Roi du monde

Le 18/07/2016
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par LePouilleux
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Thèmes / Obscur / Tranches de vie
Lepouilleux invente la slow motion littérature en mode bullet time. De longues descriptions parsèment les pensées dépressives d'un narrateur perdu dans la prose poétique. Le temps suspend son envol par cet artifice visant à saturer l'esprit du lecteur. C'est court et dense. Une belle trouvaille.
Ma sale gueule à contre-vent, ma mobylette pète comme un dragon de carnaval. Il y a des flammèches qui sortent de son fion.
J'avais passé un quart d'heure à lécher la pluie, la langue bizarrement sortie, avant de me décider à quitter Trouville. Les gouttes n'avaient pas apaisées ma soif de vivre. Elles glissaient tranquillement sur mon imperméable jaune. Je pensais à la Saint-Barthélémy des grenouilles sur les routes, c'était grand massacre par temps pareil, puis aussi au chien en décomposition devant la fabrique de graviers, à la sortie du village. Le printemps arrivait, les rayons du soleil mettraient fin au déluge en transperçant la couche de nuages de part en part. Encore une fois les forces du bien gagneraient la bataille.

Prôt ! Prôt ! Prôôôôot ! Je tordais allègrement la poignée d'accélération. Migrant irlandais qui grimpe à la poupe du Titanic, femme battue qui supprime son mari colérique à coups de carabine, constipé chronique qui se vide enfin de ses entrailles après trente jours d'abstinence : j'avais enfin rejoint cette communauté des hommes libres. D'un moment à l'autre j'allais m'envoler vers de nouveaux cieux !

Prôt ! Prôt ! Il n'y avait rien d'autre à dire sur cette aventure.

Car une fois le petit croisement qui donne sur la nationale passé, j'entrais de plein pied dans l'éternité par le biais d'un chauffeur polonais franc-bourré.