Marne-la-Vallée (mes semblables)

Le 28/12/2008
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par Das
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Dossiers / Remix
Le narrateur de ce texte ressemble plus à Sangoku en plein combat qu'au héros du premier 'Marne-la-Vallée'. Il galope avec des balles dans les genoux, déclame des discours grandiloquents au milieu des fusillades, il recharge son arme alors qu'il n'a plus de munitions. Ah et aussi, il gerbe quand il presse sa bite contre le cul de jeune filles à peine nubiles. Bon, OK.
[remix de Marne-la-Vallée de Dourak Smerdiakov]
Quelques minutes après m'être jeté dans le flot mouvant de mes semblables, je suis arrivé au niveau du panneau sur lequel était inscrit : " A partir de ce point : une heure d'attente". Au dessus, une sculpture de mickey. Une croute de plastique noir pend à son oreille et laisse apparaître le plâtre gris dont il est constitué. Derrière, ils me pressent, de plus en plus fort, comme affamés par les promesses sensées se trouver à l'intérieur. Devant moi, un groupe de jeunes filles, trop parfumées, pas assez vêtues, probablement jolies. Je suis forcé de me coller à leurs dos en sueur, de sentir mon sexe écrasé par les culs moulés. Trop. J'ai senti le vomi me brûler le larynx et se répandre dans ma bouche. Je n'ai pu en ravaler qu'une partie, et ai craché le reste au creux de mes mains et l'ai déposé discrètement sur le béton. Personne n'a rien vu, personne n'a réagi, trop occupés à attendre. Je me suis essuyé sur les jeans, sur les jupes, les pantalons en toile, ils ont continué à presser. Et le film s'est prolongé avec cette odeur subconsciente : ma gerbe.
Je continue d'avancer, involontairement, forcé par les victimes du fouet des divertissements vains : du vécu sans substance. Ils n'existent pas. Ce sont des larves qui se mettent en branle, des drogués léthargiques qui courent à l'abattoir. Je les hais et ils me touchent. Ils poussent comme s'ils en avaient envie, comme si c'était viscéral. Les enfants crient et gesticulent, pleurent parfois, les visages des adultes sont rouges, exaspérés. La tension est dans mes yeux et mon sexe, tandis que mes semblables croient attendre, alors même qu'ils devraient se sentir vivre. Trop tard pour eux, le soleil de midi relance le manège.

Ils sont des fantômes roses, se roulant dans leur fange et dédaigneux devant celle du voisin, sans savoir pourquoi ils sont là, à se mouvoir au milieu de cette immense masse de chair. Passé la caisse, ils s'étalent, comme si d'une volonté commune, ils voulaient répandre leur odeur putride partout dans l'enceinte du parc. Avant de venir, j'hésitais encore sur le sort des nouveaux-nés. Peut-être pourraient-ils représenter une nouvelle chance au monde. Mais ils puent, tous. Seuls les yeux des agents de sécurité sont des espoirs. Ils ont de vrais regards d'Hommes, comme ils doivent l'être. Et sous ce contrôle serein des hommes vrais, le flot se déverse dans l'arène de l'illusion, la benne de l'imaginaire transfiguré. On a greffé du métal aux sols abandonnés, et dressé des remparts autour de l'enceinte de l'hypocondrie sentimentale. Mes semblables sont bourrés de morphine pathologique, et ils en redemandent, et ils en ont besoin, car ils croient créer avec des poussières d'os, car ils croient exister par des ersatz périmés.
Mais ceux-là mêmes me disent que j'ai tort, que je ne suis pas normal, qu'ils peuvent m'aider à soigner ma "maladie". J'écoute, mais je reste celui qui m'habite : un fou, peut-être un saint. Cette voix que j'entends, douce au creux de l'oreille, brutale par mon sexe et évidente dans mon ventre, ce n'est pas celle de Dieu, celle d'un dieu. Eux, ils croient. Moi, j'entends ma propre voix, transcendante, impossible, et c'est elle qui me guide, elle est mon sang, mon rituel. Elle a du charme, belle comme une arme chromée, luisante sous l'assommant soleil d'été, belle comme le réel.

Le reflet du flingue éblouit certains de mes semblables, d'autres courent se cacher, fuient. Les vrais hommes se sont jetés sur moi, trois impacts. L'alarme est donnée, alors je cours, et je tire au hasard sur mes semblables qui croisent mon chemin. Plus de munitions, je cogne, je démolis les masses de chair, je forge des hommes en détruisant les faces molles et pusillanimes. Je recharge en courant, j'entends les cris, je vois le sang, je goûte les larmes. Je suis un saint en marche vers l'accomplissement d'une prophétie qui n'existe pas. Les corps tombent et mes chargeurs se vident, et enfin, les symboles symptomatiques sont au sol, agonisants, pas encore morts. Je ne bouge plus, recharge tranquillement en regardant mickey me supplier de l'achever.
Le troupeau de C.R.S a débarqué en courant vers moi. Je fonce à mon tour à leur rencontre, ils ne s'arrêtent pas, moi non plus, et tandis que leurs balles envahissent mes jambes qui fonctionnent toujours plus vite et mon ventre plein de cette clameur frénétique des vrais Hommes, je me vois soulever mon arme, et en descendre quelques uns en hurlant : "L'avenir est une promesse avortée, car une multitude après moi viendra, et rien n'empêchera alors le percuteur de percuter":