face par les psychotropes en mourrant d’overdose. Quelques-uns, rares, osent mourir de par leur propre volonté, en effectuant eux-même le dernier geste.

Si je ne meurs pas par accident, mon dernier mouvement sera un envol. Je passerai les dernières secondes de ma vie dans les airs, j’aurai peut-être alors un ultime sentiment de liberté. J’ai souvent rêvé de voir le sol s’approcher de moi, de pouvoir mesurer ce qui me reste à vivre avec la distance qui m’en sépare. Je sais qu’à cet instant je verrai ma vie comme jamais je ne l’aurai vue et j’espère que je pourrai être fier de moi-même, fier de ce que j’aurai réussi à en faire, fier que tout cela ne soit rien.

Amen

ps : veuillez me pardonner la gravité de ce texte sérieux comme la mort