La Zone
La Zone - Un peu de brute dans un monde de finesse
Publication de textes sombres, débiles, violents.
 
 
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Messages - Charogne

#16
Incroyable, de quoi changer mon profil.
Je tiens évidemment à remercier tous mes sponsors pour cette victoire, nombreux à cette occasion, et à remercier l'organisation pour avoir délibérément supprimé leur contrôle anti-dopage.
#17
= INITIATIVES = / Re : test de discord pour la zone
Février 16, 2024, 18:16:45
Jamais vu la zone être autant au point sur les nouveaux moyens de communication. Ça fait presque peur.
#18
Lapinchien, au lit-pot
bravo

Bonne nuit à tous
Je regrette déjà le moment où on devra relire tout ça
#19
Charogne rogne sa chair qui ronge sa rogne.

J'ai même pas écrit charogne.

Oulipo, au dodo.
#20
« Billy XIII »

Je ne suis qu'un bloc de chair rouge filamenteux. « Je m'appelle... J'ai les cheveux... Je viens de... Je suis, Je suis, JE » Non. Je ne suis qu'un tas de viande, de la chair qui saigne. Je suis tendre sous la dent, je suis huileux et moite, je gicle, je suis chaud, tiède, mort ou vivant. En filigranes de tendons et de graisse. Un sac de peau dans lequel des os et des organes et des veines sont articulés autour de viande. Ce n'est pas une introspection, je suis un bloc de chair et les gens sont des blocs de chair. Ce sont des faits, des observations, nous ne sommes que des morceaux de nourriture qui marchons et nous frottons et nous entourons et absorbons et pondons d'autres petits tas de viande.

Je ne veux pas. Je ne souhaite pas. J'existe. J'erre, je m'aplatis, je fais ce qu'un amas de chair est censé être ou faire, j'existe pour être mangé ou frappé ou attendri ou enveloppé. Bien sûr, on ne me comprends pas ; je ne suis qu'un parmi les bruits statique de l'inanité des conversations vides de mes congénères. Un bloc de viande ne parle pas.

Alors ils parlent de société, et si je ne parle pas, et si je n'écoute pas, j'entends. Ils parlent de soif et de faim, ce que je peux comprendre. Nous sommes faits pour être mangés, tués, mâchés, déchiquetés. Nos vêtements sont faits pour être déchirés, pour dévoiler notre chair, nos cheveux pour être rasés, nous créons ce qui peut nous tuer pour nous tuer.

Alors ils parlent de morale, et de paix et de justice. Mais nous mourrons. Je n'écoute pas mais j'entends. La paix ne sert que d'excuse pour continuer la guerre et continuer le massacre. La paix n'existe que pour nous montrer que la paix n'existe pas. La paix n'est inventée que pour justifier le meurtre qui nous unis car tous ensemble nous mourrons de la main des autres. Et même si tu souhaites la paix, véritablement, si tu penses valoir assez pour être écouté et déblatérer le statique de la télévision qui se répète, et que tu es honnête, tu mens. La paix est morte car la paix n'existe pas.

Viande. Rouge. Sang. Chair. Pleurs. Peau.

Mais la justice existe. Je n'écoute pas mais j'entends. Mon cerveau est un bloc de chair aussi, je l'ai développé, il est à moi, il réfléchis pour moi, car Je suis tout de même. Et la justice existe. La justice, c'est regarder autours de soi et se rendre compte que l'on n'est qu'un morceau de viande entre quatre murs de béton gris froids. Aucune couleur. Juste nous, rouge, pavés de filigranes, laissant notre sueur (rouge) et notre bave (rouge) et nos excréments sur les parois de ces cubes qui nous enferment. La justice, c'est l'acte de se manger. Et c'est aussi montrer que celui qui mange le plus de viande peut se faire manger par un insecte. Sa chair qui se déchire face aux mandibules des insectes qui le rongent sur les sols gris des appartements de béton. C'est mourir seul, mangé par personne, car un insecte n'est qu'une blatte ou un cloporte, c'est gris et inerte comme le sol.

Je mange ma chair de l'intérieur car mon être est ma peau et ma seconde peau ne cache que mes entrailles qui se régurgitent en permanence. Si je ne mange pas les autres alors je me mange moi-même dans un bruit de mastication incessant jusqu'à ce que mes dents ne puissent plus mâcher car trop pleines de viande et de sang. Voici ma paix intérieure.

Amas de chair rampant dans un bloc de béton.

Point rouge dans cube gris.

Ma vie et mon existence et ma paix et ma justice se résument à des formes de couleurs.

Rouge dans gris.
#21
dernière ligne droite
je me baigne dans le café

https://youtu.be/EWqf3hkbEXk?si=ve_FpBu895jJtQHz
#22
« Celui au bec d'oiseau »

La figure aux dix-mille yeux se redressa au dessus du temple en une silhouette titanesque, recouvrant le globe de sa splendeur, Ses sept bras regroupés auprès de frère Hammil, lui-même qui l'avait appelé. Un énorme bec recourbé surplombait ce qui semblait être sa tête, et un corps vaguement humanoïde d'un bleu pâle, nu translucide, accompagnait ses mouvements. Il était magnifique. Il était immonde. Jamais l'humanité n'aurait dû faire appel à une telle atrocité. Le moment où Il s'est élevé des esprits de Ses enfants, le monde changea. Son existence n'était pas prédite dans les écrits sacrés. Le sacré ne signifiait d'ailleurs plus rien face à Lui. Le réel ne signifiait plus rien. Sa présence était un bruit sourd, une cacophonie infernale de musiques et de trompettes, de cris et de rires, une manifestation violente qui prenait au tripes et qui violait les tympans de tous ceux qui venaient à L'entendre. C'était une erreur de la nature, un aperçu du cosmos qui n'aurait jamais dû entrer en contact avec notre monde. Une singularité qui ne concordait pas avec les normes de ce monde, un parfum qui retournait la gravité, une force qui assimilait et trépassait les frontières de ce qui est.

Un seul regard vers le dieu suffit à faire vriller les circuits internes du compagnon Hammil, à lui frire les neurones, à faire couler son cerveau à travers ses narines. Il s'écroula raide sur le sol, les yeux révulsés. On ne peut pas concevoir l'inconcevable, il faut mourir. Son nom avait déjà disparu dans l'infini.

Le père de famille s'avança lentement vers lui, la tête baissée pour ne pas croiser le regard de Celui qui apportait la vie et la peste. Mais déjà il n'y a plus de titre. Il n'y a plus frère ou de père, plus de parents, plus d'amoureux, d'amitié, de liens, de social. Car il suffit de savoir qu'Il existe, il suffit d'imaginer qu'Il puisse exister, pour ne pas pouvoir en ressortir. La sueur et le sang et la bile et les organes fusionnent pour disparaître en une fumée d'éther qui vient rejoindre Son identité en Sa silhouette d'antimatière.

Il brille autant qu'Il a tué la lumière et le soleil et les lampes en s'élevant, Il est si immaculé qu'il a ravi la vue de tous en existant, Il est Elle et Nous et Rien à la fois, car Il ne peut pas exister, ou alors tout cesse d'exister en Sa présence. La mer est morte, la terre est réduite à des cendres d'atomes, et seul l'animal prodigue, le plus bas des mammifères, la concaténation stupide de tout ce qui existe reste à l'issue de Son apparition. L'ornithorynque n'est pas, car il n'est que par l'existence d'autres dont il s'est approprié la peau. Et si les concepts à qui il a volé les attributs ne sont plus, alors lui seul demeure et définit ses attributs par sa seule individualité.

Il ne reste plus rien que ces étranges mammifères, bénis par Sa patte fatale, Ses suppôts, Eux qui ne peuvent pas le concevoir, qui ne peuvent pas, mais qui devinrent, par delà la matière, outre le physique, ces organismes désormais supérieurs.

Et quand plus personne ne put Le concevoir, quand ni même l'espace ne pouvait se souvenir de Lui, il disparu sans qu'une quelconque trace ne survive, sans une histoire à raconter. Il n'y a pas de tristesse, ni de volonté, ni de motifs. Il n'y a pas de réactions ; pas de logique. Il n'y a plus rien, et quand Il ne fut plus, alors tout ce qui ne pouvait pas exister pu revenir de nouveau. Les particules, les motivations, le destin, le temps, la vie, le monde.

Et seuls les ornithorynques peuvent se souvenirs de leur dieu. Et les autres animaux devinrent secondaires, car ce sont eux qui désormais eurent à s'identifier, se caractériser, s'approprier les qualités du mammifère primordial.

Un regard tourné vers l'immensité du vide.
L'autre vers la structure complexe de l'existence.
#23
J'ai plus que du café. C'est la dèche.
#24
« PAS un texte de Saint-Con »

Walou. Il n'y avait au fond pas de vraie raison pour laquelle j'ai eu cette impulsion soudaine. C'est venu très naturellement. On était un vendredi soir, ou plutôt un samedi matin, aux alentours de trois heures. Beaucoup de gens s'étaient réunis pour l'occasion. Notre victime était là, à notre merci, mais elle souriait, cette petite enflure. Elle se foutait de notre gueule ! Ça avait le don de nous foutre en rogne. Tout ce que je souhaitais, c'était de faire des gants avec sa peau, vous savez, le genre de gants qui relaxe et qui réchauffe à force d'écrire.

Nada, des moyens. On y est allés à la bonne franquette, on va pas se mentir. On a vraiment juste prit ce qu'on avait sous la main- des stylos, pour la plupart, des machines à écrire pour les plus atypiques, et on a commencé à frapper. On a planté, griffé, écrasé, je peux vous assurer que très rapidement la créature n'était plus. Quelques poils jaunes au sol, au plus, dans une marre de sang absorbée par la terre. Mais on s'est dit que c'était pas assez, encore. Il en fallait plus.

Peanuts, alors. On a jeté ce qu'il restait de notre cervelle dans les poubelles du temps. La purification d'une colère pareille, ça ne peut passer que par le feu. Alors on a jeté une allumette sur la bête. Bon, il faut dire que le temps ne s'y prêtait pas... curieusement, quand on essaye de faire cramer un truc, ça prends bien plus en avril, en mai, ou en juin... mais là, mi-février, c'était pas bien ouf. On a eu une petite flamme avec les poils, certes, mais ça a cramé pendant trois minutes puis ça s'est éteint, juste assez longtemps pour roussir les poils jaunes du mammifère en une sorte de cendre brune. Mais on voulait le cramer, on l'a cramé l'animal ! On était satisfait.

Que tchi. On avait plus rien à faire ici. Alors on s'est regardé tous ensemble, on s'est serré la main, on s'est remercié, en se disant qu'on avait fait du bon boulot, que la Bête n'était plus, que le monde était désormais un monde meilleur, débarrassé de cette vermine. On s'est retourné sur nos pas. On s'est dit que peut-être une fois dans notre existence, on pouvait ressentir ce sentiment qu'était la plénitude, le contentement de soi, le bonheur... avant que le destin ne nous rattrape dans un « plop ». On s'est retournés. Puis on l'a vu, avec son grand sourire, couché par terre dans une pose tendancieuse, comme s'il venait de reprendre vie. Les mots « à mort » ont beau retentir sur terre, scandés comme une prière, mais le grand parchemin là-haut en a décidé autrement. Ce concept ne s'applique pas à lui, qui transcende la vie, la mort, l'espace et le temps.

#25
Je comprends mieux pourquoi la cocaïne était si haute dans la liste des sponsors.
#26
« La fièvre du dimanche matin »

J'émerge difficilement du trou noir qu'est mon esprit. Mes yeux le regrettent ; la lumière perce mes paupières comme des aiguilles. Au moins, ça tangue un peu moins autour de moi. Puis, peu à peu, les souvenirs me reviennent.

C'est moelleux autour de moi. Un peu humide, aussi. Je crois que c'est de l'urine. Je me concentre. Ma vision se fait plus nette. Je suis chez moi, sur mon matelas. Une quantité importante de bouteilles traîne par terre. Il y a un peu de vomi, aussi.

Je grogne, puis attrape une bouteille qui ne me semble pas vide. « Lussac Saint-Emilion », lit l'étiquette. J'ai la gorge sèche, mais les effluves de mes fluides corporels remontent jusqu'à mon nez, et je dois boucher d'urgence mon nez pour ne pas régurgiter à nouveau mes acides gastriques. Mais alors, la muse vignoble m'appelle. Dans mon esprit, elle m'interpelle, elle me parle. Une petite voix qui me chuchote : « Verse le vin par terre. »

Instinctivement, je rejette cette voix. Quelle horreur ! Jeter un vin qui m'a coûté 6 balles ! Mais la voix reprends. « Verse le vin ! » Et plus j'entends cette petite voix me susurrer l'idée, plus elle paraît tentante, bien que complètement déraisonnée. Alors, je tente l'expérience. D'un délicat mouvement de poignet, je fait pencher le goulot de la bouteille vers mon sol en plastique. Puis c'est un filet de couleur rubis qui commence à couler jusqu'au sol, en n'en renversant presque pas sur le matelas, jusqu'à former une flaque.

Je me demande pourquoi j'ai fait ça. Mais la voix me reprends de plus belle. « Penche-toi ! Penche-toi ! » Pour la lécher ? Intrigué, je me penche, et observe mon reflet dans la surface rouge.

Il paraît que certaines personnes lisent l'avenir dans le café. C'est complètement con, le café ça te réveille, ça a rien de mystique. Alors que le vin, nectar sublime qui exerce une attirance fantastique sur ses adeptes, ça c'est plus logique. Je me concentre donc. Si j'arrive à lire mon avenir dans cette flaque, peut-être que je pourrais me consoler d'avoir perdu vingt centilitres de liqueur dans une pulsion de démence.

Alors j'ai l'impression que d'un coup, mon reflet s'approche de moi, comme pour m'attraper par les côtés de la tête et me faire passer de l'autre côté du miroir. En passant à travers la flaque, j'ai l'impression de m'être cogné contre le sol, mais la douleur n'est qu'éphémère, car je ressort de l'autre côté, pour découvrir ce que mon avenir me réserve. Mon double me tiens par la main, et un large palais s'élève devant moi. « Tout ce que tu vois sera à toi », me déclare mon double en mode Roi Lion. Puis, en s'avançant vers la structure, je vois tous mes amis de beuverie m'accueillir et m'offrir chacun une bouteille de Jack Daniel's ! Fou de joie, je me retourne, et vois mes femmes préférées (Clara Morgane, Katsuni, et Ségolène Royal) me faire signe de la main en petite tenue.

C'est un rêve ! C'est un putain de rêve ! « Bien sûr que c'est un rêve. » me répondit mon double. Mais il reprit : « Ce rêve se réalisera, sois en sûr ! Quand tu sera réveillé, tu pourras mettre la main sur toutes ces choses. Tu sera l'homme le plus puissant du monde, Jackson ! »



Les policiers retrouvèrent le cadavre de Jackson quelques jours plus tard, la tronche éclatée dans une mare de vin moisie, quand le voisin du dessous avait commencé à se plaindre des odeurs et des liquides étranges qui s'infiltraient dans son plafond.
#27
Il y en a d'autres comme ça ?
#28
Dans le goulot !
#29
« Matriochkas organiques »

Le Démiurge, créateur de toutes choses, prophète absolu, était devant son clavier avec son casque sur les yeux, en train de finaliser l'œuvre de sa vie.

Jackson Hammil était un homme dans la trentaine, franchement moche, sale, sans passion, sans vocation, sans rien. Un homme destiné à être l'une de ces raclures de la société, à qui on a jamais donné une chance de faire quoi que ce soit, de s'élever au dessus de la médiocrité. L'un de ces sombres individus destinés à devenir des tueurs en série ou des pédophiles, s'ils ne se suicident pas avant. Mais heureusement pour lui, Jackson survivait (ou sous-vivait) dans les glorieuses années 2110. Et heureusement pour lui, cette formidable décennie marquait également l'arrivée d'un nouvel objet révolutionnaire : la couveuse à intelligence artificielle, développée par la géniale Z.O.N. Megacorp. Accessible, simple d'utilisation, permettant aux femmes de procréer sans douleurs, ou aux familles stériles de connaître les joies de la vie de parent.

Le principe de ce bijou de la technologie humaine était simple : à partir d'échantillons d'embryons récoltés depuis plusieurs dizaines d'années par les agents de la Z.O.N., il suffisait d'entrer une description de notre enfant idéal pour que la machine nous le conçoive.

Jackson se sentait terriblement seul. Et bien que sa compagne virtuelle réponde à ses besoin « sentimentaux », et sa fidèle main droite à ceux d'ordre plus charnels, il se rendait bien compte qu'il lui était incapable de procréer sans présence humaine. Et assez étonnamment, aucune présence humaine ne souhaitait de lui. Dieu refusait que Jackson ait une descendance, et Il avait bien raison : le jeune homme et ses quarante-sept chromosomes ne manqueraient à personne.

Cependant, la Z.O.N. Megacorp. en avait décidé autrement, pour le plus grand malheur de Dieu. Car grâce à la couveuse à intelligence artificielle, même Jackson pouvait désormais avoir un enfant.

Dans un acte anarchiste, révolutionnaire, inspiré des plus grands athéistes, digne héritier de Marx et de Musk, Jackson décida non pas de se contenter de fabriquer un enfant. Il voulait fabriquer SON enfant. Cette singularité d'individualité pure, l'égoïsme de l'être humain à son paroxysme était une vision si forte et déterminée qu'elle aurait pu être inspirante si elle ne venait pas de l'esprit ravagé d'un tel con. Car en effet, Jackson fit à Dieu la plus grande insulte, la plus grande provocation : il abreuva le machine de ses propres gênes avant d'ordonner à cette dernière de créer le bambin parfait, à partir de ses cellules.

Isaac Asimov aurait dit : « L'aspect le plus triste de notre vie aujourd'hui est que la science acquière les connaissances plus vite que la société n'acquière la sagesse. » Il en aurait tiré une précieuse leçon.

Le Grand Gourou, PDG suprême de la plus grande méga-corporation du monde, le vénéré maître du monde connu sous le nom de « NIHIL », traduit en « L'ABSOLUTEUR », récupéra ces données en apprenant qu'un individu avait décidé de donner son propre ADN à la machine. En se rendant compte du degré de débilité que représentait cet échantillon de Jackson, il dit : « L'IA n'a plus besoin de moi. » Et sur ces étranges paroles, il se suicida en sautant du 323e étage de sa tour.


Jackson pensa « Ghnueeeeeee ». Puis un filet de bave coula sur ses lèvres.
#30
= INITIATIVES = / La peur au ventre.
Février 10, 2024, 01:00:20
"La peur au ventre."

Nous étions parti pour une excursion vers l'Europe. Tout se passait bien, dans le car pour aller jusqu'au port. Les petits riaient à l'arrière, tandis que ma merveilleuse femme s'était endormie pour la sieste. Mes voisins semblaient tous aussi excités que nous à l'idée de partir en voyage. Les colonies comme ça, ça rapproche, il faut dire. Moi, c'est Jackson Hammill. Je suis un mâle respecté au sein de ma famille et de mon entourage. Je suis blanc, pure souche, traditionaliste. Enfin, après plusieurs années de dure labeur aux champs, j'avais réussi à décrocher un plan pour pouvoir faire découvrir le monde à mes êtres les plus chers. Et le voyage commençait vraiment bien.

Mais une fois arrivés au port... ça a changé d'ambiance. On a débarqué du bus, et les gens qui nous faisaient embarquer étaient bien pressés. À vrai dire, ils ne nous parlaient pas. Ils ne nous regardaient même pas. C'est comme si pour eux nous étions que des marchandises...

... cela fait maintenant trente-cinq heures que je suis dans la cale de ce navire.

Ils ont commencés par nous présenter nos cabines. Notre première erreur a été de leur faire confiance... si j'avais su, je serais reparti vers la berge en emmenant mes petits avec moi. Mais une fois rentrés dans nos cabines, ils ont refermé les portes derrière nous, et c'est là qu'on s'est rendu compte de l'horreur de la chose. C'étaient des cages.

Le temps que mes yeux s'habituent à l'obscurité, je me suis ensuite rendu compte que j'avais été séparé de ma famille. J'ai crié, hurlé à plein poumons. Je n'était pas le seul : on était tous dans le même cas. Mais d'un coup, un cri de douleur a résonné dans l'antre métallique. Nous nous sommes tus, de choc et d'épouvante, en nous rendons compte que l'origine de ce cri était un enfant, de même pas 3 ans, qui venait de se faire battre à mort d'un coup de machette.

Il n'y eu plus un cri. Juste quelques sanglots silencieux. Cependant, cela n'a pas empêché les meurtriers de continuer leur massacre de manière pernicieuse. Il y a quelques heures, j'ai vu un de nos tortionnaire éclairer une cage de sa torche, pour attraper une femme que je reconnu, à la lumière froide de la lampe, être ma femme. Nous nous sommes échangés un regard plein d'amour, de peur et de compassion.

Je ne suis pas sûr de ce qu'il est advenu d'elle, mais je crains le pire. Notre nombre ne fait que diminuer. Lorsque la lumière de la lune passe à travers les hublots, je crois voir une masse sombre se balancer au bout d'une corde, au fond du couloir d'où elle a été emmenée.

Mais je n'ai plus d'espoir. Nous sommes tombés dans un piège sinistre, et nous ne ressortirons pas d'ici vivants. J'en suis certain. Mon voisin ne bouge plus, peut-être est-il mort de peur, de soif ou de fatigue.

« Et c'est désormais à mon tour d'y passer », je pense, alors qu'un homme s'approche de moi, lanière de cuir à la main. Je ne vois pas son visage.

Avant que les lumières de la vie ne s'éteignent à jamais dans mon esprit, mes yeux se posent sur l'insigne de l'homme, vision funeste s'il en est. Son badge affiche un logo écrit en lettres capitales que je déchiffre avec peine.

« Pork-alpine Farms Co. »