LA ZONE -

Psychotropes

Le 09/05/2009
par Contre-paix
[illustration] 7 novembre.

-"Saleté de foutue moto", maugrée Laurent. Encore trois jours à rentrer du travail en RER, coincé entre les clochards bruyants et les matrones reniflantes, avant qu'il ne la récupère chez son garagiste.
Il s'engouffre dans un encadrement métallique donnant sur un étroit couloir individuel ; en un instant, il est identifié, fouillé de fond en comble par des rayons inquisiteurs, et une double porte s'ouvre devant lui. Dans le dédale souterrain des Halles, résonnent les bottes de quelques quatuors de militaires lourdement armés. Depuis que les vagues d'émeutes se font régulières, ils ont fini par s'installer définitivement, superbement ignorés par la foule avec un instinct millénaire pour l'indifférence.

Mais un frisson raidit Laurent, quelque chose cloche dans ce tableau d'une banalité démoralisante. Il réalise que des silhouettes trapues font irruption dans les galeries à sa suite, irradiant une nervosité incroyable. Les Mille Fantassins, les Gangs Libres, peu importe leurs noms : Laurent sait qu'au moindre signe de panique, il risque de déclencher prématurément leur attaque. Comment entrent-ils, malgré leurs armes ? Personne ne le sait, ils sont là et inquiétants. Laurent allonge le pas, serre les mâchoires, et réfléchit avec fébrilité. Mieux vaut filer vers le centre des Halles, où les casseurs n'osent pas souvent s'aventurer ; il bifurque donc à gauche à la première intersection.

Rien n'y fait : toujours plus nombreux, ils entrent dans les couloirs et suivent la même direction que Laurent. Soudain, leurs palabres à voix basse s'interrompent. Leurs pas se synchronisent en un instant, résonnent en une cadence fusionnelle caractéristique. Laurent, sachant qu'il n'a plus que quelques secondes devant lui avant l'assaut, s'élance dans une course désespérée vers la sortie du couloir.

-"Il va donner l'alerte!"

Le cri est lancé, repris, et déjà le groupe se fait meute aux trousses de Laurent. Celui-ci, déjà arrivé au carrefour principal des Halles, a trouvé refuge sous un escalator. Haletant, en nage alors qu'il n'a couru que quelques mètres, il entend s'élever un grondement terrible. Une vieille femme hurle alors d'une voix perçante :
- "Les Commandos ! C'est un piège !"
À cet instant, tous les couloirs se mettent à déverser un flot ininterrompu d'hommes et femmes en armes. Immédiatement, sept des huit patrouilles militaires en place se mettent à couvert et ouvrent le feu ; une autre est déchiquetée par une grenade avant d'avoir seulement commencé à réagir. Les assaillants sont en large surnombre, peut-être trois cents. Tous se couchent en quelques instants, sauf une vingtaine de jeunes qui lancent des grenades sur les militaires, chacun couvert par un partenaire doté d'une arme automatique. La panique de la foule est totale, les détonations et les cris des gens pris dans le traquenard s'entremêlent, amplifiés par écho.

Les militaires sont rapidement submergés. Trois d'entre eux sont taillés en pièces par une demi-douzaine de furies, à deux mètres à peine de la cache de Laurent. Pris de nausées violentes, celui-ci régurgite son petit déjeuner avant que des spasmes ne le fassent se tordre et vomir de la bile. Devant lui, les chaînes, matraques, crosses, poings des femmes martèlent les corps avec une efficacité et une vitesse telles qu'il n'en reste rapidement qu'un amas sanguinolent.

Un sifflet aigu retentit, auquel répond un son de basse puissant. Les Commandos se dispersent immédiatement. Laurent, plié en deux de douleur, les aperçoit s'échapper par toutes les issues disponibles, laissant derrière eux une quarantaine d'agonisants. De sombres mares croissent inexorablement sous les néons blafards, s'échappant des mourants. Le carnage joue sa dernière partition, un enchevêtrement de râles et de sanglots nerveux.


9 novembre.

L'écran déverse son flot sonore et lumineux sur Laurent, affalé dans son fauteuil, à moitié ivre.
- "Revenons maintenant sur les événements tragiques qui ont endeuillé la nation toute entière dans la soirée d'avant-hier. Cinq cent trente-huit de nos plus courageux défenseurs de l'ordre ont péri sous les coups des milices terroristes, qui ont attaqué en de nombreux points du territoire. Les Commandos ont revendiqué ces actes innomables peu après les avoir perpétrés. Nous vous proposons quelques images exclusives, dont certaines sont extraites du réseau national de vidéo-surveillance."
Apparaissent des corps broyés, chairs éclatées et os à vif.
- "Des actes odieux, révoltants. C'est ainsi que Sabrina Malarte, ministre de l'Intérieur, a qualifié la série d'assassinats sauvages qui a eu lieu ce 7 novembre. "Tous seront arrêtés, nous les traduirons en justice", a-t-elle promis. "Des crimes aussi inhumains ne resteront pas impunis. Nous seront impitoyables, et la sécurité sera plus drastique encore pour garantir à nos citoyens la protection d'un Etat de droit." La ministre a également tenu à exprimer sa solidarité envers les familles des victimes."






24 novembre.

    Un son lointain et plaintif le réveille.

- "Oh et merde, pense Laurent, quelle heure c'est pour que le voisin foute une raclée à sa gamine... elle chiale à toute heure celle-là. Va falloir que je ressorte mon casque de nuit anti-bruit, faut que je sois en forme demain."
Le son est étouffé, semble provenir de nulle part. À peine a-t-il enfilé son casque qu'il s'endort profondément.


    Il se lève d'un bond lorsque son réveil meugle des imbécilités indistinctes. Les gémissements se font encore entendre. Il porte la main à l'oreille pour vérifier qu'il n'a pas enlevé son casque durant son sommeil.
- "Saloperie de casque... déjà pété. Garantie six mois, "confort et silence absolus", mon cul, oui."
En quelques gestes secs, il ôte l'objet de ses conduits auditifs ; le ronronnement de basse du réfrigérateur lui parvient aussitôt.
-"Ah tiens si, il est juste bousillé dans les hautes fréquences, j'entendais pas le frigo mais j'entendais la mioche et sa sale voix de chialeuse", râle-t-il in petto. Il était irrité contre les caprices de la petite voisine, gâtée par sa mère quand son père ne la battait pas.

Durant son morne petit-déjeuner, avalé sans y penser, il jette un oeil indifférent à la télévision. Les informations matinales sont identiques chaque matin : un pseudo-journaliste colle trois faits divers ensemble, les agrège en un sujet "d'actualité", et conclut en soulignant gravement la nécessité de durcir les lois punissant les asociaux et les déviants. Laurent ne s'y intéresse pas particulièrement, mais regarder le journal est une vieille habitude qui lui permet d'avoir un minimum de conversation. Cela lui permet également de ne pas aborder certains sujets trop sensibles qui peuvent valoir une surveillance rapprochée. Ses yeux errent sur son paquet de céréales, garanties "vitaminées, minéralisées, énergisées, avec fibres naturelles, sans radicaux libres" ; un rire amer lui échappe alors que cela lui évoque ses carences alimentaires chroniques.

Une demi-heure après son lever, lorsqu'il quitte la maison, les pleurs lancinants ne s'arrêtent pas. Au contraire, ils semblent gagner imperceptiblement en intensité. Cela en devient perturbant. Il enfourche sa moto, et fait rugir le moteur jusqu'à son bureau. Peine perdue, le vrombissement ne dissimule pas la voix d'enfant. Laurent commence à se sentir mal, mais il hésite à faire ce qu'il sait être une obligation.
"N'hésitez pas à venir me voir si vous vous sentez mal, même en-dehors de nos rendez-vous programmés", lui a recommandé Sigmund. C'est ainsi qu'il appelle son psychoflic, à cause de sa barbiche grise et de ses formules typées. Pas très original, comme surnom, mais c'est par ce genre de procédé qu'il surmontait son angoisse d'aller le voir.

Psychoflic. Le genre de mot qu'il ne faut pas prononcer n'importe où, et encore moins dans les bars, lorsque l'ivresse propice des clients régale les micros gouvernementaux. Car pour ce genre d'erreur, on peut avoir un dossier étendu au Ministère de l'Intérieur. Le dossier en question, outre les informations personnelles habituelles, inclut alors un "droit d'accès étendu aux informations privées". C'est ainsi qu'une soirée arrosée, trop bavarde, et un retour chancelant sur la voie publique furent prétextes suffisants à l'administration pour suggérer fortement à Laurent de prendre rendez-vous auprès d'un "Psychiatre consultant à la Fonction Publique".
Les lettres n'ayant aucunement convaincu Laurent, une "consultation gracieuse" lui fut offerte. En réalité, il savait que s'il ne s'y rendait pas, il serait surveillé de très près jusqu'à la moindre erreur. Dès lors, il serait un jeu d'enfant de pointer du doigt son refus de se faire soigner malgré la prévention publique, d'amplifier à l'extrême son erreur en l'accusant de mettre ses concitoyens en danger, et de l'envoyer en "assainissement". Trois, peut-être cinq ans à travailler pour un salaire nul ("l'apprentissage du bénévolat dans un cadre sain"), tout ceci sans la moindre raison apparente.

La plupart des gens envoyés en assainissement ignoraient la véritable raison de leur condamnation. Il y avait quelques extrémistes de tous bords, intellectuels, ou asociaux, mais ils étaient minoritaires. L'État pratiquait la prévention à grande échelle, en filtrant toutes les conversations, et traquait la moindre déviance - tout ce qui présentait le moindre danger pour le pouvoir des oligarques était filtré et disséqué.

    Et maintenant, qu'il faut retourner voir le vieux Sigmund. Pas que ça lui répugne, l'aïeul est plutôt sympathique, ce qui est fort rare dans son métier ; il y officie surtout "des pourris qui te bourrent de médocs et engraissent tes névroses pour que jamais tu touches un poil de cul d'un flic, ni que t'ouvres ta gueule", avait déclaré une connaissance de Laurent, un pilier de bar. Personne ne l'a revu, trois ans après son départ en "redressement psycho-social". Frappé par cet exemple, Laurent tente d'être vigilant. D'autant plus qu'il existe de nombreuses peines, allant jusqu'à la "resocialisation" - ou lavage cérébral si complet qu'il calme à jamais toute ardeur sexuelle, amoureuse et surtout politique.

    Il n'est pas stupide, Laurent. Il sait que si les pleurs continuent, ses nerfs finiront par le trahir, et on lui reprochera de n'être pas allé se confier aux "dévoués architectes réparateurs de la société".
- "En ce moment, le filet se resserre sur la déviance... marmonne-t-il d'un ton où se mêlent mépris et crainte. Faudrait que je voie à prendre rendez-vous, ça coûte pas si cher, et au moins je me ferai pas engueuler, ajoute-t-il presque indistinctement.
    Cette journée semble interminable. Les pauses-café, îlots de paix en temps normal - quelques couples de minutes jetés au hasard entre deux dossiers - deviennent des repoussoirs pendant lesquels il ne peut plus s'abrutir de travail. À plusieurs reprises, il se fait interpeler par un collègue alors qu'il semble hypnotisé par son petit noir. Les gémissements érodent petit à petit son moral, sa concentration, et jouent sur ses nerfs comme avec un archet en papier de verre.

À quatre heures un violent mal de tête le décide à rentrer : tant pis pour la journée de salaire qui saute, il n'en peut plus. Les taxis étant hors de prix pour lui, il se dirige vers le RER. À peine arrivé près de la station, il se met à trembler de tous ses membres, à claquer des dents. Tout lui apparaît comme dans un brouillard ralentissant chaque mouvement, une mélasse dans laquelle il doit faire un effort infini pour avancer. Il reste assis dix minutes près de l'entrée avant que quelqu'un ne le remarque : un petit noir barbu qui le prend par le bras et s'adresse à lui en murmurant presque :
- "Monsieur, vous êtes sûr que ça va ?"
Laurent tente de faire un effort, crache à grand-peine quelques syllabes tout juste intelligibles.
- "Aidez-moi à monter..." Son corps refuse d'effectuer des mouvements cohérents. En face de lui, les flashes lumineux d'un écran publicitaire géant agressent ses yeux, le slogan vociféré par une voix désagréable de ménagère parfaite lui vrille les oreilles.
-"Vous voulez que j'appelle un médecin ?" insiste le petit homme au regard inquiet. Le mot violente Laurent, lui fait l'effet d'un électrochoc. Si un médecin le voit dans cet état, il est bon pour se faire virer : son dossier médical est accessible par son patron. Et s'il se fait virer, il tombe sous la responsabilité des psychoflics pour l'inciter à retrouver un emploi... Sans qu'il puisse formuler pourquoi, cette éventualité le terrorise. Mû par une peur viscérale issue de son cerveau reptilien, il se lève comme un automate et part en vacillant, sans un regard pour l'autre.
    Le trajet est un interminable supplice. De jeunes étudiantes pérorent derrière lui, un clone de six individus. Laides, engoncées dans leur tenue qui colle à leur corps quelconque, leurs voix irritent Laurent. Une envie soudaine lui prend de gifler leurs joues barbouillées d'un fond de teint trop lisse et épais, de les sortir en tirant leurs cheveux rougis par le même pigment à la mode et parfaitement tirés pour se glisser dans le conformisme le plus osé. La pulsion lui ordonne de briser les nez, de régler les questionnements de boutonneuses à coups de poing dans les yeux, de donner dans la pédagogie en cassant des dents. Le désir est si fort et brutal qu'une grande chaleur envahit le ventre de Laurent, une érection douloureuse lui survient. Il doit mobiliser toute sa concentration pour ne pas céder. Les arrestations "par vidéosurveillance" augmentent de cinq pour cent par mois, la police sera ravie de le compter parmi son quota de délinquants à fournir chaque semaine au Ministère.
Il se retrouve chez lui, abruti de fatigue, sans aucun souvenir des vingt dernières minutes écoulées. Il cherche à déterminer ce qui s'est passé, émergeant lentement d'un état d'hébétude complet. Pas de douleur dans les membres, il n'a pas cédé ni frappé qui que ce soit. De toutes façons, se dit-il, il ne serait certainement pas chez lui dans le cas contraire...

Il s'effondre sur son lit et dort d'un sommeil agité, sans jamais atteindre l'éveil ; il reste naufragé dans des rêves étranges dont son malaise se nourrit.
La réalité revient à lui, s'imposant contre les images intangibles qui l'assaillent. Vingt-deux heures. Il a dormi près de quatre heures mais n'est toujours pas reposé. Son estomac refusant toute nourriture, il essaie de s'endormir à nouveau : peine perdue, il ne cesse de se retourner sous ses draps. La plainte incessante dans sa tête augmente lentement en intensité, l'empêchant de trouver le repos ; l'épuisement le gagne petit à petit. Son biomédic de chevet le lui indique, lui prescrivant deux jours d'alitement.

- "C'est pas normal que je sois crevé comme ça, fait chier, se lamente-t-il. Même avec cette foutue hallu..."
Il se tait soudainement, son cœur s'emballe et il se met à transpirer. Il a failli se trahir - parce qu'il vient de comprendre. Il a le syndrome exact des pauvres types qui sont drogués à leur insu aux psychotropes, peu après avoir fait une erreur de trop. Il s'affole, ce n'est pas possible, pas lui, il n'a rien fait...
Les psychotropes de la police, qui exacerbent le caractère, provoquent des hallucinations et un épuisement, permettent de confondre n'importe qui dont on veut se débarrasser. "Ils vous traqueront, vous pousseront à la faute, vous tenteront, rien ne vous sera épargné. Et vous serez balayés sans pitié." Où a-t-il entendu ça? Le souvenir revient lentement, se fraie un chemin sous ses paupières closes et de plus en plus fiévreuses.
Ah oui. Carbont, un des députés de l'opposition qui ont démissionné. C'était il y a longtemps, déjà, avant les présidentielles d'il y a quinze ans... juste avant qu'il ne se suicide. Pas même nécessaire de l'assassiner, lui aussi avait dû goûter aux psychotropes dans un plat habilement préparé. Maintenant, de temps en temps, un ou deux gros bonnets du gouvernement tombe, donnant aux citoyens l'illusion de l'égalité sociale devant la justice. Il s'agit toujours, en réalité, de personnages trop ambitieux.
"Je suis dans la merde, je suis dedans, mais pourquoi ? Qu'est ce que j'ai fait ? Non c'est pas possible, il doit y avoir erreur, il faut que j'aille voir Sigmund, lui expliquer... non, il va me faire interner, ah, il ferait pas ça c'est un bon gars, mais t'as jamais de pote dans l'administration... Pourquoi, pourquoi ?"
Ce mot revient dans sa tête, le fait frémir, s'affoler, et les gémissements en fond ne font que renforcer sa fébrilité et son début de panique, entretenu par les pensées contradictoires qui écartèlent sa conscience. Il s'agite longuement, désespéré, mais il est trop faible pour se lever, s'aérer, fuir... Fuir ? Il n'y a nulle part où fuir. Il serait rattrapé en quelques heures à cause de l'arsenal technologique qu'il porte sur lui, et qui conditionne toute interaction avec les infrastructures. Et sans cet équipement, il irait encore moins loin. Aucune issue. Après de longues heures, Laurent finit par s'endormir, assommé par la triple dose de somnifères qu'il a ingurgitée.


    Il se réveille en sursaut, son cœur battant la chamade, la sueur collant ses cheveux à son front plissé, l'œil hagard. Les pleurs se sont faits hurlements, terribles et puissants. L'image d'un enfant terrorisé flotte devant ses yeux, un visage rond et constellé de taches étranges, l'innocence incarnée pour être sitôt bafouée. Un visage déformé, qui n'est plus que deux yeux exorbités, et une gorge béante figée dans l'horreur, débouchant sur un rictus de peur primitive. Laurent est muet de panique, sa poitrine est oppressée, sa respiration sifflante. Le visage est là, et c'est lui qu'il regarde, comme s'il était un démon que seuls ces cris pouvaient chasser.

Après un temps infini, Laurent retrouve un début de calme, tremblant encore de tous ses membres. Trois coups sourds retentissent à la porte, le genre de coups qu'on entend toujours frapper chez le voisin, l'inconnu, après quoi on ne le revoit plus.
- "Sécurité d'État, veuillez ouvrir."
Une voix sèche, impérieuse, qui ne souffre pas la moindre résistance. Amplifiée, raffermie, durcie par un modulateur vocal - ce qui aide aux interventions de la police, comme les neutraliseurs de ceinture, utilisés uniquement lorsque le suspect doit être pris vif.
-"Sécurité d'État, ouvrez, citoyen ! Tout délai excessif sera consigné comme acte de rébellion passive!"
Laurent reste hébété quelques instants, les hurlements l'empêchent de réfléchir, impossible de prendre la fuite. Si, c'est maintenant ou jamais, il est trop tard. Il est foutu, il n'est pas au boulot et vu son état, les confessionnaux de la police tireront n'importe quel aveu de lui en quelques minutes. Un aveu absurde, à propos de faits imaginaires, et au mieux il sera interné en maison de resocialisation.

Accès de panique - mû par une violente décharge d'adrénaline, il court vers la porte et l'ouvre à la volée. Un seul, ils en ont envoyé un seul, un gamin presque sous son casque de hardplast ! Ils paieront cher cet excès de confiance, se jure Laurent. Avec effroi, il réalise que le flic n'a pas de neutraliseur à la ceinture - seulement le revolver de service. Ils se fichent même de l'avoir vivant. Alors que l'autre commence à déclamer la tirade de fin de toutes les existences anormales, en sortant calmement une paire de menottes, Laurent se jette soudain sur une lourde chaise près de l'entrée et la lance à la tête du policier. Celui-ci esquive mal, la prend sur l'épaule, vacille et cherche à dégainer malgré son bras endolori. Laurent pousse l'agent qui s'effondre dans l'escalier, descend les marches quatre à quatre, en pantalon et chemisier, n'entend pas l'avertissement du policier qui s'est lancé à sa poursuite :
- "Citoyen, arrêtez vous immédiatement, dernière sommation !"
Sous son crâne bat le cri, qui torture chacun de ses nerfs, brouille tout, c'est à se jeter contre les murs. Il n'est plus qu'une machine lancée à pleine vitesse dans l'allée, s'échapper, arrêter ces hurlements - ce visage !

La balle le cueille dans le dos. Ce fut si simple, pour eux. Il leur a facilité la tâche - non, ils l'ont voulu ainsi. Avant même qu'il ne s'écrase au sol, un autre projectile tiré automatiquement perfore sa boîte crânienne, projetant alentour des débris vermillon, gris, roses. Des éclaboussures de sang maculent le visage d'un gamin qui se tient là, tétanisé par la terreur, l'enfant qui le hantait, venu assister à sa lutte perdue d'avance contre le néant.

Pendant que sa conscience le quitte, sans qu'il ne puisse la retenir, de la bouche de l'enfant s'élèvent encore les mêmes sanglots qui lui déchirent les entrailles, montant encore, vibrant plus fort, jusqu'à ce qu'il ne soit plus.

= commentaires =

LH
    le 10/05/2009 à 01:56:10
Ca se lit très bien.
En fait, j'ai zappé un peu le début, mais la fin est sympa.
Bon, d'accord le coup du
"Même avec cette foutue hallu..."
Il se tait soudainement, son cœur s'emballe et il se met à transpirer. Il a failli se trahir - parce qu'il vient de comprendre. Il a le syndrome exact des pauvres types qui sont drogués à leur insu aux psychotropes, peu après avoir fait une erreur de trop. Il s'affole, ce n'est pas possible, pas lui, il n'a rien fait..."

C'est un peu limite ridicule, mais dans l'ensemble c'est pas dégueu. Ca manque un peu d'emphase, de tripes tout ça, ça manque un peu de tension au début, mais c'est un gentil texte du gouter.
Putsch

Pute : 0
    le 10/05/2009 à 12:52:43
C'est pas trop mal, quoique l'histoire soit trop commune, ou peut être pas assez riche. Par contre, je n'ai pas aimé la narration, froide et creuse à mon goût, voire parfois scolaire.
En gros c'est sympa sans plus.
Kevin le corse !
    le 11/05/2009 à 21:27:02
JE SUIS UNE MOOOOOOOOORRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRUUUUUUUUUUUUUUUUUEEEEEEEEE !!!
Glop-glop

Pute : -1
    le 11/05/2009 à 21:53:38
Morue fora !

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