Serial Edit 27 : Le putain d'saïan

Le 15/09/2008
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par Lapinchien
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On passe du joyeux luron de la Sainte-Bavière en quête d'absolu au zonard mélancolique des banlieues parisiennes en quête de tronche à éclater, et on perd beaucoup au change. Lapinchien emploie ici l'argot qu'il a expérimenté dans ses derniers textes : du coup, chaque paragraphe ressemble à une triple épaisseur de béton armé qu'il faudrait franchir avec un Concorde lancé à pleine vitesse. Et c'est pas cool. Au reste, le fond et le personnage (une caricature assumée prônant l'individualisme) sont lapinchiennesques, donc éventuellement intéressants, pour peu qu'on aime le béton armé.
Textes précédents :

- Extrait du Faust, de Goethe
- Le pacte par nihil
- L'impact par Glaüx-le-Chouette
- Le trou par Aka
- Le vide par Hag
- La jouissance par Strange
- Der flammenwerfer par Glaüx-le-Chouette
La dernière nuit, c'était trop d'la balle. Tout qu'est ce que j'sais, c'est qu'ça cramait, c'est qu'ça gueulait... Que même les machins là bas, les belpous et les vieux quetrus, ils parlaient genre avec des ptites voix de meufs, que j'te leur disais de la fermer et tout. Pasque comme ça, là bas, ben, les quetrus et les keumés, c'était pareil dans ma chetron... et tout se mélangeait. Tous étaient chiredés. T'arrosais la guedro de partout comme ça, et pis tout se mettait à gébou et à danser comme dans un putain de Walt Disney. Bon, ouam par exemple, hein, j'étais trop pété veugra. Je sifflais par les trous de nez et pis je dodelinais du cul en te foutant des petits coups de karaté à tous les quetrus qu'étaient trop zarbes. Zbam ! Zbam ! coup de tatane entre les deux yeux. Rhaaaaa ! trop puissant... Comment qu'j'le savais trop. Tout qu'est ce que j'voyais, fallait qu'ça valdingue. Et pis les autres comme ça, ben, ils se barraient et tout comme quoi qu'ils se chiaient trop dans leur froc, de m'voir tout fou fou... Rhaaaa! fils de tepus... Zbam! par les épaules que j'te les serrais, et pis j'les tordais comme ça, et pis il s'pliaient, ils s'pliaient, jusqu'à ce que "Kraaak!" leur bassin, il partait en yecou et ils s'étalaient comme des demers... et pis là, j'te les répendais dans toute la cepla, comme si qu'ils avaient toujours fait partie du décor. Pas un qu'y m'aurait dis d'me la jouer molo, pasqu' d'une pichenette, j'te l'aurai décapité.

Ici, dans la téci que même ceux qui y crèchent, y savent même pas comment qu'ça s' prononce comment qu'c'est tellement zarbi, on s'est mis grave sévère, on s'est pété le crâne. On a trop fait la teufé pour célébrer la victoire de l'autre soir. Même moi, tu m'connais, hein baletringue ?, jamais j'me donne trop en spectacle... J'maitrise... Ben là, comme ça, j'étais tellement décalqué, que je smurfais avec les dalpé dans le hall... et pis j'rappais et tout, c'est trop la tehon quand j'y repense... Tous les vieux quetrus de 2pack Chakur y sont passés, et tu m'connais, hein ? j'cause pas un mot d'anglais... ça d'vais être trop veugra... J'crois qu'vais butter tous les connards qu'étaient présents pour pas qu'ils m'foutent larchouma en racontant des pipos sur ma face. Depuis l'temps qu'on les avait mis en garde, hein, depuis l'temps qu'on les avait prévenu... On t'avait prévenu, hein bâtard ?, qu'un jour on descendrait te la crâmer ta putain de capitale, hein ?, ben voila, on y est, elle flambe et pis bien même qu'elle flambe. Le bruit et l'odeur, petite pute, hein ? c'est ton quartier qui pue la mort maintenant.. zyva, bouffe ton caca. Trop longtemps que j'ai quitté ma millefa, trop longtemps que j'suis les autres et qu'on t'en mutile, qu'on t'en balaffre et qu'on t'en embroche du gebour...

Des fois, comme çà, ya des ragots, des bruits des troupes plus dans le centre qui remontent. ça parle de chef, y aurait un gars ça-comme, qui nous dirait la voie à suivre et tout. J'ai trop fébou de pipo, j'ai trop géman de barouette... 'tain, c'est pas à ouam qu'on va la faire. Comme quoi, si tu t'ralies, si tu suis les instructions, qu'tu lèches les boules aux hommes de main, qu'tu t'frottes à leur béjan comme un caniche en rut, ben t'as des chances de monter en grade. Moi j'dis non, c'est d'la demer en barre. J't'en ai porté des signes de raliement, j'en ai encore des tatouages et des scarifications d'appartenance, j'en ai même jusqu'au bout du zgeg... ça vaut pas un clou ces conneries là, j'tassure, tu m'crois, refrè, hein ? tu m'connais. Ma rolepa, j'y crois plus à leur belle propagande... C'est quand qu'j'étais un morveu qu'on pouvait m'en vendre des Converse et des Nike Air Jordan avec des belles pubs à la con... de la caillera, de la vrai baltringue, c'est ça, ces keumés... ils ont rien dans la chetron, prêts à suivre les scarlas qui s'la racontent le plus... C'est pas ma voie. Mon quetru c'est le grand porte nawak. Je casse des gueules. Je casse des gueules. Je casse des gueules. Quoi d'autre, refré ? hein ? Ya qu'en mes poings que j'crois.

Je nique tout en force. Zbam! Zbam! une belle tartine de chetrons ! 'tain ! Tema ouam toutes ces lopesas ! Comment qu'elles cétra avec la quequette entre les béjans. Gebours de merde ! Fuyez, fin de race ! C'est ça, seca ouat derrière tes barbelés et tes caméras de suveillance ! Va t' quéplan dans la teuch à ta mère-grand, fonbou ! Comme quoi qu'y aurait les forces de l'ordre qu'auraient été lâchées en masse et qu'elles feraient reculer tous mes reufrés ? Rien à battre, franchement, rien à battre j'vais d'l'avant et j'béflan tout qu'est ce qui peut béflan, et j'zillebou tout qu'est ce qui peut pas mécra. Grand nettoyage par le vide, j'te'l dis. J'm'en bas les glawouis de qu'on est pas allé jusqu'au bout du quetru.Tout qu'est ce que j'peux péter, j'te'l pète et pis c'est tout. Comme quoi qu'y aurait eu un sens à tout ça ? J'pense pas et qu'est qu'ça peut m'foutre, la tevéri. On va nous repousser jusqu'à la banlieue, la zone des bannis et pis ça ira pas plus loin. On nous laissera dans la demer, ils reconstruiront leur merdier, et pis ils feront des remparts plus haut c'te fois-ci. Et pis c'est tout. Dans 2 ans on recommencera, et on te laminera tout à nouveau. Et ça recommencera, et ça recommencera éternellement. Et ouam au milieu de tout ça, hein ? J'suis lucide, reufré, j'suis immunisé contre toutes ces conneries d'ideologies et croyances en un monde meilleur. Paname sous les bebons, hein ? J'te leur ai taggé leurs murs, leur mère et leurs morts. et quoi ça, hein ? Y'a qu'nos noms qu'on a laissé, parce qu'y a plus de slogan, y'a plus d'idées auxquelles qu'on croit. Y a qu'l'étendard de ta gueule qu'ça vaut l'coup d'porter. Respect pour ta chetron. Là au moins t'es sûr de pas d'tromper. Là au moins t'es sûr d'aller dans l'sens de tes intérets. Expose ta cefa et explose la cefa des autres.

Le calme après la tempête. J'kiffe grave la nuit noire quand les affrontements cessent, qu'les gamins se pieutent et qu'ils arrêtent de lanceba leurs yassecas en première ligne. J'me prends un gros splif, un gros tarpé de sa race et j'me ladeba seul-tout au milieu des décombres et des morts avec mon petit keus plein de bebons. Quand j'vétrou un coin qu'en jète trop sa mère, un truc qui surplombe bien tout l'reste et que j'suis à peu près sûr qu'ça sera pas démoli tout d'suite, ben j'me pose et j'sors les aerosols d'mon keussa. C'est là que j'deviens un surhomme, un putain d'Saïan. J'te pose un graff de ta mère la pute que même dans 20 ans on en parlera encore. Le gros truc qui tape grave sa race que l'moindre baletringue du coin, il aurait trop la téhon d'y foutre un tag même en p'tit d'ssus. Pasque j'chirdé tout quand j'graffe. Je dessine c'est ace mon kiff, c'est ace tout qu'est ce que j'veux. Les formes vagues des keums que j'ai fumé dans la journée, que j'm'en foutais, que j'm'en battais les couilles, ben c'est là qu'elles me reviennent comme si qu'c'etait des putains d' fantômes. Je graffe et j'revois l'keumé qu'j'ai méfu et son visage apparait comme s'y m'décalquait un gros coup d'boule à l'instant. Et le grain même de sa peau m'revient, alors qu'deux secondes avant j'savais plus si l’œil qu'j'avais éclaté était noir, vert ou même bleu, qu'j'savais plus si ses veuchs étaient fins ou grossiers, lisses ou crépus.. Je graffe et ça m'revient , voilà tout qu'est ce qui est. J'dégueule ma mère sur le mur, j'te peins la putain d'bataille du jour dans ses moindres détails, les trippes qui volent, les gorges qui s'ouvrent, les membres qu'on écartelle et qu'on traine. J'domine tout, c'est pas l'respect qu'je cherche, c'est la crainte de tous ceux qui matent mes putain d'fresques en contre-bas.

Et j'méfer les yeuses et j'me mets à nétour sur ouam. Et j'kiffe tout ce merdier, ce monde qui part en méfu, l'odeur des morts qui remonte jusqu'à mon zen. Et j'béflan encore et encore Paname et toute sa demèr qui chlingue, j'chirdé tout, j'chécra des gros larmos qui mécra tout le demon et les miskines, tous en liseba à se séca leur race, et j'te respire la capitale, la charogne qui pourrit, les keufs et leur grosse odeur de sueur de ralouf, et ça sent le souffre, ça sent l'essence et les belpous qui crament, le caoutchouc qui béflan. J'suis trop séca, et j'nétour,j'nétour sur ouam. J'nétour et j'entends dalleque, le bruit des doom-doom, les fonbous qui me gueulent de chéla mes bebons tout en essayant de m'faire des sommations dans la tronche. Mais ça passe à coté d'ouam, rien à battre, j'suis un putain d'guerrier d'l'espace, un putain d'Saïan et c'est tout.

Je danse et j'golri, j'golri ma race au milieu des bruits et des odeurs. Je danse et j'cours plus vite que les balles, j'cours plus vite que leur justice expéditive, j'cours, j'cours et pis j'les largue en pénétrant dans les égouts. Baltringues, j'reviendrai plus tard dans la journée avec les autres pour vous niquer vos mères. En attendant, j'retourne au champs d'bataille. J'trouverais bien un d'vos confrères à l'agonie et j'le viderai de tout son sang pour remplir à raz mes bebons.