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« le: novembre 04, 2008, 19:22:05 »
Le monde décoloré
Posté le 20/10/2008
par Zak Blayde
C'était la nuit, une de ces nuit pourries qu'on ne devrait voir que dans les polars... Et pourtant c'était bien la réalité. La réalité d'un monde usé et recyclé, un ramassis d'ordures coincées dans un bocal sensé sauver des vies, mais qui ne faisait que les plonger dans un chaos physique puis mental.
J'écrasais ma cigarette à moitié fumée dans le cendrier. La lumière filtrait à travers le store de mon bureau et projetait ses reflets. La paperasse formait des piles poussiéreuses dans la pièce et passant mes mains derrière ma tête, je repensais à toutes ces années passées dans la police. La plupart des flics étaient corrompus, et les seuls honnêtes finissaient souvent comme moi à quitter le métier, par lâcheté ou dégoût, je ne le savais toujours pas moi-même.
La corruption avait atteint la ville entière à Cybercity, et c'était pas près de s'arrêter. Je décidais d'aller faire un tour dehors. Prenant mon imper, je refermais la porte derrière moi et m'engageais dans les rues.
La vapeur sortant des bouches d'égouts faisait baigner la ville dans un nuage permanent. Le sol humide et couvert de merde la plupart du temps nous faisait presque vomir il y a quelques semaines. Aujourd'hui on s'y était habitué, on s'habitue à tout à Cybercity : les coups de feu, les meurtres, les cris, la corruption, et la merde...
On est que des rats dans ce laboratoire géant, plus des hommes.
Bordel, j'en devenais claustrophobe, ce mur de verre géant qui nous entoure a beau être énorme, ça n'en est pas moins une prison.
Une voix derrière moi ;
"Eh Columbo, file ton porte-feuille où j'te care du plomb dans ton beau blouson"
Y'a quelques années, j'aurai peut-être pu le neutraliser, mais aujourd'hui...
Je passais lentement la main dans la poche intérieure de mon imper, le soulevant un peu de l'autre main en faisant mine d'être coopérant.
Puis d'un geste brusque je sortais mon flingue et le braquais devant l'autre...
Ah merde ça brûle ces conneries. J'venais de me prendre une bille de plomb dans l'épaule, et je sentais le liquide chaud et noir couler le long de mon corps desséché. L'autre morveux, sûrement mineur, un bonnet sur la tête et des cheveux longs sortant de celui-ci riait presque malgré une angoisse mal contenue. Il me prit mon porte-papelard et s'en alla avec en courant...
C'était la nuit, une de ces nuit pourries qu'on ne devrait voir que dans les polars... Et pourtant c'était bien la réalité.