Alias omega

Le 16/05/2007
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par Omega-17
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Thèmes / Obscur / Tranches de vie
Toujours mégalo, toujours exilé en Belgique, toujours alcoolo, Omega continue à nous gerber des bribes de sa vie dont on se fout et à se lustrer les couilles sur son style. Ceux qui ont déjà lu du Omega auront l'impression de relire toujours le même texte : du gloubiboulga de réflexions désabusées, de cynisme de poseur, de sentimentalisme qui n'ose pas s'assumer. C'est assez fatiguant.
Je vais vous dire…
Mais je vais d’abord me chercher des bières belges chez les individus absurdes et niais qui tiennent l’épicerie d’en bas.
C’est quand même incroyable que ce turc dépressif derrière son comptoir visqueux ait osé me dire ‘Merci, mon grand’, la marque de familiarité m’a relativement irrité.
Ces belges n’ont vraiment aucun respect pour rien.
D’autant plus que je dois être le seul étranger du pays à faire tourner les usines de leur jaunâtre ‘Gordon’, dix degrés de houblon dans un packaging peu inspiré.
Le tout après qu’un ex-parrain appartenant probablement à l’Omerta dans sa période la plus creuse ait payé nonchalamment son faible pack de trois. ( Ouais, ils ont des packs de trois à Bruxelles, mais il y a quelque chose de plus fou encore : c’est qu’ils les vendent. )
‘Nul n’est prophète en son pays’.
Certes.
Mais l’étranger me donne des goûts de déjà-vu, aussi loin que j’aille, alors mes prophéties, à l’image d’une Cassandre errante, je me les garde.
La clope au bec, je regarde cette ville qui se dit capitale européenne et en effet, c’est cosmopolite. Rien que ça, c’est déjà péjoratif.
Les magasins pornos sont blindés : dix-neuf heures, l’heure de pointe. On va se chercher son petit film avec sa petite carte de fidélité pour passer sa petite soirée de petit belge dans son petit et bien plat pays.
Que voulez-vous, il faut bien que tout le monde trouve son exutoire…

Admirez la mauvaise foi des deux phrases précédentes à l’éclairage du paragraphe qui suit. C’est dans ces moments-là que je me trouve formidable.

Acheter une carte téléphonique Belgacom afin de pouvoir appeler un numéro spécial qui fournit des mots de passe pour téléchargements de films de cul sur internet puisque votre dernier Nokia apprécie peu le réseau local Mobistar : c’est un phénomène tout ce qu’il y a de plus réaliste. ( De plus triste ? Non, non : de plus réaliste. Même combat, vous me direz… )
Mais en arriver au point de l’écrire et en ressentir une vive satisfaction scripturale : ça, c’est un geste de néo-réalisme.
On notera tout de même que c’est la seule fois où les incompétents de chez Belgacom m’ont servi à quelque chose. Plus encore si on a lu mon texte précédent.

Le fichier ‘Sexedenfer1029’ est à 52% de son téléchargement sur mon Hewlett Packard flambant neuf. Il reste encore 48% de sens à ma vie ?
Ca me paraît très généreux, quand même.
Il doit y avoir une Erreur quelque part.
Et il y en a une, en particulier.

« Et elle vient de publier un texte qui te concerne. C’est pour ça que tu te sens fier ? Le surhomme nietzschéen parle aux foules de son hôtel bruxellois ? Ohé, ohé, la grande aventure du néo-réaliste en puissance qui excite les femelles par son jeu de doigts sur vingt-six cases mates ? Tu es en échec, mon garçon. Et te foutre de ma gueule pour ce jeu de mots sans intérêt ne changera absolument rien au fait que tu es tout seul dans ta chambre, cette fois. Et tu vas y rester. Eh oui, parce que l’ibis, c’était juste un brin de soleil fugace dans ton ciel noirâtre. Et en plus tu aimes ça, les ciels noirâtres, quand c’est vide, quand la dépression se camoufle au coin des couloirs pour te saisir au passage, hein ? Enfin, en tout cas, tu as réussi à l’apprécier ou plutôt à trouver un mode de pensée pour cautionner, développer et justifier tout ça. C’est trop mal fait, je dois l’avouer mais moi, tu ne me trompes pas, tu le sais bien. Alors, change de ton et ouvre les vannes, sale Speer de bas étage, dis-le que tu n’as pas arrêté d’y penser depuis la gare malgré ton départ furtif en réajustant ton bob comme un pseudo cow-boy ténébreux qui connaît la vie. Dis-le. Et joue pas les coriaces, t’es tout flasque à l’intérieur. Ouais, tu arrives à la faire à pas mal de gens, un gros paquet même, c’est vrai, et ça t’excite de te sentir puissant de cette manière-là, hein ? Je le sais bien mais même en ayant parfaitement conscience de ça, tu ne fais que survivre. Ca marche à peu près, ouais, même en étant bancal, mais tu ne fais que survivre. Tu ne vis pas. Tu ne veux pas même essayer d’imaginer ce que ça peut vouloir dire. Alors, guerrier néo-réaliste, t’as peur ? Non ? Alors, tu fous quoi ? Ben, fais quelque chose. « J’écris mes textes en tant que script itinérant et je porte allégeance au néo-réalisme monolithique », tu m’expliques ? Parce que là, j’ai dû rater des épisodes. ‘Jinventedesphilosophies.com’, tu prends des décisions ou tu continues à bouffer une brioche aux pépites de chocolat avec tes quinze bières cinquante centilitres ? »

Toujours le même gnome qui vient agiter sa baguette sous mon nez.
Il est gentil : « Fais quelque chose ».
Ouais, ben, je termine ma bière d’un air décidé.
A ouvrir la suivante.
Ou alors, je retourne à Mons, je l’appelle et je lui dis qu’elle n’a qu’à tout plaquer.
Hum, je vais faire ça.
Dans deux semaines.
Le 30 Février.
A huit heures pétantes.
Ca sera comme ça et pas autrement.

« C’est bien, tu prends des risques, je vois. Tu crois t’en sortir avec cette pirouette foireuse ? C’est même pas drôle une seconde, ton sketch, tu le sais ? »

Je le sais.
ET TU CROIS QUE CA ME FAIT RIRE, CONNARD ?
Non.
Absolument pas.
Bien au contraire mais j’ai pris le parti du cynisme pince-sans-rire, une méthode efficace, anti-rampante et oublieuse de certains états de fait, pour tout dire. C’est d’une praticité peu innovante mais qui peut, à haut niveau, s’avérer essentielle face aux obstacles innombrables de l’ordre du désespoir intempestif.

Le téléchargement du fichier s’est arrêté : « Délai dépassé ».
Je me suis fait chier pour que dalle et ça me fait sourire. De toute façon, je n’ai même pas envie de me branler, c’était juste pour le concept.

Bruxelles : ville authentique où les faux Gipsy Kings arrêtent leur show urbain pour que le leader réponde à son portable, Belgacom, les asiatiques qui gèrent les laveries automatiques ‘le sèche-linge dure huit minutes pour cinquante centimes mais si vous mettez deux pièces, vous aurez en seize’, les cartouches à quarante euros, les connexions internet dans les épiceries moyennement orientales, des verres, des bières, des trains, des hôtels, des textes…

J’arrête.

« Intéressant, ça : ‘J’arrête’. Tu as commencé quelque chose, j’ai pas remarqué ?
- Tu observes mal.
- Dis-moi alors, puisque je suis si mal informé. Ah, oui… Tu commences dans les ibis pour finir dans les ‘Hôtels de France’, cent bornes plus loin. Pas mal, ouais… Mais je ne vois pas en quoi c’est un projet qui tient la route.
- Tu m’emmerdes, tu ne sais pas grand-chose finalement, tu restes là, tu prends ton pied en essayant de m’imiter mais tu n’es pas vraiment moi et c’est justement en cela que le bât blesse : tu ne vis pas toi non plus et tu ne pourrais le faire qu’à travers moi. Je me trompe ? J’ai une mauvaise nouvelle : ta marge de manœuvre est encore plus réduite que la mienne, elle est inexistante.
- Ce n’est pas complètement faux.
- Et pas tout à fait vrai non plus, hein ? Ca ne m’intéresse pas. J’irai un peu plus loin, un peu plus près, avec ou sans inspiration, défoncé à mort ou à jeun, mort ou vivant, j’irai encore un peu plus en avant. ‘Quand on est au bord du gouffre, la meilleure chose à faire c’est parfois un pas de plus’.
- Imparable. On va aller loin avec ça. »

Je suis l’Omega.
Car les journées trouvent déjà leur conclusion quand je les commence.
Il y a des exceptions, bien sûr.
Mais il y en a tellement peu.