La Zone
La Zone - Un peu de brute dans un monde de finesse
Publication de textes sombres, débiles, violents.
 
 
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Messages - MILL

#16
Sans vraiment s'en apercevoir Jack, Véronique Genest, Alain Finkielkraut et Eric Zemmour cassaient des gueules sans rencontrer de résistance particulière et se dirigeaient tranquilou vers le stand cantine à prix libre. A les observer ainsi par en-dessous, Jack se dit qu'ils lui rappelaient les Bee Gees en 1975, à la sortie de leur premier tube disco, "You should be dancing", récemment recyclé en générique de fin pour Moi, moche et méchant, film de prédilection de Jack qui se prit alors à rêver d'un autographe des frères Gibb.

Un gars un peu relou qui pestait contre soit disant la bande de facho-spécistes qui entretenait fallacieusement la confusion des clients de la cantine, faisait la queue pour être servi avant eux et il s'agissait d'Aymeric Caron qui voulait bien s'assurer que toute la bouffe qui lui était offerte, pour les 5 centimes qu'il avait bien voulu en payer, ne contenait pas des produits issus de l'élevage d'animaux n'ayant pas donné leur accord préalable pour être exploité en tant que ressource ou producteur esclave de ressource alimentaire puisque d'ailleurs il insista pour analyser la bouffe au spectromètre de masse, exigea qu'on lui montre tous les labels et certificats de traçabilité de la moindre nanomolécule faisant officiellement ou non partie des ingrédients de la bouillie du buffet à volonté. Un jeune nigaud un peu ivre le poussa de l'épaule, il arrivait, son assiette en main et la doléance au bec, car il venait, à l'instant, de trouver un œil dans le pot-au-feu vegan. C'est l'œil de Pétunia se félicita le cuistot, on l'a cherché partout... mais... il est tout mâchouillé!

En apprenant cette nouvelle, Aymeric Caron eut un haut le cœur, puis il se retourna à droite et aperçu un logo Spanghero, un fer à cheval et un sigle biohazard sur un gros sac où il y avait l'inscription "trucs bouffables en vrac", ce qui lui provoqua un second haut le cœur, mais ce glorieux journaliste de guerre qui avait couvert de nombreux conflits en avait vu d'autres, des vertes, des pas mûres, des humains tellement affamés lors du siège de Malaya en Syrie où il faisait un photoreportage sur la thématique "les selfies et l'état islamique sont-ils compatibles ?", qu'ils avaient mangé tous les animaux domestiques, et avaient choppé d'immondes intoxications en ingurgitant toutes les feuilles des arbres, où il avait vu des Hommes affamés manger leurs enfants alors qu'ils n'étaient même pas morts et qu'il souffraient d'horribles intoxications après avoir ingéré de grandes doses d'amiante, et il se remémorait bien la trace des petites dents des tous petits gamins sur toutes les grosses dalles des bâtiments en ruines, éventrés par les bombes chimiques de Bashar Al Assad, alors il se reteint de vomir en hommage à leur mémoire. Puis Aymeric Caron se tourna à droite et se retrouva face à face avec Eric Zemmour, et cette vision insupportable, choquante, brutale, de près puisque probablement ils avaient respiré le même air, ce petit regard vicieux qui s'insinua par ses nerfs optiques circulant le long de ses axones fibreux et atrophiés par 20 ans de veganisme militant jusqu'au-boutiste et les carences protéiniques associées, jusqu'au plus profond de sa vésicule biliaire sécrétant de la chlorophylle à présent, déclenchèrent quelques spasmes puis très vite Aymeric Carron déversa le contenu de son estomac dans le col de celui qui comme lui était un ex présentateur de l'émission "On n'est pas couché" présentée par Laurent Ruquier. Puis cet incommensurable effort métabolique effectué, essoufflé, il bascula automatiquement en mode photosynthèse.

Jack, qui ne se séparait pour ainsi dire jamais de son nécessaire de petit chimiste, dégaina alors un bistouri à cran d'arrêt et un microscope de poche, ainsi que quelques lamelles transparentes afin de procéder à la vivisection de l'impétueux chroniqueur à cheveux longs. Finkielkraut et Zemmour usèrent d'armes non-létales capables d'éborgner un rhinocéros ou un syndicaliste à plus de vingt mètres pour dégager un espace suffisant et Jack en profita pour déplier une chaise de camping récupérée sur le tournage de Walking Dead. Sur l'envers du dossier en toile blanche, on pouvait lire Norman Reedus, ce qui lui valut des cris béats d'admiration chez les plus jeunes des manifestants. N'écoutant que son professionnalisme et son goût immodéré pour la science, il s'empressa de retirer un par un les organes d'Aymeric Caron, avant de les disposer par ordre de taille décroissante sur une écharpe bolivienne dérobée à Manu Chao. Lorsqu'il atteignit le coeur, Véronique Genest tourna de l'oeil. Lorsqu'il déroula les huit mètres d'intestins, l'odeur puissante et ambrée ne tarda pas à la réveiller dans un carnaval de vomissements, arrachant ainsi de vilaines paroles misogynes à Eric Zemmour qui, dans l'euphorie des éclaboussures, tweeta frénétiquement des photos de l'actrice barbouillée de gerbe. Finkielkraut observait la scène de son regard le plus critique.

"Bigre, hurla-t-il à la face du monde qui ne s'en est toujours pas remis, n'avons-nous pas mieux à faire que de désosser un végétarien ?
- Techniquement, on peut pas parler de désosser, dit Zemmour, de sa petite voix de serpent enroué.
- Ben non, dit Jack. J'ai pas encore touché aux os.
- Beurp, répéta Genest.
- Et si on mangeait ?
- Ah oui, tiens, au bout d'un moment, ça creuse.
- Beurp."


Ce fut le plus copieux repas à l'œil auquel nos compères n'avaient été invités, et tout en continuant de galvaniser les foules de leurs slogans fédérateurs, plusieurs cohortes se mirent en marche vers les appartements de Manuel Valls.
#17
Et voici ma pioche :

hautelisse, hautement, microtoponyme, napalmer, olécranienne, ouaf-ouaf, pétissière, rebarrir, salal, tournevis.

Putaingue.
#18
Ca vient, ça vient.... Rhhhhhaaaaa sommeil !!!
#19
Citation de: Valstar Karamzin le Mai 05, 2016, 14:35:25
Les admins ont-ils oubliés de leur envoyer les clés du forum?
Les admins l'ont-il fait exprès?
Mais, alors, dans quel dessein?

Eustace Mullins, sors de ce corps !
#20
C'est effectivement Lapinchien qui a tout fait. Je me suis contenté de relayer l'info.

#21
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#22
Le cordon de sécurité était tout de même bien imposant. Ce n'était pas du tout la flamboyante manifestation exhibitionniste que Jack avait tant espéré ou peut-être un truc de super pervers car il y avait des punks à chien à dreadlocks, des agriculteurs, des syndicalistes et tout un groupe de l'association Droit Au Logement, et d'ailleurs Jack crut reconnaître Albert Jacquard ce scientifique au physique intriguant, ambigu, super coquin en définitive, qu'il retrouvait souvent dans les backrooms et les saunas oniriques de ses nuits humides hantées de songes et fantasmes inavouables, mais Jack se souvint alors qu'Albert Jacquard était mort en septembre 2013, ce qui l'emplit soudain d'un spleen tétanisant.

"Ah bigre de merdouille, ô mortelle condition humaine, ah fichtre de foutre de corne de licorne en chocolat liégeois, pourquoi faut-il qu'ils meurent donc tous, les grands, les blonds, les beaux, qui sentent si bon le sable chaud ?"  Oui, et pourquoi la majorité des participants à la nuit debout étaient-ils en fait assis, pour ne pas dire avachis à même le sol, se croyaient-ils à la plage, espéraient-ils bronzer sous les lampadaires, et où étaient passés les maîtres-nageurs? "Debout, feignasses!" s'entendit-il crier, conscient toutefois que la peur panique les paralysait, lui et ses cordes vocales, "levez-vous, tenez-vous droit pour vos droits, ne lâchez pas le combat, fais tourner le oinj, et omni putas putatum eres et subséquemment !"

Une grosse dame du service d'ordre s'approcha du trouble fête.
- Hey ! T'es pas un casseur au moins, toi, le beuglard ?
- Quoi mais heu...
- Retourne tes poches et vide ton sac à dos. T'as des caillasses sur toi, des cocktails Molotov, une cagoule, une Kalash, un cran d'arrêt, une ceinture explosive, le dernier album de Booba ?
- Bah ?
- Avoue que c'est le MEDEF qui t'envoie pour foutre le boxon et nous décrédibiliser... Tu ressembles à Gattaz... T'es pas son neveu ?
- Ben peut-être j'en sais rien... j'ai pas fait de test génétique et...
- T'as vu le film "Merci, Patron" de François Ruffin ? Hey ! Mais tu serais pas le négociateur de Bernard Arnault ?
- Nar-Bé Arnault, mucho dinero. Yo te amo ! Wesh, grosse. Heu... Pas grosse, ronde, enrobée, koi...
- T'as l'air cool en fait, je te taquine. ça se sens que toi, t'es là pour t'exprimer. Parce que t'en as gros sur la patate...
- Il est vrai que je suis un taiseux. Un gars plutôt dans l'action.
- Faut que tu saches ici y a des codes à respecter. Tu peux pas te mettre à gueuler comme ça. Je comprends. T'as pas d'amis et t'as besoin d'évacuer tout le ras-le-bol au fond de toi. Lis bien cette petite brochure. Elle comporte des pictogrammes. Même les petits mammifères, genre les gerbilles, les mulots, les illettrés de la société Gad, Emmanuel Macron, entravent ce qu'y a d'écrit dessus. Voilà ce sont nos règles. Il faut les respecter.

Alors que la grosse dame s'en allait probablement vers de plus verdoyants pâturages, Jack se mit à étudier le prospectus qu'elle lui avait laissé. Quelle ne fut pas sa surprise : Il y avait tout un tas de mouvements décortiquant pas à pas une splendide chorégraphie quelque part entre Just Dance 4 sur PS4 et les derniers cours de Zumba qu'il se remémorait. La danse représentée ici ne lui était pas familière. Il en connaissait pourtant un rayon en façons de bouger son corps sur la piste depuis que les frères Gibb lui avaient mis la fièvre ce fameux samedi soir alors qu'il était littéralement ivre à la suite d'une hypersécrétion sauvage de sébum. Par la suite, il avait tout dansé, du kwasa kwasa au ver de terre, du pogo à la lambada sans oublier le cha-cha-cha, mais cette chorégraphie ne lui disait vraiment rien. Il essaya difficilement  de reproduire ce que le prospectus tentait de lui enseigner lorsqu'une voix autoritaire retentit derrière lui :

- Toi qui aime danser, viens donc voir un peu par là!

Jack vira de bord en esquissant un demi-tour en deux temps, histoire de souffler un brin au niveau du degré 12, comprit aussitôt que la personne qui venait de s'adresser à lui jouissait d'une aura particulière en découvrant sa couronne en papier mâché et, haussant les épaules comme quelqu'un qui en a marre de peser le pour et le contre à chaque lancé de dés, il alla effectivement voir un peu par-là.

- Hey, mec, tu me reconnais pas ? C'est moi, bordel,  Rémy Buisine !
- Ah ? Heu... Rémy Buisson, genre, le gorge profonde de Sarkozy, toussa. Bonjour, c'est un honneur et...
- Non mais ta gueule, mec. Pas Patrick Buisson Ardent mais Rémy Buisine, putain ! Tu regardes pas le Grand Journal sur Canal+ ?
- Aaah ! non, je m'en fous complètement pourquoi ?
- Putain, t'es un putain d'ermite ou quoi ? C'est quoi ton monastère ? Hey ! LA GUERRE FROIDE EST FINIE § Sors de ton bunker, l'ami...
- Non, mais tout Rémy Buisine que tu puisses être, surement de bonne famille, de noble condition et stricte éducation catholique, je ne vous permet pas et...
- Dis coucou à mon iPhone, mec !
- Non mais espèce d'animiste c'est quoi ce bad trip ?
- Non, mais ducon, je suis Rémy Buisine, j'te dis, on est en direct sur Périscope. J'ai 50.000 viewers en simultanée là.
- Périscope ? Mais d'où que t'as vu que j'avais un scaphandre, capt'n Némo ? Hey, t'es Jean-Yves Le Drian en vrai sous ta couronne en papier mâché ? Tu veux me vendre des sous-marins sous le manteau comme ça ? Tu m'as pris pour un australien, baltringue ?
- Mais non, sombre crétin, Périscope, c'est une application qui permet de couvrir des événements en STREAMING LIVE sur internet et là, bordel, t'es en train de faire grimper le compteur du nombre de viewers en temps réel. Ils sont déjà plus 60.000 en simultanée. On va encore faire tomber le serveur comme le 34 mars dernier et...
- Espèce de taré, 34 mars ? Mais tu viens de quelle planète de narvalos ? Dans ton espace-temps, comme ça, vous lynchez des garçons de café à 50.000 contre un ? Vous seriez pas un peu une bande de lâches genre des happy slappers ?
- Hey, cool, mec ! On a agressé personne. Avec Périscope, on a fait tomber un serveur internet tellement on était nombreux l'autre soir.
- Mais que ce soit un garçon de cybercafé ne change rien à l'affaire et tel les 300 spartiates je me dresserai fièrement contre vos cohortes de perses surnuméraires, mon cher Xerxes sur Seine. Je vais vous prendre tous un par un dans les Thermopyles de ton cul !
Jack joignit le geste à la parole et fit voler la couronne en papier mâché de Rémy Buisine.
Le roi du périscope n'eut pas le temps de réagir. Coi et sans coiffe, il était redevenu un être humain comme les autres, tous les autres, qui s'agglutinaient maintenant autour de Jack, la couronne brandit aux cieux. Il gueulait, la bave aux lèvres comme un épileptique en pleine crise qui aurait oublié, une fois de plus, que les cachets effervescent s'ingèrent avec de l'eau, sinon ça mousse.
Il criait  : "ça a commencé comme ça 89! ça a commencé comme ça la révolution FRAN9AISE!"
Et il brandissait de plus belle sa couronne, et il se mit à danser, la couronne toujours en main, essayant de se remémorer les pas de danses du prospectus. Il était en transe ; il se mit à réinventer le Krump, modestement, sur la place de la République.
Autour de lui, bien sûr, ça s'agglutinait de plus en plus, les gens scandaient, grondaient, riaient, la petite foule le portait... c'est à cet instant que le serveur du périscope rendit l'âme.

"Le pauvre", pensa Jack, qui n'en avait strictement rien à foutre. Il répondit alors à son téléphone Nokia première génération qui vibrait dans la poche de son jean depuis le début du chapitre mais qu'il ne souhaitait pas foncièrement interrompre afin de profiter un maximum de temps de l'effet massage testiculaire collatéral inhérent à la localisation du dit téléphone.

"Allô ?
- Oui, Jack, c'est toi, Jack .
- Oui, oui, je vous entends mal, vous êtes ?
- Ici le lieutenant Ripley, à bord du Nostromo. May day may day, je répète, may day, may day...
- Oui, d'accord, c'est très bien mais ça manque de mélodie. N'hésitez pas à me rappeler à un autre moment merci !"

Et il raccrocha aussitôt parce que diantre.


Jack finit tout de même par s'approcher de l'estrade.
#23
Soudain ce fût le tour de Jack de prendre la parole et un microphone lui fut tendu. Il y avait des tas de gens qui avaient constitué des commissions et par petits groupes ils parlaient d'utopies improbables en citant des Bisounours notoires comme Stéphane Hessel, ce suppôt démoniaque de l'impératif présent à la seconde personne du pluriel, cependant, Jack, micro en main, ne se sentait étrangement pas du tout indigné mais plutôt catatonique face à la foule hétéroclite, difforme et monstrueuse à laquelle il allait devoir se confronter tel un créateur de start-up ayant 2 minutes pour placer un pitch cool et bien senti. N'écoutant que son courage, dont il s'empressa par ailleurs de s'emparer d'une seule paluche, l'autre tenant le micro, il entama son intervention par une citation qu'il jugea instantanément parfaite de sobriété, rassembleuse et finaude :

"Est-ce qu'on va reprendre la route ?
Est-ce que nous sommes proches de la nuit ?
Est-ce que ce monde a le vertige ?
Est-ce qu'on sera un jour puni ?"

C'est alors qu'un indigné de la première vague, confortablement planqué dans la foule, un devenu à présent enragé à force d'arpenter les places européennes, jeta sur scène un objet qui vint atterrir aux pieds de Jack. Il s'agissait d'un piano, un gros piano à roulettes qui s'écrasa telle une masse et de disloqua dans un improbable accord dissonant à 10 mains semblant tout droit provenir d'un orgue de cathédrale dynamité par des bolcheviques de la grande époque empressés d'aller jouer au foot avec la tête de l'archevêque du diocèse annexé du coin. Et bien sûr, le gars qui l'avait balancé n'était autre que Davide Martello, l'allemand de 34 ans, qui parcourrait l'espace Schengen de long en large et en travers à l'affût d'un attentat, d'un rassemblement quelconque, la manne d'un public providentiel,  devant laquelle il interpréterait en boucle durant des heures et des heures, inlassablement, tout en nuance de couacs, de canards tonitruants, le bout des doigts gonflés de cloques asséchées, le seul et unique morceau de son répertoire approximatif, "Imagine" de John Lennon. C'était le fameux Monsieur Hommage cacophonique, le pianiste manchot itinérant, l'intermittent des bons sentiments incontinents, celui qui, s'était-on plu à concevoir, passait du baume au cœur, à des milliers de victimes d'explosions aveugles, de drive by aléatoires, d'attaques au couteau, de révoltes et d'insurrections printanières, de guerres civiles bisounoursiennes, mais qui en réalité était un émissaire secret de Daesh pour affliger le coup de grâce, l'after burner de la pop au service du mauvais goût, overkill de la cover classique en berne, l'artiste terroriste venant achever les blessés de rafales de bémols jusqu'à ce qu'ils ne saignent à mort des oreilles, et qu'un buzz médiatique relaye sur des milliers de chaînes info à travers le monde, son tintamarre anarchique, son ramdam de furie furieuse douce n'ayant qu'un seul et unique objectif : saturer la bande passante des satellites de communication et les réseaux sociaux d'une surcouche de bruit de fond diffus cosmologique.

Galvanisé par cet apport soudain de matière sonore inconsistante qu'il interpréta à tort comme une proposition unilatérale de collaboration improvisée, Jack entama un discours qu'il espéra long et beau et même un petit peu poétique ici ou là.

Il dit d'abord :

"Mesdames, messieurs, mesdemoiselles, oui, vous là, la petite rouquine avec les boucles pimpantes, je tiens d'abord à vous signaler que je vous ai compris."

Le piano de Martello émit un magnifique accord en ré mineur qui arracha trois larmiches aux premier rang et un éternuement à Jack qui se rappela aussi sec qu'il souffrait d'allergie aux accords mineurs. Il n'en poursuivit pas moins :

"A l'heure où la vie se répand dans les canaux sanguins de vos silhouettes parfaitement irriguées, à l'heure où deux plus deux ne font plus vraiment quatre, parce que TVA, Panama Papers et îles Caïman, à l'heure où des gifles se perdent à la télé ou ailleurs, à l'heure où John Malkovitch étonne par son absence prolongée sur le grand écran de nos angoisses, à l'heure où les Stones jouent à Cuba en buvant du Champagne français fabriqué en Chine, à l'heure..."

Pendant qu'il pérorait, le piano tentaculaire du massacreur de Lennon exhalait des volutes de gaz farci de dopamine. Des couples se formaient, des langues s'enchevêtraient, des sexes énormes se dressaient dans de pauvres sous-vêtements mal verrouillés. Jack racontait à présent qu'il n'était plus très loin d'achever sa collection de timbres lorsqu'un homme de haute taille et qui moulait ses muscles longilignes dans une combinaison en lycra, détruisit pianiste et piano d'un seul rayon de laser rouge lancé par ses globes oculaires chauffés à blanc. La foule se rhabilla, embarrassée, non sans un dernier coup de langue, et Jack décida de mettre fin à son discours en chantant une chanson de Polnareff dont il avait oublié les paroles.


Mais ce gros bâtard de coordinateur de débat fit évacuer Jack de l'estrade.
#24
Jack fut exfiltré vers l'espace VIP où il se retrouva enfermé avec Véronique Genest, Alain Finkielkraut et Eric Zemmour. Jack se sentit blêmir de l'intérieur, rougir de l'extérieur et pâlir du côté gauche. Les lois du hasard voulurent qu'en ce même instant un groupuscule féministe, interdisant la mixité du débat qui allait être entamé, investit les lieux, aussi la question de savoir si les prisonniers étaient des femmes ou non se posa et il leur fût demandé qu'ils ôtent intégralement leurs vêtements pour que la commission LGBT de l'évaluation du genre puisse statuer sur chacun de leur cas à vue d'œil et par des techniques de palpation d'ordre purement scientifique.

Eric Zemmour à son tour se sentit blêmir du côté gauche, rougir de l'intérieur et pâlir de l'extérieur, il ne voulait pas se mettre tout nu devant du monde, il ne voulait pas qu'une lesbienne le touche, il avait peur d'être contaminé, il ne voulait pas exhiber hubert, son sexe, son ami ; Véronique, elle, était déjà à poil et Alain, lui, bandait sous cape, en riant niaisement. Quant à Jack, il exhibait fièrement son micopénis tout en planquant ses burnes flasques entre ses cuisses. Il n'aimait pas trop ce genre de plaisanteries douteuses, lui qui était si rafiné, et voulait rendre la pareille génitale (si je puis me permettre) à l'Inquisition LGBT. Deux grandes drag queens se penchèrent longuement (et c'est une façon de le dire avec courtoisie) sur la protubérance dépassant d'une petite touffe de poils et qui présentait l'aspect d'un piléus sporophore. Un mycologiste fut appelé de suite à la rescousse. "Bon sang, mais s'agit-il d'un nanogland ou d'un macroclitoris ?" C'est alors que l'espiègle Jack écarta d'un coup les cuisses, dévoilant urbi et orbi, son énorme elephantiasis testiculaire. Il crut que cela ferait rire mais son cas souleva encore plus de questionnements, la commission LGBT se réunit en conclave inquisitorial afin de statuer s'il serait bon de placer Jack en quarantaine afin de prévenir et contenir tout départ de pandémie ébolique orpheline.

Pendant ce temps, à Juvigny-sur-Orne, Mme Sidonie Vertempied fouille dans son porte-monnaie à la recherche d'une pièce de cinquante centimes d'euros. La sueur a investi ses tempes, sa gorge et sa colonne dorsale. Elle frémit d'horreur et de stupéfaction lorsque le policier de la petite-monnaie alloué à la boulangerie chez René lève le sourcil gauche, signe incontestable de menace imminente pour la frêle petite dame aux cheveux argentés. N'écoutant que sa lâcheté, elle empoigne alors un revolver de taille conséquente qu'elle pointe aussitôt sur le groin du policier, mi-homme mi-sanglier, lequel siffle alors une mélodie simplette qui n'est pas sans rappeler le leitmotiv d'un film de Fritz Lang dont beaucoup s'accordent à dire qu'il est un chef-d'oeuvre et moi je dis oui, oui, un chef-d'oeuvre, haahaaaa, c'est évident, et j'ose pas avouer que je l'ai jamais vu. Le fameux jour de la séance spéciale dans le petit cinéma d'art et essai situé à trois arrêts de bus de la maison de mes parents, je suis tombé sur un os et le policier se jette les défenses en avant sur Mme Vertempied, qui vient de troquer son tailleur de vieille dame un peu pingre contre une longue robe fendue, des bas de contention à paillettes et un chapeau de cow-boy vert fluo, mais je voulais tant y aller, j'en rêvais de le voir, ce putain de film, mais cette salope de Sabrina est montée dans le bus avec sa banane pleine de drogues et de sextoys et je suis la voix du sommeil paradoxal de Jack et il serait temps qu'il se réveille de sa micro-sieste bordel de poutre parce que Mme Vermeulen vient d'entamer un coït impromptu avec le poli-sanglier qui en profite pour lui labourer l'intérieur du ventre de ses défenses sanguinolentes et je veux pas voir ça, je veux pas voir çaaaaaaaaaaaa...

Ce groupe vaillant venait de retrouver sa liberté et se frayait un chemin à grands coups de poings à travers toute cette bande de zombies fascistes.
#25
Le cordon de sécurité était tout de même bien imposant. Ce n'était pas du tout la flamboyante manifestation exhibitionniste que Jack avait tant espéré ou peut-être un truc de super pervers car il y avait des punks à chien à dreadlocks, des agriculteurs, des syndicalistes et tout un groupe de l'association Droit Au Logement, et d'ailleurs Jack crut reconnaître Albert Jacquard ce scientifique au physique intriguant, ambigu, super coquin en définitive, qu'il retrouvait souvent dans les backrooms et les saunas oniriques de ses nuits humides hantées de songes et fantasmes inavouables, mais Jack se souvint alors qu'Albert Jacquard était mort en septembre 2013, ce qui l'emplit soudain d'un spleen tétanisant.

"Ah bigre de merdouille, ô mortelle condition humaine, ah fichtre de foutre de corne de licorne en chocolat liégeois, pourquoi faut-il qu'ils meurent donc tous, les grands, les blonds, les beaux, qui sentent si bon le sable chaud ?"  Oui, et pourquoi la majorité des participants à la nuit debout étaient-ils en fait assis, pour ne pas dire avachis à même le sol, se croyaient-ils à la plage, espéraient-ils bronzer sous les lampadaires, et où étaient passés les maîtres-nageurs? "Debout, feignasses!" s'entendit-il crier, conscient toutefois que la peur panique les paralysait, lui et ses cordes vocales, "levez-vous, tenez-vous droit pour vos droits, ne lâchez pas le combat, fais tourner le oinj, et omni putas putatum eres et subséquemment !"

Une grosse dame du service d'ordre s'approcha du trouble fête.
- Hey ! T'es pas un casseur au moins, toi, le beuglard ?
- Quoi mais heu...
- Retourne tes poches et vide ton sac à dos. T'as des caillasses sur toi, des cocktails Molotov, une cagoule, une Kalash, un cran d'arrêt, une ceinture explosive, le dernier album de Booba ?
- Bah ?
- Avoue que c'est le MEDEF qui t'envoie pour foutre le boxon et nous décrédibiliser... Tu ressembles à Gattaz... T'es pas son neveu ?
- Ben peut-être j'en sais rien... j'ai pas fait de test génétique et...
- T'as vu le film "Merci, Patron" de François Ruffin ? Hey ! Mais tu serais pas le négociateur de Bernard Arnault ?
- Nar-Bé Arnault, mucho dinero. Yo te amo ! Wesh, grosse. Heu... Pas grosse, ronde, enrobée, koi...
- T'as l'air cool en fait, je te taquine. ça se sens que toi, t'es là pour t'exprimer. Parce que t'en as gros sur la patate...
- Il est vrai que je suis un taiseux. Un gars plutôt dans l'action.
- Faut que tu saches ici y a des codes à respecter. Tu peux pas te mettre à gueuler comme ça. Je comprends. T'as pas d'amis et t'as besoin d'évacuer tout le ras-le-bol au fond de toi. Lis bien cette petite brochure. Elle comporte des pictogrammes. Même les petits mammifères, genre les gerbilles, les mulots, les illettrés de la société Gad, Emmanuel Macron, entravent ce qu'y a d'écrit dessus. Voilà ce sont nos règles. Il faut les respecter.

Alors que la grosse dame s'en allait probablement vers de plus verdoyants pâturages, Jack se mit à étudier le prospectus qu'elle lui avait laissé. Quelle ne fut pas sa surprise : Il y avait tout un tas de mouvements décortiquant pas à pas une splendide chorégraphie quelque part entre Just Dance 4 sur PS4 et les derniers cours de Zumba qu'il se remémorait. La danse représentée ici ne lui était pas familière. Il en connaissait pourtant un rayon en façons de bouger son corps sur la piste depuis que les frères Gibb lui avaient mis la fièvre ce fameux samedi soir alors qu'il était littéralement ivre à la suite d'une hypersécrétion sauvage de sébum. Par la suite, il avait tout dansé, du kwasa kwasa au ver de terre, du pogo à la lambada sans oublier le cha-cha-cha, mais cette chorégraphie ne lui disait vraiment rien. Il essaya difficilement  de reproduire ce que le prospectus tentait de lui enseigner lorsqu'une voix autoritaire retentit derrière lui :
- Toi qui aime danser, viens donc voir un peu par là!

Jack vira de bord en esquissant un demi-tour en deux temps, histoire de souffler un brin au niveau du degré 12, comprit aussitôt que la personne qui venait de s'adresser à lui jouissait d'une aura particulière en découvrant sa couronne en papier mâché et, haussant les épaules comme quelqu'un qui en a marre de peser le pour et le contre à chaque lancé de dés, il alla effectivement voir un peu par-là.

Jack finit tout de même par s'approcher de l'estrade.
#26
Allez hop, un second, pour le fun :

Godard in the flesh.

« Vois-tu, je te trouve navrant. »

Je marque une pause.
Nous sommes tombés sur des prépubères.

Clara retira ses bas, en commençant un Strip-Tease et je bandais déjà. Et c'était facile, oui, c'était même d'une simplicité enfantine. Et pourtant, il n'y a rien dans tout cela. Après 15 bonnes minutes de va et viens vraiment pas gentleman, je l'ai trouvée sexy mais elle a une tronche bizarre, un peu déformée, des couilles gonflées à l'hélium, un QI au dessus du niveau de la mer.

« A toi de m'orienter vers ce qui te semble pertinent. »

Sans attendre sa réponse, il lui prend la main droite et écarte les doigts un à un. Au moment où il a éjaculé, elle a retiré sa main : « Je ne puis tolérer que tu fasses campagne. »

Pour eux c'était drôle. Ca te crispe déjà ? C'est très motivant.
#27
La poésie est une brochette braquée sur un mangeur de verre qui le lit dès l'aube jusqu'à la couenne.

On l'aura bien cherchée et on l'aura bien méritée notre condition humaine définitive. On a baisé sans la viande compliquée des suppositions, un coup de barre à mine, en disant : « N'aie pas peur... C'est la lutte finale... » Et oui, arrive un moment où, à force de descendre des pintes, on avale rapidement en chemin nos rations de médocs pour pas contracter la Maladie de Creutzfeldt-Jakob. La voix de ma petite soeur en boucle dans ma tête devant le portail rouillé :

« Laisse-moi partir et je te donne du fric. Beaucoup, beaucoup, beaucoup de fric. Tu trouveras plutôt marrant de bazarder quelques affaires : Garcia Marquez, Fuentes, Cortazar, Bioy Casares et Borges, nom de Dieu, Borges ! Tu le sais bien ça, débuggeur, que nos temps sont troubles même si tu ne me l'avoueras jamais. »

Ripley voyait ces observations d'un regard davantage décalé. L'innocence même, et moi, le colon-touriste, gorgé de tous mes ismes : humanisme, cynisme, Mary Popisme.

« Le rythme change selon ta consommation de cette merde dont tu apprécies tant le goût et les effluves, cette chiasse impure, trafficotée jusque dans sa structure atomique sous la haute vigilance de savants sous-diplômés grouillant telle la vermine dans les méandres noires d'un laboratoire secret planqué sous une vaste chaîne de supermarchés estampillés post-nuke, où l'on propose à brûle-pourpoint de risibles promotions sur la cervelle et les asticots, où l'on vend à la criée des souvenirs formatés à de pâles orang-outans qui croient régner sur le monde parce qu'ils maîtrisent Google. »

Quand elle enleva son masque, une poitrine lourde et prometteuse, qui devrait pouvoir nourrir une longue lignée, métissée ou pure race, vint caresser ses joues. Un buisson ardent, la cyprine comme ultime carburant. Son sang ne fit qu'un tour.  C'était une situation inextricable.

Les scientifiques qui avaient élaboré le premier robot écrivain, avaient produit une suite délirante de robots : d'abord, des robots pour tous les corps de métier, ensuite des robots pour la prostitution. Marc-Antoine était particulièrement friand des selfies en maillot de bain ou en tenue de fitness, un mini short sur des collants, ça ne suffit plus.

« Soigne un peu ton langage fils de pute. Ce que j'exècre le plus chez toi, ce n'est pas ta suffisance de petit-bourgeois peigne-cul. Allez, vas-y, je t'écoute. Raconte-moi ta vie minable de pauvre humain dérisoire. Je suis l'arbre et la forêt. »

Je nous ai servi du coca-cola. Faut quand même pas déconner, quand même.
#28
J'allais justement le proposer.
#29
Tous les français libérés chantonnaient, festoyaient et forniquaient librement. Dans l'ombre du gouvernement provisoire constitué par les clones des Bee Gees, Joey Starr et Nabila, les confusionnistes survivalistes soraliens se frottaient les mains en ôtant leurs masques d'Etienne Chouard.

Jack sombra dans un flashback extatique où il se remémorait les prémices de cette insurrection, la campagne électorale de Ségolène Royal en 2007 (presque dix ans déjà) et sa volonté de placer la démocratie participative au cœur de nos institutions, puis il se souvint des années 80 au détour d'une faille spatio-temporelle, tu te souviens des soirées, et très clairement des nuées de sombres connards, qui dansaient le MIA, tenir les mêmes discours en parlant du Minitel comme l'outil de libération du citoyen asservi à la sombre dictature en sous-texte de la constitution de la Veme République, et il suffit à Jack d'une remontée de LSD, pour qu'il se retrouve propulsé de nouveau, via l'hyperespace plié en accordéon, quelques heures plus tôt, juste avant qu'ait eu lieu la seconde révolution française, place de la République. Il mangea alors un cachou, mû par une fringale printanière hérité de sa grand-mère paternelle. Au loin, des rasta blancs jouaient du jdembe, jammant comme jamais, en attendant le Grand Soir, et accessoirement la soupe aux légumes frais préparée par Svan, le frère de Sven, lui même rasta, roux, rasé et rasant les murs pour ne pas que la maréchaussée ne l'appréhende. Un clochard qui voulait un peu de soupe fut tancé par un animateur culturel : il n'était pas membre d'une assemblée constituante tirée au sort et participative. Près des toilettes sèches et vegan, le Parti de la Souveraineté Misandre organisait des réunions non-mixtes. "Le mâle, c'est la mal" cria fort Pétunia, un personnage secondaire qui joua un rôle essentiel dans le 5ème chapitre de notre aventure.

Jack se réveilla sanglé dans une petite pièce capitonnée et il avait fort mal à son fondement.
#30
Le cordon de sécurité était tout de même bien imposant. Ce n'était pas du tout la flamboyante manifestation exhibitionniste que Jack avait tant espéré ou peut-être un truc de super pervers car il y avait des punks à chien à dreadlocks, des agriculteurs, des syndicalistes et tout un groupe de l'association Droit Au Logement, et d'ailleurs Jack crut reconnaître Albert Jacquard ce scientifique au physique intriguant, ambigu, super coquin en définitive, qu'il retrouvait souvent dans les backrooms et les saunas oniriques de ses nuits humides hantées de songes et fantasmes inavouables, mais Jack se souvint alors qu'Albert Jacquard était mort en septembre 2013, ce qui l'emplit soudain d'un spleen tétanisant.

"Ah bigre de merdouille, ô mortelle condition humaine, ah fichtre de foutre de corne de licorne en chocolat liégeois, pourquoi faut-il qu'ils meurent donc tous, les grands, les blonds, les beaux, qui sentent si bon le sable chaud ?"

Oui, et pourquoi la majorité des participants à la nuit debout étaient-ils en fait assis, pour ne pas dire avachis à même le sol, se croyaient-ils à la plage, espéraient-ils bronzer sous les lampadaires, et où étaient passés les maîtres-nageurs?

"Debout, feignasses!" s'entendit-il crier, conscient toutefois que la peur panique les paralysait, lui et ses cordes vocales, "levez-vous, tenez-vous droit pour vos droits, ne lâchez pas le combat, fais tourner le oinj, et omni putas putatum eres et subséquemment !"

Jack finit tout de même par s'approcher de l'estrade.