22h22

Le 15/12/2009
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par Zone Inc.
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Thèmes / Communauté / Initiatives
Une série de courtes nouvelles, dont le seul point commun est le thème : 22h22. Les textes devaient tous faire quatre phrases seulement. Par Dourak, Lapinchien, Das, Glaüx, Hag et Winteria.
La vie ne pouvait pas être plus belle que ça. Je m'apprêtais à plonger dans un fauteuil, armé d'un verre, d'une bouteille de cognac, et des Oeuvres complètes de Malherbes. Hélas, juste avant que je n'éteigne la radio, un fou furieux s'est mis à me menacer de débarquer par l'ascenseur de vingt-deux heures quarante-trois en provenance de Babylone, la Grande Prostituée. J'ai beau me rappeler dans les moindres détails chacune des funestes vingt-et-une minutes qui suivirent cet instant, je ne comprends toujours pas pourquoi je me suis jeté par la fenêtre quand mes voisins de palier sont rentrés du cinéma et, je le reconnais, rien n'est plus comme avant.

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Si l'on procède à un simple dénombrement, il y a 24 heures dans une journée, 60 minutes par heures, soit 1440 combinaisons d'affichage possibles sur toutes ces putain d'horloges numériques à digits que l'on trouve un peu partout de nos réveils-matin à nos téléphones portables en passant par mon enculé de pacemaker. Sachant que parmi ces combinaisons, il y a l'ensemble des couples [{00:00}; {01:01}; {02:02};...; {22:22};{23:23}] comprenant 24 éléments alors on peut se dire que chaque fois qu'on regarde l'heure on a une chance sur 60 de tomber sur un de ces couples et une chance sur 1440 de tomber sur 22h22. Ce soir comme tous les soirs depuis maintenant 22 ans 22 jours, 22 heures et 22 minutes, il faut que ma putain d'attention soit attirée par le cadran de ma montre. 22 février 1440: Naissance de Ladislas V le Posthume, duc d’Autriche, roi de Hongrie et de Bohême; sa mère Élisabeth de Luxembourg reçoit le soutien de Jan Jiskra, qui tient entre ses mains la Haute Hongrie et une partie des pays tchèques et moraves ; Le roi et sa mère se placent sous la protection de l’empereur Frédéric III à Vienne. Je viens de me faire péter la gueule au dessus de la cuvette des chiottes en plaçant un flingue au sommet de mon crâne. Ma dernière action : tirer la chasse.

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Au début, je voulais pas venir à cette soirée, mais Dryss m'avait pris par les sentiments en me promettant qu'il y aurait du bon vinyle. Les gros seins, c'est ma seule faiblesse. On a tapé quelques bangs puis on s'est mis en route. Arrivé là-bas, désillusion totale : des tas de connards pleins de couleurs et des ballons partout : "Surpriiiiiiiiiise". J'ai gobé deux taz pour me sortir de ce traquenard, mauvais calcul. 22h22 : Cindy me secoue en me montrant l'heure. Elle m'a dit : "Fais un vœu!", et là, j'ai craqué devant l'incarnation de la bêtise crasse qu'elle était. Je me souviens juste lui avoir enfoncé le réveil dans le cul avant que ce putain de "22h22" ne vienne hanter le trou noir qui s'en est suivi.

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J'attendais la symétrie du 22:22, les yeux fixés sur le coin de l'écran, plein de vide et de plein, le vide objectif qui causait lui-même mon attente et mon ennui, le plein des clichés débiles et des superstitions vaines, elles-mêmes pleines de vide et de plein. Un instant dense de stupidité. Rien à faire, et rien à dire, surtout pas avant les 22:22, surtout pas tant que rien n'avait encore de sens ; il fallait que le temps reste suspendu, précieux, jusqu'au moment critique qui ferait basculer l'inepte dans le symbolique - de quoi, personne n'en sait rien. Une heure à se tuer, précisément celle où une fois encore, on ne se tuera pas, parce qu'à cette heure-là, on attend ; un signe ; pour en finir.

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Je finis la vaisselle, il était 22h21. Je pensais bêtement qu'il serait bientôt l'heure magique, sans trop savoir pourquoi. J'allais m'asseoir sur le canapé, mais le range cd-m'arrêta et je choisis brièvement un Mux gravé, pour l'ambiance. La chaîne l'avala goulûment, et je pris enfin place sur le canapé, posant ma bière sur la table basse. Je restai quelques instants dans le calme, avant que la vague des pensées ne revienne et ne m'évoque l'horloge. Je la regardai distraitement, bougeant à peine la tête vers la gauche. Il était 22h23.

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À 22:22, j'ouvris les yeux sur mon réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, je chus dans l'infinie profondeur du présent. Mon regard se perdit dans le flou ; j'avançais en courant le long de l'étroite plaie ouverte entre les instants passés et les instants à venir, couloir aux murs imprécis et au fond illusoire qui sans cesse se dérobe (la perspective me laissait espérer l'existence du point où se joignent les parallèles) ; et je me ruais en vain, main tendue en avant, pour effleurer du doigt ou entr'apercevoir le véritable instant. Puis la vision prit fin. Le cadran réapparut, qui affichait 22:23.

***

Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n'avais pas le temps de me dire : "Je m'endors." À 22:22, j'ouvrais les yeux sur mon réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, je chutais dans l'infinie profondeur du présent. Mon regard se perdait dans le flou ; j'avançais en courant le long de l'étroite plaie ouverte entre les instants passés et les instants à venir, couloir aux murs imprécis et au fond illusoire qui sans cesse se dérobe (la perspective me laissait espérer l'existence du point où se joignent les parallèles) ; et je me ruais en vain, main tendue en avant, pour effleurer du doigt ou entr'apercevoir le véritable instant. Puis la vision prenait fin. Le cadran réapparaissait, et affichait 22:23. Alors, je serrais mon doudou très très fort, et me rendormais bien vite.

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À 22:22, j'ouvris les yeux sur mon réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, je chus dans l'infinie et inéluctable profondeur des monstrueux abysses du présent mystérieux. Mon regard se perdit dans un flou vague et incertain ; j'avançais en courant sur mes faibles et humaines jambes, le long de l'étroite plaie ouverte entre les instants passés et les instants à venir, couloir aux murs imprécis, organiques, mouvants, et au fond illusoire qui sans cesse se dérobe, et nous fuit, nous échappe (la perspective me laissait espérer l'existence du point paroxystique, des confins inconcevables où se joignent les imperturbables et immuables parallèles) ; et je me ruais en vain, main tendue en avant, la face tordue par un inhumain effort qui outrepassait ma frêle condition, pour effleurer du doigt ou entr'apercevoir l'instant unique, l'instant vrai, le véritable instant. Puis la vision prit fin, se drapant dans le brouillard ésotérique qui cerne les vérités inaccessibles aux hommes mortels. Le cadran réapparut, qui affichait 22:23.

***

Dans les fonds brumeux et sourds, sur les territoires sous-marins des abysses, entre les ruines décalées et bleuâtres, la pieuvre Amork et Negana l’ourson blanc chassaient ensemble. Amork flottait dans les vents obscurs des abîmes, agitant ses longs tentacules fibreux, indistincts, les laissant onduler jusqu’à ce qu’ils atteignent les dimensions spiralantes d’un vortex océanique. Ou bien il rampait sur les épaves d’un monde oublié, fluide sculpture déformée par les lames de fond. Ses yeux étaient grands et emplis d’ombre ; une nuit (mais tous les jours sont des nuits dans les fonds brumeux et sourds), à 22:22, il les ouvrit sur son réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, il chut dans l'infinie profondeur du présent. Son regard se perdit dans le flou ; il avançait en nageant le long de l'étroite plaie ouverte entre les instants passés et les instants à venir, couloir aux murs imprécis et au fond illusoire qui sans cesse se dérobe (la perspective lui laissait espérer l'existence du point où se joignent les parallèles) ; et il se ruait en vain, tentacule tendu en avant, pour effleurer ou entr'apercevoir le véritable instant. Puis la vision prit fin. Le cadran réapparut, qui affichait 22:23. Mais restait là le cadavre crispé, ensanglanté, aux os éventrés, aux yeux brûlants, de la déité, sous la Surface maudite.

***

À 22:22, j'ouvris les yeux sur mon réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, je chus dans l'infinie profondeur du présent. Mon regard se perdit dans le flou ; j’avancer dans ce bâtiment de la fonction publique, certainement le ministère des finances à Paris 13. Il y avait là, beaucoup de gens qui se bousculer pour passé dans ses couloirs beige, monotone, étroit et sans vie, l’archétype du couloir de la mort. Soudain je vis par la fenêtre tout au fond du couloir une lumière bleutée, intense qui ressemblée fortement à un raz-de-marée électrique. J’arriva devant un ascenseur, une jeune et séduisante femme complètement nue si trouver assise sur un tabouret, elle fumer une longue cigarette, et exaltée des ronds d’une fumée compacte. Puis la vision prit fin. Le cadran réapparut, qui affichait 22:23.

REMIX 1 :

Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n'avais pas le temps de me dire : "Je m'endors." À 22:22, j'ouvrais les yeux sur mon réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, je chutais dans l'infinie profondeur du présent. Mon regard se perdait dans le flou ; j'avançais en courant le long de l'étroite plaie ouverte entre les instants passés et les instants à venir, couloir aux murs imprécis et au fond illusoire qui sans cesse se dérobe (la perspective me laissait espérer l'existence du point où se joignent les parallèles) ; et je me ruais en vain, main tendue en avant, pour effleurer du doigt ou entr'apercevoir le véritable instant. Puis la vision prenait fin. Le cadran réapparaissait, et affichait 22:23. Alors, je serrais mon doudou très très fort, et me rendormais bien vite.

REMIX 2 :

À 22:22, j'ouvris les yeux sur mon réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, je chus dans l'infinie et inéluctable profondeur des monstrueux abysses du présent mystérieux. Mon regard se perdit dans un flou vague et incertain ; j'avançais en courant sur mes faibles et humaines jambes, le long de l'étroite plaie ouverte entre les instants passés et les instants à venir, couloir aux murs imprécis, organiques, mouvants, et au fond illusoire qui sans cesse se dérobe, et nous fuit, nous échappe (la perspective me laissait espérer l'existence du point paroxystique, des confins inconcevables où se joignent les imperturbables et immuables parallèles) ; et je me ruais en vain, main tendue en avant, la face tordue par un inhumain effort qui outrepassait ma frêle condition, pour effleurer du doigt ou entr'apercevoir l'instant unique, l'instant vrai, le véritable instant. Puis la vision prit fin, se drapant dans le brouillard ésotérique qui cerne les vérités inaccessibles aux hommes mortels. Le cadran réapparut, qui affichait 22:23.

REMIX 3 :

Dans les fonds brumeux et sourds, sur les territoires sous-marins des abysses, entre les ruines décalées et bleuâtres, la pieuvre Amork et Negana l’ourson blanc chassaient ensemble. Amork flottait dans les vents obscurs des abîmes, agitant ses longs tentacules fibreux, indistincts, les laissant onduler jusqu’à ce qu’ils atteignent les dimensions spiralantes d’un vortex océanique. Ou bien il rampait sur les épaves d’un monde oublié, fluide sculpture déformée par les lames de fond. Ses yeux étaient grands et emplis d’ombre ; une nuit (mais tous les jours sont des nuits dans les fonds brumeux et sourds), à 22:22, il les ouvrit sur son réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, il chut dans l'infinie profondeur du présent. Son regard se perdit dans le flou ; il avançait en nageant le long de l'étroite plaie ouverte entre les instants passés et les instants à venir, couloir aux murs imprécis et au fond illusoire qui sans cesse se dérobe (la perspective lui laissait espérer l'existence du point où se joignent les parallèles) ; et il se ruait en vain, tentacule tendu en avant, pour effleurer ou entr'apercevoir le véritable instant. Puis la vision prit fin. Le cadran réapparut, qui affichait 22:23. Mais restait là le cadavre crispé, ensanglanté, aux os éventrés, aux yeux brûlants, de la déité, sous la Surface maudite.

REMIX 4 :

À 22:22, j'ouvris les yeux sur mon réveil et, sans vraiment m'en rendre compte, je chus dans l'infinie profondeur du présent. Mon regard se perdit dans le flou ; j’avancer dans ce bâtiment de la fonction publique, certainement le ministère des finances à Paris 13. Il y avait là, beaucoup de gens qui se bousculer pour passé dans ses couloirs beige, monotone, étroit et sans vie, l’archétype du couloir de la mort. Soudain je vis par la fenêtre tout au fond du couloir une lumière bleutée, intense qui ressemblée fortement à un raz-de-marée électrique. J’arriva devant un ascenseur, une jeune et séduisante femme complètement nue si trouver assise sur un tabouret, elle fumer une longue cigarette, et exaltée des ronds d’une fumée compacte. Puis la vision prit fin. Le cadran réapparut, qui affichait 22:23.