Bon premier jet pour poser un peu l'ambiance du texte. On peut partir sur d'autres personnages, d'autres idées etc... bref, c'est juste "pour voir".
D'aussi loin que je me souvienne nous avions toujours vécu cette même vie de gueux. Creusant de nos mains sanguinolentes ce vieux de tas de mousse défraîchie. Enfermés dans cet étroit couloir d'acier aux parois vertigineuses. Surmontés par une noirceur extrême et inquiétante. La sensation du froid venu du dehors nous léchant le dos, comme une sourde menace à notre envie de faire marche arrière. Nous cherchions un passage vers un hypothétique nouveau refuge. Cette mission consumait toutes nos forces vacillantes. En ce temps, nous étions harcelés par la fatigue et la faim.
« J'ai faim, j'suis fatigué !!! » Criait Beg le tâché pour nous le rappeler. Tort lâcha un gémissement lointain mais suffisamment agressif pour le faire taire. Il était à la pointe de la flèche que nous formions tout les trois pour creuser cet improbable chemin. J'étais ébahi par l'autorité qu'il pouvait avoir sur Beg. Parfois, elle se manifestait de manière si subtile et tranquille de sa part qu'elle contrastait avec l'extrême violence dont il pouvait faire preuve à tout moment. Certes, Beg était de loin le plus servile d'entre nous. Et sans aucun doute le plus lâche. Mais à aucun moment il ne nous serait venu à l'idée de contredire notre leader. Nous étions trop peu nombreux pour lui trouver un remplaçant, d'ailleurs. Sa mort ou sa mise au ban aurait signifié la fin du groupe, ou plutôt du débris d'humanité qui nous faisait office de groupe. Veï : sous ses apparences de vieillarde noueuse, se cachait la véritable mémoire de notre clan. Car le chemin qui nous laissions derrière nous s'effaçait au fur-et-à-mesure que nous avancions. Singulière malédiction qui nous empêchait de voir au-delà d'un voile brumeux qui se posait au-delà de dix jours de notre mémoire. Nous errions éternellement comme des nouveaux-nés. Cette femme qui pouvait aussi bien être ma mère, (mais qui pouvait bien se souvenir de cela dans le groupe ?), était parfois capable de remonter le fil de visions lointaines pour nous aider à déchiffrer ce monde obscur et dangereux. Sans cela elle girerait sans doute au bord de la route le crâne fracassé par Tort. Je la regardais à l'arrière, tentant comme toujours de se rendre utile, elle évacuait les résidus de mousse que nous accumulions. Meï :encore plus en arrière, celle qui espérait le plus de cette chaleur qui se faisait sentir à l'autre bout du couloir, dans ce bâtiment étrange, son corps maigre portait un ventre tendu, signe d'un proche enfantement qui s'annonçait difficile. Bien plus jeune que Veï, elle était la seule femelle fertile du groupe, gardée jalousement par Tort. Notre chef à la patte manquante, doté d'une vitalité à toute épreuve. Son moignon sans doute plus puissant à arracher cette mousse compact que les deux bras réunis de Beg le faiblard, ou que les miens. Des tâches brunâtres lui parcouraient le corps, lui faisant une sorte de sceau de la peur qui transparaissait dans le moindre de ses gestes ou la moindre de ses paroles. Moi, je ne savais pas qui j'étais. Une sorte de bête au corps à peine sorti de l'adolescence. Pas tout à fait assez agressif, ni tout à fait assez clairvoyant pour s'imposer aux yeux des autres. Comment avais-je réussit à survivre jusque là ? C'était un mystère. Au demeurant, aucun de nous ne savait précisément depuis combien de temps nous errions ensemble, ni quels liens antérieurs avaient bien pu nous jeter dans le même rafiot pourri et tanguant que nous nous aventurions parfois à appeler « le clan ». Trois mâles et deux femelles qui ne valaient sans doute pas grand chose à l'échelle individuelle, hormis peut-être Tort et Veï. Tous creusés par la faim, tenaillés par la peur de ne rien trouver derrière cet absurde tas de mousse à la masse inépuisable.
« Pal, il ne va pas s'arrêter avant d'avoir trouver une sortie à cet espèce de tunnel. » C'était Meï qui me tenait le bras pour me faire arrêter cette folie qui devait bien durer depuis plusieurs jours. Personne ne savait plus. Encore un décompte que nous avions perdu. « Reposez-vous avec Beg. Veï a calfeutré le trou de l'autre côté. Nous allons pouvoir souffler un peu. » Couché en chien de fusil dans le noir, j'essayais de me « remembrer » les événements qui nous avaient mené ici. Mais rien ne venait hormis le souvenir vague de l'herbe gelé, de feuilles mortes et tournoyantes, des morsures permanentes d'un vent glacial auquel il fallait échapper autant qu'à la faim. Nous avions pénétré dans les entrailles d'une immense bête d'acier et de béton dont la fonction nous échappait. De toute évidence rien n'était fait pour nous ici, les dimensions n'était pas celles des hommes, cette architecture n'avait ni queue ni tête. Mais cela pouvait autant être notre absence de mémoire qui nous jouait des tours. Il fallait encore et encore réapprendre, recommencer, tâtonner en tout sens comme des nouveaux-nés. Il en allait de notre survie. La carlingue de métal dans laquelle nous nous nous étions réfugiés couinait sous les assauts des bourrasques. J'avais du mal à me représenter ce qui pouvait bien se passer de l'autre côté de la paroi. Sans doute quelque chose de terrible. Tout précaire qu'il fut, cet abri était un abri. Calé contre l'épaule de Veï, inconfortable tant elle était décharnée, mes rêves défilaient, désespérément vides, longs films noirs dans lesquels je ne distinguais pas le moindre détail.
Là, je rajoute une partie pour étayer un peu le principe de la gestion de la mémoire collective. En gros, ils sont trop paumés et épuisés pour capter ce qu'il se passe. Ils ont perdu le fil de la mémoire, surtout notre personnage principal qui semble ne se rappeler de rien. La doyenne du groupe invoque donc la "remembrance". Une sorte de rituel pour mettre en commun les souvenirs qui leur restent. Ca donne lieu à des quiproquos ou des malentendus, voir des disputes car les souvenirs des uns et des autres peuvent entrer en contradiction tant ils se déforment et s'effacent rapidement.
Quelques heures ou quelques minutes plus tard Tort' nous réveillait à coups de pieds bien sentis. « Hé réveillez-vous bande de pouilleux ! J'ai trouvé une ouverture là-haut, il y a de la chaleur derrière. » Il marqua une pause, l'excitation lui faisant perdre un peu de son souffle. Notre chef regardait de l'autre côté du couloir. « Et vous avez vérifié de ce côté s'il y a pas un passage ? » Le groupe marqua un silence hésitant. Même si c'était flou, j'en aurais mis ma main à couper que c'était de là que nous venions, les tas de laines découpés indiquaient clairement que nous avions creusé cette galerie qui avançait à présent loin en avant à partir de cette direction, impossible de se tromper. Pour le reste, le vague souvenir d'un monde extérieur me revenait. Un sol gelé, quelque chose qui pouvait bien être le vent glacial, mais ce souvenir se perdait dans le lointain. Nous étions tous là, emmurés dans un silence étrange, tentant de remonter mentalement le chemin du passé passé jusqu'aux portes closes de notre mémoire. La confusion semblait régner dans nos consciences. Veï annonça alors, de sa petite voix tremblante, que le temps de la « remembrance » était venu. Le clan s'assit en cercle. Nous avions tous piteuses mines, Meï semblait particulièrement faible du fait de sa grossesse, Veï et Tort' l'aidèrent à s'asseoir. C'était toujours la vieillarde qui appelait et dirigeait le rituel. Celui-ci était vital pour ne pas perdre définitivement le fil dans le maintien d'une certaine conscience collective. De plus, c'était notre seul moyen de transmission d'informations pour ne pas nous noyer définitivement dans les limbes de l'oubli. D'enfants perdus nous serions devenus de pauvres fantômes errants. Mais rien ne se passa, les autres regardaient notre chef, qui lui-même me fixait avec insistance. Visiblement il attendait quelque chose de moi. « C'est toi qui commence, toujours, tu es le plus jeune, ta mémoire est plus fraîche. » m'annonça-t-il sans ambages. Cette manière de faire me paraissait étrange. Dans mes souvenirs de la dernière remembrance, il y avait quelques jours, c'était Veï qui nous dirigeait pour faire ressortir nos souvenirs les uns après les autres, dans un ordre à peu prés cohérent. Je m'empourprais car je ne savais trop quoi dire ou quoi faire. « Je suis... Pal. », annonçais-je au hasard. «Mort' » « Meï » « Veï » « Beg ». Les membres du clan venaient d'annoncer leurs noms les uns à la suite des autres. Quelques chose me poussa à continuer sur la même lancée : « ...et Tort' est notre chef... ». « Tu te trompes. Mon nom est Mort', pas Tort'. Je suis bien votre chef, oui. » me coupa celui qui manifestement s'appelait Mort' et non Tort'. « ... nous sommes cinq, deux femelles et trois mâles...» « où sont les autres ? » demanda Beg d'une voix angoissée. Veï se tourna vers lui pour lui annoncer d'une voix posée quelque chose qui paraissait assez terrible à mes oreilles « Il n'y a pas d' « autres », s'il y en a, nous avons perdu leur trace depuis longtemps. C'est nous le clan. ». Par réflexe je regardais autour de moi pour guetter les réactions, essayer de voir au-delà de ces simples énoncés qui semblaient si importants pour le groupe, mais vidés de leurs sens sans le contexte qui nous permettait d'en mesurer la portée réelle. Meï semblait regarder dans le vide, évitant mon regard ou celui des autres, le tâché tordait sa bouche d'un air perplexe, tandis que notre leader regardait franchement la vieillarde sans laisser paraître la moindre émotion. « Veï est la mère de Meï. » lança-t-il. Beg acquiesqua semblant mieux se souvenir de cette information qui, pour me part, semblait sortir du néant, et commença à ajouter : « Et l'enfant que porte Meï... » « Cet enfant est le mien. » termina notre chef. « Mort', tu ne peux pas couper la parole de quelqu'un pendant la remembrance, lui reprocha la vieillarde d'une voix toujours égale, il faut que le fil de leur mémoire remonte de son plein gré, il ne faut pas interférer avec leurs propres souvenirs, puisse-t-il être inexacts. Nous devons confronter nos souvenirs tous ensemble pour démêler le vrai du faux. » Mort' émit le même grognement agressif que dans la galerie, tout à l'heure. « Cet enfant est le mien. Je déciderai si on le garde ou pas. Nous n'avons plus de nourriture. Meï devra partir sans lui si je le décide. Elle est d'accord. »
D'aussi loin que je me souvienne nous avions toujours vécu cette même vie de gueux. Creusant de nos mains sanguinolentes ce vieux de tas de mousse défraîchie. Enfermés dans cet étroit couloir d'acier aux parois vertigineuses. Surmontés par une noirceur extrême et inquiétante. La sensation du froid venu du dehors nous léchant le dos, comme une sourde menace à notre envie de faire marche arrière. Nous cherchions un passage vers un hypothétique nouveau refuge. Cette mission consumait toutes nos forces vacillantes. En ce temps, nous étions harcelés par la fatigue et la faim.
« J'ai faim, j'suis fatigué !!! » Criait Beg le tâché pour nous le rappeler. Tort lâcha un gémissement lointain mais suffisamment agressif pour le faire taire. Il était à la pointe de la flèche que nous formions tout les trois pour creuser cet improbable chemin. J'étais ébahi par l'autorité qu'il pouvait avoir sur Beg. Parfois, elle se manifestait de manière si subtile et tranquille de sa part qu'elle contrastait avec l'extrême violence dont il pouvait faire preuve à tout moment. Certes, Beg était de loin le plus servile d'entre nous. Et sans aucun doute le plus lâche. Mais à aucun moment il ne nous serait venu à l'idée de contredire notre leader. Nous étions trop peu nombreux pour lui trouver un remplaçant, d'ailleurs. Sa mort ou sa mise au ban aurait signifié la fin du groupe, ou plutôt du débris d'humanité qui nous faisait office de groupe. Veï : sous ses apparences de vieillarde noueuse, se cachait la véritable mémoire de notre clan. Car le chemin qui nous laissions derrière nous s'effaçait au fur-et-à-mesure que nous avancions. Singulière malédiction qui nous empêchait de voir au-delà d'un voile brumeux qui se posait au-delà de dix jours de notre mémoire. Nous errions éternellement comme des nouveaux-nés. Cette femme qui pouvait aussi bien être ma mère, (mais qui pouvait bien se souvenir de cela dans le groupe ?), était parfois capable de remonter le fil de visions lointaines pour nous aider à déchiffrer ce monde obscur et dangereux. Sans cela elle girerait sans doute au bord de la route le crâne fracassé par Tort. Je la regardais à l'arrière, tentant comme toujours de se rendre utile, elle évacuait les résidus de mousse que nous accumulions. Meï :encore plus en arrière, celle qui espérait le plus de cette chaleur qui se faisait sentir à l'autre bout du couloir, dans ce bâtiment étrange, son corps maigre portait un ventre tendu, signe d'un proche enfantement qui s'annonçait difficile. Bien plus jeune que Veï, elle était la seule femelle fertile du groupe, gardée jalousement par Tort. Notre chef à la patte manquante, doté d'une vitalité à toute épreuve. Son moignon sans doute plus puissant à arracher cette mousse compact que les deux bras réunis de Beg le faiblard, ou que les miens. Des tâches brunâtres lui parcouraient le corps, lui faisant une sorte de sceau de la peur qui transparaissait dans le moindre de ses gestes ou la moindre de ses paroles. Moi, je ne savais pas qui j'étais. Une sorte de bête au corps à peine sorti de l'adolescence. Pas tout à fait assez agressif, ni tout à fait assez clairvoyant pour s'imposer aux yeux des autres. Comment avais-je réussit à survivre jusque là ? C'était un mystère. Au demeurant, aucun de nous ne savait précisément depuis combien de temps nous errions ensemble, ni quels liens antérieurs avaient bien pu nous jeter dans le même rafiot pourri et tanguant que nous nous aventurions parfois à appeler « le clan ». Trois mâles et deux femelles qui ne valaient sans doute pas grand chose à l'échelle individuelle, hormis peut-être Tort et Veï. Tous creusés par la faim, tenaillés par la peur de ne rien trouver derrière cet absurde tas de mousse à la masse inépuisable.
« Pal, il ne va pas s'arrêter avant d'avoir trouver une sortie à cet espèce de tunnel. » C'était Meï qui me tenait le bras pour me faire arrêter cette folie qui devait bien durer depuis plusieurs jours. Personne ne savait plus. Encore un décompte que nous avions perdu. « Reposez-vous avec Beg. Veï a calfeutré le trou de l'autre côté. Nous allons pouvoir souffler un peu. » Couché en chien de fusil dans le noir, j'essayais de me « remembrer » les événements qui nous avaient mené ici. Mais rien ne venait hormis le souvenir vague de l'herbe gelé, de feuilles mortes et tournoyantes, des morsures permanentes d'un vent glacial auquel il fallait échapper autant qu'à la faim. Nous avions pénétré dans les entrailles d'une immense bête d'acier et de béton dont la fonction nous échappait. De toute évidence rien n'était fait pour nous ici, les dimensions n'était pas celles des hommes, cette architecture n'avait ni queue ni tête. Mais cela pouvait autant être notre absence de mémoire qui nous jouait des tours. Il fallait encore et encore réapprendre, recommencer, tâtonner en tout sens comme des nouveaux-nés. Il en allait de notre survie. La carlingue de métal dans laquelle nous nous nous étions réfugiés couinait sous les assauts des bourrasques. J'avais du mal à me représenter ce qui pouvait bien se passer de l'autre côté de la paroi. Sans doute quelque chose de terrible. Tout précaire qu'il fut, cet abri était un abri. Calé contre l'épaule de Veï, inconfortable tant elle était décharnée, mes rêves défilaient, désespérément vides, longs films noirs dans lesquels je ne distinguais pas le moindre détail.
Là, je rajoute une partie pour étayer un peu le principe de la gestion de la mémoire collective. En gros, ils sont trop paumés et épuisés pour capter ce qu'il se passe. Ils ont perdu le fil de la mémoire, surtout notre personnage principal qui semble ne se rappeler de rien. La doyenne du groupe invoque donc la "remembrance". Une sorte de rituel pour mettre en commun les souvenirs qui leur restent. Ca donne lieu à des quiproquos ou des malentendus, voir des disputes car les souvenirs des uns et des autres peuvent entrer en contradiction tant ils se déforment et s'effacent rapidement.
Quelques heures ou quelques minutes plus tard Tort' nous réveillait à coups de pieds bien sentis. « Hé réveillez-vous bande de pouilleux ! J'ai trouvé une ouverture là-haut, il y a de la chaleur derrière. » Il marqua une pause, l'excitation lui faisant perdre un peu de son souffle. Notre chef regardait de l'autre côté du couloir. « Et vous avez vérifié de ce côté s'il y a pas un passage ? » Le groupe marqua un silence hésitant. Même si c'était flou, j'en aurais mis ma main à couper que c'était de là que nous venions, les tas de laines découpés indiquaient clairement que nous avions creusé cette galerie qui avançait à présent loin en avant à partir de cette direction, impossible de se tromper. Pour le reste, le vague souvenir d'un monde extérieur me revenait. Un sol gelé, quelque chose qui pouvait bien être le vent glacial, mais ce souvenir se perdait dans le lointain. Nous étions tous là, emmurés dans un silence étrange, tentant de remonter mentalement le chemin du passé passé jusqu'aux portes closes de notre mémoire. La confusion semblait régner dans nos consciences. Veï annonça alors, de sa petite voix tremblante, que le temps de la « remembrance » était venu. Le clan s'assit en cercle. Nous avions tous piteuses mines, Meï semblait particulièrement faible du fait de sa grossesse, Veï et Tort' l'aidèrent à s'asseoir. C'était toujours la vieillarde qui appelait et dirigeait le rituel. Celui-ci était vital pour ne pas perdre définitivement le fil dans le maintien d'une certaine conscience collective. De plus, c'était notre seul moyen de transmission d'informations pour ne pas nous noyer définitivement dans les limbes de l'oubli. D'enfants perdus nous serions devenus de pauvres fantômes errants. Mais rien ne se passa, les autres regardaient notre chef, qui lui-même me fixait avec insistance. Visiblement il attendait quelque chose de moi. « C'est toi qui commence, toujours, tu es le plus jeune, ta mémoire est plus fraîche. » m'annonça-t-il sans ambages. Cette manière de faire me paraissait étrange. Dans mes souvenirs de la dernière remembrance, il y avait quelques jours, c'était Veï qui nous dirigeait pour faire ressortir nos souvenirs les uns après les autres, dans un ordre à peu prés cohérent. Je m'empourprais car je ne savais trop quoi dire ou quoi faire. « Je suis... Pal. », annonçais-je au hasard. «Mort' » « Meï » « Veï » « Beg ». Les membres du clan venaient d'annoncer leurs noms les uns à la suite des autres. Quelques chose me poussa à continuer sur la même lancée : « ...et Tort' est notre chef... ». « Tu te trompes. Mon nom est Mort', pas Tort'. Je suis bien votre chef, oui. » me coupa celui qui manifestement s'appelait Mort' et non Tort'. « ... nous sommes cinq, deux femelles et trois mâles...» « où sont les autres ? » demanda Beg d'une voix angoissée. Veï se tourna vers lui pour lui annoncer d'une voix posée quelque chose qui paraissait assez terrible à mes oreilles « Il n'y a pas d' « autres », s'il y en a, nous avons perdu leur trace depuis longtemps. C'est nous le clan. ». Par réflexe je regardais autour de moi pour guetter les réactions, essayer de voir au-delà de ces simples énoncés qui semblaient si importants pour le groupe, mais vidés de leurs sens sans le contexte qui nous permettait d'en mesurer la portée réelle. Meï semblait regarder dans le vide, évitant mon regard ou celui des autres, le tâché tordait sa bouche d'un air perplexe, tandis que notre leader regardait franchement la vieillarde sans laisser paraître la moindre émotion. « Veï est la mère de Meï. » lança-t-il. Beg acquiesqua semblant mieux se souvenir de cette information qui, pour me part, semblait sortir du néant, et commença à ajouter : « Et l'enfant que porte Meï... » « Cet enfant est le mien. » termina notre chef. « Mort', tu ne peux pas couper la parole de quelqu'un pendant la remembrance, lui reprocha la vieillarde d'une voix toujours égale, il faut que le fil de leur mémoire remonte de son plein gré, il ne faut pas interférer avec leurs propres souvenirs, puisse-t-il être inexacts. Nous devons confronter nos souvenirs tous ensemble pour démêler le vrai du faux. » Mort' émit le même grognement agressif que dans la galerie, tout à l'heure. « Cet enfant est le mien. Je déciderai si on le garde ou pas. Nous n'avons plus de nourriture. Meï devra partir sans lui si je le décide. Elle est d'accord. »